Droit international humanitaire/Introduction
Raisons d’être d’un Droit des conflits armés
modifierSous ce titre, se cachent trois aspects:
- Pourquoi avons-nous un droit des conflits armés ? D'autant plus que l’on peut penser que la guerre est l'antithèse du droit, la violence déchaînée qui détruit tout. Peut-on avoir un droit dans la guerre donc. Il faut insister sur les raisons de l’existence d'un tel droit.
- Est-ce-que ce droit est efficace ? Soit, nous connaissons les raisons de son existence, mais peut-on avoir un Droit qui peut fonctionner dans la guerre ? Voici donc la question de l'effectivité qui est posée.
- Pourquoi ce droit des conflits armés est-il tellement important?
Ce sont des questions intimement liées
Existence du Droit des Conflits armés
Il y a fondamentalement trois raisons qui ont poussé à l’existence d'un Droit des conflits armés. Et cela est d'autant plus remarquable que des règles sur la guerre ont existé dans toutes les civilisations, à toutes les époques, partout sur Terre:
- Contrairement à ce que l’on pense de la guerre, celle-ci est plus qu'un simple déchaînement de violence. Avec le temps, c’est devenu un phénomène de plus en plus réglementé. Il suffit de regarder à quel point la discipline militaire est importante dans les armés.
Mais pourquoi y a-t-il une tendance à réglementer? Cette tendance est à l'avantage des belligérants, ils y trouvent un égoïste avantage à court terme:
- La guerre se fait avec des armes, mais l'art de la guerre consiste à doser leur utilisation. C'est la tenaille de la réciprocité, nous avons un intérêt à limiter l’utilisation de certaines armes. Du fait de la possibilité de représailles. Cela ne me sert à rien d'atomiser mon adversaire ci celui-ci peut également le faire. Chacun renonce donc à certaines armes sachant qu'aucun des deux n'en tirerait quoi que ce soit du fait de leur pouvoir destructeur. (armes atomiques, chimiques...)
- Si on fait une guerre de conquête, on n'utilisera pas des armes qui vont empoisonner ledit territoire par exemple. Puisqu’il en est ainsi, il est plus facile de renoncer à son utilisation, sauf pour des représailles.
C'est un motif qui a existé dans toutes les sociétés à tous les temps, je me limite afin que tu te limites, et afin de ne pas annuler les avantages possibles de la guerre. Les deux motifs suivants sont plus modernes:
- Le motif humanitaire. Nous estimons aujourd’hui que la guerre est une activité cruelle, et son impact devrait se limiter aux forces militaires, et aux combattants, alors que les civils devraient en pâtir le moins possible. On estime nécessaire l’existence de règles régissant la violence, afin que l'être humain ne souffre pas plus que ce qui est inévitable et strictement nécessaire. Les victimes de la guerre, les biens culturels, les civils, sont perçus aujourd’hui comme étant une valeur nécessitant une protection notamment en temps de guerre.
- Enfin, il y a un avantage altruiste et social de limiter la violence. C'est un avantage bien entendu des belligérants et à long terme. Nous entendons par là que, depuis fort longtemps, le but de la guerre est la paix. Personne ne se lance dans une entreprise guerrière en escomptant une rapide victoire. Comme le but de la guerre est d'arriver à une paix plus favorable le plus vite possible. Un dirigeant sait que plus il pillera, tuera et détruira, plus difficile il sera de retourner à l'État de paix. Si on allume la haine chez l'adversaire, la paix devient de plus en plus difficile. La haine réciproque plante les germes d'un conflit futur.
Effectivité du Droit des Conflits armés:
Entrons dans cette question par le débat entre les réalistes et les idéalistes. Depuis toujours, il y a eu des penseurs, des politiques, des militaires, qui ont estimé que la guerre ne se laisse pas réglementer. Cela est impossible par essence. Nous avons ainsi la vieille devise latine de Cicéron: « les lois ne sauraient parler lorsque les armes parlent » le droit se tait pendant la guerre, et surtout, il ne peut rien faire d'autre.
L'autre école, celle sous laquelle nous vivons, consiste à dire que le Droit est un phénomène de société avant tout, là où il y a société il y a droit, et qu’il régit tous les phénomènes sociaux quelconques. Donc des phénomènes de contacts. Tout ce qui est intersubjectif est du domaine du droit. Or, la guerre est un phénomène social, et ces contacts sont ouverts à un règlement juridique. Il y a des trêves qui doivent être conclues, des armistices, le problème des prisonniers, ces questions doivent être réglementées.
Le droit des conflits armés restent une des branches les plus précaires du Droit International. Il ne s'agit pas ici de se voiler la face sur la réalité et les constantes violations de ce Droit.
Mais il faut bien sur distinguer les conflits armés internationaux ou non internationaux. L'image change en effet du tout au tout. Dans le premier cas, ils sont en nombre beaucoup plus limité. Alors que le deuxième cas, des guerres civiles, sont beaucoup plus nombreux dans le monde. Finalement la paix au niveau international offre un bon bilan, à l'opposé du deuxième cas de figure. Mais on se trouve finalement entre des armées de métiers au courant du Droit, contre des vas nu pied rebelles qui sont dans un mouvement afin de pouvoir manger, survivre, combattre pour une cause.
Mais est ce qu'au fond, le Droit des conflits armés à vraiment besoin d’être efficace? Jean Pictet estimait toujours que ces questions étaient secondaires. Le Droit n'a pas pour but de faire des statistiques concernant son efficacité, mais plutôt de proposer au niveau de la norme, un critère d'évaluation. « Si le DIH n'a servi qu'à sauver qu'une seule vie humaine, il aura valu la peine d’être développer. » Il apporte une perspective nouvelle, l'efficacité importe certes, mais dans une vision humaniste, si ce droit sert à véhiculer certaines choses, et à endiguer même de temps en temps la violence, cela en vaut déjà la peine. On se situe donc dans le gris. Le droit est une question de volonté après tout. Le CICR, grâce au droit, peut aller devant un belligérant et le mette devant le fait accompli. Cela donne des résultats surprenant contre toute attente.
Terminologie : « droit de la guerre », « droit des conflits armés », « droit international humanitaire », « ius in bello »
modifierC'est un aspect secondaire certes, mais cela permet de dissiper toutes les incertitudes qui peuvent être liées aux différents termes.
Il y a bien sur des nuances entre chacun d'entre eux. Et cela s'explique principalement par le fait qu’ils sont apparus à différents moments de l'Histoire. Le premier à être apparu est le droit de la guerre, traduction du latin jus belli, aujourd’hui ius in bello. Au fond, tout le DIP dans les temps plus anciens était biparti: -Le Droit applicable en temps de paix -Le Droit applicable en temps de guerre.
Le Droit de la guerre comprenait toutes les relations entre états en périodes de guerre. Dès lors la question de savoir ce qu’il se passait avec un traité, était une question du droit de la guerre. C'est un terme abandonné à la suite de la deuxième guerre mondiale. En effet, les conventions de Genève opèrent une transition qui nous éloignent de ce terme. En effet, c’est le terme droit des conflits armés qui émerge. Il apporte fondamentalement deux choses nouvelles: - Le terme guerre n'a en 1949 plus la côte, les Nations Unies s'évertuent à la combattre. Parler donc d'un droit de la guerre, cela avait quelque part une saveur passéiste. C'est la raison pour laquelle on a voulus parquer le fait du ius contra bellum en abandonnant le droit de la guerre. - Le terme conflit armé est plus large que le mot guerre. La guerre est en effet un terme juridique très spécifique. La guerre est un état juridique des choses, que l’on amène à travers un acte formel qui est la déclaration de guerre. L'État de guerre découle donc d'un acte volontaire. Si cela est vrai, la conséquence est qu’il peut y avoir des hostilités sans guerre. Je bombarde sans déclarer la guerre par exemple. Or l'optique des Conventions de Genève marque la rupture, car le terme guerre n’est pas très adéquat pour le Droit Humanitaire, car il laisse des lacunes. On veut réglementer toutes les hostilités.
Le terme conflits armés apporte une innovation, un terme purement factuel Le fait même des hostilités qui compte. On comble donc la lacune. On exprime mieux ce fait par ce nouveau terme. Or il y a conflit armés dans toutes une série de cas.
Puis on a le Droit International Humanitaire. Pourquoi est ce que l’on a commencé à utiliser de plus en plus ce terme? C’est un terme forgé au CICR. On comprend que celui-ci ce soit attacher à ce terme, car il reflète tout de même l'esprit des Conventions de Genève de 1949, qui sont le cœur, le noyau dur de DIH moderne.
C’est quelque part l’expression du travail du CICR, on s’occupe des victimes de la guerre, Le terme a finalement été tout simplement aimé- Dans une période ou les Droits de l’Homme sont devenus de plus importants, ou il devient de plus en plus central par à rapport à l’État. Dès lors on utilise aujourd’hui ces trois termes de manières synonymiques. Les auteurs utilisent souvent un terme pour l’autre, bien que DIH soit plus usité, et que l’utilisation du droit de la guerre peut semble réactionnaire.
Cependant, on peut considérer tout de même que le Droit des conflits armés n’est pas synonyme au droit de la guerre, le premier étant plus large dans les questions qu’il traite. Il comprend en effet toutes les relations entre les parties belligérantes, qu’il y a guerre ou non, sur terre, mer ou air... Le DIH serait alors une sous-catégorie du Droit des conflits armés.
La séparation du ius in bello et du ius ad bellum ; le principe de l’égalité des belligérants selon le droit de la guerre
modifierQu'est-ce que le Ius in Bello, et le Ius ad Bellum:
Le Ius in Bello est la matière qui nous intéresse ici, le DIH. À savoir toutes les règles qui régissent les rapports entre États durant un conflit armé. Il s'agit surtout de règles sur la conduite des hostilités, et ensuite, des règles sur la protection des victimes de la guerre. En sommes, quelles armes je peux ou pas utiliser, comment dois-je traiter les blessés, les prisonniers, les civils...
Ce que l’on appelle le Ius Ad Bellum, ce sont la toutes les règles qui déterminent quand un État peut légitimement, en droit international, utiliser la force. Quand est-ce que l’on peut légitimement utiliser la force. En légitime défense? Sur autorisation des Nations Unies?
On perçoit assez rapidement qu’ils peuvent avoir un rapport relativement étroit entre eux... Le Ad me dit quand et si je peux utiliser la force, tandis que le In prolonge cela et me dicte la conduite que je dois suivre quand j’utilise la force. Un lien de consécution temporelle. Mais le problème juridique ne se pose pas à ce niveau, mais en définitive, on pourrait dire: ce que l’on a droit de faire durant la guerre, cela ne peut rester indépendant de la cause de la guerre. Si vous partez en hostilités en légitime défense, vous êtes catégorisés comme le bon.
En revanche, si vous agressez sans mandat d’un conseil de sécurité, à ce moment-là, on pourrait être tenté de dire que tu es le mauvais. Et qu'on te donne encore des droits, c’est gênant. Il faudrait dans l’idéal que le DIH discrimine contre toi, du fait que tu n’as pas une bonne cause, que tu es l’agresseur.
L'applicabilité du Jus In Bello pourrait dépendre de la bonté des causes Ad Bellum, à ce moment-là, nous n’aurions plus qu’un simple lien de consécution temporelle, mais nous aurions un lien d’influence mutuelle. Si j’ai une bonne cause, le DIH me permet plus de choses que si j’ai une mauvaise cause. Le DIH ne devrait dans ce cas-là m’accorder un strict minimum.