Évolution du breton
modifierL'origine de la langue bretonne se situe au Ve siècle (401-500), quand des insulaires de langue brittonique venus de ce qui est aujourd'hui la Grande-Bretagne, fuyant l'invasion saxonne, franchirent la Manche pour venir s'installer dans la péninsule occidentale de la Gaule, qu'on appelait alors Aremorici en langue gauloise, "le pays maritime" : l'Armorique ( Aremorici
se prononce Aremoriki).
Leur langue se répandit dans la péninsule et atteignit au IXème siècle une ligne reliant la baie du Mont Saint-Michel à l'estuaire de la Loire. Elle devint le breton en se détachant peu à peu de la langue insulaire, suivant son évolution propre. L'usage du breton a reflué depuis : au vingtième siècle, il était parlé à l'ouest d'une ligne Saint-Brieuc – Vannes.
Le breton s'écrit avec un alphabet latin adapté à son histoire ; les accents écrits (circonflexe et grave) n'ont pas la même valeur qu'en français.
Tout comme le français, la langue bretonne a été écrite de plusieurs manières au cours de son histoire. On distingue plusieurs périodes, déterminées par l'analyse de textes d'abord gravés, puis manuscrits et enfin imprimés.
Dates | Plus ancien document connu — Source : Arzel Even (1956), Istor ar yezhoù keltiek, vol. I, pp. 95-151, Hor Yezh, 1987 | |
---|---|---|
Proto-breton | VIe – VIIIe siècles | Avant 550 : inscription irha ema in ri (ici repose le roi) à Krac'h ; le breton se distingue des langues brittoniques insulaires. |
Vieux breton | VIIIe – XIIe siècles | Cartulaire de Redon, archives manuscrites de l'abbaye. |
Moyen breton | 1100 – 1450 : pré-moyen breton | Cartulaire de Quimperlé, archives manuscrites de l'abbaye. |
1450 – 1557 : moyen breton classique | An Dialog etre Arzur Roe d'an Bretounet ha Guynglaff, poème manuscrit de 247 vers. | |
1557 – 1659 : moyen breton tardif | Buhez santes Barba, mystère en 4 878 vers imprimé à Morlaix. | |
Breton moderne | 1659 – 1807 : breton pré-moderne | Le Sacré-Collège de Jésus de Julien Maunoir, catéchisme. |
1807 – aujourd'hui : breton moderne | Grammaire celto-bretonne de Jean François Le Gonidec de Kerdaniel. |
- Évolution du breton moderne
Plusieurs systèmes orthographiques ont été tentés au fil du temps pour unifier la langue écrite de manière interdialectale.
- 1905 : une assemblée d'écrivains de Cornouaille, du Léon et du Trégor établissent le système orthographique dit KLT, pour Kernev–Leon–Treger ; le dialecte du Vannetais n'ayant pas été pris en compte, l'édition en vannetais garde son orthographe particulière.
- 1941 : les tenants du KLT et ceux du vannetais s'entendent pour finir de mettre au point l'orthographe dite peurunvan (
complètement unifiée
) prévue à Lorient en 1936, qui remplace alors le KLT dans l'édition en langue bretonne. - 1955 : des universitaires rennais rétifs au peurunvan publient dans leur propre système, dit skolveurieg (
universitaire
) ; quatre éditeurs l'utilisent encore aujourd'hui. - 1971 : un universitaire brestois imagine et promeut son propre système dit etrerannyezhel (
interdialectal
), peu usité aujourd'hui.
Qui lit en peurunvan peut lire dans les autres systèmes, y compris le moyen breton !
Écrire le breton
modifierOn traitera ici de l'écriture seulement ; la prononciation du breton et ses particularités, telles les voyelles longues, sera traitée dans la leçon spécifique.
Alphabet
modifierL'alphabet breton moderne se compose de 25 lettres ; on n'y trouve pas les lettres Q et X, et au lieu de C il comporte CH, qui se prononce [ ʃ ] (ch) ou [ ʒ ] (j) suivant le contexte grammatical, et C'H, qui se prononce [ x ] en fin de mot comme le /ch/ allemand, le خ /kh/ arabe, la jota /j/ espagnole et le /x/ russe, et comme un /h/ aspiré [ h ] entre deux voyelles.
Voici les 5 voyelles, 19 consonnes et la voyelle/consonne de l'alphabet breton :
Écriture | A, a | B, b | CH, ch | C'H, c'h | D, d | E, e | F, f | G, g | H, h | I, i | J, j | K, k | L, l | M, m | N, n | O, o | P, p | R, r | S, s | T, t | U, u | V, v | W, w | Y, y | Z, z |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Prononciation | a | bé | ché | c'hé | dé | é | fé | gué | hé | i | jé | ké | lé | mé | né | o | pé | ré | sé | té | u | vé | wé | yé | zé |
- La phrase suivante est un pangramme breton, elle contient toutes les lettres de l'alphabet :
Oui, notre breton est devenu chic depuis que nous étudions à Wikiversité, c'est notre grand plaisir !
Écriture des voyelles
modifierOn appelle « voyelles » des sons émis par la voix sans bruit d'air, par résonance de la cavité buccale plus ou moins ouverte (voyelles simples et doubles), parfois en communication avec la cavité nasale en ouvrant plus ou moins la bouche (voyelles nasalisées).
L'écriture des voyelles simples et doubles est la même qu'en français ; celle des voyelles nasalisées est particulière au breton.
- Écriture des voyelles simples
(br) | (fr) | |
---|---|---|
A | aba (depuis) | abat |
E | ed (du blé) | de |
I | iskis (étrange) | ski |
O | osod (prothèse) | sot |
U | untu (unilatéral) | tu |
- Écriture des voyelles doubles
Les voyelles doubles sont deux voyelles distinctes que l'on couple à l'écrit pour traduire un son différent de celle de chaque voyelle isolée : en breton comme en français, eu se prononce différemment de /e/ ou /u/ isolées.
(br) | (fr) | |
---|---|---|
EU | beuz (buis) | peu |
OU | boued (nourriture) | boule |
- Écriture des voyelles nasalisées
Les voyelles nasalisées sont prononcées en partie par le nez : le mot français andin comprend un /a/ et un /i/ nasalisés. La nasalisation est beaucoup plus marquée en breton, et sonne différemment.
En breton, la nasalisation est indiquée par l'emploi d'un signe diacritique, le tilde ~, placé sur un /n/ ; ñ indique donc la nasalisation de la voyelle qui le précède.
Le tableau suivant montre les voyelles nasalisées du breton et du français ; attention : les prononciations ne sont pas équivalentes.
(br) | (fr) | |
---|---|---|
AÑ | aezañ (faciliter) | anse |
EÑ | kreñv (fort) | encre |
IÑ | fiñval (bouger) | inca |
OÑ | doñv (apprivoisé) | on |
UÑ | buñs (muid) | un |
- La nasalisation n'est pas toujours écrite ; par exemple : amzer [ˈãm.zɛr] (temps), enez [ˈẽːnes] (île), fiñval [ˈfĩːval] (bouger), tonn [ˈtɔ̃nː] (vague).
Écriture des consonnes
modifierCertaines des 19 consonnes du breton peuvent subir des mutations consonantiques selon le contexte grammatical, par exemple tad (père) – ma zad (mon père) – da dad (ton père) ; ce phénomène peut apparaître dans l'écriture ou rester oral.
Écriture de la voyelle/semi-consonne
modifierComme en français, /y/ est une voyelle quand elle est l'initiale d'un mot ou après une consonne, et une semi-consonne quant elle est suivie d'une voyelle.
(br) | (fr) | ||
---|---|---|---|
Y | ya (oui) | yak | Ø |
- L'écriture permet la lecture, il nous faut donc étudier les bases de la prononciation du breton.