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Institution du droit des institutions sociales et sociales, le contrat de séjour résulte des dispositions des articles L. 311-4 et D. 311 du Code de l'action sociale et des familles (CASF). Ces textes déterminent l’ensemble du régime juridique applicable au lien contractuel noué entre l’organisme gestionnaire – dès lors que l’établissement ne dispose pas de la personnalité juridique – et la personne accueillie. Il convient de préciser qu’indépendamment de la distinction textuelle entre contrat de séjour et document individuel de prise en charge (DIPC), la jurisprudence considère que le lien entre usager et organisme gestionnaire est toujours un lien contractuel et qu’il naît au moment de l’admission, sauf dans le cas particulier d’un placement sur décision judiciaire (Cass., Civ. 2, 12 mai 2005, Association Clair Soleil & MAIF, no 03-17994 ; Bull. Civ. 2005, II, no 121 ; JCP A 2006, no 1201, note O. POINSOT ; Cass., Civ. 2, 24 mai 2006, Association ADIJ & MAIF, no 04-17495). Par ailleurs, en l’absence de jurisprudence interprétant les dispositions des articles L. 311-4 et D. 311 du CASF du fait de leur caractère récent, il convient de se reporter aux analyses prospectives élaborées par la doctrine. Sauf à ce que, dans le cas particulier des organismes gestionnaires de droit public, le contrat de séjour soit susceptible de revêtir la qualification de contrat administratif, ce qui n’a pas encore été jugé (bien que dans un arrêt récent CAA NANTES, 18 mai 2007, M. René X... c/ CCAS de Saint-Malo, no 06NT00419, une Cour administrative d'appel ait dit pour droit que la signature du contrat de séjour conditionne, pour un établissement social ou médico-social public, la faculté de procéder au recouvrement de frais de séjour par l'émission d'un titre de perception), le régime juridique du contrat de séjour relève de celui des contrats de droit privé défini par les articles 1101 et suivants du Code civil. À cet égard, le contrat de séjour est :

- un contrat synallagmatique dont les conditions de validité relèvent du droit commun ;

- un contrat nommé relevant de la catégorie des contrats de louage d’ouvrage ou contrats d’entreprise au sens des articles 1792 et suivants du Code civil ;

- un contrat d’adhésion, en ce sens qu’il articule des conditions générales non négociables avec des conditions particulières négociables ;

- un contrat de consommation, en ce sens que la personne accueillie, considérée comme profane contractant avec un professionnel, bénéficie de la protection du droit de la consommation.

Voir en ce sens :

J.-M. LHUILLIER, Le droit des usagers dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux, éd. ENSP, 3e éd., p. 128 et s.

D. EVERAERT-DUMONT, « Les droits des usagers des établissements et services sociaux et médico-sociaux : quelle évolution ? », Dr. soc. 2005, p. 311 et s.

X. DELSOL et B. RIGAUD, « La contractualisation des droits et obligations dans les établissements sociaux et médico-sociaux », Juris associations no 266, 15 oct. 2002, p. 12 et s.

B. RIGAUD, « Secteur médico-social : le contrat de séjour enfin défini », Juris associations no 313, 5 février 2005, p. 36 et s.

Dictionnaire permanent d’action sociale, V° Etablissements sociaux et médico-sociaux, éd. Législatives, no 87 à 94

O. POINSOT, « Le contrat de soutien et d’aide par le travail », Droit & Santé no 17, mai 2007, p. 276 et s., spécialement p. 293 à 300


Un contrat synallagmatique

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Le contrat de séjour est un contrat synallagmatique au sens de l’article 1102 du Code civil en ce sens qu’il crée, à la charge des cocontractants, des obligations réciproques.

L’organisme gestionnaire contracte l’obligation d’assurer la prise en charge de la personne accueillie et, pour ce faire, de mobiliser les ressources, compétences et méthodes dont il dispose dans le respect des règles légales et réglementaires en vigueur car la réalisation d’activités sociales et médico-sociales est une activité réglementée, soumise à autorisation et assujettie à un pouvoir de police administrative.

La personne accueillie contracte l’obligation, d’une part de participer à sa prise en charge conformément aux dispositions qui l’encadrent (projet d’établissement, règlement de fonctionnement), d’autre part d’assurer le paiement du prix des prestations.

Sur ce dernier point, il faut immédiatement préciser qu’à l’exception de quelques cas de figure particuliers dans lesquels la personne accueillie contribue effectivement au paiement d’une partie des prestations dont elle bénéficie (ex. : contribution aux frais d’hébergement et d’entretien des personnes handicapées adultes, paiement du tarif hébergement des personnes âgées non admises au bénéfice de l’aide sociale), l’obligation au paiement du prix s’effectue par le jeu d’un mécanisme de subrogation légale. En effet, les établissements et services sociaux et médico-sociaux sont financés, selon leur catégorie et les conséquences que cela implique en termes de compétences de tarification (État et/ou Conseil général), par des fonds issus de l’assurance maladie (régime assurantiel), de l’État et/ou du Conseil général au titre de l’aide sociale (régime assistantiel). Ces financements ont, lorsqu’ils se trouvent encore dans les caisses des payeurs, la nature de fonds publics. Cette qualification n’a jamais été discutée s’agissant des fonds d’aide sociale de l’État et des Conseils généraux. Elle était plus discutable s’agissant des fonds de l’assurance maladie, les caisses de sécurité sociale étant des organismes de droit privé sui generis. Toutefois, le Conseil d’État, conduit à statuer sur plusieurs recours pour excès de pouvoir dirigés contre le décret no 2003-1010 du 22 octobre 2003 (décret budgétaire et comptable codifié aux articles R. 314-1 et suivants du CASF) a eu l’occasion d’affirmer que tous ces fonds, quelle que soit leur provenance, ont la nature de fonds publics (CE, 1er avril 2005, ARSEAA & autres, no 262907, concl. J.-H. Stahl). Le tarif – c’est-à-dire le financement alloué aux établissements et services sociaux et médico-sociaux au terme de la procédure règlementaire annuelle de tarification – perd sa nature de fonds publics dès qu’il est versé aux dits établissements et services, sauf à ce que ces derniers soient gérés par une personne publique (ex. : gestion en régie par une Commune, établissement médico-social annexe d’un établissement de santé public, établissement géré par un établissement public tel qu’un centre communal d’action sociale ou CCAS). À cet égard, les organismes gestionnaires de droit privé – dont les associations déclarées ou reconnues d’utilité publique – ne subissent aucune des contraintes liées au maniement de fonds publics : pas de comptable public, pas de comptabilité publique. L’explication de cette situation réside dans le fait que le tarif rémunère la réalisation de prestations. Le terme est expressément employé dans la législation et la réglementation budgétaire dont, en premier lieu, l’article L. 312-1, I, dernier alinéa du CASF : « Les établissements et services sociaux et médico-sociaux délivrent des prestations à domicile, en milieu de vie ordinaire, en accueil familial ou dans une structure de prise en charge. Ils assurent l'accueil à titre permanent, temporaire ou selon un mode séquentiel, à temps complet ou partiel, avec ou sans hébergement, en internat, semi-internat ou externat. » La jurisprudence a d’ailleurs confirmé que ces sommes, rétributives de prestations dont la nature et la tarification sont définies par des dispositions légales et règlementaires spéciales, ne constituent pas des subventions publiques mais bien le prix de la délivrance de prestations (CE, 6 juillet 1994, Comité mosellan de sauvegarde de l’enfance, de l’adolescence et des adultes, Rec. p. 343 ; CE, 29 décembre 1997, Association amicale du Nid, no 160139). Les prestations dont s’agit sont fournies aux usagers, c’est-à-dire aux personnes accueillies ou accompagnées par les établissements et services. L’usager étant dès lors le client de l’établissement ou du service, se pose la question du lien entre lui et l’origine du financement de sa prise en charge. La réponse à cette interrogation réside dans les dispositions de l’article 1251, 3° du Code civil qui instituent la subrogation légale : en effet, le bénéfice des prestations d’assurance maladie ou de l’aide sociale résulte de dispositions légales mettant à la charge du financeur une dette dont l’assujetti ou le bénéficiaire est le créancier, sous réserve d’avoir satisfait aux conditions légales et réglementaires du Code de la sécurité sociale ou du CASF. Le lien de clientèle unissant la personne accueillie à l’organisme gestionnaire de l’établissement ou du service qui l’accueille est d’ailleurs expressément confirmé par la volonté du législateur de soumettre le contrat de séjour à la compétence de contrôle de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) dans les conditions de l’article L. 313-21 du CASF.

Ceci étant, les conditions de validité du contrat de séjour se définissent, conformément aux dispositions de l’article 1108 du Code civil, par le consentement des parties, leur capacité à contracter, un objet contractuel certain qui forme la matière de l’engagement et, enfin, une cause contractuelle licite.


Le consentement de l’usager

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Le consentement de l’usager résulte de sa volonté claire et non équivoque d’être admis dans l’établissement ou le service. La relation contractuelle se forme, de ce point de vue, au jour de l’admission, dès lors que l’établissement ou le service appartient à la catégorie visée par la décision d’orientation et que l’admission en procède pas de l’exécution d’une décision judiciaire (placement d’un mineur délinquant ou placement au titre d’une mesure d’assistance éducative), peu important qu’un contrat de séjour ait été formellement conclu ou qu’un document individuel de prise en charge (DIPC) ait été remis. (Cass., Civ. 2, 12 mai 2005, déjà cité).


La capacité de l’usager

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La capacité de l’usager est appréciée au regard des règles de droit commun, selon qu’il est majeur ou mineur et selon qu’étant majeur, il dispose de sa capacité ou qu’il fait l’objet d’un régime de protection ou de représentation.

Pour ce qui concerne le majeur protégé, les dispositions des articles 458 et 459 du Code civil prévoient que la personne, dans toute la mesure de ses capacités, est seule à pouvoir consentir :

« Article 458

Sous réserve des dispositions particulières prévues par la loi, l'accomplissement des actes dont la nature implique un consentement strictement personnel ne peut jamais donner lieu à assistance ou représentation de la personne protégée.

Sont réputés strictement personnels la déclaration de naissance d'un enfant, sa reconnaissance, les actes de l'autorité parentale relatifs à la personne d'un enfant, la déclaration du choix ou du changement du nom d'un enfant et le consentement donné à sa propre adoption ou à celle de son enfant.

Article 459

Hors les cas prévus à l’article 458, la personne protégée prend seules les décisions relatives à sa personne dans la mesure où son état le permet. Lorsque l'état de la personne protégée ne lui permet pas de prendre seule une décision personnelle éclairée, le juge ou le conseil de famille s'il a été constitué peut prévoir qu'elle bénéficiera, pour l’ensemble des actes relatifs à sa personne ou ceux d'entre eux qu’il énumère, de l'assistance de la personne chargée de sa protection. Au cas où cette assistance ne suffirait pas, il peut, le cas échéant après l'ouverture d'une mesure de tutelle, autoriser le tuteur à représenter l'intéressé.

Toutefois, sauf urgence, la personne chargée de la protection du majeur ne peut, sans l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué, prendre une décision ayant pour effet de porter gravement atteinte à l'intégrité corporelle de la personne protégée ou à l'intimité de sa vie privée.

La personne chargée de la protection du majeur peut prendre à l'égard de celui-ci les mesures de protection strictement nécessaires pour mettre fin au danger que son propre comportement ferait courir à l'intéressé. Elle en informe sans délai le juge ou le conseil de famille s'il a été constitué. »

Par ailleurs, sur la question plus précise de l’hébergement, il importe de souligner qu’aux termes de l’article 459-2 du Code civil :

« La personne protégée choisit le lieu de sa résidence.

Elle entretient librement des relations personnelles avec tout tiers, parent ou non. Elle a le droit d’être visitée et, le cas échéant, hébergée par ceux-ci.

En cas de difficulté, le juge ou le conseil de famille s'il a été constitué statue. »

L’article 426 du même code ajoute :

« Le logement de la personne protégée et les meubles dont il est garni, qu’il s'agisse d'une résidence principale ou secondaire, sont conservés à la disposition de celle-ci aussi longtemps qu’il est possible.

Le pouvoir d'administrer les biens mentionnés au premier alinéa ne permet que des conventions de jouissance précaire qui cessent, malgré toutes dispositions ou stipulations contraires, dès le retour de la personne protégée dans son logement.

S'il devient nécessaire ou s'il est de l’intérêt de la personne protégée qu’il soit disposé des droits relatifs à son logement ou à son mobilier par l'aliénation, la résiliation ou la conclusion d'un bail, l'acte est autorisé par le juge ou par le conseil de famille s'il a été constitué, sans préjudice des formalités que peut requérir la nature des biens. L'avis préalable d'un médecin inscrit sur la liste prévue à l’article 431 est requis si l'acte a pour finalité l'accueil de l'intéressé dans un établissement. Dans tous les cas, les souvenirs, les objets à caractère personnel, ceux indispensables aux personnes handicapées ou destinés aux soins des personnes malades sont gardés à la disposition de l'intéressé, le cas échéant par les soins de l'établissement dans lequel celui-ci est hébergé. »

Il résulte de ces textes que, sauf à ce qu’il ne soit pas en mesure de prendre une décision personnelle éclairée, le majeur protégé est seul en mesure de consentir à sa prise en charge, en particulier lorsqu’elle a un effet sur la détermination de son lieu d’hébergement.

Dans le cas contraire, le juge – ou, s’il existe, le conseil de famille – devra statuer et désigner la personne qui sera compétente pour signer le contrat de séjour.

Si le mandataire judiciaire à la protection des majeurs est un agent de l’établissement (article L. 472-6 du CASF) ou un agent d’un établissement tutélaire au sens du 14° du I de l’article L. 312-1 du CASF, alors aux termes de l’article L. 471-7 du même code :

« 1° [le contrat de séjour est] personnellement remis à la personne protégée ou, dès lors que l'état de cette dernière ne lui permet pas d’en mesurer la portée, à un membre du conseil de famille s'il a été constitué ou, à défaut, à un parent, un allié ou une personne de son entourage dont l’existence est connue ; 2° La participation directe de la personne à l'élaboration du document individuel de prise en charge mentionné à l’article L. 311-4 est requise à moins que son état ne lui permette pas d'exprimer une volonté éclairée ; »

Et l’article D. 311-0-2 du CASF précise dans ce dernier cas :

« Pour l’application du 2° de l’article L. 471-7, si l'état de la personne protégée ne lui permet pas de comprendre la portée du document individuel de prise en charge, un membre du conseil de famille s'il a été constitué ou, à défaut, un parent, un allié ou une personne de son entourage ayant des liens étroits et stables avec elle, dont le mandataire judiciaire à la protection des majeurs connaît l’existence ou le subrogé curateur ou tuteur, peut être associé à l'élaboration du document. La personne associée à l'élaboration du document s'en voit remettre une copie. »


L’objet du contrat de séjour

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L’objet du contrat de séjour, pour l’usager, est le paiement du prix de sa prise en charge, paiement dont il a été indiqué ci-dessus qu’il intervient le plus souvent par le jeu d’un mécanisme de subrogation légale.


La cause du contrat de séjour

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La cause du contrat de séjour, pour l’usager, réside dans le bénéfice des prestations attachées à son accueil ou à son accompagnement. La définition de ces prestations, qu’il s’agisse de leur contenu ou de leurs modalités de délivrance, provient de multiples sources qui sont :

- l’autorisation administrative d’ouverture (l’agrément) ;

- lorsqu’il en existe selon la catégorie d’établissements ou de services, les conditions techniques minimales d’organisation et de fonctionnement visées au II de l’article L. 312-1 du CASF ;

- le projet d’établissement ;

- le règlement de fonctionnement ;

- la charte des droits et libertés de la personne accueillie issue de l’arrêté du 8 septembre 2003 ;

- le document contractuel « contrat de séjour » ou le document individuel de prise en charge (DIPC). Sont ainsi prévues les clauses mentionnées au V de l’article D. 311 du CASF, à savoir :

la définition des objectifs de la prise en charge ;

la mention des prestations les plus adaptées qui peuvent être mises en œuvre dès la signature du contrat dans l’attente de l’avenant de personnalisation de la prise en charge ;

la description des conditions de séjour et d’accueil ;

selon la catégorie de prise en charge, les conditions de la participation financière ou de facturation ;

les conditions d’admission en urgence au bénéfice de l’aide sociale pour les personnes accueillies en centre d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) et les étrangers entrant en centre d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) ;

- l’avenant au contrat de séjour, qui précise les objectifs et les prestations adaptées à la personne.

Il faut ici rappeler que, nonobstant la rédaction de l’article D. 311 du CASF et au regard de l’état de la jurisprudence judiciaire actuelle, ni la conclusion du contrat de séjour ni la remise du DIPC n’ont pour effet de créer la relation contractuelle puisque c’est le fait juridique de l’admission qui caractérise la naissance de cette relation. De ce point de vue, il faut déplorer que la rédaction du texte règlementaire n’ait pas tenu compte de la nécessité de lier admission et conclusion du contrat. Par suite, même en l’absence de contrat de séjour ou de DIPC, la définition des prestations cause de l’engagement contractuel résulte a minima des documents cadre susvisés, de l’agrément au règlement de fonctionnement.

Il faut enfin indiquer que le contrat de séjour est un contrat règlementé et qu’à ce titre, la licéité de sa cause s’apprécie au regard non seulement du droit commun mais également des dispositions des articles L. 311-4 et D. 311 du CASF ainsi qu’en fonction des exigences posées par la Charte des droits et libertés de la personne accueillie issue de l’arrêté du 8 septembre 2003.

Un contrat d’entreprise

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Les prestations de service qui composent la prise en charge sont des plus diverses : il s’agit d’interventions éducatives, d’enseignement et de formation, psychologiques et psychothérapeutiques, de soins et de rééducation, d’aide à la vie personnelle, domestique, familiale, professionnelle et sociale, de compensation du handicap par des aides techniques et humaines. Pour une vision à la fois plus juridique et peut-être plus exhaustive encore de ce qui constitue une prise en charge sociale ou médico-sociale, cf. l’article L. 311-1 CASF qui énonce les missions de l’action sociale et médico-sociale institutionnelle. Compte tenu de cette diversité et de cette complémentarité d’interventions, le contrat de séjour en établissement ou service social ou médico-social doit être qualifié de contrat d’entreprise au sens de l’article 1710 du Code civil (J.-M. LHUILLIER, Le droit des usagers dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux, éd. ENSP, 4e éd., p. 142 ; Ph. MALAURIE, L. AYNES, P.-Y. GAUTIER, Contrats spéciaux, éd. Cujas, coll. Droit civil, 14e éd., no 708). Cette qualification a pour conséquence, compte tenu de la prépondérance des prestations immatérielles, de retenir le principe d’une responsabilité contractuelle majoritairement placée sous le signe de l’obligation de moyens, sauf en matière de sécurité et dans certains cas seulement (P. CALLOCH, La responsabilité des établissements sanitaires et sociaux, éd. Législatives, Coll. Dominantes, p. 110 ; J.-M. LHUILLIER, La responsabilité civile, administrative et pénale dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux, éd. ENSP, 3e éd., no 403, 416 et 417 ; J.-M. LHUILLIER, Le droit des usagers dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux, éd. ENSP, 4e éd., p. 141, 156 à 158 ; Cass., Civ. 1, 5 juillet 2006, Catherine X… c/ Assoc. Les Papillons Blancs, no 03-12.344. En cas de commission d’agressions sexuelles répétées par d’autres usagers : O. POINSOT, note sous Cass. Civ. 2, 12 mai 2005, déjà cité. En cas de fugue mortelle d’une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer : TOULOUSE, 26 juin 2007, no 371 ; O. POINSOT, « contrat de séjour, obligation de sécurité et fugue mortelle », Droit & Santé no 26, décembre 2008, p. 716-719). Cette qualification signifie que l’établissement a l’obligation de délivrer des prestations conformes à la réglementation mais que l’étendue de ses obligations est limitée aux moyens qui sont mis à sa disposition (MONTPELLIER, 1ère Ch. Section D, 18 juin 2008, ADAPEI des Pyrénées-Orientales c/ Carl et Saskia X..., no A08.1D2767 : « (…) qu'au vu des pièces du dossier, il apparaît en effet que cet établissement a géré les crises d'épilepsie de Carl X... dans le respect de ses obligations, compte tenu des moyens dont il disposait, sans qu’il soit démontré que ceux- ci auraient été insuffisants au regard de la réglementation en vigueur (…) »). Cette qualification a également pour conséquence d’exclure que le contrat de séjour – contrat complexe associant des prestations hôtelières à des prestations humaines et techniques – soit seulement un contrat de bail (Cass., Civ. 3, 1er juillet 1998, Maison de retraite Fleury, no 96-17515). Autre conséquence de la qualification de contrat d’entreprise : les prestations peuvent être délivrées par le prestataire mais également, en l’absence de convention expresse contraire entre les parties, par un sous-traitant qui, à l’égard du prestataire, est tenu d’une obligation de résultat (Cass., Civ. 1, 21 octobre 1997, RJDA 1998, no 47 ; Dalloz 1998, 376, note Petit).


Un contrat d’adhésion

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Il est constant que, même dans une démarche de négociation des conditions de la prise en charge qui procède de l’objectif de personnalisation, tous les éléments caractéristiques de l’accueil en établissement ne peuvent être discutés. Ainsi faut-il considérer comme intangibles les éléments de définition issus de l’agrément, des conditions techniques minimales d’organisation et de fonctionnement s’il en existe, du projet d’établissement, du règlement de fonctionnement, de la charte des droits et libertés de la personne accueillie et même du contrat de séjour lui-même, ce dernier étant un document type. Ces documents – qui contribuent à déterminer la teneur des prestations et les modalités de leur délivrance – acquièrent nécessairement, lors de la naissance du lien contractuel, une valeur contractuelle dès lors qu’en cas de contentieux, l’usager pourrait tirer argument de leur non respect pour caractériser la réalisation d’une faute contractuelle imputable à l’organisme gestionnaire. De manière plus générale, les circonstances factuelles et juridiques dans lesquelles se noue le lien contractuel entre l’usager et l’organisme gestionnaire correspondent en tous points aux conditions requises pour caractériser l’existence d’un contrat d’adhésion :

1°) une inégalité sociale entre les parties, inégalité issue tant du déséquilibre entre l’offre et la demande de places que du fait que les établissements participent à la mise en œuvre d’une politique publique ;

2°) une offre contractuelle générale, destinée non à une personne mais à un public et dans des termes identiques ;

3°) un contrat dont le contenu est majoritairement sinon exclusivement l’œuvre de l’organisme gestionnaire puisque la réglementation fait reposer sur lui la responsabilité de son élaboration.

Voir en ce sens :

F. TERRE, Ph. SIMLER, Y. LEQUETTE, Les obligations, Dalloz, coll. Précis, 9e éd., no 196

Par suite, il faut considérer qu’à l’exception de l’avenant de personnalisation de la prise en charge, qui correspond aux conditions particulières du contrat de séjour, les autres références textuelles précitées constituent ensemble les conditions générales de ce contrat.


Un contrat de consommation

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La doctrine consumériste définit le consommateur comme la « personne physique ou morale qui se procure ou qui utilise un bien ou un service pour son usage non professionnel » et le professionnel comme étant « toute personne physique ou morale agissant dans le cadre d’une activité habituelle et organisée de production, de distribution ou de prestation de services » (Y. PICOD, H. DAVO, Droit de la consommation, Armand-Colin 2005, no 31 à 39). Les situations de l’usager et de l’organisme gestionnaire correspondent à ces définitions. Cette analyse est d’ailleurs corroborée par le fait que :

- la compétence en matière de contrôle administratif appartient depuis la loi du 2 janvier 2002 aux services de la concurrence, de la consommation, et de la répression des fraudes ;

- la conformité juridique de certains contrats de séjour (les contrats conclus avec les personnes âgées) s’apprécie au regard des plusieurs recommandations de la Commission des clauses abusives, dont la no 85-03 du 5 juillet 1985 et la no 08-02 du 13 décembre 2007, prises en application des articles L. 132-1 à L. 132-5 du Code de la consommation.

L'usager doit donc bénéficier des dispositions protectrices du Code de la consommation en matière d’information, de protection contre les clauses abusives, de remise des documents contractuels, d’interprétations des clauses du contrat, de reconduction tacite des engagements souscrits ou encore de sécurité.

S’agissant en particulier de la protection contre les clauses abusives, l’usager bénéficie des dispositions des articles L. 132-1 et R. 132-1 et suivants du Code de la consommation qui ont procédé à la transposition de la directive no 93/13/CEE du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs. Certaines clauses sont purement et simplement interdites ; d’autres sont présumées abusives, le professionnel étant admis en cas de litige à rapporter la preuve de leur caractère non abusif. Enfin, les recommandations émises en vertu de l’article L. 132-4 par la Commission des clauses abusives sont susceptibles de guider l’appréciation du juge sur le caractère abusif ou non d’une clause contenue dans un contrat de consommation. Dans le cas du contrat de séjour, au moins huit recommandations sont susceptibles d’être prises en compte, directement ou par analogie (certaines recommandations étant propres aux contrats conclus avec des personnes âgées accueillies en établissement).

Bibliographie

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  • Olivier Poinsot, Le droit des personnes accueillies ou accompagnées, les usagers dans l’action sociale et médico-sociale, coll. Ouvrages généraux, LEH Edition, 2016, 410 p., (ISBN 978-2-84874-647-0)