Le développement. Histoire d'une croyance occidentale
- Auteur : Gilbert Rist
- Année : 2013
- Titre : Le développement. Histoire d'une croyance occidentale
- Pages : 512
- ISBN : 978-2724612790
Résumé
modifierDéfinition
modifierLes métamorphoses d'un mythe occidental
modifierUne métaphore est un processus mental par lequel on remplace une idée ou un fait par une image, permettant de mieux comprendre. Le choix du terme développement est une métaphore d'un phénomène humain, ramené au processus biologique de développement (graine, enfant, etc.). C'est une naturalisation de l'histoire, qui retire l'aspect socio-historique pour dépeindre le phénomène. Ainsi, devenu naturel, celui-ci a 4 caractéristiques :
- directionnalité : le développement va dans une direction, qui est la bonne direction
- continuité : les choses changent d'aspect, mais pas de nature
- cumulativité : chaque nouvelle étape dépend de la précédente
- irréversibilité : on ne peut pas régresser dans le développement
Dans l'épistémologie grecque, l'étude est partagée entre les sciences , qui s'intéressent aux liens de causalités, et l'histoire, qui s'intéresse à ce qui est accidentel, à ce qui sort de la norme. Ainsi, la science est liée à la nature, qui eelle-mêmeest liée étymologiquement à la nature.
Les prémices de la mondialisation
modifierL'invention du développement
modifierLa fin de seconde guerre mondiale laisse l'URSS et les USA aux commandes du monde, à la place des empires coloniaux européens. Les camps de concentration donnent un exemple des effets de la haine raciale.
Le point IV du discours d'investiture du Président Truman (USA) propose d'étendre l'aide que proposent les USA à plus de pays, et constitue un acte fondateur de l'aide au développement.
La mise en place de la doctrine et des institutions internationales
modifierLa modernisation, entre histoire et prophétie
modifierCe chapitre interroge l'approche historique du développement proposée par Rostow dans son livre sur les étapes du développement[1].
Dans un premier temps, il interroge le contenu du livre. D'abord, il remet en cause la pertinence des arguments pour chacune des étapes du développement. Trois problèmes se posent : l'inévitable réinvention du passé lorsque celui ci est interprété; l'omission dans la notion de progrès de tout ce qui a été perdu dans le processus; et la définition floue du stade final.
Dans un second temps, l'auteur analyse le processus de pensée de Rostow, en le comparant à la doctrine communiste et aux écrits de Marx. Il indique que les arguments de Rostow se rapprochent de ceux de Marx, tant dans les arguments que dans les "erreurs".
Dans une troisième partie, l'auteur présente les voix divergentes de deux auteurs : François Perroux et Dudley Seers. Le premier est un économiste français, qui analyse les rapports de force entre les nations effectives et les nations apparentes, et qui rendent impossible la libération de la colonisation, même une fois la décolonisation terminée. Le second est un spécialiste anglais du développement. Pour lui, les économistes échouent à créer des lois, car ils se basent sur le système économique dans lequel ils ont vécu; il faut que l'économie soit l'étude des économies, et non l'étude des modèles économiques.
On notera que l'auteur indique dans le préambule du chapitre vouloir s'intéresser non au texte mais à la réception du texte et aux effets que celui-ci a eu, mais se livre dans une analyse littéraire plus que socio-politique.
Les périphéries et l'étude de l'histoire
modifierL'autonomie sociale : le passé commun comme modèle de l'avenir
modifierCe chapitre traite de la self-reliance, concept de développement autonome développé en Tanzanie à travers la déclaration d'Arusha (1967).
L'autosuffisance villageoise avait déjà été développée ailleurs. En Inde, Gandhi prône le principe du swadeshi (autonomie) et du sarvodaya (amélioration des conditions). En Chine, Mao prône la capacité du peuple à enclencher son propre développement.
La Tanzanie a été dominé par des puissance étrangères, notamment allemande et britannique. Le Royaume-Uni est à l'origine de 44% de l'aide extérieure en 1965. Dans ce contexte, la recherche d'une autonomie politique et économique est importante. En 1967, la déclaration d'Arusha pose dans des termes très simples les grands principes d'une autonomie basée sur un rejet du développement à l'occidentale, le respect des droits fondamentaux, une organisation en villages autonomes, un dur labeur et une sobriété consentie.
Cette expérience a été un échec. L'utilisation de valeurs traditionnelles va à l'encontre de la tentative de modernisation de l'agriculture. L'imposition de valeurs et de la décentralisation par un homme unique se heurte aux volontés d'enrichissement des politiques locaux. L'intérêt qu'apporte cette démarche aux fonds de développement génère un afflux d'aide internationale, qui entraine une forme de "domination par le don".
Pour autant, cet échec doit être mis en perspective d'autres théories de développement, notamment celle de Rostow, qui ne donne pas de meilleurs résultats. Il faut aussi rappeler le cas de ceux qui ont choisi de vivre en marge de la société, dans des schémas de vie plus frugaux.
Le triomphe du tiers-mondisme
modifierL'environnement ou la nouvelle nature du "développement"
modifierDans ce chapitre, l'auteur déplore le fait que la notion de développement, qu'il considère incompatible avec la durabilité, lui soit attaché, dans une oxymore.
Dans un premier temps, il parle du tiers-mondisme, concept qui défend la position des pays du tiers-monde et une responsabilité des pays du Nord dans les problèmes touchant les pays du Sud.
Ensuite, il présente le rapport Bruntland. Celui-ci introduit la notion de développement durable. Cependant, l'auteur émet des critiques : le texte serait formulé de manière trop vague, englobant par défaut un "nous" peu clair, et ne mettant pas d'opposition claire entre développement et environnement.
Enfin, il traite du sommet de la Terre à Rio (1992), conférence internationale réunissant plus d'une centaine de chefs d'États. L'auteur déplore qu'après les négociations, les mesures ont été vidées de leur sens. Cependant, cet événement a permis une prise de conscience et une plus grande visibilité.
Le mélange du réalisme et des bons sentiments
modifierLa globalisation comme simulacre du "développement"
modifierDe la lutte contre la pauvreté aux Objectifs du millénaire pour le développement
modifierCe chapitre traite de la lutte mondiale pour contre la pauvreté, menée par les organisations internationales, notamment l'ONU, dans le cadre des objectifs du millénaire pour le développement et en s'appuyant sur la croissance économique. L'auteur y développe une pensée très critique du fonctionnement de l'aide au développement, spécifiquement en pointant la construction sociale du problème de la pauvreté, les méthodes employées, et la communication de ces agences.
Dans un premier temps, l'auteur développe la construction sociale à l'origine du problème de la pauvreté. Historique, la lutte contre la pauvreté se fait de 3 manières : la charité, des plus riches aux plus pauvres; l'enfermement des pauvres par peur de troubles sociaux, et l'utilisation des pauvres comme force de travail, en échange des secours accordés. La pauvreté n'existe pas en soi; elle n'existe qu'en creux de la richesse. Ainsi, le problème de la pauvreté est avant tout un problème de rapports sociaux entre deux groupes antagonistes. Par ailleurs, la définition de la pauvreté dépend de l'univers conceptuel dans lequel elle est construite, et n'est pas forcément liée qu'à une question de revenus (pauvreté sociale, ...).
Dans un second temps, il dénonce la méthode d'intervention des agences internationales. Celle-ci se fait en intégrant le plus possible les pauvres dans le système de marchés, avec des actions qui comprennent des pans toujours plus étendus de la vie sociale. Les objectifs du millénaires pour le développement incarnent des valeurs universelles, excluant toute controverse, mais sont mis en place à travers des programmes qui soulèvent plus de questions. En particulier, "le découpage du développement en une série d'objectifs distincts paralyse la réflexion et empêche de mettre en évidence leurs rapports systémiques".
Enfin, il déplore des "chiffres trompeurs". La méthode de calcul employée fait croire à une augmentation, mais en retirant tout ce qui n'est pas directement de l'aide au développement sur le terrain, il y a une stagnation.
Le grand retournement ?
modifierAu-delà du "développement"
modifierCommentaires
modifierPrésentation
modifierConstruction
modifierIdée directrice
modifierÉléments de développement
modifierConclusion
modifierCitations
modifier« Nos ressources en connaissance technique - qui, physiquement, ne pèsent rien - ne cessent de croître et sont inépuisables. Je crois que nous devrions mettre à la disposition des peuples pacifiques les avantages de notre réserve de connaissance techniques afin de les aider à réaliser la vie meilleure à laquelle ils aspirent. »
— Harry Truman, Discours d'investiture, 1948
« Ainsi, la critique de Seers remettait trop de choses en question pour être entendue. Pour protéger sa crédibilité, la corporation des économistes préféra le silence au débat, l’oubli à la controverse. Mais le problème était posé et, à bien des égards, il continue de l’être : rares sont en effet les économistes qui, cinquante ans plus tard, ont véritablement conscience des limites qu’impose à leur « science » son origine occidentale. »
— Chapitre 6, Gilbert Rist
Dans cette deuxième citation, issue du chapitre 6, l'auteur montre la difficulté à remettre en cause le système de pensées dans lequel on évolue.
Notes
modifier- ↑ Rostow, Walt Whitman., Stages of Economic Growth : a Non-Communist Manifesto (ISBN 978-1-83974-421-1 et 1-83974-421-9) (OCLC 1178939852) [lire en ligne]