États-Unis et le monde depuis les « 14 points » de Wilson/Annexe/Forces stratégiques
Les forces stratégiques des États-Unis désignent les unités des forces armées qui ont la charge de l’arsenal nucléaire américain.
L'armement nucléaire fait partie des « armes de destruction massive », dites aussi « NBC » (nucléaires, bactériologiques et chimiques), classées à part des autres armes dites « conventionnelles ». Parmi les NBC, seules les armes nucléaires sont actuellement opérationnelles au sein des forces armées des États-Unis.
Trois vecteurs (moyen de transport) sont employés pour rendre opérationnelles les armes nucléaires américaines, formant une triade :
- sous forme de bombes ou de missiles de croisière (ALCM) embarqués à bord de bombardiers ;
- sous forme de missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) placés dans des silos enterrés ;
- sous forme de missiles balistiques (SLBM) placés dans des sous-marins.
Articles connexes : United States and weapons of mass destruction ; Nuclear weapons and the United States.
Rappels historiques
modifierArmes chimiques et biologiques
modifierLe premier usage par les forces armées des États-Unis d'armes de destruction massive remonte à 1918 lors la Première Guerre mondiale, pendant laquelle l'artillerie américaine a abondamment tirée des obus au gaz (dichlore, ypérite et phosgène) fournis principalement par l’industrie française. Le traité de Washington[1] de 1922 puis le Protocole de Genève de 1925 interdisent l'emploi des gaz lors des guerres ; mais la production de gaz de combat se poursuit en Amérique pendant l'entre-deux-guerres (notamment la lewisite). Les stocks ne sont pas utilisés pendant la Seconde Guerre mondiale.
Pendant la guerre froide, les armes chimiques sont perfectionnées avec les gaz neurotoxiques (tabun, soman, sarin, cyclosarin, chlorosarin et gaz VX), complétés par des armes biologiques (peste, choléra, typhus, anthrax, etc.) : les États-Unis se dotent dans un premier temps de stocks importants, avant d'y renoncer à partir de 1968 (l'arsenal nucléaire étant largement suffisant). Ils sont signataires de la Convention sur l'interdiction des armes biologiques en 1972, puis de la Convention sur l'interdiction des armes chimiques en 1993, d'où la destruction progressive des stocks.
Développement d'armes nucléaires
modifierLes États-Unis ont été les premiers à développer une arme nucléaire, les premiers à en tester une et les seuls à l'avoir utilisée au combat. Le développement fut assuré par le Projet Manhattan, nom de code à partir de 1942 de ce projet scientifique et technique secret (le plus cher fut la production d'uranium et de plutonium). Le premier essai nucléaire fut le test Trinity dans le désert du Nouveau-Mexique le 16 juillet 1945 : la détonation fut équivalente à celle de 19 000 tonnes d'explosif (19 kt d'équivalent en TNT). Deux bombes furent larguées chacune par un bombardier américain sur une ville japonaise les 6 et 9 août 1945, lors des bombardements atomiques d'Hiroshima et Nagasaki (respectivement 13 et 21 kt).
Dans le contexte du début de la guerre froide, les tests reprirent en juillet 1946 sur l'atoll de Bikini (dans le Pacifique) pour voir les effets sur des navires (Opération Crossroads). Après le premier test soviétique en 1949, les deux superpuissances se livrèrent une course aux armements nucléaires marquée par la multiplication du nombre d'armes nucléaires, du nombre de tests (les États-Unis en firent le plus avec un total de 1 050) et de la puissance des armes. La première arme à fusion de l'hydrogène fut testée sur l'atoll d'Eniwetok sous le nom Ivy Mike (puissance de 10 Mt, soit 10 000 kt) en 1952, suivi par le test de la bombe Castle Bravo (puissance de 15 Mt) à Bikini (la bombe y fit un cratère de deux kilomètres de large) en 1954.
Articles détaillés : Types d'armes nucléaires ; List of nuclear weapons tests.
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Les îles après Ivy Mike : l'île d'Elugelab a été pulvérisée.
Le développement par les États-Unis de missiles longue portée se fait en réaction au lancement réussi par les Soviétiques de la fusée R-7 en octobre 1957 : cette fusée a été développée en tant que premier missile balistique intercontinental (ICBM en anglais), avec de mettre sur orbite le petit satellite Spoutnik 1. Le développement de ces missiles fut un des aspects militaires de la course à l'espace. Les tests des premiers ICBM américains (fusées Atlas) ont lieu dès décembre 1957, avant de devenir opérationnels à partir de 1959. Les modèles suivants (Titan en 1962, Titan II en 1965, Minuteman III en 1969 et Peacekeeper en 1986) permirent d'améliorer la portée, la précision et la capacité d'emport. D'autres missiles, plus petits et à plus courte portée, sont développés pour être tirés d'un sous-marin en plongée (SLBM : Polaris en 1962, Poseidon en 1972, Trident en 1979 et Trident II en 1990). Les dernières améliorations portèrent sur l'informatique embarquée et sur le mirvage dès 1970 (chaque missile pouvant emporter jusqu'à dix ogives nucléaires MIRV).
Articles détaillés : Programme spatial des États-Unis ; Militarisation de l'espace ; Missile gap.
Bouclier anti-missiles
modifierLa menace très sérieuse d'un affrontement nucléaire entre les États-Unis et l'Union soviétique fut une des principales caractéristiques de la guerre froide. Comme le tir de tout ou partie des ICBM d'un des deux protagonistes entraine le tir de son adversaire en riposte, le principe de la « destruction mutuelle assurée » devait théoriquement garantir que personne ne déclenche une guerre nucléaire (d'où la notion d'équilibre de la terreur). Mais deux parades à ce problème furent trouvées :
- d’une part l’idée d'une frappe préventive à courte portée qui ne laisserait pas le temps de répliquer (d'où le déploiement de missiles à Cuba en 1962, à bord de sous-marins à partir de 1962 et en Europe de 1977 à 1987) ;
- d’autre part le développement de missile anti-missiles chargés de détruire en vol les ICBM ennemis, développés dès les années 1960 par les Américains (pour protéger leurs bases de lancement) comme par les Soviétiques (autour de Moscou). En 1983, le président Reagan lance un vaste programme de défense anti-missile appelé « Initiative de défense stratégique » (surnommée Star Wars car comprenant le projet de détruire les ICBM par des satellites armés de laser).
Le coût de la course aux armements entraine l'affaiblissement puis la disparition de l'Union soviétique en 1991. En conséquence, la réduction des arsenaux nucléaires est progressivement négociée (START en 1991 et SORT en 2002). Actuellement, la défense anti-missile du territoire des États-Unis et de ses alliés (OTAN, Israël, Corée du Sud et Japon) est dirigée par le NORAD, qui dispose de radars de détection (Ballistic Missile Early Warning System) ainsi que de batteries de missiles au sol (GMD, THAAD et Patriot) et sur des navires (SM3 du système Aegis).
Article connexe : Système de défense antimissile de l'OTAN.
Armement actuel
modifierEn cas de guerre nucléaire la décision de l'emploi des armes nuc' appartient au président des États-Unis et au secrétaire de la Défense (conjointement)[2], qui transmettent leur ordre au chef d'état-major, puis au Strategic Command, lequel relaye aux unités concernés de l'Air Force et de la Navy.
Article connexe : Single Integrated Operational Plan.
L'arsenal nucléaire américain est dispersé entre les bases de stockage et les unités opérationnelles : les bombardiers et les ICBM dépendent des bases de l'Air Force (AFB : Air Force bases), tandis que les sous-marins disposent dans les années 2010 de deux bases de la Navy (NSB : Naval submarine bases).
Vecteurs aériens
modifierLe largage de bombes est chronologiquement le tout premier moyen d’utiliser une arme nucléaire, mais les avions sont des vecteurs plutôt lents et surtout très vulnérables à la défense anti-aérienne (chasseurs et missiles ennemis). D'où le développement en plus des bombes de missiles de croisières (ALCM) tirés par les bombardiers. Les bombardiers stratégiques américains dépendent tous de la Eighth Air Force, avec 57 Boeing B-52 Stratofortress (datant de 1962) à Barksdale AFB et Minot AFB ainsi que 20 Northrop B-2 Spirit (datant de 1993) à Whiteman AFB.
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Le B-52H Stratofortress, capable d'emporter 32 tonnes d'armes.
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Ravitaillement en vol d'un B-52, lui donnant une autonomie permettant de faire le tour du monde.
Vecteurs terrestres
modifierLe deuxième moyen d’utiliser une arme nucléaire est de la mettre au sommet d'un missiles balistiques intercontinentaux (ICBM), qui a l'avantage de sa vitesse (24 000 km/h), rendant son interception très difficile. Le principal problème est que les sites de lancement sont facilement repérables, d'où l'aménagement de silos de lancement enterrés et bétonnés pour les protéger d'un tir ennemi préventif (seul un tir au but détruirait un silo).
Les 450 missiles Minuteman III (portée estimée : 13 000 km) sont affectés à la 20th Air Force, déployés autour de Warren AFB, Malmstrom AFB et Minot AFB.
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Une équipe de tir d'un ICBM en 2006, dans leur poste de contrôle souterrain.
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Couvercle blindé d'un silo de missile désaffecté à Cooperstown.
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Un Minuteman III dans son silo.
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Tir d'essai d'un Minuteman III de la base de Vandenberg en Californie.
Vecteurs maritimes
modifierLe troisième moyen utilisé par les États-Unis pour porter ses armes nucléaires est à bord de sous-marins, appelés sous-marins nucléaires lanceur d'engins (SNLE, ou SSBN en anglais), capables de tirer en immersion des missiles balistiques (SLBM). Leur avantage est d’être mobiles et très difficiles à détecter, ce qui leur permet de frapper de très près ; par contre leur portée est plus limitée.
14 sous-marins de la classe Ohio sont basés sur la Côte Ouest à Kitsap NB et sur la Côte Est à Kings Bay NSB. Chacun de ses sous-marins emporte 24 missiles Trident II D5 d'une portée de 8 300 km, mirvés avec cinq ogives (douze à l'origine) de 485 kilotonnes.
Notes et références
modifier- ↑ (en) « Washington Treaty in Relation to the Use of Submarines and Noxious Gases in Warfare », sur http://wwi.lib.byu.edu/, .
- ↑ En cas de décès, d'incapacité ou de démission, un ordre de succession présidentielle existe.