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Un grand nombre de biens et de services sont disponibles grâce à l’activité des entreprises. Ce qui se passe à l’intérieur de ce cadre est important à plus d’un titre. L’état d’esprit qui y règne n’a pas seulement une influence sur la qualité des services ou des produits, il se répercute également sur la vie privée et le comportement social de ceux qui y travaillent.
 
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La plupart des entreprises sont actuellement tributaires d’un système économique qui les pousse à adopter des stratégies de guerre. Celles qui satisfont les mêmes besoins qu’elles sont considérées comme des adversaires potentiels qu’il faut neutraliser ou éliminer. Beaucoup considèrent que ceci est indispensable pour maintenir ses positions et conquérir des parts de marché. Les employés subissent parfois une sorte d’embrigadement idéologique pour qu’ils suivent le mouvement sans état d’âme et consentent à d’importants sacrifices. Mais bien souvent, la conscience de la précarité de leur situation suffit. De nos jours, les Hommes et les machines se trouvent mis en concurrence dans un grand nombre de domaines. Lorsqu’il s’agit de trancher en faveur de l’un ou de l’autre, les facteurs humains sont rarement l’élément déterminant. – En tous cas, pas pour l’instant. Durant les périodes où le chômage est important, les salariés doivent accepter toutes sortes d’atteintes à leur dignité. S’ils refusent de se soumettre à ce qui est exigé d’eux, on leur rappelle qu’ils peuvent facilement être remplacés par d’autres, tout aussi compétents, qui seraient très heureux de pouvoir occuper ce poste, même dans ces conditions. Les cadres eux-mêmes sont soumis à ce régime. Chacun vit donc avec un sentiment d’insécurité quelle que soit la fonction qu’il occupe. La situation du client-roi n’est pas plus enviable. On prend soin de sa petite personne dans la mesure où il semble solvable et susceptible d’être intéressé par le produit Mais si plus tard il se trouve dans l’impossibilité de payer ses traites, on emploiera avec lui un tout autre langage que celui du cœur. Dans cette économie dominée par l’esprit calculateur, les sentiments les plus humains parviennent tout de même à jouer un rôle, mais c’est presque par effraction.
 
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Cette situation n’a rien d’une fatalité. Ce n’est pas non plus la faute d’une classe dirigeante ou la conséquence inévitable de conditions particulières : elle est le résultat d’une attitude. L’esprit de solidarité et le courage font défaut à tous les échelons. S’il n’y avait pas eu tant d’avidité, de démissions, de visions à court terme et de fuite devant les responsabilités, un système aussi mesquin n’aurait jamais pu se mettre en place. Heureusement, les ressources humaines sont loin d’être épuisées. Si nous retrouvons le carrefour où nous nous sommes trompés de chemin, les meilleures d’entre elles pourront diriger le cours de nos vies.
 
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La production standardisée engendre une compétition forcenée. Certaines entreprises pourraient se mettre à fabriquer des objets personnalisés, faciles à réparer, à recycler ou à transformer. Dans un premier temps tout au moins, à cause de l’originalité de leur production, elles ne seraient pas directement en concurrence avec d’autres et l’atmosphère s’en ressentirait. Cela permettrait sans doute une amélioration de la qualité des conditions de travail et des relations avec les clients et le milieu naturel. Si nous voulons vivre dans un monde meilleur, nous devons consentir de bon cœur à quelques sacrifices. Il est naturel de payer plus cher ce qui a été produit en respectant les équilibres écologiques, la personnalité de l’utilisateur et la dignité des employés. Ceux qui aimeraient participer au développement de ce mode de production pourraient se rassembler au sein de réseaux de solidarité qui assureraient une partie de l’investissement ou achèteraient en priorité ces produits d’une plus grande valeur éthique et esthétique. Ce seraient peut-être les prémisses d’une nouveau type d’économie qui coexisterait avec le système actuel. D’innombrables possibilités s’offrent actuellement à l’humanité. L’important est de réveiller nos propres rêves. Pour cela nous devons cesser de nous laisser hypnotiser par ce monde de papier mâché et ses marionnettes qui nous assurent que notre mode d’organisation est conforme à l’ordre des choses, ou tout au moins qu’il est le moins mauvais, compte tenu des limites de la nature humaine.
 
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L’hyper-spécialisation engendre un sentiment d’isolement. Lorsqu’on est assigné à un poste, accaparé en permanence par un certain genre d’activités, on peut difficilement être conscient de ce que les autres ont à vivre. L’identification avec une fonction unique accentue les risques de rigidité dans les relations humaines. Comme chacun est tenu d’atteindre certains objectifs, il se voit dans l’obligation d’exiger des autres ce qui lui permet de respecter ses engagements. Les antagonismes prennent alors le pas sur le sentiment d’être réunis dans un même but. Ceux qui le souhaitent devraient pouvoir assumer tour à tour plusieurs fonctions nettement distinctes. Ce genre d’aménagement est sans doute possible dans la majeure partie des cas. Les choix s’effectueraient en fonction du contexte et des aptitudes de chacun. Le changement d’activité se produirait selon les rythmes qui conviendraient le mieux aux besoins des différents partenaires : à l’échelle de la journée, de la semaine ou de l’année. Pour assurer une diversité suffisante, des accords entre entreprises pourraient être passés. Dans le même temps, des informations sur leur fonctionnement pourraient être diffusées. Chacun aurait ainsi une bien meilleure compréhension du point de vue des autres. Il verrait de l’intérieur les difficultés auxquelles ils se trouvent confrontés. Une coopération plus chaleureuse et efficace en découlerait. Les bénéfices seraient également importants. Après un effort intellectuel intense, les activités manuelles délassent et permettent de se ressourcer. Inversement, après un travail très physique ou répétitif, l’activité créative ou relationnelle est réparatrice et stimulante. Cette alternance aurait des effets bénéfiques, notamment sur la santé. De plus, chacun de ces domaines permet de développer des qualités pouvant s’avérer très utiles dans les autres. Cette diversité des fonctions favoriserait le développement de personnalités plus riches, attentives à leurs semblables et davantage ouvertes sur les différents aspects de l’existence.
 
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Tout ce qui relie favorise l’adaptation et la communication. Des passerelles ou des transitions doivent être aménagées partout où un fossé risque de se creuser. Pour beaucoup, il existe une opposition entre les loisirs et le travail. Les premiers sont vécus comme une source d’épanouissement. Le second est souvent considéré comme quelque chose qui est pénible et peu exaltant mais néanmoins nécessaire pour obtenir ce qui nous permet de satisfaire nos besoins. Cette dichotomie est surtout présente chez ceux qui doivent se contenter d’obéir aux directives : plus l’autonomie et la possibilité de s’exprimer sont importantes, plus elle s’estompe. Pour que nous puissions vivre à plein temps, il serait souhaitable de repenser les tâches de façon à les rendre plus agréables, valorisantes et favorables à l’équilibre de la personne. C’est un champ de recherche passionnant auxquels beaucoup d’artistes et de psychologues pourraient contribuer. La qualité des relations mériterait elle aussi de devenir un objectif prioritaire. Si l’on tient compte de tout, aucun préjudice matériel n’en résulterait. Si chacun a le sentiment d’effectuer une tâche véritablement utile et s’il sait qu’il peut compter sur l’aide et la compréhension de ses collègues, il donnera plus facilement le meilleur de lui-même. Avoir comme fondement de l’économie une coopération aussi agréable que possible pour le bien de tous peut sembler naïf mais c’est sans doute la seule façon de sortir des impasses sociales et écologiques où nous sommes engagés. Insuffler un supplément d’âme dans le monde du travail n’est cependant pas sans risque ; en particulier celui de voir se mettre en place une sorte de religion d’entreprise qui englue l’individu. Chacun doit rester libre de décider sur quels bases et à quel degré il est prêt à s’impliquer.
 
L’entrée dans la vie active peut se faire par étapes, et la charge de travail être réduite graduellement à partir du moment où les forces et les capacités commencent à diminuer. Pour autant qu’ils le souhaitent, les retraités devraient pouvoir rester en contact avec la vie professionnelle, de préférence à titre bénévole et de façon épisodique, pour le simple plaisir de faire bénéficier les autres de leur expérience et pour continuer à se sentir pleinement intégré dans le mouvement de la vie. Les enfants eux-mêmes pourraient faire de temps à autre une apparition sur les lieux de travail, ne serait-ce que pour rappeler aux adultes que tout ceci est un jeu qu’il ne faut pas prendre trop au sérieux. Souvent, les meilleures solutions apparaissent lorsqu’on parvient à se dégager des cadres habituels. La présence et les réflexions des enfants créeraient sans doute une effervescence qui ferait germer quelques idées neuves.
 
Tout le monde n’attribue pas la même importance à l’argent. Ceux qui ont d’autres valeurs prioritaires déplorent de devoir se plier aux objectifs de ceux qui détiennent le pouvoir économique. Les personnes qui en ressentent le besoin devraient avoir la possibilité de rejoindre des entreprises où la distinction entre actionnaire et salarié serait atténuée ou n’aurait plus cours. Tous les participants auraient un statut d’associés et recevraient une part de bénéfice en proportion de la pénibilité du travail et des services rendus. Les décisions relatives à la production seraient prises par ceux qui ont les compétences requises. Par contre tout ce qui concerne les conditions de travail serait décidé de façon totalement démocratique. À cet égard, chacun disposerait d’un pouvoir égal, quel que soit sa place dans la hiérarchie. Et il en irait de même lorsqu’il s’agirait de la répartition des bénéfices. Les pouvoirs publics veilleraient à ce qu’un minimum soit assuré à tous en cas de difficulté. L’accès aux capital demanderait lui aussi à être revu en fonction de ces principes. Les entrepreneurs porteurs de projets intéressants et viables devraient pouvoir disposer facilement des capitaux nécessaires pour les mener à bien sans s’endetter même si au départ ils ne possèdent aucune fortune personnelle. Ici également, l’aide de l’état ou des collectivités locales pourrait se conjuguer avec le soutien des particuliers qui sont en sympathie avec les objectifs poursuivis.
 
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Grâce à toutes ces modulations chacun parviendrait plus facilement à trouver une place qui serait satisfaisante pour lui tout en étant socialement utile. La plupart des frustrations et des tensions s’estomperaient sans doute. La période actuelle est propice aux changements de cap. Il nous appartient de faire évoluer les sociétés dans un sens ou un autre. Les obstacles qui se dressent devant nous ne sont pas insurmontables. Les solutions peuvent varier considérablement selon le contexte. L’une d’entre elles me semble pouvoir concilier notre besoin de sécurité et notre soif de liberté. Deux sphères distinctes pourraient coexister.