Civilisation lettone/Histoire

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L'histoire de la Lettonie
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Chapitre no 3
Leçon : Civilisation lettone
Chap. préc. :Les régions de la Lettonie
Chap. suiv. :L'État letton
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L'ère préchrétienne modifier

 
Les tribus baltes vers l'an 1200

Entre 9.000 et 6.000 avant Jésus-Christ, des peuples finno-ougriens s'installent sur le territoire des pays baltes. Il s'agit des Estes qui forment la base du peuple estonien. Les alentours de 2.500 avant Jésus-Christ marquent l'arrivée des « proto-baltes » ou pré-baltes et des Lives. Ces derniers proviennent de l’Oural et sont finno-ougriens comme les Estes et les Suomis (Finnois) tandis que les proto-baltes sont indo-européens et sont les ancêtres du peuple letton. Les pays baltes sont donc la rencontre de deux cultures : scandinavo-finnoise au nord et pré-balte au sud. Tandis que les Estoniens seront repoussés progressivement vers le nord, les Lives seront assimilés au fur et à mesure dans l’ensemble letton.

Au début de l'ère chrétienne, le territoire de la Lettonie est un carrefour commercial où passe la célèbre « route des Varègues aux Grecs ». Cette route mentionnée dans les anciennes chroniques s'étend de la Scandinavie jusqu'à l'Empire Byzantin et passe par la Lettonie en empruntant la rivière Daugava pour déboucher dans l’ancienne Russie. Une autre route célèbre est la « route de l'ambre » car la côte de la Mer Baltique est alors réputée pour son ambre. L'ambre a jusqu'au Moyen Âge une plus grande valeur que l'or dans certaines régions.

Vers l'an 900, les anciens baltes commencent à constituer des cultures tribales spécifiques : Coures, Latgaliens, Sémigalliens et Séloniens (en letton : kurši, latgaļi, zemgaļi et sēļi). Les premiers appelés aussi Couroniens adopte un mode de plus guerrier et vivent des pillages et des rafles : ils sont surnommés les « Vikings baltes ». Les Latgaliens (ou Lettes) qui donneront leur nom à la Lettonie sont les plus avancés au niveau sociopolitique. De leur côté, les Séloniens et les Sémigalliens vivent pacifiquement de l'agriculture dans les plaines de Lettonie.

La colonisation germanique au XIIe siècle modifier

 
La Confédération livonienne en 1260

Le christianisme arrive dans les pays baltes grâce aux voies commerciales, notamment par les marchands orthodoxes venus de l'est. À la fin du XIIe siècle, une évangélisation d'origine germanique fait son apparition. Celle-ci a peu de succès car les Baltes sont très attachés à leurs croyances païennes : ils vénèrent des chênes sacrés et pratiquent le culte de nombreuses divinités comme Pērkons, Laima, Auseklis ou Māra.

Lorsque les difficultés des marchands et princes allemands à faire accepter le baptême aux baltes parviennent à Rome, le pape Célestin III lance un appel en 1193 pour une croisade nordique afin d'y imposer le christianisme par la force. Dans les faits, les princes germaniques et scandinaves ont déjà commencé à envoyer des croisés avant cette date. Cette exception violente dans l'histoire de la christianisation de l'Europe marque le début de longues périodes d'occupation pour les peuples baltes dont la destinée en fut fort marquée.

Les Allemands fondent Riga en 1201 et celle-ci devient rapidement la ville la plus grande et la plus influente de toute la rive orientale de la Baltique. Le successeur de Célestin III, le pape Innocent III institue l’ordre des Chevaliers Porte-Glaive et ceux-ci finissent d'écraser l'Estonie grâce à une alliance avec les Danois. L'avancée des Croisés marque également la fin des royaumes tribaux des lettons par la création de la Confédération livonienne. L'évangélisation est accompagnée d'une colonisation germanique qui instituera une bourgeoisie et une noblesse allemandes qui domineront le peuple letton jusqu'au début du XXe siècle.

Le commerce se développe également fortement durant cette période, notamment car de nombreux ports de Livonie font partie de la Ligue hanséatique.

Les dominations polonaise et suédoise au XVIIe siècle modifier

 
La Lettonie divisée entre Livonie suédoise, Livonie polonaise et Duché de Courlande

Après un XVIe siècle marqué par l'arrivée du christianisme réformé et par les 25 ans de la Guerre de Livonie durant laquelle les puissances étrangères (Russie, Danemark et Norvège, Lituanie et Pologne, Suède) tentent d'acquérir le contrôle de la région, le territoire de l'actuelle Lettonie était divisé.

Le nord du territoire finit par être dominé par les Suédois tandis que le Latgale reste sous influence polonaise avec le Duché de Courlande. Cette influence est toujours marquée aujourd’hui par la différence religieuse du Latgale catholique dans une Lettonie plutôt protestante.

La période suédoise est souvent considérée comme une époque éclairée. En effet, durant les siècles avant cette période, le peuple letton avait bien peu de droits face à l'élite germanique des descendants des chevaliers allemands : il leur était par exemple interdit de construire des maisons de pierre, de vivre dans l'enceinte des villes ou d'appartenir aux grandes guildes. La situation s'améliora quelque peu durant cette période : si ce n'est en actes, du moins en paroles.

L'ère est surtout prospère car Riga se développe au point de devenir la ville la plus grande et la plus développée du Royaume de Suède tandis que le Vidzeme s'impose comme le grenier à grain de la Suède. De plus, le Duché de Courlande (une ancienne partie de la Livonie) connait un boom économique notable et parvient même à établir deux colonies : en Afrique à l'embouchure de la Gambie et dans les Caraïbes sur l'ile de Tobago. Des traces couroniennes existent d'ailleurs toujours dans les toponymies locales.

D'un point de vue politique, c’est durant cette période que Couroniens, Séloniens, Sémigaliens, Latgaliens et Lives unifient progressivement leur langage et forment une nouvelle nation : les Lettons (en letton : Latvieši).

L'empire russe modifier

 
La statue de Pierre le Grand à Riga, aujourd’hui remplacée par le Monument de la Liberté

En l'an 1700, la Grande guerre du Nord éclate : le Tsar de Russie Pierre le Grand désire acquérir au détriment de la Suède des ports sur la Baltique afin d’avoir un accès maritime vers l'Europe. À la fin du XVIIIe siècle, l'entièreté de la Lettonie est sous la domination russe. Le Tsar a également un intérêt personnel pour les Pays de la Baltique : il s'est amouraché de Marta Skavronska, une simple fille de paysan letton. Celle-ci se marie d’abord à un officier suédois avant d'épouser le prince Menchikov qui est ministre et ami du Tsar. Ce dernier renonce à son épouse et Marta devient finalement la maitresse du Pierre Ier tout en embrassant la religion orthodoxe et en prenant le prénom de Catherine. Après huit ans de vie commune, il modifie la loi pour pouvoir la couronner impératrice en 1724. À la mort du Tsar l'année suivante, Catherine Ière est proclamée impératrice et meurt après deux ans de règne.

À la fin du XVIIIe siècle, l’industrie prospère rapidement ce qui permet une croissance démographique importante. La Lettonie est alors la province russe la plus développée. Mais quatre siècles après la défaite des chevaliers teutoniques, la Lettonie reste sous l'autorité des aristocrates et des bourgeois allemands : les villes prospères sont fermées aux Lettons et la peste ravage les campagnes. Les dures conditions de vie et l'indifférence à leur égard pousse finalement les Lettons à se rebeller en 1777 et en 1784 notamment. En 1802, le « pauvre Conrad » (surnommé le Bonaparte letton) fomente un soulèvement qui est réprimé sans ménagement et celui-ci connait une mort atroce. En 1840, les paysans lettons se révoltent une fois de plus mais contre l'église luthérienne cette fois-ci car celle-ci symbolisait l'emprise allemande sur la Lettonie. L'église russe orthodoxe en profita pour distribuer le catéchisme orthodoxe en letton mais les notables allemands se vengent alors en refusant d'octroyer des terres aux églises orthodoxes. De nombreux pasteurs luthériens sont ensuite emprisonnés ou déportés en Sibérie tandis que plus de 30.000 lettons sont convertis d'office à l'orthodoxie. Malgré tout, la politique économique russe profite aux paysans lettons car les aristocrates et bourgeois allemands sont obligés de laisser la place aux Lettons dans les échelons inférieurs de la société.

Les consciences nationales s'éveillent partout en Europe au début du XIXe siècle et la Lettonie connait également un « éveil » important de l'identité nationale. Des journaux sont imprimés en letton, une littérature lettone voit le jour et un développement culturel prend place activement. Une conscience politique nait durant la seconde moitié du XIXe siècle et de nombreux mouvements apparaissent dont le mouvement « Jeune Lettonie » (en letton jaunlatvieši, littéralement « nouveaux Lettons » en français) qui réclame pour les Lettons les mêmes droits dont jouissent les autres nations.

L'idée d'une Lettonie indépendante devient une réalité au début du XXe siècle et en janvier 1905 c’est la révolution balte éclate. Celle-ci coïncide chronologiquement avec le soulèvement de Saint-Pétersbourg et est motivée par la haine de tout ce qui est russe ou allemand face à la main mise des allemands baltes et à la politique de russification. La garde impériale réussit en décembre de la même année à rétablir l’ordre dans toute la Lettonie et le Tsar renforce un peu plus les barons allemands à Riga en remerciement de leur collaboration (en 1914, la moitié de la ville est encore allemande). Dix ans plus tard, la première Guerre Mondiale commence et les Lettons sont autorisés à lever une armée nationale pour aider l'empire dans sa guerre contre l'Allemagne : les tirailleurs lettons (en letton latviešu strēlnieki).Lorsque les Russes capitulent en 1917, les Lettons essaient de contenir l'avancée allemande en organisant la défense de Riga. 32.000 Lettons meurent durant cette bataille et les tirailleurs lettons gagnent la reconnaissance de leur bravoure à travers l'Europe.

La république de Lettonie modifier

 
Kārlis Ulmanis, premier ministre (1918-1921, 1931, 1934-1940) et président (1936-1940) de la République de Lettonie

Durant les premiers mois de l'occupation allemande, les nationalistes lettons espèrent pouvoir obtenir une certaine autonomie au sein de l'empire allemand : ils proposent donc la couronne balte en avril 1918 à l’Empereur d'Allemagne et Guillaume II accepte.

La victoire alliée de novembre 1918 change cependant la donne et rend possible l'indépendance grâce à la confusion qui régnait. L'indépendance est proclamée le 18 novembre 1918 et la citoyenneté est accordée à tous excepté les bolchéviques et les Allemands unionistes. Néanmoins, dès le départ des troupes allemandes, les bolchéviques prennent le contrôle du pays et proclament la République Soviétique de Lettonie. Heureusement, les troupes estoniennes viennent aider les Lettons permettant la création de la République de Lettonie (en letton Latvijas Republika).

Paradoxalement, la Russie soviétique est le premier État à reconnaitre l'indépendance de la Lettonie en renonçant pour toujours ses prétentions sur le territoire du nouveau pays. Les actions futures de la Russie prouvent cependant que ce furent des promesses en l'air. La communauté internationale ne reconnait l'indépendance de la Lettonie que le 26 janvier 1921, ce qui permet à la Lettonie de devenir membre de la Société des Nations.

De nombreux défis attendent la Lettonie à son indépendance car la population avait baissé d'un tiers depuis 1914 et le pays avait un certain retard du point de vue de la scolarisation. La Lettonie organise une profonde réforme de son agriculture en expropriant les barons allemands et en redistribuant les terres aux paysans lettons tandis que l'économie se développe grâce à une bonne reprise en main de l’industrie et du commerce. La culture lettone vit également une véritable renaissance favorisée par la proclamation du letton comme langue officielle tandis que les Lettons parviennent à représenter 75% de la population en 1939.

La Grande Dépression frappe durement la Lettonie au début des années 1930 et le mécontentement s'élève au milieu de la population. Afin d'apporter la stabilité au pays, le premier ministre Kārlis Ulmanis suspend les activités des partis politiques et de la Saeima (le parlement letton) par un coup d'état pacifique le 15 mai 1934. Le régime autoritaire de Kārlis Ulmanis est cependant assez bien toléré par la population car le pays connait une croissance économique rapide et une amélioration importante et généralisée de la qualité de la vie. Les réformes de Kārlis Ulmanis permettent à la Lettonie d’avoir l'un des meilleurs niveaux de vie d'Europe alors qu'une grande partie du monde souffre largement de la crise.

La seconde guerre mondiale modifier

 
Signature du pacte par Molotov. Ribbentrop est à la droite de Staline en arrière-plan.

Le 23 août 1939, l’Allemagne nazie et l’URSS signent un traité de non-agression que l’on appelle désormais Pacte germano-soviétique ou « Pacte Molotov-Ribbentrop ». Outre l'accord de non-agression, ce traité comporte des protocoles secrets délimitant le partage entre l'Allemagne et l'URSS des états situés entre ces deux puissances. Le 25 septembre 1939, l'URSS adresse un ultimatum à l'égard des pays baltes pour les forcer à signer un traité d'« assistance mutuelle » obligeant ces pays à accepter la présence de bases militaires soviétiques sur leurs territoires. Le gouvernement letton accepte ce traité qui est signé le 31 octobre 1939. 25.000 soldats soviétiques peuvent désormais stationner en Lettonie. Le 16 juin 1940, Vyacheslav Molotov accuse les pays baltes de violer le traité d'assistance mutuelle et l'URSS adresse alors un nouvel ultimatum. Le lendemain, le 17 juin 1940, l'armée soviétique envahit la Lettonie. Des élections sont organisées et un gouvernement fantoche est formé dès le 20 juin (les résultats des élections sont même proclamés à Londres 24 heures avant la fin du scrutin). La République socialiste soviétique de Lettonie est proclamée le 21 juillet à Moscou. Le 15 aout de la même année, elle devient officiellement la 15e république constituante de l'URSS conformément aux protocoles secrets du pacte germano-soviétique.

Les exactions soviétiques commencent immédiatement après l'invasion du 17 juin 1940 et les opposants sont traités sans aucune pitié : plus de 35.000 personnes sont arrêtées en moins d'un an et la plupart sont ensuite déportées tandis que 945 opposants sont fusillés. Quelques jours avant l'attaque de l'Allemagne nazie contre l'Union Soviétique, Staline organise une « Nuit de Terreur » particulièrement brutale : la nuit du 13 au 14 juin 1941, des milliers d'habitants sont arrachés à leurs foyers, entassés dans des wagons de marchandise et déportés en Sibérie.

Le 22 juin 1941, Hitler lance l’Opération Barbarossa et les troupes nazies envahissent l'URSS. La Lettonie est assez rapidement occupée par l'Allemagne et devient une partie du Reichskommissariat Ostland. Lors de cette occupation allemande, plus de 90% de la population juive de Lettonie est systématiquement annihilée. La Russie envahit à nouveau la Lettonie en 1944 et le pays est une nouvelle fois sous le contrôle totale soviétique en 1945.

Plus de 200.000 Lettons dont 70.000 juifs meurent durant la seconde guerre mondiale et beaucoup de soldats lettons participent à la guerre du côté allemand (la Légion lettone était composée de deux divisions de Waffen-SS) ou du côté russe. La plupart d'entre eux sont intégrés de force par les occupants nazis ou soviétiques car tout refus de rejoindre l'armée est suivi d'un emprisonnement, de menaces envers les proches ou même d'exécution.

La domination soviétique modifier

 
Monument commémoratif consacré aux enfants lettons morts en déportation

Les premières années d'après-guerre sont extrêmement dures en Lettonie et la domination soviétique est marquée par une répression systématique et par une politique de nettoyage ethnique. 120.000 habitants sont emprisonnés ou déportés dans des camps de concentration (gérés par le GULAG). Plus de 140.000 habitants fuient l'armée soviétique en Occident et la résistance armée contre le régime soviétique dure jusqu'en 1951 (fait largement ignoré en Occident). Entre 1949 et 1953, on assiste à de nombreuses purges contre les « nationalistes bourgeois » qui sont exécutés ou déportés. Rien que le 25 mars 1949, plus de 40.000 ruraux sont déportés en Sibérie pour favoriser la collectivisation de l'agriculture via la création de kolkhozes. Durant toute l'occupation soviétique, plus de 320.000 Lettons (sur une population de 2 millions d'habitants) sont déportés en Sibérie par le NKVD et presque aucun n'en est revenu.

La diminution drastique du nombre de Lettons s'accompagne d'une immigration massive de Russes pour faire tourner les usines. En effet, puisque les Lettons ont l'une des meilleures infrastructures et des spécialistes bien formés, les soviétiques décident d'installer en Lettonie les usines manufacturières les plus avancées de l'URSS. Ces bouleversements démographiques s'accompagnent d'une russification intensive de la Lettonie. De très nombreux obstacles administratifs à l’utilisation de la langue lettone sont créés. Ensuite, on assiste à un remplacement des élites lettones par des Russes. Une hiérarchisation ethnique s'inscrit à l'intérieur du régime communiste : les Lettons sont soumis aux Russes et aux « Latovichi ». Si des Russes estimant avoir le droit de revendiquer la qualité de Letton après seulement quelques années au pays sont parfois appelés Latovichi, les Latovichi sont principalement des Lettons ayant eu une éducation soviétique et ne parlant pas le letton. À part par leur nom letton, il est donc impossible de différencier un Latovichi d'un Russe. Cette hiérarchie ethnique est renforcée en 1959 après une purge politique et administrative : Khrouchtchev remplace plus de 2.000 lettons influents ayant manifesté leur mécontentement par des Russes ou par des « Latovichi ».

Après cette purge, le nouveau Premier Secrétaire de la République socialiste soviétique de Lettonie Arvīds Pelše (et son successeur Augusts Voss) mène une politique impitoyable de russification et de lutte contre l'identité lettone en allant jusqu'à interdire d'entonner des chansons populaires.

Durant les années 1980, le régime soviétique se libéralise quelque peu et met en place une politique d'ouverture, de liberté d'expression et de transparence : la glasnost. Les mouvements indépendantistes se saisissent rapidement de cette opportunité et on assiste à une renaissance pacifique du nationalisme letton. Cela se traduit par une discrète restauration de monuments religieux et historiques, par une plus grande de mouvements littéraires mais aussi par la formation d'organisations politiques contestatrices sous le couvert de la défense de la nature. Ces organisations obtiennent en 1986 l'arrêt d'une centrale électrique sur la Daugava, ce qui démontre que Moscou adopte une position plus ouverte. Des groupes se forment dès la fin des années 1980 et parlent ouvertement de souveraineté nationale : Latvijas Tautas Fronte (Front Populaire de Lettonie), Latvijas Nacionālās Neatkarības Kustība (LNNK - Mouvement pour l'Indépendance Nationale de la Lettonie) et Pilsoņu Kongress (Congrès des Citoyens). Ces groupes, surtout le LNNK, basent leur revendication sur l'illégalité de l'annexion de 1940 vis-à-vis du droit international (la plupart des États n'ayant même pas reconnu cette annexion).

La restauration de l'indépendance modifier

Le retour de l'indépendance de la Lettonie se concrétise durant la période 1986-1991. En 1986, la catastrophe de Tchernobyl permet aux groupes écologistes de gagner en considération en URSS. Les mouvements indépendantistes se servent la contestation écologique pour promouvoir leurs idées car elle permet de détruire un à un les interdits imposés par le régime communiste. En 1987, le groupe Helsinki-86 organise une importante manifestation aux pieds du Monument de la Liberté. Les changements politiques commenceront véritablement en 1988 au niveau national :

  • les déportations sont officiellement reconnues et les déportés sont réhabilités ;
  • le Protocole secret du Pacte Ribbentrop-Molotov est rendu public, cela discrédite la propagande officielle autour de l'annexion de 1940 ;
  • le Soviet suprême de Lettonie (équivalent soviétique du parlement) légalise l’utilisation du drapeau letton (29 septembre 1988);
  • la langue lettone reçoit le statut de langue officielle (6 octobre 1988)
  • le Congrès du Front Populaire de Lettonie invite le Soviet suprême à adopter une déclaration de souveraineté (19 novembre 1988).

Les évènements de 1989 soulignent l'urgence de l'indépendance. Un recensement officiel montre d’abord que les Lettons s'apprêtent à devenir minoritaires dans leur propre pays car ils ne représentent que 52% de la population de Lettonie. Le 28 juillet 1989, le Soviet suprême de Lettonie adopte une déclaration sur la souveraineté de l'État de Lettonie. Ensuite, une commission officielle reconnait l’existence des protocoles secrets du pacte germano-soviétique qui a mené à l'annexion illégale des pays baltes. Le 23 aout, jour du 50e anniversaire du pacte germano-soviétique, 2 millions de Lettons, de Lituaniens et d'Estoniens forment la « Voie balte » : une chaine humaine de 650 kilomètres s'étendant de Tallinn à Vilnius en passant par Riga pour symboliser l'unité des pays baltes dans la lutte pour l'indépendance. Le 9 novembre 1989, c’est l'effondrement du Mur de Berlin qui annonce la fin de l'URSS. Le Soviet suprême de Lettonie affirme successivement son indépendance vis-à-vis de Moscou tandis que le Congrès des Députés du Peuple d'URSS reconnait le 24 décembre 1989 l’existence des protocoles secrets du Pacte Ribbentrop-Molotov, les condamne et les déclare nuls et non avenus.

Le 4 mai 1990, le Soviet suprême de la République socialiste soviétique de Lettonie adopte la Déclaration restaurant l'indépendance de la Lettonie avec une période de transition d'une durée indéterminée. Elle est cependant déclarée illégale par Mikhaïl Gorbatchev le 14 mai.

En 1991, diverses unités de l'armée soviétique organisent des attaques contre des stations de télévisions en Lituanie et en Lettonie dans l'espoir de susciter une réaction armée légitimant l'intervention de l'armée dans ces pays. Un référendum est organisé en Lettonie le 3 mars 1991 : 73,7% pour l'indépendance et 87,6% de participation. Du 19 au 21 août 1991, des membres de la ligne dure du parti communiste russe organise un coup d'État mais échouent dans leur tentative de supprimer les réformes de Gorbatchev.

Les 20 et 21 aout, les 3 États baltes adoptent chacun une Déclaration de restauration de l'indépendance. Reconnus par les États-Unis, les pays européens et le reste du monde, ils réintègrent la communauté internationale.