Droit commercial général/Actes de commerce

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L'article L.110-1 du Code de commerce est un texte fondamental du droit commercial. Il énumère des actes réputés commerciaux sans donner de définition de l'acte de commerce. La jurisprudence retient deux critères complémentaires l'un de l'autre pour qualifier un acte de commerce : le critère de la spéculation (la recherche et la production de profits), et le critère de la répétition de l'acte.

Actes de commerce
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Chapitre no 2
Leçon : Droit commercial général
Chap. préc. :Introduction
Chap. suiv. :Commerçants
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Selon la conception objective, les actes sont commerciaux par leur nature même, et non en fonction du professionnel qui les accomplit. Ainsi, un acte de commerce par nature permet de qualifier son auteur de commerçant (par accessoire objectif). Cette conception suscite certaines critiques : elle résulterait d'une interprétation extensive de l’article L.110-1, et certains actes pourraient être civils ou commerciaux selon leur auteur (l'activité commerciale de l'auteur confèrerait la qualité commerciale de leurs actes).

Selon la conception subjective, la qualité de l'auteur de l'acte permet de qualifier l'acte lui-même. Ainsi, les actes accomplis par un commerçant sont des actes de commerce, même si ces actes sont isolés les uns des autres. Il existe en effet une présomption de commercialité des actes accomplis par un commerçant pour le besoin de son commerce (Cass. req., 29 janvier 1883 ; Cass. civ. 31 janvier 1956.) La principale critique de la conception subjective repose sur l'absence de définition du commerçant.

Les différentes catégories d'actes de commerce

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Les actes de commerce sont classés en trois catégories :

  • l'acte de commerce par nature,
  • l'acte de commerce par accessoire,
  • l'acte de commerce par la forme.

L'acte mixte n’est pas une catégorie d'actes de commerce, mais résulte d'une simple situation de fait. Cet acte est commercial pour une partie et civil pour l'autre, et ce, indépendamment de la qualité des parties.

Les actes de commerce par nature

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Les actes énumérés à l’article L.110-1 du Code de commerce (sauf aux alinéas 9 et 10) sont des actes de commerce par nature. Certains de ces actes sont envisagés individuellement, d'autres supposent d’être accomplis dans le cadre d'une entreprise pour être commerciaux. Cependant, tous les actes de commerce par nature bénéficient d'une présomption simple de commercialité, qui peut être renversée par la preuve contraire.

Les différents actes de commerce par nature
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Le négoce, ou achat de biens pour revente, est un acte de commerce par nature. L'achat du bien, ou toute autre forme d'acquisition du bien à titre onéreux, suppose l'intention de revendre et la volonté de réaliser des bénéfices. Cette définition exclut donc les actes de consommation. Le négoce concerne les biens meubles et immeubles, par nature ou par destination. Si l'achat d'immeubles par des entreprises est civil, le même achat en but de les revendre présente un caractère commercial. Cela ne concerne que les seuls marchands de biens, les promoteurs immobiliers étant exclus (Cass. com., 10 avril 1975).

Le secteur économique de l’industrie (art. L.110-1 5°) est également une source d'actes de commerce par nature. Sont concernés tous les travaux effectués pour la fabrication ou la transformation de biens :

  • de matières premières en biens finis ou semi-finis,
  • ou de biens corporels en biens incorporels (éditions, journaux, films...).

Sont exclues de la sphère commerciales :

  • les productions intellectuelles des professions libérales, artistiques et littéraires,
  • les activités agricoles,
  • les activités d'exploitation du sol (sauf l'exploitation de mines).

Enfin, les activités de banque, de change, de bourse et d'assurance (sauf mutuelles) sont des actes de commerce par nature. Les actes de bourse supposent un caractère spéculatif et répété.

Les actes accomplis dans le cadre d'une entreprise
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Certains actes supposent d’être accomplis dans le cadre d'une entreprise, à titre professionnel et de manière répétée, pour être considérés comme des actes commerciaux par nature. C'est le cas de nombreuses activités de service :

  • les opérations d'intermédiaires qui ne supposent pas de mandats (art. L.110-1 3°, 5°, 6°, 7°) ;
  • la location de meubles (4°),
  • les activités de transport à but lucratif,
  • les activités de fourniture de biens et de services (livraisons successives de denrées ou de marchandises devant être fournies en grande quantité et à intervalle régulier),
  • les activités de spectacles (à but lucratif et à l'exclusion de toute profession intellectuelle),
  • les activités de dépôt (moyennant rétribution).

Enfin, les activités maritimes listées à l’article L.110-2 du Code de commerce sont des actes de commerce par nature, à l'exclusion des activités de plaisance et de pêche artisanale.

Les actes de commerce par accessoire

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Selon l’article L.110-1 9°, la qualité de commerçant détermine la nature commerciale de certains actes. Deux conditions doivent alors être réunies : l'acte doit être passé par un commerçant ou une entreprise commerciale à l’occasion d'une activité commerciale.

L'auteur de l'acte
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Un acte commercial par accessoire est un acte civil accompli par un commerçant, qu’il soit commerçant de droit ou de fait. Il devient commercial par le fait même d’avoir été accompli par un commerçant, ou dans le cadre de l'activité d'un ancien ou d'un futur commerçant. Ainsi, la vente d'un fonds de commerce par un ancien commerçant est un acte de commerce par accessoire (Cass. com., 13 juin 1989).

Dans le cas de la vente d'un fonds de commerce, la nature de l'opération est déterminée par la qualité des parties, vendeur ou acheteur, (l'achat par un non-commerçant révèle son intention de devenir commerçant, Cass. com., 13 juin 1989). De même, l'emprunt souscrit pour l'achat du fonds de commerce est un acte de commerce par accessoire, sauf lorsque le conjoint non-commerçant est co-emprunteur. Enfin, la vente d'un fonds de commerce par un héritier non-commerçant n’est pas un acte commercial (Cass. req., 21 juillet 1873).

Par ailleurs, un contrat de location-gérance est commercial à l'égard du locataire-gérant, et tous les actes d'une entreprise sous forme commerciale sont en principe commerciaux, par application de la théorie de l'accessoire commercial.

Le but de l'acte
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Seuls les actes passés pour le besoin du commerce sont des actes commerciaux par accessoire, car ils bénéficient d'une présomption de commercialité (Cass. req., 27 janvier 1883) : "lors même que l'obligation n'a pas, par sa nature propre, un caractère commercial, il suffit qu'elle se rattache à un commerce et en soit l'accessoire pour qu'elle affecte le caractère commercial et que les contestations relatives y soient de la compétence du tribunal de commerce" (Cass. req., 29 janvier 1883).

Sont ainsi des actes de commerce par accessoire :

  • l'achat de matériel et le louage d'immeuble pour le commerce,
  • le contrat de travail pour l'employeur commerçant,
  • l'emprunt souscrit pour les besoins de l'exploitation et l'achat du fonds (sous réserve de prouver le lien de nécessité entre l'emprunt et l'exploitation),
  • le contrat d'assurance,
  • le mandat donné à un agent d'affaire,
  • le contrat de dépôt,
  • le cautionnement par une entreprise commerciale,
  • les obligations extra-contractuelles,
  • les actes des dirigeants es qualité en dehors de leur fonction,
  • les actes des sociétés commerciales à objet civil.

Toutes les obligations dont la naissance se rattache au commerce ont un caractère commercial :

  • les dettes et créances pour concurrence déloyale (Cass. com., 3 janvier 1972),
  • la responsabilité du fait de la chose employée pour les besoins du commerce (Cass. req., 11 juillet 1900).

La jurisprudence retient une présomption de commercialité dans le domaine délictuel et dans le domaine contractuel. Il en va de même pour les actes de nature quasi-contractuelle, tels que le paiement ou la réception de l'indu dans l'exercice du commerce, ou l'enrichissement sans cause dans l'exercice du commerce. Toutefois, les obligations légales ne sont pas des obligations commerciales, sauf les cotisations de Sécurité sociale (Cass. com., 27 mai 1957).

Lorsque le commerçant est une société commerciale, la théorie de l'accessoire commercial s'applique quel que soit l'objet, même civil, de la société, car les actes sont qualifiés selon la qualité de leur auteur (accessoire subjectif). Enfin, les actes ayant un versant commercial pour une partie et civil pour l'autre constituent des actes mixtes dont le régime est particulier. Il s'agit souvent d'actes passés entre un commerçant et un non-commerçant, mais pas systématiquement. Deux commerçants peuvent aussi conclure un acte mixte.

Les actes de commerce par la forme

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Certains actes sont commerciaux par leur forme même, en fonction d'une présomption irréfragable. C'est le cas des lettres de change, et des actes des sociétés commerciales par la forme.

La lettre de change
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Selon l’article L.110-1 10°, les lettres de change sont toujours des actes commerciaux, qu’ils soient isolés ou répétés, exercé par des non-commerçants ou des commerçants, et quelle que soit la forme de leur engagement (Cass. civ., 12 mai 1909). La lettre de change est commerciale dès son établissement (Cass. com., 5 décembre 1949). Une lettre de change, qui sert à effectuer des transferts d'argent, est devenue un instrument de crédit.

En revanche, si une lettre de change établie par un non-commerçant est un acte de commerce par la forme, la personne qui l'établit n'acquiert pas pour autant la qualité de commerçant (Cass. com., 11 mai 1993), même si elle permet de caractériser la spéculation et faire apparaître la qualité de commerçant de son auteur (Cass. com., 17 juillet 1984). La commercialité objective de la lettre de change connaît quelques tempéraments.

Une lettre de change souscrite par un mineur non-négociant est nullé à son égard (Cass. com., 28 octobre 1969). Elle ne conserve sa qualité commerciale objective que par le respect des formalités prescrites par les textes, à peine de nullité (Cass. com., 10 février 1971).

L'article L.110-1 10° ne concerne que la seule lettre de change : les chèques et billets à ordre sont des instruments de paiement civils, qui ne deviennent commerciaux qu’à l'égard des commerçants qui les utilisent pour les besoins de leur activité (Cass. req., 27 novembre 1906).

Les actes des sociétés commerciales par la forme
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Le caractère commercial d'une société par sa forme est déterminé à l’article L.210-1 du Code de commerce. C'est la forme qui détermine la commercialité d'une société, et les associés ne peuvent y déroger (Cass. req., 8 décembre 1815). La jurisprudence a caractérisé certains actes commerciaux, non pour avoir été conclus par un commerçants, mais parce qu’ils dépendent d'une activité commerciale.

Les actes de fonctionnement des sociétés commerciales ont un caractère commercial. Ces actes sont accomplis dans le cadre de l'organisation des sociétés soumises aux articles L.210-1 et suivants du Code de commerce. C'est le cas des souscriptions d'actions ou de parts de commandite, même si les souscripteurs ne sont pas commerçants (Cass. civ., 15 juillet 1863).

La signature des statuts par l'associé ne suffit pas à lui conférer la qualité de commerçant, s'il ne participe pas lui-même à l'activité (Cass. com., 2 mai 1989). Cependant, le mandat d'un dirigeant de société commerciale par la forme est de nature commerciale. (Cass. crim., 1er février 1972). De même, la responsabilité des dirigeants engagée à l’occasion de leur gestion relève de la compétence des tribunaux de commerce lorsque les faits incriminés se rattachent par un lien direct à la gestion de la société (Cass. civ., 23 juillet 1877).

Bibliographie

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  • Vallansan Jocelyne, "Compétence des tribunaux de commerce - Détermination des actes de commerce" in JurisClaseur Commercial, fasc. no 37, 20 juillet 2001.
  • Canin Patrick, "I. La typologie des actes de commerce" in Droit commercial, Paris, éd. Hachette supérieur, coll. "Les fondamentaux", 2004 (2e éd.), p. 41-48.