Fonctions mentales/Analytique

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Analytique
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Chapitre no 4
Leçon : Fonctions mentales
Chap. préc. :Remémoration
Chap. suiv. :Rêve
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L'analytique

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    La fonction analytique construit des formes et des architectures. Je n'ai pas conscience de son intimité opérative, ni de ses sous-produits intermédiaires. Quand je suis éveillé, elle est en servitude, c'est-à-dire qu'elle répond en réaction des sollicitations des autres fonctions mentales, dans le rêve elle est dominante et me montre la pleine puissance de ses pouvoirs.
    Dans le détail, grâce à ses grilles l'analytique construit des catégories qui deviennent des ensembles de sens en y rassemblant et en conservant comme distincts tous les éléments qu'il distingue et en y confondant ceux qu'il ne distingue pas, et à l'inverse il crée du sens en recomposant les éléments qu'il puise dans ces catégories. La puissance de son talent réside dans la richesse de cette distinction, dans l'analyse qu'il en fait, afin qu'elle ne soit pas simplement une différence mais une architecture élémentaire complexe et subtile de qualité et d'opérateurs logiques. Cette distinction fulgurante n'est pas figée mais évolutive, elle est en mesure de progresser au même pas que ses grilles et ainsi, de faire émerger du sens des recoins les plus obscurs du flou et de l'expérience.
    Bergson nous a montré l'importance du rôle de la mémoire dans nos perceptions sensorielles, que nous imaginons beaucoup les choses que nous sommes persuadés de simplement voir et entendre, mais la mémoire est passive elle ne peut produire par elle-même ces phénomènes. C'est l'analytique qui intervient pour relier, assembler, décomposer, recomposer, combiner, structurer tous les produits qui émergent dans ma conscience et pas seulement mes impressions sensorielles. Il ne répond pas seulement aux sollicitations, il réagit automatiquement à tous les éléments qui font ma vie mentale, il structure le sens, tout le sens, en associant tout nouvel élément à ses propres structures. Il est l'architecte de mon champ sémantique. Il enrichit le sens en y associant la richesse de ses propres structures, c'est la raison pour laquelle j'imagine des choses que je ne vois pas mais qui devraient être. Ce n'est pas un imaginaire libre mais le résultat de programmes automatiques précis.
    Je ne peux pas considérer les fonctions sensorielles comme des fonctions mentales, elles sont biochimiques, appartiennent à l'autre monde, celui de la physique, de la terre et des étoiles, et les images qu'elles envoient à ma conscience sont les seules qui m'informent sur ce monde, et ce monde est aussi celui de mon corps, le lieu où se joue ma survie, la préoccupation essentielle de la vie mentale. Heureusement je dispose de sa représentation virtuelle, au sein de ma mémoire. Cette représentation je l'ai héritée des animaux qui nous ont précédés, ce sont eux qui en ont créé les bases, eux qui ont créé ces couleurs magnifiques qui n'existent pas dans la nature et beaucoup d'autres choses. La fonction analytique a développé, étendu cette représentation en créant des catégories, des échelles de qualités, des concepts et des architectures de concepts. Cette représentation de mon environnement physique comme celle de mon corps sont fausses, mais elles sont cohérentes entre elles, et c'est parce qu'elles sont cohérentes qu'elles sont efficaces et qu'elles ont permis à l'humain d'atteindre ce niveau de maîtrise de son environnement.
    L'analytique transforme le sens brut en sens structuré, consolide la mémoire par les liens qu'il crée, noue avec ma mémoire, hors de ma conscience, une relation permanente, assiste la remémoration et répond aux sollicitations croisées de toutes les autres fonctions mentales. L'analytique crée du vrai, il crée du vrai parce que tout ce qu'il crée est conforme avec ses propres structures et ses propres grilles, il crée aussi du paradoxal quand ses chaînes de vrai se contredisent. Il crée mais ne juge pas ce qu'il crée et ce qu'il propose, c'est le jugement arbitraire qui juge la valeur de ce qu'il crée et la direction volontaire qui choisit parmi ses propositions.
    Dans les synergies de veille l'analytique est en servitude, son activité est entravée, soumise à multiples contraintes imposées par les nécessités de la vie éveillée dont il ne doit pas perturber les comportements. Le raisonnement attentif est un processus conscient très lourd dans lequel à chaque étape ses propositions doivent être dirigées par la fonction volontaire, contrôlées en mémoire, validées par l'arbitraire, avant de passer à l'étape suivante. Quand il s'agit seulement de suivre un plan préétabli, répétitif, parfaitement validé à l'avance, selon un plan logique confirmé, c'est beaucoup plus rapide, mais cela rapporte moins. Je m'incline à penser que chez certains autistes qui présentent des fonctions mentales altérées qui n'exercent pas les mêmes contraintes, l'analytique dévoile des capacités cachées extraordinaires qui ne se révèlent d'ordinaire pleinement qu'en état de rêve.
    Du fait de la spécificité de son monde, l'analytique opère selon sa propre logique, plus pratique que formelle. Pour lui, avant d'être un homme Socrate est d'abord flou et parfois paradoxal, Socrate et les éléments qui le composent peuvent faire partie de multiples catégories et de plusieurs complémentarités. Pour lui, la complémentarité est importante car les fonctions mentales qui dominent son monde sont complémentaires. Zéro n'est pas un nombre mais une absence de qualité, et comme pour lui diviser c'est répartir, en pratique l'absence ne lui pose pas de problème. De même, si dans son monde l'indéfini est pourtant présent, ses ensembles sont toujours finis car c'est lui qui les a créés. Enfin, s'il ne juge pas lui-même, il tient compte des jugements de l'arbitraire, aussi que Socrate soit ou non un homme a une valeur insignifiante, sinon aucune, et une question inappropriée puisqu'il revient à Socrate et à lui seul de juger ce qu'il est.