Psychologie positive/Interventions et stratégies en psychologie positive

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Interventions et stratégies en psychologie positive
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Chapitre no 12
Leçon : Psychologie positive
Chap. préc. :Psychologie positive et neurosciences
Chap. suiv. :Démarche scientifique : les outils
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Introduction

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Il est difficile de déterminer la date de la première intervention en psychologie positive dans la mesure où cela dépend de la définition de la psychologie positive sur laquelle on se base et au vu de la façon dont elle a évolué au cours du temps. Toutefois, on s’accorde sur le fait que les racines de la psychologie positive émanent des travaux de William James relatifs à la religion et la psychologie, et que ces derniers datent du début du 20ème siècle.

De nombreux auteurs ont contribué tant à l’élaboration qu’à la mise en œuvre des interventions en psychologie positive, dont les principaux sont :
– Martin Seligman : Il est le fondateur de la psychologie positive et a développé l’approche basée sur la thérapie de la pleine conscience permettant de renforcer les forces positives et les ressources individuelles afin d’améliorer le bien-être et la satisfaction de vie des individus.
– Fredrickson : Elle s’est focalisée sur la relation entre les émotions positives, les cognitions positives et le bien-être. Ainsi, elle a élaboré la théorie du Broaden-and-Build, soutenant que les émotions positives élargissent les perspectives et renforcent les compétences.
– Lyubomirsky : Elle s’est centrée sur l’étude des facteurs qui pouvaient favoriser le bien-être durable et a développé une approche basée sur les activités et stratégies concrètes visant à renforcer la gratitude et d’autres forces positives.
– Peterson : Il a étudié les qualités positives de la personnalité, à savoir, la responsabilité, la persévérance et la compétence. Il a ainsi développé une approche se basant sur les forces afin de renforcer les forces positives individuelles dans l’objectif d’améliorer le bien-être et la qualité de vie.

Les premières interventions proposées incluaient des techniques de médiation, de visualisation positive et de formation de l'attention. Elles avaient pour objectif d’améliorer la qualité de vie des individus en leur permettant de développer des attitudes, comportements et émotions plus positives. Notons qu’avec l’évolution, de nouvelles recherches et interventions ont été développées afin de renforcer les effets de la psychologie positive.

À ce jour, l’efficacité des interventions en psychologie positive a été largement étudiée et de nombreuses preuves scientifiques sont disponibles. Ainsi, il a été montré qu’elles permettaient d’améliorer les niveaux de bien-être, de réduire le stress, d’augmenter la satisfaction de vie, de renforcer les relations interpersonnelles positives, d’améliorer la confiance en soi et la résilience mais aussi de réduire les symptômes de troubles mentaux tels que la dépression et l’anxiété. Précisons cependant qu’elle ne représente pas une solution universelle à tous problèmes mais qu’il faut la considérer comme un complément à d’autres formes d’interventions ou traitements.

Les interventions et les stratégies pour développer les compétences positives (résilience, épanouissement, bien-être, satisfaction de vie, croissance post-traumatique).

Rôle des ressources psychologiques

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D’après les recherches récentes, la mobilisation et le maintien des ressources psychologiques dépendraient des émotions positives ressenties. C’est notamment Fredrickson (1998) qui élabora sa théorie sur l’élargissement constructif des émotions positives (Broaden-And-Build Theory of Positive Emotions). Ainsi, deux processus psychologiques sont mis à l'œuvre lorsqu’un individu est traversé par des émotions positives : l’élargissement et la construction. L’auteur stipule ainsi que le fait de ressentir ces émotions offre à l’individu la possibilité de se saisir d’autres façons de penser et de considérer d’autres idées et actions (“élargissement”), facilitant la réinterprétation de ses comportements et donc le développement de nouvelles ressources individuelles (“construction”). Ces deux processus, que sont les émotions positives et les ressources individuelles disponibles, s'influencent alors mutuellement, contribuant à l’accroissement du bien-être et de la performance.

Ces ressources psychologiques constituent des facteurs protecteurs qui permettent à l’individu de faire face aux événements de la vie en facilitant la résistance à l’adversité et l’adaptation psychologique dans des situations difficiles. Ce sont des dispositions stables qui assurent des niveaux optimaux de bien-être individuel. On distingue par ailleurs les ressources internes (dispositions psychologiques) des ressources externes (environnementales) comme par exemple le soutien social. De manière générale, elles sont considérées comme protectrices de la santé mentale et physique. A cet effet, la littérature rapporte que des niveaux élevés de ressources psychologiques (comme l’optimisme et la résilience) chez des patients atteints de cancer hématologique sont associés à de moindres symptômes de détresse psychologique (Wang & al., 2016). D’autres auteurs rapportent les bénéfices du soutien social perçu sur la santé mentale des patients souffrants de diabète de type II (Meldgaard & al., 2022).

Les ressources psychologiques les plus citées dans la littérature et les plus étudiées à l’heure actuelle regroupent l’optimisme, l’espoir,  le contrôle personnel (auto-contrôle) et le sens (sense of meaning), l’auto-efficacité, la disposition à l’attention consciente (mindfulness), l’intelligence psychologique (psychological mindedness) et plus récemment l’orientation reconnaissante, la disposition au pardon, à l’espoir et à la bienveillance envers soi (self-compassion) ou encore l’auto-affirmation spontanée (self-affirmation).

L’optimisme

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L'optimisme se définit comme la confiance générale d’un sujet à voir l’issue positive d’un événement. Il est fondé sur une estimation rationnelle des probabilités de réussite de la personne et sur la confiance en son efficacité personnelle (Martin-Krumm, 2021). Selon Carver et Scheier (1982), “les optimistes sont les personnes qui s’attendent à vivre des expériences positives dans le futur.”  L’optimisme est dit “dispositionnel” lorsqu’il constitue une tendance stable des sujets à penser qu’ils vivront plus d’expériences positives que négatives au cours de leur vie. Cette disposition stable dans le temps s’est révélée être salutogène pour la personne en matière de santé (Giltay & al., 2004; Giltay & al., 2006; Marton & al., 2022). Des chercheurs ont en effet mis en évidence que l’optimisme dispositionnel favorise l'adaptation psychologique à l'insuffisance cardiaque chronique et agit comme un facteur de protection contre l'apparition et la mortalité des maladies cardiovasculaires (Giltay & al., 2004, 2006). Dans une autre étude menée auprès d’hommes âgés de 64 à 84 ans, Giltay et al., (2006) ont montré que l'optimisme dispositionnel prédit de manière significative une incidence réduite des symptômes dépressifs sur une période allant jusqu'à 15 ans. Dans une récente revue de littérature, les chercheurs ont globalement mis en évidence une association positive entre l’optimisme dispositionnel et la qualité de vie liée à la santé des patients atteints de cancers, voire le rôle prédicteur de ce trait de personnalité sur l’évaluation de la qualité de vie liée à la santé (Marton & al., 2022).

L’espoir

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De manière générale, l’espoir se définit comme une attente de bienfaits dans l’avenir. Un auteur connu pour ses travaux sur ce concept est Snyder (2002) qui définit l’espoir comme une construction cognitive de type trait englobant des croyances affirmatives sur la capacité d'une personne à atteindre ses objectifs personnels. L’espoir consisterait en « un état motivationnel positif qui se base sur une interaction entre l’énergie et la motivation orientées vers les buts ainsi que les différentes manières de les atteindre ». D’après la théorie de Snyder (2002), une personne est considérée comme ayant de l’espoir dès lors qu’elle se fixe des buts, qu’elle pense disposer des moyens pour les atteindre, et qu’ils lui sont propres (motivation).

Bien que ce concept constitue une tendance stable et générale pour certains sujets, on notera aussi la dimension “état” de l’espoir, lorsqu’elle reflète plutôt une tendance liée à un contexte particulier. De nombreuses études se sont intéressées aux effets de l’espoir auprès de diverses populations comme des personnes atteintes de cancer (Berendes & al., 2010 ; Rajandram & al., 2011), de pathologies mentales (Werner, 2012), chez des individus ayant subi des traumatismes sévères comme des un trouble du stress post traumatique après guerre (Gilman & al., 2012) ou les grands brûlés (Barnum & al., 1998). Plus récemment, des chercheurs se sont intéressés aux associations entre l'espoir et la douleur musculo-squelettique chronique (Or & al., 2021). Les résultats suggèrent que l’espoir était positivement associé à l’auto-efficacité chez des patients souffrants de  douleurs articulaires, musculaires et cervicales.

L’estime de soi

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L’estime de soi est un concept ancien qui a émergé des travaux de James (1890) qui le définit comme la conscience de la valeur du soi. Il correspond aux sentiments et jugements personnels que chaque personne éprouve à l’égard d’elle-même, en particulier au sentiment qu’elle se fait de sa propre valeur en tant que personne. L’estime de soi se construit dès l’enfance à partir de son système de valeurs personnelles, sociales et contextuelles. Bien que ce concept soit plutôt stable dans le temps, des événements de vie marquants peuvent le moduler. Il apparaît par ailleurs que l’estime de soi est relativement stable à un âge avancé de la vie (Wagner & al., 2015). Les auteurs semblent s’accorder quant à la contribution de l’estime de soi dans l’induction de comportements de santé puisqu’elle développe le sentiment d’auto-efficacité (Kamalifard & al., 2019) de compassion et de satisfaction personnelles (Zhang & al., 2016). Bonsaksen et al., (2015) rapportent à cet effet qu’une bonne estime de soi joue un rôle protecteur sur la santé somatique des patients souffrants d’obésité morbide et de maladie pulmonaire chronique, en favorisant la mobilisation de stratégies d’ajustement et de ressources personnelles salutogènes. Une autre étude menée auprès de femmes allaitantes a montré qu’une amélioration de l'estime de soi et de la santé générale s’accompagnait d’une augmentation de l'auto-efficacité de l'allaitement (Kamalifard & al, 2019). D’autres chercheurs ont mis en évidence une corrélation positive entre l’estime de soi et la qualité de vie chez des patients stomisés en raison d’un cancer colorectal (Ferreira & al., 2017).

L’auto-efficacité

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Bandura (1977, 1988, 1997), cité par Bruchon-Schweitzer et Boujut (2021) définit l’auto-efficacité comme la croyance des individus en leur capacité à mobiliser les ressources nécessaires pour maîtriser la plupart des situations et y réussir.

De manière générale, Luszczynska et al., (2005) soulignent qu’un niveau élevé d’auto-efficacité est associé à de nombreux indicateurs de bien-être (émotions positives, estime de soi, optimisme dispositionnel, satisfaction au travail) et de performance (académiques).

Mobilisée dans les théories socio-cognitives qui ont tenté d’expliquer pourquoi un individu va adopter ou non un comportement de santé (Ajzen, 1991), la littérature s’accorde sur le rôle moteur de l’auto-efficacité dans l’adoption de comportements sains (Sheeran & al., 2016) et la qualité de vie (Selzler & al., 2020). Dans une récente étude menée auprès d’étudiants universitaires, Hong et Chung (2022) rapportent une association significative entre l’auto-efficacité et la pratique de l’activité physique. On retrouve ces résultats dans la recherche de Gillibrand et Stevenson (2006) qui ont constaté qu’une auto-efficacité était associée à une meilleure adhésion à un régime alimentaire chez des adolescents diabétiques. Dans cette même population, Huang et al., (2021) ont suggéré un effet direct de l'auto-efficacité sur l'adhésion aux médicaments.

Mindfulness / l’attention consciente

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Le concept de pleine conscience trouve ses racines dans les traditions bouddhistes et autres traditions contemplatives, où l'attention et la conscience conscientes sont activement cultivées (Brown & Ryan, 2003). Cette ressource psychologique se traduit par une attention réceptive aux stimuli sensori-moteurs, cognitifs et émotionnels, ainsi qu’à la prise de conscience des événements et expériences présentes ici et maintenant, par un engagement actif. La mindfulness renvoie aussi à la capacité d’acceptation des évènements tels qu’ils sont, sans aucun jugement de valeur sur leur valence positive ou négative. Elle est le plus souvent définie comme l'état d'attention et de conscience de ce qui se passe dans le présent. La pleine conscience peut constituer une disposition stable du sujet (mindfulness-trait) mais peut aussi varier selon certains contextes (mindfulness-état).

La littérature a mis en évidence les effets bénéfiques de la pleine conscience notamment sur la santé cardio-vasculaire, révélant des associations significatives avec le tabagisme, l'indice de masse corporelle, la glycémie à jeun et l'activité physique (Loucks et al., 2015). D’autres chercheurs rapportent que la pleine conscience est associée à des niveaux moindres d’anxiété et de symptômes dépressifs chez des sujets âgés atteints de troubles neurocognitifs (Lam et al., 2021). Dans leur étude menée auprès de professionnels de la santé, Cascales‐Pérez et al., (2021) ont montré l’efficacité d'un programme de réduction du stress basé sur la pleine conscience sur leur qualité de vie liée à la santé et leur qualité de vie au travail. Les sujets ayant bénéficié de ce programme ont rapporté des scores plus élevés après l'intervention pour la pleine conscience, la qualité de vie liée à la santé, l'humeur et la satisfaction de la compassion et un score plus faible pour l'épuisement professionnel.  De manière générale, les études rapportent des associations positives entre la pleine conscience et les comportements de santé tels que l’activité physique, l’alimentation saine et le sommeil (Sala et al., 2019).

La résilience

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Le concept de résilience émerge d’un constat universel issu des travaux et recherches sur les animaux et les hommes qu’il existe une hétérogénéité dans les réponses à tous types de risques environnementaux, qu’ils soient physiques ou psychosociaux (Rutter, 2006). Les premiers travaux sur la résilience menés auprès d’enfants exposés à la misère, la maltraitance et ayant des parents malades ou alcooliques ont tenté de comprendre comment ces enfants avaient pu se développer normalement et s’épanouir à l’âge adulte (cité dans Bruchon-Schweitzer, 2021). Ainsi, l'exposition au stress de certains individus peut être suivie d'une résistance accrue au stress ultérieur, plutôt que d'une sensibilisation ou d'une vulnérabilité accrue (Rutter, 2012). La résilience peut ainsi être définie comme une vulnérabilité réduite aux expériences de risque environnemental, le dépassement d'un stress ou d'une adversité, ou un résultat relativement bon malgré les expériences de risque (Rutter, 2006). La résilience consiste à affronter des situations très éprouvantes et à “en réchapper indemne et même un peu plus fort qu’avant” (Tugade, 2011). Il s’agit donc d'un concept interactif et dynamique qui concerne la combinaison d'expériences de risques graves et un résultat psychologique relativement positif malgré ces expériences. Une étude menée un an après la marée noire Deepwater Horizon auprès de deux communautés côtières de l'Alabama a relevé le rôle moteur de la résilience perçue sur l’atténuation des facteurs psychosociaux et de santé mentale au fil du temps (Shenesey & Langhinrichsen-Rohling, 2015). Les résultats montrent que les personnes moins résilientes ont signalé davantage de symptômes de dépression et de troubles du stress post-traumatique liés à la catastrophe que les personnes plus résilientes.

L’intelligence psychologique / Psychological Mindedness

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La littérature tend à s’accorder sur la définition proposée par Appelbaum qui conçoit l’intelligence psychologique comme "la capacité d'une personne à voir les relations entre les pensées, les sentiments et les actions, dans le but d'apprendre les significations et les causes de ses expériences et de son comportement" (cité dans Rai et al., 2015). Les chercheurs qui se sont intéressés à ce concept l’ont enrichi en y ajoutant de nouvelles dimensions. Pour Farber (1985), l’intelligence psychologique (IP) consiste non seulement à percevoir ses propres états internes mais aussi à comprendre les états internes d’autrui. Plus tard, Conte et al., (1996)  ont étoffé ​la définition en y intégrant les notions d’ouverture aux idées nouvelles et la disposition au changement, d’une part, et de croyance en l’effet bénéfique de partager ses difficultés avec autrui, d’autre part. D’autres auteurs conceptualisent l’intelligence psychologique sur une dimension essentiellement cognitive, comme Grant (2001) qui considère l’IP comme une capacité  métacognitive. Ainsi, selon lui, l’IP s'apparente à « une préposition à s’engager dans des attitudes affectives et intellectuelles en explorant ‘‘comment’’ et ‘‘pourquoi’’ soi-même et les autres se comportent d’une certaine manière ». Dans une étude récente, des chercheurs ont mis en évidence que l’IP était associée aux attentes des patients concernant leur comportement au cours de la prise en charge et, en particulier, à leur motivation à poursuivre le traitement (Beitel et al., 2009). Les résultats suggèrent ainsi qu’un haut niveau d’IP entraîne un locus de contrôle interne, c’est-à-dire que l’individu attribue ce qu’il lui arrive à des causes qui lui sont propres. Par ailleurs, les résultats ont montré que les personnes avec un haut niveau d’IP attribuent davantage le changement à leurs efforts qu’aux techniques utilisées par le thérapeute. De manière générale, les études mettent en évidence des associations entre l’IP et la santé mentale puisqu’elle contribue au bien-être subjectif (Trudeau & Reich, 1995) et permet une meilleure adaptation aux difficultés à la fois sur le plan psychologique et sur le plan de l’interaction avec l’environnement (Shill & Lumley, 2002).

Rôle des forces de caractère et vertus

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Selon Seligman (2011), “ le bonheur authentique provient du fait de repérer et de cultiver nos forces les plus fondamentales et de les utiliser chaque jour au travail, en amour, dans le jeu et les responsabilités parentales”.

Ainsi, Martin Seligman et Christopher Peterson se lancent au début des années 2000 dans l’élaboration d’un inventaire complémentaire au manuel diagnostic des maladies mentales (DSM), afin de compléter le travail de recension des symptômes et troubles mentaux en répertoriant les ressources psychologiques des individus et les moyens de les développer. Pour cela, les chercheurs ont sélectionné, parmi les écrits fondamentaux des grandes traditions religieuses et philosophiques, les principales vertus et forces de caractère ayant une valeur universelle. Cette recherche interculturelle à grande échelle a balayé différentes disciplines, comme la psychiatrie ou la pédagogie, afin de parvenir à une classification des facettes de la santé mentale comme base de la psychologie positive (Seligman & Lecomte, 2011). Cette démarche de recherche dans la littérature scientifique a été l’objet d’un ouvrage paru en 2004 (Peterson & Seligman, 2004).

Six vertus morales regroupant vingt-quatre forces de caractère ont été retenues, selon différents critères : ces traits sont valorisés dans la plupart des cultures; ils participent à l’accomplissement de soi sans porter préjudice à autrui, ils peuvent être mesurés, ils se distinguent les uns des autres, ils s’appliquent à certaines personnes et pas à d’autres, ils sont malléables et peuvent faire l’objet d’un apprentissage.

Les auteurs ont souhaité que la classification obtenue (“VIA Classification of Strength”; Peterson & Seligman, 2004) soit présentée comme un complément au DSM et à la CIM, davantage orienté vers une vision positive de l’être humain à travers un continuum de traits plutôt que des catégories exclusives. Afin d’aider le repérage des forces individuelles, un questionnaire composé de 120 affirmations qui mesure les 24 forces de caractères humaines et universelles a été créé : l’Inventaire de Forces de caractères – Valeurs en Action (VIA-IS; Peterson & Seligman, 2004). Ce questionnaire est traduit en français et validé scientifiquement; il est accessible gratuitement en ligne. A l’aide de ce test, il est possible d'identifier son profil de forces et de repérer ses cinq forces principales, dites “forces signatures”.

Pour répondre aux exigences de validité scientifique, Martin Seligman et Christopher Peterson ont poursuivi les travaux de recherche dans différents pays. Une étude réalisée dans 54 pays montre que les 24 forces de caractère se retrouvent bien dans ces différentes cultures, avec des correspondances importantes entre pays (Park, Peterson & Seligman, 2006).

D’autres études ont complété ces premiers résultats, et se sont intéressées aux effets liés à ces forces. En 2010, une étude démontre que l’utilisation des forces peut permettre de diminuer le stress, d’augmenter les émotions positives, la vitalité et l’estime de soi. Elle apparaît comme un prédicteur de bien-être (Wood et al., 2011). Une autre étude précise qu’en utilisant différemment ses propres forces de caractère, les individus obtiennent des scores de dépression plus faibles, et augmentent leur niveau de bonheur (Gander et al., 2013). Les auteurs démontrent que certaines forces influencent l’état de santé, notamment l’enthousiasme, la persévérance, l’espoir et la curiosité. D’autres sont repérées pour faire baisser le stress, comme la créativité, la curiosité, l’ouverture d’esprit, l’appréciation des l’apprentissage et la sagesse.  

Les vertus regroupent différentes forces dont elles relèvent. Elles se définissent comme des caractéristiques fondamentales de base du caractère, présentes dans différentes traditions culturelles et religieuses (taoïsme, bouddhisme, hindouisme, islam, christianisme, judaïsme, confucianisme, philosophie grecque) (Bernard et al., 2011). Elles sont abstraites alors que les forces sont mesurables et qu’elles représentent les “itinéraires” menant aux vertus (Seligman & Lecomte, 2011).

Les forces de caractère se définissent plus précisément comme “des modes spécifiques de réalisation ou d’application des vertus pouvant se manifester au travers de pensées, d’idées, d’émotions ou de comportements variés” (Bernard et al., 2011). Elles sont “des traits de personnalité, une caractéristique psychologique qui peut être observée dans différentes situations et au fil du temps” (Seligman & Lecomte, 2011). Elles reposent sur l’acquisition et l’utilisation de connaissances et de compétences; par conséquent, elles peuvent être cultivées et renforcées à travers l’apprentissage, l’exercice et la pratique. Elles sont rarement toutes présentes chez un même individu. Les forces sont des traits de caractère cognitif et non cognitif qui poussent les individus à faire des choix en cohérence avec leurs valeurs personnelles afin de les aider à éprouver du bien-être dans la vie et qu’elle ait un sens pour eux. Ce sont des caractéristiques morales évolutives (contrairement aux talents) qui naissent de la volonté de l’individu, impliquent des efforts et de la détermination. Les valeurs sont souvent ancrées chez l’individu dès son plus jeune âge, en fonction de sa personnalité et de l’environnement dans lequel il évolue. Elles sont difficiles à changer, contrairement aux forces de caractères qui peuvent se développer si l’individu en prend conscience.

Les forces et les vertus sont les caractéristiques positives d’un individu qui génèrent des émotions positives authentiques et de la gratification. Selon Seligman, l’environnement culturel alimente les forces “en fournissant des institutions, des rituels, des modèles de rôle” qui valorisent le développement de certaines caractéristiques.

VERTUS FORCES
  1. Sagesse et connaissance

Forces cognitives impliquant l’acquisition et l’utilisation de connaissances

Créativité : penser à de nouvelles façons de faire créatives

Curiosité : s’intéresser à tous les aspects de toutes les expériences

Ouverture d’esprit : analyser les choses en profondeur et les examiner sous tous les angles

Désir d’apprendre : maîtriser de nouvelles capacités, de nouveaux sujets et savoirs

Sagesse : être de bon conseil pour les autres

  1. Courage

Forces émotionnelles qui impliquent l’exercice de la volonté afin d’atteindre des buts, malgré une opposition interne et externe

Authenticité : dire la vérité et se présenter de manière vraie

Courage : faire face à la menace, les défis, la difficulté ou la douleur

Persévérance : finir ce que l’on a commencé

Enthousiasme : aborder la vie avec entrain et énergie

Bravoure

Vitalité

  1. Amour et humanité

Forces interpersonnelles consistant à se soucier des autres et à s’en faire des amis

Gentillesse : rendre des services et faire de bonnes actions pour autrui

Amour : valoriser les relations proches avec les autres

Intelligence sociale : être conscient de ses motivations et sentiments, et de ceux des autres

Bonté

  1. Justice

Forces civiques qui sont à la base d’une vie communautaire saine

Citoyenneté

Equité : traiter toutes les personnes de la même manière en respectant les notions de justesse et de justice

Leadership : organiser des activités de groupe et veiller à ce qu’elles soient réalisées

Travail d’équipe : bien travailler en tant que membre d’un groupe ou d’une équipe

  1. Tempérance

Forces qui protègent contre les excès

Pardon : pardonner à ceux qui ont mal agi

Clémence :

Modestie : laisser ses réalisations parler d’elles-mêmes

Prudence : être prudent quant à ses choix ; ne pas dire ou faire des choses que l’on pourrait regretter plus tard

Autorégulation : réguler ce que l’on ressent et fait

  1. Spiritualité et transcendance

Forces qui favorisent une ouverture vers quelque chose de plus grand que soi et qui aident à trouver du sens à sa vie

Appréciation de la beauté et de l’excellence : remarquer la beauté, l’excellence et la

performance dans tous les domaines de la vie

Gratitude : être conscient et reconnaissant pour les bonnes choses qui arrivent ; être reconnaissant en remerciant les autres

Espoir : attendre le meilleur dans l’avenir et travailler à le réaliser ; croire qu’un bon avenir est quelque chose qu’on peut atteindre

Humour : aimer rire, sourire aux autres ; voir les choses de leur côté léger ; faire des plaisanteries

Spiritualité : avoir des croyances cohérentes à propos du sens de l’univers ; savoir où l’on se situe dans un ensemble plus large ; avoir des croyances à propos

du sens de la vie qui orientent sa conduite et favorisent le bien être.

Selon Seligman, certaines forces sont toniques, toujours en alerte, et d’autres sont phasiques, elles nécessitent un stimulus pour être activées. Cependant, en prenant conscience de ses forces, un individu peut en développer certaines et en utiliser d’autres de façon plus intentionnelle.

Les forces et vertus limiteraient les troubles psychologiques et seraient la clé de la résilience (Seligman). L’objectif de la thérapie serait d’aider le patient à les identifier et à les construire ou les consolider. Il s’agirait aussi de trouver l’environnement où ces forces pourraient s’exprimer au mieux.

Entretien motivationnel (Miller et Rollnick, 2013)

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L’entretien motivationnel (EM), décrit pour la première fois par Miller et Rollnick dans les années 1980, se révèle être une passerelle clinique entre les différents métiers du soin (Rollnick et al., 2008). Principalement utilisé dans les situations thérapeutiques ayant trait aux processus de changement de comportements, d’ambivalence, de motivation et de résistances, tel le champ de l’alcoologie (Lécallier & Michaud, 2004) ou celui des maladies chroniques, il consiste en “une méthode directive, centrée sur la personne, pour augmenter la motivation intrinsèque au changement par l’exploration et la résolution de l’ambivalence” (Miller & Rollnick, 1991).  De manière générale, il repose sur une conversation motivationnelle collaborative, en lien avec un changement, en se fondant sur les valeurs et intérêts de l’individu (Miller & Rollnick, 2013). Souhaitant changer de comportement et percevant ses potentiels bénéfices, l’individu peut néanmoins être pris dans une ambivalence en percevant également les avantages à ne pas entamer ce changement. Dans sa conversation se mêlent un discours tourné vers le changement et l’auto-motivation à un discours axé sur son maintien. Le but de l’entretien motivationnel est de renforcer sa motivation propre et son engagement vers le changement en étant à l’écoute de son “discours-changement” (Miller & Rollnick, 2013). L’un des principes fondamentaux de l’entretien motivationnel consiste à renforcer le sentiment d’efficacité personnelle du patient en vue d’accroître sa confiance dans sa capacité à surmonter les obstacles (Lécallier & Michaud, 2004). Pour se faire, le thérapeute, avec empathie, emploie différents styles (“guider”, “suivre” et “diriger”) pour favoriser l’évocation du patient et le valoriser. Tous deux communiquent en alternant entre écoute, interrogation et dons d’informations, ce qui majore le soin apporté à la qualité de la relation thérapeutique. Dans le cadre d’un changement de comportement, il est habituellement judicieux d’employer l’outil de la balance décisionnelle (Janis & Mann, 1977) afin que le patient prenne conscience des risques liés à la poursuite de sa conduite et des intérêts à s’en détacher. Le patient, acteur, contrebalance les avantages associés à l’adoption d’un nouveau comportement aux inconvénients engendrés par une conduite actuelle. Par conséquent, cet outil a pour objectif principal de renforcer le poids vers un changement de comportement aux issues plus favorables. Les échelles d’évaluation, les techniques de reflets, de renforcement et de résumés sont également des outils précieux. Notons que des essais cliniques relatifs à l’évaluation de l’entretien motivationnel dans de larges domaines considérant un changement de comportement ont été publiés (Rollnick & al., 2008).

Perspectives cliniques des approches psychothérapiques basées sur la psychologie positive

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Les approches psychothérapeutiques basées sur la psychologie positive visent à traiter les troubles psychologiques, à éliminer les symptômes psychopathologiques et à promouvoir le bonheur ainsi que le bien-être. Effectivement, éradiquer les symptômes permet de rendre la vie des patients moins douloureuse, contribuant ainsi à la rendre plus satisfaisante (Csillik, 2017; Rachid & Csillik, 2011). Ces approches se basent sur le renforcement des émotions positives, des forces positives et des ressources des individus (Lee Duckworth et al., 2005), plutôt que sur la résolution uniquement des problèmes, des défaillances psychologiques ou des symptômes et schémas négatifs. L’idée ici, selon les auteurs, est de travailler sur les valeurs, le sens de la vie des patients (Csillik, 2017; Martin-Krumm, 2011), de faire émerger et de consolider des aspects positifs chez les individus tels que le courage, la bonté, la bienveillance envers soi, l’optimisme, l’espoir, le pardon, la gratitude, mais aussi l’intelligence émotionnelle et sociale (Csillik, 2017; Rachid & Csillik, 2011).

Ces auteurs partent du principe que les émotions et forces positives présentent une authenticité et une réalité aussi importantes que les symptômes et les troubles psychopathiques. De ce fait, ils avancent qu’il est tout aussi nécessaire de les cultiver (Martin-Krumm & Regourd-Laizeau, 2014).

À ce jour, plusieurs études ont évalué les effets de ces psychothérapies auprès de patients atteints de dépression ou pour le traitement des troubles addictifs (Csillik, 2017). Seligman et ses collaborateurs ont réalisé une étude randomisée, contrôlée, afin de montrer l’efficacité de stratégies utilisées dans les psychothérapies positives (Seligman et al., 2005). Ils ont comparé l’efficacité des cinq exercices de psychothérapie positive par rapport à une tâche placébo. Les exercices de psychologie positive visaient à cultiver un sentiment de gratitude, à identifier des aspects positifs relatifs à soi-même ou à renforcer les forces de caractère par rapport à une tâche placébo qui consistait, quant à elle, à écrire des souvenirs d’enfance pendant une semaine. Les sujets étaient des patients dépressifs. Les résultats de l’étude ont montré des effets positifs des exercices de psychologie positive, 6 mois après leur mise en place, avec une diminution des symptômes dépressifs et un effet positif sur le bien-être.

Une autre étude, menée par Seligman et al., (2006) visait à comparer l’efficacité des psychothérapies positives par rapport aux prises en charge habituelles et  celles associées à des antidépresseurs pour les patients atteints de dépression. Les résultats ont mis en évidence une diminution des symptômes dépressifs, une amélioration du fonctionnement global et un sentiment de bonheur supérieur et plus durable chez les patients ayant suivi une psychothérapie positive, en comparaison à ceux ayant suivi les deux autres types de prises en charge. Ces résultats sont similaires lorsque des psychothérapies positives de groupe sont proposées, où il apparaît une diminution des symptômes dépressifs, une augmentation de la satisfaction de vie et un maintien dans le temps des gains de la thérapie, comparativement à ceux ayant suivi une prise en charge traditionnelle.

Rashid et Anjum (2007), quant à eux, ont montré les effets positifs de la psychothérapie positive dans l’augmentation du bien-être chez les lycéens avec une taille importante d’effet. En outre, Rashid et Anjum (2009) ont mené une autre étude auprès d’adultes issus de la population générale. Ils ont montré que des interventions de groupe basées sur des exercices de psychothérapie positive permettent une augmentation du bonheur et de la satisfaction de vie avec une taille d’effet modérée. Enfin, la méta-analyse de Sin et Lyubomirsky (2009) a recensé 51 études à propos des interventions positives qui ont montré leur effet sur l’augmentation du bien-être et la diminution de la dépression.

Ces études mettent alors en avant les perspectives cliniques prometteuses des psychothérapies positives.

Cependant, il apparaît comme indispensable de poursuivre les recherches afin de confirmer les bienfaits de ces psychothérapies positives.

Premièrement, il est important de pouvoir mieux cerner les indications thérapeutiques en les testant auprès de différentes populations cliniques souffrant de différents troubles psychologiques avec ou sans comorbidités (Csillik, 2017; Martin-Krumm, 2011).

Deuxièmement, il convient de poursuivre les comparaisons quant à l’efficacité de ces psychothérapies, comparativement à des modes de prises en charge plus traditionnels (Martin-Krumm, 2011).

Troisièmement, il est nécessaire de cerner les combinaisons d’exercices permettant d’obtenir des résultats thérapeutiques optimaux (Csillik, 2017).

Quatrièmement, il apparaît comme pertinent de cerner plus précisément la portée de ces interventions et d’investiguer les champs d’application de celles-ci (Csillik, 2017).

Cinquièmement, la compréhension de l’interaction entre chacune des ressources individuelles et les mécanismes favorisant le bien-être reste importante et nécessaire à approfondir (Csillik, 2017).

De manière générale, ces approches nous amènent à appréhender l’importance de prendre en considération la personne dans son intégralité en considérant tant ses atouts et ressources personnelles que les difficultés psychologiques qu’elle présente (Csillik, 2017).

En outre, les exercices proposés dans ces psychothérapies sont attractifs et faciles à utiliser ce qui permet de favoriser l’adhésion thérapeutique de la part des patients (Csillik, 2017; Martin-Krumm, 2011). Effectivement, les patients rapportent être de nouveau actifs dans leur santé, en réalisant, spontanément, les exercices en dehors des séances de psychothérapie.

Les psychothérapies positives apparaissent comme étant des approches permettant l’atténuation des symptômes, avec une augmentation du niveau de bien-être individuel et la réduction des risques de rechute alors même qu’aucune séance de maintien n’ait été mise en place (Csillik, 2017; Martin-Krumm, 2011).

À ce jour, les psychothérapies positives se composent de quatorze séances (Seligman, 2013) :

  • Séance 1 : exercice de rédaction d’un court texte où la personne doit présenter le meilleur jour de sa vie et expliquer la manière dont elle utilise ses principales forces
  • Séance 2 : exercice basé sur le même principe mais cette fois ci, réalisé sur la base d’un questionnaire

Dans le cadre de ses deux séances, le thérapeute aide la personne dans l’identification de ses forces.

  • Séance 3 : réalisation d’exercices permettant à la personne d’identifier les situations dans lesquelles elle pourra utiliser ses forces afin d’augmenter son niveau de plaisir, son engagement et le sens qu’elle donne à sa vie. C’est à cette séance-ci que l’exercice « les trois bonnes choses » est introduit. Cet exercice sera poursuivi tout au long de la thérapie. Il se base sur le principe selon lequel l’individu a tendance à accorder plus d’attention aux événements négatifs qu’aux éléments positifs. Dans cet exercice, la personne doit prendre 10 minutes, chaque soir, avant de se coucher, pour identifier et noter dans un carnet trois bonnes choses qui se sont passées durant la journée. La personne doit ensuite se questionner : « Pourquoi est-ce arrivé ? ». Cela renvoie au style explicatif de Martin-Krumm (2012), dans la mesure où si la personne identifie des causes internes, stables, globales et éventuellement confortables alors les effets seront bénéfiques. Cet exercice a deux objectifs : d’une part, ne pas identifier uniquement les événements négatifs mais identifier aussi les événements positifs et d’autre part attribuer les causes tendant vers une vision optimiste du monde.
    • Séance 4 : dialogue entre le thérapeute et la personne afin d’identifier le rôle des bons et mauvais souvenirs qui viennent entretenir la dépression. Au cours de cette séance, la personne note ses réflexions sur la colère et la rancune et décrit la façon dont elles perpétuent la dépression dans laquelle elle se trouve.
    • Séance 5 : introduction du pardon en tant qu’outil pour transformer la colère et la rancune en sentiments neutres voire en émotions positives Durant cette séance la personne rédige « une lettre de pardon » qui ne sera pas envoyée.
    • Séance 6 : introduction d’une discussion sur la gratitude
    • Séance 7 : bilan des avancées des six premières séances, de l’exercice des trois bonnes choses et de l’utilisation des forces de caractère
    • Séance 8 : notion de perfectionnisme et effets délétères qu’elle peut présenter, lorsqu’elle est poussée à son extrême Ici, la personne doit apprendre à se satisfaire de ce qu’elle possède et mettre en place un projet de satisfaction personnelle
    • Séance 9 : notion d’optimisme et d’espoir. Durant cette séance, la personne est amenée à considérer le style optimiste comme étant le fait de considérer que les événements négatifs présentent des effets limités dans le temps et dans l’espace et qu’ils peuvent être changés, les causes n’étant ni stables, ni générales. En outre, cette séance vise à augmenter l’espoir de la personne en revenant sur les objectifs afin de s’assurer de leur nature : Est-ce qu’ils ont un sens pour elle ? Est-ce qu’ils sont intrinsèques ou définis pour des raisons extrinsèques ? Est-ce que ce sont des buts personnels ou inspirés d’autres personnes ?
      • Séance 10 : identification les forces de caractère d’une personne chère
      • Séance 11 : identification des forces de caractères des membres de la famille et les origines de celles de la personne elle-même
      • Séance 12 : acquisition des techniques afin de mieux apprécier le moment présent pour augmenter l’intensité et la durée des émotions positives (cf. mindfulness)
      • Séance 13 : utilisation ses forces de la personne pour réaliser quelque chose qui nécessite du temps afin de faire don de son temps personnel
      • Séance 14 : discussion entre le thérapeute et la personne de ce qu’est « une vie pleine de sens qui comprend le plaisir, l’engagement et le sens » (Seligman, 2013, p. 67).

Psychothérapies

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Voici une liste non-exhaustive des autres psychothérapies qui sont associées à la psychologie positive :

1) Thérapie de la gratitude

La gratitude est définie comme un état d’esprit ou un sentiment de reconnaissance envers une personne et/ou une situation dont l’individu tire un bienfait. Il s’agit d’une forme de bien-être social ayant un impact positif sur sa santé mentale et psychique (Emmons, 2018). Afin d’éprouver de la gratitude, l'événement doit être reconnu comme positif par l’individu et ce dernier doit percevoir que sa source se situe sur un versant extérieur à lui-même : dimension intellectuelle et dimension émotionnelle entrent en jeu (Shankland, 2014). La gratitude est majorée par la reconnaissance du bienfait du don, l’intentionnalité de procurer du bien-être à autrui et ce, sans contrepartie (Bartlett & DeSteno, 2006). Visible par des comportements et sans expressions faciales, la gratitude est conceptualisée non seulement comme une émotion positive complexe, mais également comme une humeur et comme un trait de personnalité, aux effets sur le bien-être psychologique ressenti et la qualité de ses relations sociales. Véritable spirale ascendante, la gratitude s’avère une stratégie de coping efficace comme facteur de promotion de la santé (Shankland, 2014), ce qui en constitue un levier pour les accompagnements thérapeutiques notamment. Des outils se déploient et attestent de leur efficacité sur le bien-être physique et psychologique. Prenons pour exemple le journal de gratitude, la lettre de reconnaissance et l’attention au moment présent comme essors au mieux-être (Duckworth et al., 2005), notamment pour faire face aux situations difficiles. Par ailleurs, des programmes se développent dans le but d'accroître le sentiment de gratitude au quotidien ayant pour objectifs d’identifier des pensées ingrates, d’élaborer des pensées reconnaissantes, les substituer aux précédentes et transposer la gratitude en acte (Shankland, 2014).

2) Thérapie de l'acceptation et d’engagement (ACT)

La thérapie ACT - Acceptance and Commitment Therapy - s’est développée sous l’impulsion de Hayes et al. en 1999. Acronyme traduit en français par la Thérapie d’Acceptation et d’Engagement, cette thérapie dite “contextuelle” est issue des Thérapies Cognitives et Comportementales (Seznec, 2015). Cette approche, en tant qu’intervention psychologique empirique, invite à changer sa relation avec ses expériences intérieures inconfortables : ses pensées, ses émotions, ses sensations et ses souvenirs, sans pour autant supprimer les souffrances (Schoendorff et al., 2011).  Elle vise à amener l’individu à agir dans le sens de ses valeurs grâce au développement de sa flexibilité psychologique, cette dernière étant une capacité essentielle pour promouvoir son fonctionnement optimal et sa bonne santé mentale. La thérapie ACT se base sur différents modèles : le Modèle descriptif Hexaflex, le Modèle dynamique de la Matrice et le Modèle Processuel ACT (Seznec & Ouvrier-Buffet, 2014). Attardons-nous plus précisément sur le Modèle Hexaflex qui propose la description de six habiletés psychologiques composant la thérapie ACT :

  • La conscience du moment présent renvoie à la capacité de l’individu à être en contact avec ses ressentis internes et externes dans le moment présent.
  • La défusion renvoie à la capacité à se détacher de ses pensées dans l’objectif de prendre du recul face à celles qui engendrent d’importantes souffrances.
  • Les valeurs renvoient à l’aptitude de l’individu à identifier ce qui compte réellement pour lui afin de percevoir ce qui donne sens à sa vie, de manière à engager des actions qui vont en ce sens.
  • Le soi-observateur ou soi-contexte renvoie à l’observation neutre et bienveillante de l’individu sur son expérience grâce à une certaine prise de recul.
  • L’acceptation renvoie à la capacité à être en contact avec son ressenti, quelle que soit sa valence.
  • Les actions engagées renvoient à l’exposition de l’individu à ses expériences internes douloureuses dans l’objectif de le guider à agir dans le sens de ses valeurs.

La Thérapie ACT se révèle comme un véritable levier face à de nombreuses problématiques psychiques et/ou relationnelles. Citons à titre d’exemples les troubles anxieux, les troubles dépressifs, les troubles sexuels, les traumatismes complexes, les troubles du comportement alimentaire, le burn-out ou encore les difficultés relationnelles au sein du couple (Seznec, 2015).

3) La thérapie du bien-être (“well-seing therapy”)

En 1999, le psychiatre Giovanni Fava présente son modèle de prise en soins thérapeutique, en s’appuyant sur le modèle multidimensionnel du bien-être de Carol Ryff, qui comporte six composantes: l’acceptation de soi, la croissance personnelle, les buts qui donnent du sens à la vie, l’autonomie, la maîtrise de l’environnement et les relations positives avec les autres (Neuville, 2020). Elle vise à amener le patient vers un niveau optimal d’épanouissement, en renforçant le “positif” et non plus en réduisant le “négatif”.

Cette thérapie se déroule en huit séances; elle repose sur l’utilisation d’un journal du bien-être qui permet au patient d’y retranscrire ses auto-observations quotidiennes (états de bien-être, ressentis positifs). À partir de ces situations positives, le thérapeute travaille à l’identification par le patient de ces moments de bien-être, au repérage des pensées automatiques irrationnelles et au renforcement des activités autonomes susceptibles d’augmenter le bien-être (Neuville, 2020).

4) La thérapie cognitive fondée sur la pleine conscience (MBSR et MBCT)

Le Mindfulness-Based-Stress-Reduction (MBSR) est un programme de réduction du stress fondé sur la pleine conscience, développé par Jon Kabat-Zinn (Neuville, 2020). Après quelques adaptations, il a donné lieu au début des années 2000 à la thérapie cognitive fondée sur la pleine conscience, ou Mindfulness-Based Cognitive Therapy (MBCT), développé par Zindel Segal et al.

Dans ces deux programmes, la pleine conscience est utilisée comme un moyen pour se distancier des pensées négatives et interrompre le processus de rumination. Cette technique permet au patient de se focaliser consciemment sur ses ressentis corporels, ses émotions et ses pensées et les accueillir telles qu’elles surviennent, sans s’y attacher et sans les juger.

Le programme de MBSR vise au développement de la capacité à prendre soin de soi, à trouver le calme intérieur dans toutes situations stressantes de la vie quotidienne, ainsi qu’à accroître sa concentration et son énergie. La MBCT est particulièrement destinée aux personnes ayant vécu un épisode dépressif au moins une fois, puisqu’il vise la prévention des rechutes dépressives.

En pratique, un programme de MBSR ou MBCT se déroule sur une durée de huit semaines, au rythme d’une séance hebdomadaire de 2 heures, complétées par un entraînement personnel de 45 minutes par jour. L’instructeur ou le thérapeute guide les participants tout au long de leur pratique de méditation; il les invite ensuite à partager leurs expériences. Il transmet ses connaissances théoriques, ainsi que les apports issus de la psychologie ou des sciences de la communication. Le contenu du programme repose également sur des exercices cognitifs, des étirements et du yoga en pleine conscience.

5) Thérapie positive du couple

Le domaine de la psychologie positive suggère que des liens sociaux positifs sont fondamentaux pour la croissance du bonheur personnel (Reis & Gable, 2003), qui peut alors devenir une quête dyadique (Hilpert et al., 2016).

Il existe différentes interventions thérapeutiques de couple basées sur l’approche de la psychologie positive. Celles-ci se basent notamment sur le rôle de la gratitude dans les relations amoureuses comme facteur favorisant les émotions positives (Algoe & Zhaoyang, 2016). De plus, lorsque les partenaires expriment facilement leur gratitude, on note une amélioration du bien-être subjectif quotidien, tels que la diminution des émotions négatives et l'amélioration de la satisfaction de la vie et des émotions positives (Algoe & Zhaoyang, 2016).

Une autre intervention thérapeutique est destinée à renforcer l'engagement et conduit à une affectivité positive et à une satisfaction relationnelle, avec un maintien de l'effet (Coulter & Malouff, 2013). Le partage social d'expériences positives entre partenaires représente un autre axe d’intervention, qui permet d'améliorer le bien-être relationnel, en particulier dans la satisfaction relationnelle perçue et la réception de la gratitude (Woods et al., 2015).

De nombreuses autres approches existent (thérapie narrative positive, thérapie positive des compétences, thérapie de la résilience positive, thérapie de la reconnaissance des forces etc.). Il est important de noter qu'elles peuvent varier en termes de méthodologies et de techniques utilisées, mais elles partagent toutes un focus sur les ressources positives et la promotion du bien-être et de la croissance personnelle.

Notes et références

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