« Recherche:Réflexions sur l'épistémologie en sciences sociales et la transmission du savoir au départ du livre « L'herbe du diable et la petite fumée » de Carlos Castañeda » : différence entre les versions

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Grâce à cette définition nous pouvons maintenant recentrer notre réflexion autour de cette question: « Est ce que les connaissances de Castañeda, recensées dans l'ouvrage qui nous concerne ici, ont été produites sur base d'étude, de réflexion et d'expérience ? » Après une simple lecture, il semblerait qu'oui. L'ouvrage de Castañeda en question traite bien des connaissances recueillies lors d'une étude sur les pratiques de ce nous appellerons la sorcellerie dans la culture Yaqui. Cette étude débouche sur une analyse détaillées d'un système de représentation et de la transmission de savoir. Et c'est en faisant personnellement l'expérience de l'apprentissage que Castañeda acquière les connaissances qui seront retransmises dans son ouvrage. Nous pourrions donc dire que sous sa forme, ''L'herbe du diable et de la petite fumée'' est bien une œuvre scientifique. Mais qu'en est-il du fond ou plus précisément du contenu de l'ouvrage ?
 
A ce stade, notre réflexion plonge au cœur de la polémique. Car la polémique se nourrit de cette question centrale: «Est ce que les connaissances ou informations contenues dans le ou les ouvrages de Castañeda sont elles vraies ?». Cette question est pertinente. Car il est vrai qu'avec beaucoup d'imagination, un grand tallent d'écriture voir des inspirations venues d'auteurs ayant déjà traité du sujet des substances hallucinatoires tel qu'Aldous Huxley, Castañeda aurait pu sans trop de peine, inventer sa thèse de toute pièce ou même partiellement. N'oublions pas qu'un auteur de fiction tel que [[w:J. R. R. Tolkien|J. R. R. Tolkien]], a réussi a travers ces nombreux ouvrages a créer un mondes fantastique reprenant l'histoire et les coutumes détaillées de nombreux peuples imaginaires. Il semblerait donc, que notre dernière question aboutirait à une impasse, car si s'il y avait un moyen d'élucider la question du vrai ou du faux, la polémique aurait sans doute disparu depuis longtemps.
 
Pour continuer notre réflexion au delà de cette impasse, je me suis rappelé des propos de [[w:Karl Popper|Karl Popper]] et de son intérêt sur la question du vrai ou du faux concernant les sciences. Sur la page internet de « l'Enciclopédie de l'AGORA » consacrée à cette auteur et rédigée par [[w:Andrée Mathieu|Andrée Mathieu]] <ref>Voir: http://agora.qc.ca/reftext.nsf/Documents/Popper--Karl_Raimund_Popper_par_Andree_Mathieu</ref>, on peut y découvrir que dans dans son œuvre maîtresse: ''La Logique de la découverte scientifique'', Popper nous dit que pour lui, « la scientificité d'une théorie réside dans la possibilité de l'invalider, de la réfuter ou encore de la tester ». C'est ce qu'il appelle le « critère de falsifiabilité ». Vu dans cette optique, « l'herbe du diable et de la petite fumée » serait donc une œuvre de faible « scientificité ». Car comment pourrions nous réfuté le compte rendu de l'enseignement d'une personne dont on ne dispose aucune possibilité de rencontre ni aucune trace de son discourt (pas de photos, pas d'enregistrements). Quand aux hallucinations de l'auteur, comment pourrions nous les réfuter dès lors qu'elles sont apparitions uniques et spécifiques à chaque personne. Dans le cas des hallucinations, nous pourrions encore prôner l'emploie de moyens drastiques tel qu'un sérum de vérité ou une séance d'hypnose, mais ces pratiques sembleraient déplacées sans pour autant apporter une réponse définitive puisqu'elle ne sont pas, a mon souvenir, reconnues comme preuves juridiques. Aussi, est-il intéressant de constater que le problème du « critère de falsifiabilité » se pose pour la plus part des ouvrages d'anthropologique social et culturelle. En effet, dans cette discipline, les connaissances établies reposent principalement sur le témoignages individuels de chercheurs et dans le meilleur des cas, sur une observation participante. Il y a bien sur les notes de terrain et les documents audio visuel quand ils existent, mais ils ne pourrons jamais répondre aux « critères de falsifiabilité ». Ainsi, pourrions nous dire que l'anthropologie sociale et culturelle, mais aussi les sciences sociales en général, ne pourraient prétendre au statut de science, puisque l'expérience du chercheur ne pour jamais être revécue dans des conditions similaires. Voici donc une nouvelle opportunité de clôturer notre réflexion épistémologique. Cependant, Il existe plusieurs cas où le «critère de falsifiabilité» de Popper fut d'application dans le domaine des sciences sociales.
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Dans le domaine de l'anthropologie sociale et culturelle nous avons la thèse de [[w:Derek Freeman|Derek Freeman]] qui démontra que dans son étude sur la société samoane, [[w:Margaret Mead|Margaret Mead]] s'était laissé influencer par un petit nombre de témoignages sans chercher à recouper ceux-ci. Dans le domaine de la sociologie nous pouvons aussi citer la polémique autour de la thèse de doctorat de [[w:Élizabeth Teissier|Germaine Elizabeth Hanselmann]], intitulée ''Situation épistémologique de l'astrologie à travers l'ambivalence fascination-rejet dans les sociétés postmodernes'' et dirigée par [[w:Michel Maffesoli|Michel Maffesoli]], lauréat du Grand Prix des Sciences humaines de l'Académie française en 1992. Cette thèse fut l'objet de nombreuses critiques dont une rédigée par [[w:Roger Establet|Roger Establet]] professeur émérite à l'Université de Provence et son condisciple [[w:Christian Baudelot|Christian Baudelot]] et publiée le 17 avril 2001 par le journal Le Monde. Mais chaque cas celui de Margaret Mead, celui de Germaine Elizabeth Hanselmann, mais aussi celui de Carlos Castañeda, la réfutation de leur travaux ou la polémique qui les entoure n'eut pas pour conséquence l'exclusion de ces ouvrages du domaine scientifique. En effet, l'œuvre de Margarette Mead continue à être abondamment citée dans les ouvrages scientifiques, Germaine Elizabeth Hanselmann fini par recevoir son titre de docteur en Sociologie et l'introduction de ''L'herbe du diable et de la petite fumée'' figure parmi la compilation de textes choisis pour un ouvrage de référence intitulé ''Ethnographic Fieldwork'' ( Antonius, 2007 ). Nous nous retrouvons donc dans une nouvelle impasse et peut-être que le raisonnement de Popper présente-t-il une faille. Cette faille serait due au fait que toutes réfutations peuvent faire l'objet elles-même d'autres réfutations et ainsi de suite. Il semblerait que Popper soit conscient de ce problème puisque Andrée Mathieu dans sa présentation écrit: « Pour Popper, la meilleure des théories n'est pas « vraie », elle n'est tout simplement « pas encore fausse ». Une théorie ne peut jamais être «fondée» positivement, mais elle peut être « corroborée ». On dit qu'une théorie est corroborée si elle résiste aux tests les plus sévères et si elle ne peut pas être remplacée avantageusement par une théorie rivale.». Remarquons enfin que dans son raisonnement, Popper parle seulement de théorie et non de fait ou d'informations. Nous devons penser qu'un raisonnement théorique irréprochable peut être fait sur base d'informations fausses, comme ce serait a peu près le cas pour ''L'herbe du diable et de la petite fumée''. Car la polémique autour de l'ouvrage de Castañeda ne semble par tourner autour de sa partie théorique, bien qu'elle soit discutable, mais bien autour de cette éternel question: «Castañeda nous a-t-il menti ? » Popper ne nous a donc pas aidé à sortir de l'impasse.
 
Cette impasse liée à notre incapacité de vérifier la véracité d'un témoignage n'est pas propre aux sciences. La justice y est confrontée tous les jours. Dans ce contexte, il y a nécessité, voir urgence, de trancher toutes polémique, afin que celle-ci n'évolue pas en troubles sociaux. Ainsi, il existe en justice un mécanisme qui permet de trancher au sein de toute polémique. Ce mécanisme consiste a sélectionner un jury selon diverses procédures qui aura pour mission de trancher après délibération sur la question du vrai et du faux. La réponse du jury sera reconnue comme définitive après un nombre limité de procédures de recourt en appelle. Ce mécanisme n'est pas étranger aux milieu scientifique. Tout au long d'un parcourt académique un «apprenti» scientifique puis un scientifique se verra contrait de soumettre à la délibération de jurys successifs ses connaissances et ses travaux. Aussi, comment pourrions nous déterminer la mission de ces jurys, si ce n'est qu'en leur attribuant le rôle de définir la scientificité de la matière à la-quel il sont soumis. Dans ce contexte, nous pouvons donc dire qu'un ouvrage serait reconnu scientifique, suite à l'approbation d'un jury. Ce jury sera composé de quelques scientifiques désignés et sa délibération sera selon les cas avec ou sans appel. Ce point de vue nous permet donc de classer l'ouvrage de Castañeda parmi les productions scientifiques, puisqu'il a été reconnu scientifique par le jury d'une thèse de doctorat. Resterait à savoir maintenant si s'il existe une procédure de recourt en appel à cette décision ? Quoi qu'il en soit, ce recourt en appel n'a jamais eu lieu et donc «l'herbe du diable et de la petite fumée» peut bel et bien être considéré comme ouvrage scientifique, aussi vrai que Landru fut reconnu coupable de ces crimes. Nous devons donc reconnaître que pour ce travail d'anthropologie à l'image de l'organisation du monde social, la reconnaissance du vrai et du faux est soumise à des règles et procédures plus qu'a une preuve d'irréfutabilité.
 
Ce fait démontré, j'aimerais maintenant attirer l'attention sur les dérives que peuvent entraîner cette délibération du critère de scientificité par l'intermédiaire d'un jury. Car a l'image d'un tribunal, le degré de scientificité dépend dès lors, du bon usage d'un jargon, mais aussi, des possibilités d'influence du jury. Au sujet du jargon et pour en revenir à l'ouvrage de Castañeda, il est remarquable de constater la différence entre la première partie et la deuxième partie de l'ouvrage. Dans la première partie, consacrée à la description de «l'enseignement» les mots sont concrets et simples, les phrases sont courtes et les idées compréhensibles à la première lecture. Dans la deuxième partie par contre où Castañeda tente de «montrer la cohérence interne et la force de l'enseignement de don Juan», les mots sont conceptuels et compliqués, les phrase sont longues et les idées difficiles à percevoir lors d'un première lecture. A mon sens, cette deuxième partie de l'ouvrage n'apporte que très peu d'informations nouvelles sur le sujet traité, et les efforts fourni pour la compréhension ne m'ont pas semblé être récompensés par un éclaircissement des propos de don Juan. De plus Castañeda nous informe en début de deuxième partie lorsqu'il parle «des concepts constituants du savoir de don Juan»: «Malgré mes efforts pour rendre ces concepts aussi fidèlement que possible, leur signification se trouve modifiée par ma tentative de classification». Enfin, l'analyse de Castañeda perd de sa crédibilité lorsqu'il conclu en écrivant à propos du système de pensée logique de don Juan: « Vaste système complexe de croyances où la recherche constituait une expérience qui menait à la félicité », ceci alors que tout au long de la retranscription de son enseignement, don Juan n'a jamais fait allusion à la félicité ni aucun termes apparentés. Cette deuxième partie ne semble donc pas apporté de nouvelles connaissances valides sur le sujet traité dans l'ouvrage. Cependant, sans cette deuxième partie, cette ouvrage aurait-il pu être reçu comme une thèse de doctorat par le jury de délibération ? Personnellement, je ne le pense pas.