Méthodes d'éducation physique en Europe aux XIX° et XX° siècles/La gymnastique suèdoise
Ling
modifierPer Henrik Ling (1776-1839), un écrivain et philosophe suèdois, est alarmé par la prolifération des victimes de la phtisie et de l'alcoolisme au sein du peuple. Rééduqué d'une blessure au bras par Franz Nachtegall - disciple de Basedöw – par l'escrime et la gymnastique, il se consacre dès 1804 à l'étude de l'anatomie et de la physiologie pour rationaliser ces pratiques. Ce travail l'amène à différencier quatre domaines en gymnastique :
- la gymnastique pédagogique ou de formation,
- la gymnastique médicale,
- la gymnastique militaire,
- la gymnastique artistique.
Il se consacre aux deux premiers qu’il définit comme une science véritable où l'on apprend à immobiliser son corps dans une position de départ pour un mouvement codifié, analytique, applicable à tous en vue d'un effet précis sur une grande fonction de la vie qu'il ne doit pas violenter. Il s’agit alors de redresser les corps pour donner aux poumons la place nécessaire à leur développement. A cette fin le mouvement est un médicament homéopathique à maîtriser et doser avec rigueur : la correction d'abord, la difficulté progressive ensuite. Son travail retient l'intérêt du prince Bernadotte qui le charge en 1813 de la création d'un Institut royal de gymnastique à Stockholm. Ling y poursuit des recherches publiées après son décès par ses collaborateurs, dont son fils Haljmar, et y développe une méthode fondée sur les exercices suivants :
- exercices combinés des bras et des jambes,
- exercices d'extension dorsale,
- exercices de suspension et d'appui, entrecoupés de dérivatifs composés de marches et de courses,
- exercices de musculation abdominale et de sauts,
- exercices d'éducation respiratoire.
Autres influences
modifierJusqu’aux débuts du XXe siècle ces travaux évoluent sous trois influences :
- celle du turnen allemand dont la concurrence plus ludique oblige l'Institut de Stockholm à introduire des formes jouées, le rythme et la musique.
- celle des finlandaises Elin Falk et Elli Bjorkstein. Celles-ci insistent sur le relâchement et la fixation du bassin. Cette recherche, qui inspire l'allemand Medau provoque un nouvel élan en Suède où la gymnastique volontaire apparaît en 1904.
- celle du danois Niels Buckh (1888-1950) qui fonde en 1919 un institut de cadres pour la prévention de l'arthrose agraire, véritable fléau national. Il use d’assouplissements extrêmes et d’une musculation très dynamique à partir de positions localisantes communes pour augmenter le rythme et l'aspect quantitatif de la leçon. Il adjoint également aux exercices de suspension des porters et des exercices acrobatiques (au sol, plinth et table de saut).
La néo-suédois
modifierAlors que les équipes de démonstration de Niels Bickh font la promotion des méthodes nordiques à travers le monde, le major Thulin (1875-1958) assure la synthèse des diverses influences. La néo-suédoise qui en découle vise à assurer une station correcte, la mobilité articulaire et un jeu respiratoire normal en associant aux exercices construits des exercices d'application à dominante acrobatique. Chaque exercice part d'une position localisante pour cet exercice précis ne permettant pas la moindre compensation avec les débutants ; il importe cependant de passer ensuite progressivement à une localisation volontaire efficace dans des attitudes proches de la station droite.
La qualité de celle-ci se vérifie le long d'un plan vertical (mur) : occiput, omoplates, fessiers, mollets et talons doivent entrer en contact avec celui-ci. Toute difficulté rencontrée dénonce alors un trouble statique du bassin ou de la colonne vertébrale qui prend souvent son origine dans une anomalie des membres inférieurs (hypotonie, asymétrie...). L'analyse permet d'en préciser l'origine, la gravité et le traitement
Le matériel annexe qui constitue l'équipement type du gymnase nordique complète le dispositif pédagogique :
- le banc suédois permet certaines localisations et des exercices d'équilibre et de porter,
- l'espalier ou le cadre pour les exercices de suspension,
- la bôme pour les exercices d'appui et de suspension,
- les engins de franchissement (plinth, buck, table) pour les exercices de saut et d'acrobatie,
- enfin, il convient d'y ajouter le matériel léger souvent emprunté aux allemands (massues, cordelettes, balles lestées, medecine ball) pour les lancers et la rééducation de l'attitude.
L’introduction en France de cette méthode est due aux mécanothérapeuthes et au corps médical sous l'action militante de Philippe Tissié (1852-1935) qui découvre et adopte les fondements biologiques de la méthode à la suite d’une mission en Suède. Afin de contrebalancer l’influence d'Hébert et de l' école de Joinville il est à l'origine à partir de 1927 des Instituts régionaux d’éducation physique (IREP) annexés aux facultés de médecine.