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Les objets1 que l’Homme fabrique lui ont permis d’acquérir une certaine indépendance à l’égard des conditions naturelles. Grâce à eux, les possibilités du genre humain ont été considérablement augmentées. À maints égards, notre existence est devenue moins dure et plus plus riche. Il y a malheureusement des effets secondaires indésirables. À partir d’un certain seuil, il peut même se produire un renversement. Le moyen de libération devient alors une cause de servitude et un problème. La relative sécurité qui avait été conquise à travers lui fait place à une insécurité diffuse ou plus radicale. Lorsque le serviteur est considéré comme indispensable, c’est lui qui de fait devient bien souvent le maître. Petit à petit, nous sommes devenus dépendants des objets et des structures qui permettent de les utiliser. Cet assujettissement nous rend très vulnérables. Notre capacité d’adaptation aux conditions naturelles ayant diminué, en cas de pénurie grave nous serions sans doute plus démunis et désemparés que l’étaient nos ancêtres.
 
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Dans son sens habituel, un objet est une partie de la réalité qui a été façonnée ou aménagée pour assurer certaines fonctions. Ce n’est pas un simple matériau, mais ce n’est pas non plus un être vivant. Il reflète les désirs et les besoins de ceux à qui il est destiné mais il n’a pas de volonté propre : le plus sophistiqué ne sera toujours qu’un automate. Les objets sont inconscients d’eux-mêmes et étrangers les uns aux autres : il n’y a pas entre eux de liens de vie, de cœur ou d’idées À force de s’accumuler, ils forment une couche isolante qui mobilise une partie importante de notre énergie. De ce fait, malgré le temps qu’ils nous permettent d’épargner, nous parvenons difficilement à nous rendre disponibles pour réfléchir profondément et être attentifs aux êtres vivants. Le bonheur dépend moins de facteurs externes que de la qualité de ce que chacun ressent. Si l’on peut trouver en soi de quoi être heureux avec peu de choses, notre vie y gagne en aisance et en authenticité. Moins une personne a de besoins et plus elle est libre. Malheureusement, à cause du matérialisme ambiant, l’individu n’a plus guère confiance en ce qu’il peut générer en lui-même. Il n’ose plus faire un pas sans s’entourer d’accessoires.
 
Notre société d’hyper-consommation est le résultat d’un emballement du désir. Pour satisfaire les innombrables formes qu’il prend, l’humanité impose des conditions terribles aux autres espèces vivant sur la planète. Lui-même en subit les conséquences. Les effets destructeurs sont difficiles à prévoir car ils se manifestent souvent de manière diffuse, parfois loin de la source. Ils apparaissent sous forme de conflits, de pollutions, et contribuent au sentiment de vide intérieur qui touche apparemment un nombre croissant de personnes. Les plus graves seront sans doute laissés en héritage aux générations futures. Pendant ce temps, par manque d’information, intérêt ou préjugé corporatiste, les experts discréditent les philosophies et les pratiques qui permettent de mener une existence épanouissante sans avoir recours à tous ces gadgets soi-disant indispensables et ces produits tous plus miraculeux les uns que les autres. Tous les secteurs sont contaminés. À cause de la logique absurde de notre mode d’organisation, ceux dont la profession consiste à aider autrui n’ont pas toujours intérêt à ce que soient mises en œuvre des solutions permettant de faire disparaître la cause des maux que leurs prestations se proposent de soulager ou d’éradiquer. Même si, au départ, leur choix était désintéressé et qu’ils sont toujours consciencieux, la crainte de se voir dépourvus d’emploi ou de raison d’être peut les inciter à privilégier instinctivement les solutions qui favorisent le maintien du désordre existant. À leur manière, les « mutins de Panurge » sont eux aussi des artisans de la stagnation. Installés dans une révolte systématique, sans risque et de bon ton, ils refusent de coopérer avec les pouvoirs en place même si les propositions vont réellement dans le sens du progrès. Le chemin de l’équilibre évolutif est évidemment difficile à trouver mais c’est le seul qui soit véritablement réaliste.
 
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Nos choix sont très largement automatiques. Chacun d’entre nous a cependant la possibilité de les rendre plus conscients et libres. Avant de faire une nouvelle acquisition, prenons un peu de recul et interrogeons nous à son sujet : « Est-ce vraiment de cela dont j’ai besoin ? Cet achat ne pourrait il pas être remplacé avantageusement par un changement d’attitude ou par une activité créative permettant de parvenir à un résultat équivalent ? » Nous pouvons ensuite élargir notre champ d’investigation en nous demandant, par exemple :« Quelles seront les conséquences probables pour moi-même, pour les autres et le milieu naturel2 ? Quelle vision du monde cela implique-t-il ?» Si nous voulons être autre chose que des figurants, nous devons avoir le courage de nous déterminer en fonction des valeurs auxquelles nous croyons. Il est préférable de le faire progressivement et avec souplesse, en le vivant non comme un devoir qui nous impose d’héroïques privations mais comme un jeu libérateur.
 
Certaines productions plus que d’autres ont été conçues, réalisées et diffusées en respectant au maximum la dignité humaine et les équilibres écologiques : elles méritent d’être soutenues. Pour préserver notre liberté, nous éviterons tout ce qui pourrait nous engager sans raison majeure sur des voies irréversibles. Nous accorderons au contraire une attention particulière à tout ce qui peut nous aider à préserver ou accroître notre autonomie. La société de consommation a un pouvoir hypnotique : elle réduit le monde à un réseau dense et brillant mais clos où nous oublions la prodigieuse diversité des possibilités que la vie nous offre. Une fois que les besoins de base sont satisfaits, il ne faut pas s’appesantir dans ce registre en consacrant beaucoup d’énergie pour l’enrichir. Il vaut mieux essayer de se tourner vers des satisfactions plus subtiles et des aspirations plus élevées. La plupart des Hommes passent leur vie à peaufiner le socle de leur existence, sans même songer à édifier l’œuvre d’art qu’il est destiné à soutenir.
 
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Les objets peuvent faciliter certaines prises de conscience et nous aider à développer nos capacités. Ils ne constituent cependant pas en eux-mêmes un acquis faisant désormais partie de l’individu au même titre que la station debout ou le langage articulé. Ils ne sont pas non plus transmissibles par des voies naturelles. La plupart d’entre eux sont de simples prothèses ou alors des solutions provisoires, un peu comme ces youppalas (ou ces déambulateurs) qui facilitent les déplacements de ceux qui ne marchent pas encore ou qui ont pour l’instant des difficultés à y parvenir. Les objets sont utiles tant que nous n’avons pas développé les facultés permettant de parvenir au même résultat sans leur aide. Si nous atteignions ce stade, l’être humain pourrait concilier son désir de maîtrise avec son aspiration à vivre en harmonie avec l’ensemble de ce qui existe. Tel est le grand défi à relever : le seul qui nous permette de nous élever au dessus des lots de consolation dont nous devons actuellement nous contenter. Les conditions requises se trouvent peu à peu réunies.
 
 
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Les réalisations de la technologie réduisent l'impact des déterminismes biologiques. Elles ont aussi un rôle éducatif en nous familiarisant avec toutes une gamme de possibilités. Il s’établit ainsi, grâce à elles, une relation qui prépare progressivement le terrain.. Lorsque la connaissance de la matière et celle de notre psychisme auront atteint un degré de développement suffisant, la connexion entre les deux domaines pourra être réalisée. Si nous parvenons à un haut degré de culture de nos facultés mentales et une compréhension intime du monde, nous pouvons espérer atteindre – sans le secours d’aucun accessoire – des objectifs qui nécessitent aujourd’hui le recours à un appareillage très complexe. Comme la technique fait appel à des supports matériels de plus en plus légers, discrets et faciles à manipuler, une telle perspective devient de moins en moins improbable. Si nous choisissons de prendre cette orientation,
nous apprendrons à mieux utiliser notre volonté et nous maîtriserons mieux les facteurs susceptibles de favoriser la réceptivité et la créativité. La frontière entre l’esprit et la matière deviendra de plus en plus perméable, ouvrant ainsi la voie à un déchiffrement approfondi de leur langue commune. La connaissance de l’alphabet qui leur permet de communiquer nous permettra d’envisager une contribution consciente à l’évolution. Une plus grande liberté de mouvement sera possible, ainsi qu’une insertion plus harmonieuse dans le monde. La technologie sera réduite au minimum et pour les cas où il n’existe pas d’autre solution accessible. Les objets étant plus rares, ils pourraient être finement personnalisés