Course à l'espace/Post-1989
Après la fin de la Guerre Froide, on assiste à un basculement des puissances dans le domaine spatial. Les deux anciens géants, toujours dans la course, se sont vus rejoints par d'autres pays : l'Europe tout d’abord, puis le Japon et les pays des BRIC tels que l'Inde et la Chine et même des pays moins développés comme l'Iran ou le Pakistan ont lancé leur programme spatial. Des sociétés privées ont elles aussi vu la manne financière que représente l'espace et développent des solutions pour l'exploiter. Les enjeux sont multiples, à la fois scientifiques, militaires, financiers et géopolitiques. Pourquoi de nouveaux acteurs rentrent-ils dans ce domaine si couteux qu'est la course à l'espace ? (changer)
Un basculement des puissances
modifierOn a assisté depuis la fin de la Guerre Froide à une dépolarisation du domaine spatial. Les États-Unis et la Russie ne sont plus seuls et des pays comme la Chine occupe aujourd’hui une place prépondérante dans ce domaine. Ainsi, en 2011, la Chine dépasse pour la première fois les États-Unis avec 19 lancements contre 18 pour les américains. L’Europe, depuis sa base de Kourou en Guyane, a elle lancé 10 engins en 2012, bien que sa navette Ariane 5 ne puisse pas accueillir de vol habité. Ces missions ont un coût très important : Quelques 21 milliards d’euros ont été dépensés en 2007 (uniquement pour le spatial civil, c'est-à-dire sans compter le spatial militaire ou commercial) par les six puissances – États-Unis, Europe, Russie, Japon, Chine et Inde – qui participent actuellement à l'exploration spatiale. On peut donc se demander pourquoi ces pays investissent autant dans ce domaine.
A/ Améliorer son image
Les pays capables de lancer des engins dans l'espace ne sont qu'une poignée, et figurer sur cette liste est synonyme de progrès et de prestige international. De fait, l'espace représente une formidable vitrine politique pour les pays et sa médiatisation aisée permet un impact direct non seulement au niveau national, mais également au niveau mondial. La Chine en est le meilleur exemple : ses habitants, qui n'avaient guère eu l’occasion de voir les images du premier homme sur la Lune en 1969, ont accueilli leurs premiers taïkonautes comme des héros en 2003. La fierté nationale dépasse les difficultés économiques parfois vécues par certaines catégories de la population. "Quand certains disent que les Indiens les plus pauvres préféreraient que l’on construise des hôpitaux plutôt que d'envoyer des fusées dans l'espace, ils n'ont pas entièrement tort. Mais les Indiens les plus pauvres sont fiers aussi d'appartenir à un pays qui compte parmi les puissances spatiales", selon Gopal Roaj, auteur de Histoire du programme spatial indien.
B/ Un outil au service du développement
Depuis ses débuts, la conquête spatiale a permis d’effectuer de nombreux progrès scientifiques dans des domaines divers. Ces progrès ont rapidement connu des applications pratiques et les sociétés contemporaines sont devenues très dépendantes des satellites pour les télécommunications, la météorologie, la gestion des ressources naturelles et des risques, la géolocalisation, la diffusion de l’information. Il existe de nombreux exemples de technologies militaires « passées au civil », dans des usages civils et commerciaux. Qu'il s'agisse des transports, des télécommunications ou des données d'observation, de la télédétection, le recours aux satellites est devenu indispensable à nos sociétés. Plus un seul dossier d’objectifs militaires n’est en outre aujourd’hui réalisé sans image satellitaire, et les opérations sont toutes suivies en temps réel depuis le ciel. Quelque 750 satellites civils, gouvernementaux et commerciaux (sur plus de 5500 lancés depuis 1957) assurent ces fonctions. Pouvoir en mettre en orbite est donc un avantage crucial pour ne pas être dépendant d'autres pays. De plus, d'autres pays peuvent avoir les compétences pour fabriquer des satellites mais pas pour les lancer, et être en capacité de leur facturer ce service peut être très rémunérateur : au total, le marché mondial de la construction et du lancement de satellites pèse plus de 200 milliards de dollars par an (148 milliards d'euros), ne cesse de croître, avec les besoins croissants de pays pauvres qui ne sont pas encore équipés de réseaux de télécommunication performants.
De nouveaux objectifs
modifierA/ Marcher sur Mars
Après avoir posé le pied sur la Lune pour la première froid pendant la Guerre Froide, l'objectif principal des agences spatiales est aujourd’hui de marcher sur la planète Mars. Mais le périple est long : il faudrait 350 jours pour rallier la planète rouge. Et l'obstacle majeur n’est pas technologique, mais surtout financier : on estime qu’il faudrait 300 milliards de dollars de budget pour lancer un programme permettant à des Hommes d'aller à la surface de Mars, chose impossible dans le contexte économique actuel. Mais Mars est d'ores et déjà la nouvelle frontière dans la conquête spatial. Tout d’abord, on peut le voir à travers l'envoi du robot Curiosity : ce rover de 1 tonne qui a coûté 2,5 milliards de dollars foulent le sol martien depuis le 6 août 2012, et permet à la fois des avancées scientifiques mais aussi un coup de publicité pour la NASA grâce aux photographies panoramiques qu’il nous envoie. En 2018, il est prévu que le robot américain Maven mais aussi un robot européen lui succèdent, capables respectivement d'étudier l'atmosphère et de forer le sol martien . Les scientifiques tentent ainsi de découvrir si la planète Mars a un jour abrité la vie. Et l'Homme dans tout cela ? Puisque Mars est la nouvelle frontière à atteindre, quand peut-on espérer y envoyer des spationautes? "Il n'existe pas vraiment de frein technologique à une telle épopée", explique Jean-François Clervoy, le cinquième spationaute français. Théoriquement, les technologies actuelles pourraient permettre un vol habité vers Mars, mais faute de moyens, les spécialistes pensent ne pas voir cet évènement avant 2030 ou 2040. En attendant, des simulations de vols où une équipe triée sur le volet s'enferme pour simuler un vol vers la planète Rouge ont lieu. Le programme Mars-500, qui pris lieu du 3 juin 2010 au 4 novembre 2011, soit une période de 520 jours, permis de simuler les différents problèmes auxquels devra faire face une équipe de spationautes se dirigeant vers Mars, avec en première ligne l'enfermement et le confinement durant une longue période. Ces programmes sont donc très utiles afin de préparer une future équipe à embarquer vers Mars. À terme, ce qui peut paraître aujourd’hui comme un doux rêve pourrait devenir réalité : la colonisation de Mars par l'Homme.
B/ L'exploitation des astéroïdes
Aujourd'hui, les réserves terrestres de minerais sont en déclin, suite à leur exploitation intensive : dans leur livre Quel futur pour les métaux ?, Philippe Bihouix et Benoît de Guillebon estiment que les réserves de la grande majorité des minerais ne sont plus que de 30 à 60 ans, en prenant en compte la hausse future de la demande. En effet, les énergies renouvelables, sur lesquelles beaucoup misent pour le futur, demandent énormément de métaux rares. On peut donc s'attendre à une hausse considérable de la demande, et les estimations précédentes pourraient même être optimistes si les pays développés continuent à miser sur ce secteur. Pour pallier cette raréfaction des minerais sur Terre, il est envisagé d'exploiter ceux contenus dans les astéroïdes. En effet, ceux-ci contiennent des quantités considérables de minerais : un astéroïde de 500 mètres de long peut contenir autant de platine que tout ce qui a été extrait sur Terre depuis le début de l'Humanité. On comprend ainsi aisément que des sociétés veuillent mettre la main sur cette manne. En 2010, la première entreprise du secteur a vu le jour, Planetary Resources. Financée par Larry Page, Eric Schmidt (diregants de Google) et James Cameron (célèbre réalisateur), son objectif est d'exploiter les astéroïdes géocroiseurs, c'est-à-dire les astéroïdes les plus proches de la Terre. Le scénario, un peu fou, de leur exploitation, serait de "capturer" un astéroïde puis de le ramener en orbite géostationnaire et de commencer l'extraction. La crédibilité d'une telle démarche est contestée par certains scientifiques qui ne comprennent pas comment on pourrait exploiter les ressources minières des astéroïdes à des couts compétitifs même pour des métaux couteux comme l'or et le platine. À titre d'exemple la NASA prévoit de dépenser 1 milliard de dollars US dans la mission OSIRIS-REx dont l'objectif principal est de ramener sur Terre un échantillon de 60 grammes prélevé sur un astéroïde. Mais, en attendant de trouver un moyen pour ramener ces précieuses ressources sur Terre, l'exploitation des astéroïdes pourraient tout de même être rentable. En effet, si ramener quelque chose de l'espace est très cher, l'amener dans l'espace l'est tout autant. Ces sociétés pourraient donc, grâce à l'impression 3D et aux minerais extraits des astéroïdes, créer des pièces de rechange pour les satellites ou encore la Station Spatiale Internationale (ISS), et ainsi économiser des coûts de transports astronomiques. Certains astéroïdes sont aussi très riches en eau, qui est une ressource indispensable aux astronautes mais très volumineuse donc très cher à envoyer dans l'espace. Les astéroïdes pourraient donc servir de réserves d'eau et de pièces de rechange avant d’avoir une solution pour ramener cette manne céleste sur Terre.
C/ Le tourisme spatial
Un autre objectif contemporain est la démocratisation de l'espace : plusieurs sociétés se sont lancées dans le tourisme spatial afin de permettre à des personnes "ordinaires" (mais fortunées) de survoler la Terre et de profiter d'un spectacle et de sensations actuellement réservées pratiquement qu'aux astronautes. Aujourd'hui, aucun projet n'est encore abouti, toutefois il existe une seule possibilité de tourisme spatial : suite aux problèmes budgétaires rencontrés par l'agence spatiale russe, certains, à condition d’être particulièrement riche, ont pu, à partir de 2001, réaliser leur rêve. Celle-ci propose effectivement des séjours à bord de l'ISS pour un prix entre 20 et 28 millions de dollars. 7 personnes ont donc pu, après un entraînement très rigoureux, décoller à bord de Soyouz et passer quelques jours dans l'ISS. Un tourisme spatial, de toute autre nature, s'est développé pendant les années 2000. La société Virgin Galactic, entre autres, a investi pour faire du vol suborbital, c'est-à-dire un bref séjour de quelques minutes à plus de 100 km d'altitude, une activité touristique. La date du premier vol commercial de leur vaisseau, SpaceShipTwo, était initalement prévue pour 2008, mais elle a été constamment repoussée et ne devrait pas être avant 2014. Toutefois, ce projet provoque déjà un enthousiasme considérable : plus de 600 personnes ont d'ores et déjà réservé leur billet, à plus de 200 000 dollars l'unité. Mais le vol suborbital présente de nombreux défis techniques avant de pouvoir être proposé à la clientèle. Tout d’abord, pour parvenir à une altitude supérieure à 100 km, l'avion spatial doit pouvoir se propulser à une altitude où il n'existe pas suffisamment d'oxygène pour alimenter un moteur à réaction. Il est donc nécessaire d’avoir recours à un moteur-fusée qui brûle des comburants et carburant embarqués. Ce type d'engin est toutefois à la fois complexe et dangereux à utiliser dans le cadre d'une activité commerciale qui se doit de réduire le risque couru par les passagers à un taux acceptable. Le choix des matériaux, l'aérodynamisme du vaisseau, tout doit être prendre en compte afin de proposer un vol sûr.
Conclusion Après avoir été le théâtre d'une rivalité entre les États-Unis et l'URSS pendant la Guerre Froide, l'espace a vu une multitude de nouveaux acteurs les rejoindre, avec de nouveaux objectifs Les progrès techniques et scientifiques liés à l’espace ont profondément modifié les connaissances, les modes de vie et les activités dans les sociétés contemporaines. Bien que toujours largement dominé par des agences spatiales nationales ou internationales, le domaine spatial voit se développer l’intervention d’acteurs privés (comme Arianespace). L’industrie de production et de services spatiaux est aujourd’hui en pleine expansion et irrigue de nombreux secteurs économiques (en Europe, on estime par exemple que 7% du PIB sont liés à la seule navigation par satellite). La principale activité commerciale est générée par les satellites de télécommunication et de localisation, mais de nouvelles sources de profits liées à l'espace devraient apparaître, dues à sa démocratisation future.