Métallurgie générale/Les fontes

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Comme indiqué précédemment, les fontes sont des alliage fer/carbone se trouvant dans la zone d'influence de la phase eutectique, appelée lédéburite (4,30 %C) dans le diagramme habituel métastable (diagramme à cémentite). Il s'agit d'alliages contenant entre 2,11 et 6,67 % de carbone. Contrairement aux acier, on ne peut pas obtenir d'austénitisation complète à haute température ; lors d'une coulée, il se forme de la cémentite — ou du graphite, nous le verrons plus tard — avant la solidification complète.

Les fontes
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Chapitre no 5
Leçon : Métallurgie générale
Chap. préc. :Les aciers III - traitements de surface
Chap. suiv. :Le cuivre et ses alliages
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Le terme « fonte » est parfois utilisé pour désigner des objets moulés, comme par exemple dans l’expression « fonte d'aluminium » (en général de l'alpax). Il s'agit d'un abus de langage.

La fabrication de la fonte a été décrite au chapitre concernant l'élaboration de l'acier. La fonte est une étape intermédiaire dans la fabrication de l'acier à partir du minerai, on parle alors de fonte brute (pig iron) ou fonte de première fusion. Une partie de cette fonte peut être coulée spécifiquement pour être utilisée en tant que telle, on parle alors de fonte élaborée (cast iron) ou de fonte de seconde fusion. On peut synthétiser de la fonte élaborée par fusion d'acier non allié et de graphite.

Diagramme binaire fer-carbone

Propriétés générales

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Les fontes ont une température de fusion relativement basse (eutexie). Par ailleurs, elles ont une bonne coulabilité (elles sont bien fluides) et présentent un faible retrait lors de la solidification. Ce sont dès lors des alliages de choix pour la réalisation de pièces coulées à faible coût de matière.

Les types de fonte

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Diagramme fer-carbone à cémentite (trait plein) et à graphite (traits pointillés)

Le diagramme fer-carbone classique est en fait un diagramme hors équilibre. En effet, la forme la plus stable du carbone dans le fer est le graphite (carbone pur). Cependant, pour former des précipités de graphite, il faut une forte concentration de carbone, il faut donc que le refroidissement soit suffisamment lent pour que le carbone puisse diffuser et se concentrer. Dans la pratique, il se forme avant des carbures Fe3C appelés cémentite, et ce sont ces carbures qui restent figés de manière métastable dans les aciers et les fontes, la transformation

Fe3C → 3Fe + Cgraphite

étant très lente.

Cependant, dans le cas des fontes, la quantité de carbone est plus importante, et l'ajout d'éléments d'alliages graphitisants (cuivre, nickel, silicium) permet de faire précipiter du graphite ; à l'inverse, le manganèse est antigraphitisant. On distingue donc :

  • les fontes à cémentite, dites fontes blanches (white cast iron) ;
  • les fontes à graphite, dites fontes grises (grey cast iron) ;
  • les fontes truitées (mottled cast iron), partiellement blanches, partiellement grises (fontes blanches à lamelles de graphite).

Le diagramme fer-carbone d'équilibre, à graphite, est légèrement différent du diagramme fer-carbone métastable, à cémentite.

Historiquement, l'appellation fonte blanche / grise provient de l'aspect de la cassure.

Fonte blanches

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Germination des phases de la fonte blanche à partir du liquide au cours du refroidissement ; fonte hypo- et hypereutectique

La cémentite est un carbure, dur et fragile. Les fontes blanches (FB) sont donc dures, fragiles, résistantes au frottement et à l’abrasion, et ont une bonne tenue à haute température. Elles sont difficilement usinables.

Dans le cas d'une fonte hypoeutectique, au cours du refroidissement, il se forme d’abord de l'austénite dendritique, puis de la lédéburite. La lédéburite est un eutectique globulaire, formé à haute température d'une matrice de cémentite et de globules d'austénite à 2,11 % de carbone (eutectoïde).

Lorsque le refroidissement se poursuit, l'austénite se transforme en perlite, mais la morphologie des grains d'austénite (dendritiques et globulaires) se conserve lors de cette transformation.

Dans le cas d'une fonte hypereutectique, il se forme d’abord des plaquettes de cémentite, puis de la lédéburite. La structure globulaire de l'austénite eutectique se conserve lors de la transformation austénite → perlite.

Les fontes blanches sont utilisées pour leur aspect esthétique (pièces d'aspect, fonderie d'art), mais aussi pour leur grande dureté et leur résistance à l'abrasion : boulets de broyeurs, mâchoires de concasseurs, plaques d'usure.

Fontes grises

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Solidification d'une fonte grise hypoeutectique

Les fontes grises (FG) sont donc des fontes alliées (Cu, Ni, Si). Le graphite est un matériau tendre et qui est un lubrifiant solide. Les fontes grises sont fragiles, usinables, et ont des bonnes propriétés d'absorption des vibrations. Le graphite étant du carbone pur, il représente une très faible proportion massique de l'alliage : la faible quantité de carbone dans la fonte (moins de 6,67 %) ne permet pas de former beaucoup de graphite. Toutefois, la masse volumique du graphite étant très faible (env. 2 kg/dm3), cela peut représenter une fraction volumique importante (plus de 10 % du volume).

Le graphite précipite habituellement sous forme de paillettes, ou lamelles, notamment en raison de la présence d'impuretés, en particulier du soufre ; on parle de fonte à graphite lamellaire (FGL).

Prenons le cas de la solidification d'une fonte grise hypoeutectique. La solidification se fait d’abord sur le diagramme d'équilibre (trait vert) :

  • germination et croissance de grains d'austénite dendritiques dans le liquide ;
  • arrivé à 1 153 °C, germination et croissance de l'eutectique formé de graphite lamellaire et d'austénite à 2,03 % ;
  • une fois la solidification finie, croissance des lamelles de graphite par appauvrissement en carbone de l'austénite.

À partir d'une certaine température dépendant de la vitesse de refroidissement et des éléments d'alliage, on passe sur le diagramme métastable (trait rouge) : les lamelles de graphite n'évoluent plus et restent telles quelles, et l'austénite se transforme comme un acier hypereutectoïde :

  • germination et croissance de cémentite aux joints de grain de l'austénite ;
  • à 727 °C, transformation de l'austénite en perlite (eutectoïde).

En jouant sur les conditions de refroidissement, on peut faire varier la température à laquelle on change de diagramme, et donc la proportion de graphite, pour un même alliage.

 
Micrographie d'une fonte à graphite sphéroïdal (EN-GJS-400-15)

On peut ajouter des éléments d'alliages piégeant le soufre, en général des terres rares, ce qui permet au graphite de précipiter sous forme de particules sphériques ; on parle de fonte à graphite sphéroïdal (FGS). L'absence de lamelles supprime des concentrations de contrainte qui sont une source de fragilité ; on a donc une fonte ductile, malléable.

Dans le cas des FGS peu alliée, la résistance à la traction est proportionnelle au taux de perlite :

  • % perlite (100 % ferrite) : Rm = 400 MPa (EN-GJS 400-15, EN-GJS 400-18) ;
  • 50 % perlite (50 % ferrite) : Rm = 500 MPa (EN-GJS 500-7) ;
  • 100 % perlite (0 % ferrite) : Rm = 700 MPa (EN-GJS 700-2).

Fontes malléables à cœur blanc ou noir

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On peut aussi obtenir une fonte malléable à partir de fonte blanche par traitement thermique :

  • recuit graphitisant : vers 900 ou 1 000 °C pendant 6 à 12 h, la cémentite se décompose en austénite et nodules de graphite (passage sur le diagramme stable), puis lors du refroidissement lent (15 h), l'austénite se décompose en ferrite et graphite (eutectoïde) ; on parle de fonte malléable à cœur noir (MN) ;
  • recuit décarburant : vers 1 050 °C pendant 100 h en présence de dioxygène, on parle de fonte malléable à cœur blanc (MB) ; le traitement n'est adapté qu'aux petites pièces.

On distingue donc :

  • les fontes blanches (FB) : absence de graphite (le carbone est sous forme de carbure) principalement utilisées pour les pièces d'usures ;
  • les fontes malléable (FM) : recuit de graphitisation sur une fonte blanche : le principal intérêt est une plus grande soudabilité par rapport aux autres fontes ;
  • les fontes à graphite lamellaire (FGL) : elles présentent une fragilisation par concentration de contrainte (effet d’entaille en raison de la forme des précipités) ; elles sont surtout utilisées pour les bâtis de machine (grande stabilité dimensionnelle, absorption des vibrations), les tuyaux de dimensions importantes (conduites d'égout), les contrepoids, les chauffages et les plaques et inserts de cheminée ;
  • les fontes à graphite sphéroïdal (FGS) : elles sont ductiles, on les appelle d'ailleurs également « fontes ductiles » , et facilement soudables ; elles sont utilisées pour les automobiles (bras de suspension, tambours de frein, arbre à cames, vilebrequin) et les canalisations ;
  • les fontes à graphite vermiculaire (FGV), la forme du graphite étant entre la lamelle et la sphère, en utilisant des teneurs en éléments d'alliages (nodulisant tels que Mg ou Ce) moins importantes que pour les FGS ; cela permet d’avoir les propriétés de la FGL (stabilité, absorption) sans sa fragilité.

Traitements thermiques

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Nous avons déjà évoqué les traitements de graphitisation et de ferritisation (austénitisation et refroidissement lent pour rester sur le diagramme stable). La température de traitement dépend de la structure ; si on veut ferritiser une fonte :

  • le traitement se fera à une température proche de 700 °C pour une fonte ne contenant pas de carbure ;
  • en présence de carbure il faudra prévoir un traitement à deux paliers : un premier palier vers 920 °C pour éliminer les carbures (Fe3C → 3Fe + C) et un second palier de ferritisation vers 700 °C.

On peut pratiquer d'autres traitements thermiques.

Les pièces étant moulées, il en résulte des contraintes dues aux formes complexes et à la différence de vitesse de refroidissement d'un endroit à l'autre. Pour les pièces nécessitant une grande stabilité dimensionnelle (bâti de machine), on effectue un recuit de relaxation vers 500-600 °C.

La globulisation est un traitement visant à une coalescence de la cémentite pour obtenir une perlite globulaire, la température de traitement est proche de la température de l'eutectoïde.

La matrice de la fonte étant de l'acier, on peut aussi effectuer une trempe pour obtenir une matrice martensitique ou bainitique. Ce procédé est toutefois exclu pour les fontes à graphite lamellaire en raison des concentrations de contrainte. Des traitements de surface pour durcir la surface peuvent cependant être réalisés : trempe de surface par induction ou à l'aide d'un chalumeau.

Éléments d'alliage

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Comme pour les aciers, on peut utiliser des éléments alphagènes ou gammagènes selon la structure désirée après traitement thermique. Nous avons également évoqué les éléments graphitisants et antigraphitisants.

L'élément le plus important est le silicium, utilisé à des teneurs supérieures à 3 %. Du fait de son pouvoir graphitisant, c’est l'élément de base des fontes grises. Par ailleurs, il améliore la résistance à la corrosion.

Le cuivre et le nickel étant gammagènes, ils contribuent à l'affinement de la perlite. Ils sont également graphitisants. Ils augmentent la dureté et la résistance à l'usure.

Le chrome est au contraire un antigraphitisant : il stabilise les carbures et retarde donc leur décomposition.

Le molybdène modifie la cinétique de transformation austénite → perlite, et améliore la résistance aux chocs thermiques.

L'aluminium peut être utilisé comme graphitisant, il permet alors un traitement de nitruration et de trempe superficielle de la fonte (moules de verrerie, disques de frein).

Les fontes fortement alliées permettent d’avoir des fontes ferritiques ou austénitiques avec des propriétés particulières : faible dilatation, bonne résilience, bonne résistance à la corrosion, …

Désignation normalisée

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La désignation européenne EN 1560 commence par EN-GJ (la lettre G désignant un métal moulé, comme pour les aciers, et le J désignant le fer) :

  • EN-GJN : fonte blanche (no graphite) ;
  • EN-GJL : fonte à graphite lamellaire ;
  • EN-GJS : fonte à graphite sphéroïdal ;
  • EN-GJV : fonte à graphite vermiculaire ;
  • EN-GJMW : fonte malléable à cœur blanc (white) ;
  • EN-GJMB : fonte malléable à cœur noir (black).

On ajoute la résistance à la traction Rm en MPa, et éventuellement allongement à la rupture A%, par exemple :

EN-GJS-400-18 : fonte à graphite sphéroïdal de résistance à la traction 400 MPa et présentant un allongement à la rupture de 18 %.

Pour les fontes alliées, on peut utiliser la même désignation que les aciers fortement alliés, par exemple :

X300CrNiSi9-5-2 est une fonte à environ 3 % de carbone, 9 % de chrome, 5 % de nickel et 2 % de silicium.

L'ancienne norme française (NF A 32-xxx) utilisait les préfixes

  • pour les fontes grises non alliées (graphite lamellaire), le préfixe Ft suivi de la résistance à la traction en kgf/mm2, ou bien le préfixe FGL suivi de Rm en MPa par exemple :
    Ft 10 = EN-GJL-100 ;
    FGL 150 = EN-GJL-150 ;
  • pour les fontes à graphite sphéroïdal : FGS, MB ou MN suivie de la résistance à la traction en MPa et éventuellement de l'allongement à la rupture en %, par exemple :
    FGS 370-17 = EN-GJS-370-17.

Voir aussi

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