Construction du marché du travail/Relation de domination
Exploitation n’est pas non plus synonyme de domination. Dans son ouvrage de synthèse sur les courants de la critique sociale, Hémisphère gauche, Razmig Keucheyan souligne que le concept d’exploitation qui était autrefois très présent dans les sciences sociales tend à disparaître au profit de celui de domination qui est supposé plus inclusif.
Cette tendance correspond à une perte de centralité du conflit entre capital et travail, dans l’explication des phénomènes sociaux. Pour E.O. Wright, ce décentrement constitue une faiblesse.
Sur le plan de l’analyse sociologique, la distinction entre domination et exploitation est importante, si nous voulons préserver l’idée que les intérêts des individus ne sont pas seulement n’importe quel intérêt subjectif.
La domination réfère à la capacité de contrôler les activités des autres. Elle n’implique pas des intérêts spécifiques aux acteurs impliqués. Par exemple, les parents dominent leurs enfants. Mais cela n’implique pas que les deux catégories d’acteurs aient des intérêts antagonistes.
A l’inverse, l’exploitation implique un ensemble d’intérêts matériels opposés. Les profits économiques sont acquis à partir du travail de ceux qui sont exploités. Bien sûr, il y a aussi de la domination dans la production.
A ce titre, toute exploitation entraîne une forme de domination. Cependant toute domination n’implique pas exploitation.
Et c’est bien la relation d’exploitation qui est centrale dans l’économie capitaliste et qui permet à 26 multimilliardaires de posséder plus que 3,8 milliards de personnes dans le besoin.