Introduction à la science des matériaux/Annexe/Éléments de chimie

Éléments de chimie pour la corrosion
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Annexe 5
Leçon : Introduction à la science des matériaux

Annexe de niveau 13.

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Répartition des électrons dans la couche de valence

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Cases quantique des atomes de carbone (C), d'hydrogène (H), d'oxygène (O) et d'azote (N).

Nous avons vu précédemment que pour former des molécules, les atomes mettent des électrons en commun. Dans le cas de molécules polaires, l'électron est principalement localisé sur un des deux atomes. La répartition des électrons autour de l'atome a donc de l'importance.

Les électrons se répartissent sur plusieurs couches. La dernière couche, ou couche de valence, contient 4 « cases quantiques », chaque case pouvant contenir deux électrons ; sauf si l'atome n'a qu'une seule couche — cas des atomes d'hydrogène et d'hélium —, la dernière couche est aussi la première, et cette unique couche n'a qu'une seule case. En ce qui concerne les atomes les plus courants en chimie organique, la dernière couche contient :

  • hydrogène (H, Z = 1) : un électron célibataire ;
  • carbone (C, Z = 6) : quatre électrons célibataires ;
  • azote (N, Z = 7) : un doublet non liant, trois électrons célibataires ;
  • oxygène (O, Z = 8) : deux doublets non liants, deux électrons célibataires.

Il n'y a jamais plus de huit électrons sur la dernière couche. Les électrons se placent d’abord dans les cases vides, puis lorsque toutes les cases ont déjà un électron, ils forment des paires.

 
Liaisons simples dans des molécules

La « tendance naturelle » des électrons est de former des paires. Les électrons célibataires d'un atome. cherchent donc à s'apparier avec des électrons célibataires d'autres atomes.

Dans certains cas, les atomes mettent un électron en commun, on a une liaison dite simple :

  • molécule de dihydrogène H2 : chaque atome d'hydrogène met son électron en commun avec l'autre ;
  • molécule d'eau
    Début d’une formule chimique
    H2O
    Fin d’une formule chimique
     : l'atome d'oxygène partage ses deux électrons célibataires avec ceux des atomes d'hydrogène ;
  • molécule d'ammoniac NH3 : l'atome d'azote partage ses trois électrons célibataires avec ceux des atomes d'hydrogène ;
  • molécule de méthane
    Début d’une formule chimique
    CH4
    Fin d’une formule chimique
     : l'atome de carbone partage ses quatre électrons célibataires avec ceux des atomes d'hydrogène ;
  • molécule d'éthane C2H6 : les atomes de carbone mettent en commun un électron célibataire avec l'autre, et ils partagent chacun leurs quatre électrons célibataires avec ceux des atomes d'hydrogène.

On a donc les formules développées suivantes :

dihydrogène : H-H            eau : H-O-H

                H                    H
                |                    |
   ammoniac : H-N        méthane : H-C-H
                |                    |
                H                    H

                H H
                | |
     éthane : H-C-C-H
                | |
                H H


 
Liaisons doubles dans des molécules

Dans certains cas, les atomes mettent deux électrons en commun, on a une liaison dite double :

dioxygène O2 : O=O

dioxyde de carbone

Début d’une formule chimique

CO2

Fin d’une formule chimique

 : O=C=O

                        H    H
                         \  /
éthène (éthylène) C2H4 :  C=C
                         /  \
                        H    H

Dans le cas du monoxyde de carbone CO, un des doublets non-liant de l'oxygène s'est ouvert : un des électrons est allé former une liaison, et l'autre est allé former un doublet non liant avec un électron célibataire du carbone.

 
Liaisons triples dans des molécules

Dans certains cas, les atomes mettent trois électrons en commun, on a une liaison dite triple :

monoxyde de carbone CO : C≡O

diazote

Début d’une formule chimique

N2

Fin d’une formule chimique

 : N≡N

éthyne (acétylène) CH2 : H-C≡C-H

Les liaisons simples sont appelées « liaisons σ » (sigma). Les liaisons doubles et triples sont des liaisons dites π (pi). Ces liaisons sont dites « covalentes », car elles concernent des atomes proches qui mettent en commun leurs électrons de valence (électrons de la dernière couche électronique).

Hybridation et forme des molécules simples

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Forme des orbitales dans l'hybridation sp3

Nous avons vu précédemment [1] [2] que les électrons sont sous forme de nuage autour du noyau. Ces nuages sont appelés « orbitales ».

Lorsque deux atomes se lient par une liaison covalente simple, ils mettent en partage chacun un atome. Les nuages des électrons de ces atomes forment une nouvelle orbitale dite « hybride ». L'hybridation donne une forme particulière au nuage.

Prenons le cas de la molécule de méthane

Début d’une formule chimique

CH4

Fin d’une formule chimique

. Pour des raisons de symétrie, les atomes d'hydrogène sont répartis régulièrement autour de l'atome de carbone, comme s'ils étaient aux sommets d'un tétraèdre centré sur l'atome de carbone. On parle dans ce cas d'hybridation sp3 (lire « S-P-trois »). La forme des orbitales est illustrée dans la vidéo ci-contre.

 
Représentation de Cram de la molécule de méthane
 
Vue en perspective des orbitales sp3 servant de modèle à la représentation de Cram ci-contre

Pour représenter cela, on utilise la représentation de Cram : par rapport au plan de la figure (plan parallèle contenant l'atome de carbone),

  • les liaisons dans le plan sont en trait plein ;
  • les liaisons avec des atomes vers l'avant (vers le lecteur) sont représentées par un triangle noir ;
  • les liaisons vers l'arrière sont représentées par un trait pointillé ou par un triangle hachuré.
 
Forme de la molécule d'ammoniac (notation de Cram)

Les électrons d'un doublet non liant s'hybrident également en orbitale sp3 ; le nuage électronique du doublet a donc la même forme que s'il y avait une liaison.

Dans le cas de l'ammoniac NH3, les atomes d'hydrogène occupent donc les sommets d'un tétraèdre centré sur l'azote, le quatrième sommet étant occupé par le doublet non liant. On a donc une sorte de parapluie.

 
Forme de la molécule d'eau (notation de Cram)

Dans le cas de l'eau

Début d’une formule chimique

H2O

Fin d’une formule chimique

, deux sommets du tétraèdre centré sur l'oxygène sont occupé par des doublet non liant. On a donc une molécule coudée.

 
L'éthylène est une molécule plane.

Une liaison double crée une molécule plane : tous les atomes sont dans le même plan. C'est le cas par exemple de l'éthylène (éthène). Si l’on devait faire une représentation de Cram, on aurait la même chose que la formule éclatée.

Forme et mobilité d'une chaîne carbonée

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Les molécules dites « organiques », et en particulier les polymères, sont composées de nombreux atomes de carbone. Les règles étudiées ci-dessus permettent de comprendre la manière dont la molécule s'organise, et donc sa souplesse ou bien au contraire sa rigidité.

Corrosion

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Électrochimie

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Les oxydes métalliques se rapprochent des molécules polaires. L'atome d'oxygène a une plus grande affinité avec les électrons que les atomes métalliques (notion d'électronégativité). Il en résulte que le cristal d'oxyde est quasiment un cristal ionique :

  • oxyde d'aluminium (alumine) : Al2O3 ≃ (2Al3+, 3O2-) ;
  • oxyde de cuivre (oxyde cuivreux) : Cu2O ≃ (2Cu+, O2-) ;
  • oxyde de fer (hématite) : Fe2O3 ≃ (2Fe3+, 3O2-).

Les oxydes sont donc des cristaux quasi-ioniques. De manière générale, on notera M un métal quelconque et MO ≃ (M2+, O2-) son oxyde.

Lors de la réduction d'un minerai ou de l'oxydation d'un métal, il y a donc un échange d'électrons qui se produit. Par exemple, la réduction de l'oxyde de fer par le monoxyde de carbone

(2Fe3+, 3O2-) + 3CO → 2Fe + 3
Début d’une formule chimique
CO2
Fin d’une formule chimique

peut s'écrire en deux demi-réactions :

O2- + CO →
Début d’une formule chimique
CO2
Fin d’une formule chimique
+ 2e- : l'ion oxygène cède des électrons ;
Fe3+ + 3e- → Fe : l'ion fer prend des électrons.

Il y a donc un passage d'un mini courant électrique entre les espèces.

À l'inverse, l'oxydation du fer métallique (rouille)

2Fe + 3O2 → (2Fe3+, 3O2-)

peut s'écrire

Fe → Fe3+ + 3e- : le fer cède des électrons ;
O2 + 4e- → 2O2- : le dioxygène prend des électrons.

On définit les termes suivants :


Lors de la réaction chimique, l'oxydant est réduit et le réducteur est oxydé. On parle de réaction d'oxydo-réduction, ou réaction rédox.

On voit tout de suite que la notion d'oxydation ne fait pas intervenir l'oxygène. De fait, l'oxygène n’est pas le seul oxydant, loin s'en faut, de même que le monoxyde de carbone n’est pas le seul réducteur.

 
Principe de la pile de Volta

Dans les exemples ci-dessus, le passage de courant électrique se fait entre les atomes voisins. Mains on peut séparer les lieux où se font les réactions pour créer un courant électrique dans un fil ; c’est le principe de la pile électrique. Par exemple, pour la pile de Volta (1800), on a des disques de zinc (Zn) et de cuivre (Cu) séparés par des tampons imbibés de saumure (eau salée), avec les réactions suivantes :

sur le disque de zinc : Zn → Zn2+ + 2e- (oxydation du zinc) ;
sur le disque de cuivre : 2
Début d’une formule chimique
H2O
Fin d’une formule chimique
+ 2e- → H2 + 2OH- (réduction de l'eau).

On voit que le cuivre ne réagit pas en lui-même, il sert juste de support à la réduction de l'eau ; pourtant, sa présence est indispensable. Le courant électrique circule entre le zinc et le cuivre, et l’on a un dégagement de dihydrogène (gaz).

Ici, l'oxydant est l'eau, et le réducteur est le zinc

Réactions acido-basiques

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Autoprotolyse de l'eau

L'eau est composée de molécules

Début d’une formule chimique

H2O

Fin d’une formule chimique

. Sous l'effet de l'agitation thermique, il y a en permanence des chocs entre molécules qui créent des ions H+[1] et HO-[2], et à l'inverse des rencontres d'ions qui se recombinent en eau :

Début d’une formule chimique
H2O
Fin d’une formule chimique
⇄ H+ + HO-

Cette réaction est appelée « autoprotolyse de l'eau ». Par défaut, il y a autant d'ions H+ que d'ions HO-, l'eau est dite « neutre ». Mais la présence d'autres espèces ionique peut perturber cet équilibre :

  • s'il y a plus d'ions H+, on parle de solution acide ;
  • s'il y a plus d'ions HO-, on parle de solution basique ou alcaline.

L'acidité ou la basicité est mesurée par le potentiel hydrogène pH qui est un nombre entre 1 et 14 :

  • pH < 7 : solution acide ;
  • pH = 7 : solution neutre ;
  • pH > 7 : solution basique, alcaline.

Ces ions ont une importance capitale pour la corrosion aqueuse.

Dissolution acide

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Les métaux peuvent s'oxyder dans l'eau sous l'effet du dioxygène dissout dans l'eau (celui qui permet aux poissons de respirer), mais aussi sous l'effet des molécules d'eau et des différents ions. Le principal oxydant est l'ion H+ :

M + 2H+ → M2+ + H2

l'ion métallique M2+ se dissout dans l'eau tandis que l’on a un dégagement de dihydrogène gazeux. Cet ion métallique peut se recombiner avec n’importe quel anion dissout dans l'eau, par exemple :

M2+ + 2HO- → M(OH)2, il se forme un hydroxyde métallique ;
M2+ + CO32- → MCO3, carbonate métallique ;
M2+ + 2Cl- → MCl2, chlorure métallique ;

Ainsi, les métaux ont tendance à se dissoudre dans l'eau, et en particulier dans les acides. On constate par exemple que dans une cuisine, les pièces métallique du placard contenant la bouteille de vinaigre rouillent plus vite que le reste. La présence de certains ions, en particulier des ions chlorure Cl-, aggrave ce phénomène, ce qui fait que l'eau de mer est beaucoup plus agressive que l'eau pure.

Potentiel de corrosion, passivation

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Par ailleurs, lorsque l’on met deux métaux différents en contact, ou bien reliés par un fil électrique, il se produit un phénomène de pile. Pour mesurer ce phénomène, on mesure la tension électrique E0 (en volts V) entre un métal et une électrode de référence plongée dans le même récipient ; cette tension s’appelle « potentiel d'oxydo-réduction » (ou potentiel rédox). On peut ainsi classer les paires oxydant/réducteur en fonction du potentiel d'oxydo-réduction.

Exemples de potentiels standards d'oxydo-réduction
Oxydant E0 (V) Réducteur
Ag2+ +1,98 Ag
Au2+ +1,83 Au
Au3+ +1,52 Au
Ag+ +0,80 Ag
Cu2+ +0,52 Cu
Cu2+ +0,34 Cu
H+ 0,00 H2 (g)
Pb2+ -0,13 Pb
Sn2+ -0,14 Sn
Ni2+ -0,26 Ni
Fe2+ -0,44 Fe
Cr3+ -0,74 Cr
Zn2+ -0,76 Zn
Ti2+ -1,63 Ti
Al3+ -1,66 Al
Mg2+ -2,37 Mg

Les valeurs sont données pour de l'eau pure à température normale (20 °C) et varient selon la composition de l'eau et sa température. Plus un métal a un potentiel élevé (haut du tableau), moins il risque de se corroder. On place toujours le potentiel 0, correspondant au dégagement de dihydrogène dans l'électrolyse de l'eau, comme comparaison. Les métaux ayant un potentiel positif sont naturellement protégés contre la corrosion d'ans l'eau pure ; c’est en particulier le cas des métaux nobles (argent, or).

Mais on remarque que des métaux réputés inaltérables sont dans le bas du tableau, en particulier titane, aluminium et chrome. En effet, dans ces cas-là, il se produit une oxydation très rapide, mais la couche d'oxyde formée crée une barrière qui isole le métal de l'eau et empêche la corrosion : on parle de couche passive, de passivation. L'approche ci-dessus ne suffit donc pas.

Corrosion galvanique, protection cathodique

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Le phénomène de pile décrit ci-dessus a une autre conséquence : pour les deux métaux mis en contact dans l'eau :

  • celui ayant le potentiel standard le plus faible s'oxyde ;
  • celui ayant le potentiel standard le plus élevé est au contraire protégé.

Le métal qui s'oxyde subit une corrosion dite galvanique ; l'autre métal subit une protection cathodique.

En fait, le phénomène est plus complexe, et il ne suffit pas de classer les métaux par potentiel standard. Au lieu de cela, on définit une série galvanique, qui classe les métaux du plus noble au moins noble :

Au > Ag > Ti > acier inox > bronzes, laitons > Cr > Ni > Cu > acier, fonte > Pb > Sn > Al > Zn > Mg

si deux métaux sont mis en contact, le plus noble est protégé et le moins noble est corrodé.

Il faut être conscient de ce problème et éviter de mettre en contact deux métaux différents sous peine d’en voir un se corroder très rapidement. Mais c’est aussi un moyen de protéger un métal : on le met en contact avec une masse métallique appelée « électrode sacrificielle » qui va se corroder rapidement mais protéger le métal. On utilise en génénral une électrode de zinc ou de magnésium.

Par ailleurs, si on impose une différence de potentiel avec une électrode plongée dans l'eau, on « simuler » le contact avec un autre métal et ainsi protéger le métal. C'est la protection par courant imposé.

On a donc deux moyen de faire une protection cathodique :

  • par électrode sacrificielle ;
  • par courant imposé.

Ce procédé rentre dans la catégorie « protection par modification des conditions thermodynamiques et cinétiques de la réaction ».

  1. en fait, l'ion H+ ne reste pas tout seul mais se fixe sur une molécule d'eau pour former un ion hydronium H3O<+, mais l'écriture H+ est plus simple pour nous et nous suffit
  2. pour des raisons pédagogiques, l'ion hydroxyle est maintenant noté HO-, ce qui met en évidence le fait que la charge négative est portée par l'oxygène ; toutefois, la plupart des sources utilisent encore l'ancienne écriture OH-, ce qui est également tout à fait correct