« Recherche:Quel abri pour l'être humain ? » : différence entre les versions

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== Introduction ==
 
Le 11 janvier 2011, je suis parti pour [[w:Salvador de Bahia|Salvador de Bahia]], au Brésil, pour mon mémoire de fin de master en [[w:anthropologie|anthropologie]]. J'aiJ’ai eu pour idée de départ de m'investir dans une [[w:observation participante|observation participante]], au sein d'un réseau mondial de rencontre et d'entraide pour l'hébergement appelé [[w:Couchsurfing|CouchSurfing]]. Ce réseau permet à ses membres, souvent des touristes mais pas uniquement, d'entrer en contact via Internet avec les autres membres de la communauté vivant dans les endroits qu’ils visitent. Les demandes de rencontre et d'hébergement au sein de la communauté se font via le site http://www.couchsurfing.org. Sur la page d’accueil, on peut lire le slogan : « Participez à la création d'un monde meilleur, canapé après canapé<ref> http://www.couchsurfing.org/index.html</ref> ! ». Comme le réseau s'organise aussi en groupes géographique, j'ai eu pour idée de partager la vie communautaire du groupe de Salvador da Bahia, composé de plus de deux mille membres<ref> http://www.couchsurfing.org/group.html?gid=1167)</ref>.
 
Mais, une fois rendu sur place, je me suis retrouvé devant une situation qui m'a rapidement fait changer d'avis. Durant cette période estivale, et à l'approche de la période de carnaval, la communauté CouchSurfing de Salvador était saturée de demandes de logement, et je devais encore trouver la bonne manière de m'adresser à cette communauté, tout en m'habituant à ce nouvel environnement que constituait la ville de Salvador. Tout ceci me faisait perdre énormément de temps et d'argent dans les [[w:cybercafés|cybercafés]]. J'avais fait le mauvais choix de partir sans ordinateur dans l'idée d'être plus proche de la population en fréquentant les cybercafés et en partageant une situation que je croyais être celle du CouchSurfer. C'était une fausse idée. Les premiers CouchSurfers que j'ai rencontrés, un jeune couple de Slovènes, voyageaient avec un ordinateur portable et justifiaient les inconvénients du transport par la facilité et la gratuité de l'accès [[w:Internet|Internet]] grâce à de nombreux réseaux [[w:wi-fi|wi-fi]] ouverts. Quand j'ai pris la décision d'acheter un ordinateur portable pour me faciliter la vie, il m'a été impossible d'en trouver un d'occasion ou d'en acheter un neuf, car au [[w:Brésil|Brésil]], les prix des produits électroniques importés se sont avérés deux fois plus élevés que ceux de [[w:Belgique|Belgique]].
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Trois nuits après mon arrivée, sur plus d'une vingtaine de demandes personnalisées, aucune d'entre elles ne fut concluante et, chaque soir, je devais trouver une solution de dernière minute pour mon hébergement. Le 14 janvier, jour de mon anniversaire, une proposition d'hébergement qui déboucha sur un conflit en ligne, fut annulée vers 22 heures et m’obligea à trouver un logement de dernière minute chez un autre CouchSurfer rencontré dans un bar<ref> http://www.couchsurfing.org/group_read.html?gid=20846&post=7806668#gpid7806668</ref>. Le lendemain, à bout d'énergie et de motivation, je me suis donc résigné à prendre une chambre d'hôtel à cinquante réaux la nuit pour enfin me reposer de la fatigue du voyage et des difficultés d'acclimatation. Dans la ville de Salvador, les prix d’hôtel, complets pour la plupart à cette époque, pouvaient grimper jusqu'à cent cinquante réaux la nuit (concernant le change, il fallait compter environ un euro pour deux réaux). Deux nuits plus tard, je trouvais une place dans une [[w:auberge de jeunesse|auberge de jeunesse]], à quarante réaux la nuit avec un accès Internet gratuit.
 
Mais ma situation s'est compliquée à nouveau lorsque je me suis retrouvé sans ressource financière après le blocage de mes deux cartes bancaires. La première fut bloquée suite à une erreur répétée dans l'encodage du mot de passe, et la deuxième en raison de la nouvelle législation relative aux services de paiement et l’espace de paiement européen unifié<ref> http://economie.fgov.be/fr/binaries/Brochure_nouvelle_legislation_SEPA_201102_tcm326-128429.pdf</ref> qui a limité l'utilisation de ma carte de débit dans la [[w:zone euro|zone euro]] sans que j'en sois averti. Je me retrouvais de la sorte avec une quantité d'argent limitée pour terminer ce séjour de trois mois, et il me fallait donc trouver rapidement un lieu qui me permettrait de faire mon travail de terrain tout en vivant de façon économe. Sept jours et six nuits se sont ainsi écoulés avant que mes recherches aboutissent. Durant ce temps, je faisais connaissance avec d'autres personnes en manque d'abri, comme par exemple un jeune Belge en voyage de puis plus d'un an Amérique latine et temporairement installé Salvador ou encore un Bahianais quinquagénaire dormant dans la rue et blessé au bras suite à une agression. J'aiJ’ai découvert dans les rues de Salvador de nombreux sans abris qui dorment le jour dans des lieux fréquentés, et veillent la nuit pour des raisons évidentes de sécurité. Toutes ces réalités quotidiennes liées à mes propres soucis de logement, m'ont posé réflexion sur la condition de l'être humain qui, depuis la nuit des temps, a besoin d'un abri physique pour garantir sa sécurité durant son sommeil, que ce soit une caverne ou un hôtel.
 
Suite à l'abandon du projet CouchSurfing, j'ai ensuite vécu d'autres expériences qui m'ont confronté à des besoins d'autres natures mais toujours proche du besoin conceptuel d'un abri. Quelques mois plus tard, dans ce travail de réflexion et d'écriture, j'en viens à développer cette idée que l'être humain a besoin de trois types d'abris pour vivre dans des conditions de sérénité :
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Dans mon trajet d'avion pour Salvador, je me suis retrouvé, par le plus grand des hasards, assis à côté d'un membre de la communauté CouchSurfing. C'était un jeune Suisse venu au Salvador pour un échange universitaire et qui, mieux organisé que moi, avait trouvé via le réseau une personne pour l'héberger durant les deux premiers jours de son arrivée. Nous nous étions donné rendez-vous le lendemain de notre arrivée pour assister au «[[w:pt:Lavagem do Bonfim| Lavagem do Bonfim]] », un cortège religieux qui commémore le transfert de l'église de la Penha à l'[[w:église Nosso Senhor de Bonfim|église « Nosso Senhor de Bonfim »]] d'une image du Christ apportée de [[w:Lisbonne|Lisbonne]] en [[w:1745|1745]] par Teodósio Rodrigues de Farias, officier de la marine portugaise. Ce fut un bon moment passé ensemble, hormis les coups de soleil et, chose plus embarrassante, le vol de mon carnet de terrain... Cela s'était passé dans la cohue qui a lieu habituellement en fin de cortège, là où tout le monde essaye de toucher la façade de l'église. Deux jeunes [[w:Vol à la tire|voleurs à la tire]] avaient tenté de me prendre mon [[w:caméscope|caméscope]], sans succès, mais ils ont réussi à prendre mon petit carnet de terrain que j'avais avec imprudente garder sur moi dans une poche de mon pantalon située au niveau de la cuisse. Trois jours de collecte d'informations perdues. J'avais aussi dans ce carnet l'adresse et le numéro de téléphone de mon logement, ce qui me causa toutes les difficultés du monde pour retrouver mon chemin.
 
J'aiJ’ai finalement retrouvé mon logement et je me suis ensuite estimé heureux que cela m'arrive en début de séjour et que seul mon carnet ait été volé. Et tirant leçon de cette mésaventure, j'étais bien déterminé, à trouver le soir même, des solutions pour ne plus jamais perdre de données de terrain. J'avais pour objectif de parer à toutes situations possibles dans une ville où l'insécurité règne au point d'en faire l'unique sujet d'un [[w:tract|tract]] de [[w:propagande|propagande]] (voir photo ci-dessous). J'utilisais déjà une ceinture munie d'une pochette en coton collée sur mon ventre dans laquelle je transportais mon passeport, mon argent et mes cartes de banque, mais elle était bien trop petite pour y mettre un carnet. Et puis de toute façon, il est courant, en cas d'agression à Salvador, que l'on doive se déshabiller. Il me fallait donc trouver un autre moyen de stockage plus facile et plus sûr. Après réflexion, j'ai fini par opter pour le [[w:dictaphone|dictaphone]]. Par rapport au carnet de terrain, je lui trouvais de nombreux avantages. Il était moins encombrant et plus facile à dissimuler qu'un ou plusieurs carnets de terrain. De plus, par rapport au carnet, je pouvais l'utiliser en un minimum de temps et de manipulations. Les informations y étaient directement stockées sous forme de fichiers [[w:numérique|numériques]] triés et nommés par date et heure, et tout pouvait ensuite facilement être transmis en lieu sûr via une connexion Internet.
 
[[Fichier:Tract PMDB.JPG|thumb|Photo n<sup>o</sup>2: Tract du parti du mouvement démocratique brésilien concernant la criminalité dans l'état de Bahia.|upright=1.2]]
 
Malheureusement, j'ai passé énormément de temps pour essayer d'extraire les fichiers de mon dictaphone sans jamais y parvenir. Pendant près de dix jours, je me suis obstiné en testant le dictaphone sur différents ordinateurs, avec différents câbles et selon différentes configurations, mais sans aucun résultat. Finalement, quand je suis arrivé à saturation de la mémoire de cet appareil que l'on risquait de me voler, j'ai pris la décision de réécouter l'entièreté des messages pour les retranscrire par écrit et les mettre en lieu sûr. Ma première idée fut de le faire sur ordinateur, de nouveau pour pouvoir sauvegarder les informations via une connexion Internet. Mais comme j'avais fait le choix de partir sans ordinateur pour des raisons déjà connues, la solution fut donc de retranscrire mes enregistrements dans des cahiers et de les photographier ensuite page par page avec un appareil photo digital afin de stocker les images sur Internet. J'aiJ’ai donc acheté à bon prix un appareil de fabrication brésilienne qui me semblait idéal par sa petite taille, sa couleur discrète, ses fonctions photo et vidéo, ses choix de [[w:compression d'image|compression d'image]] et puis sutout son alimentation par piles de type [[w:Pile électrique|AA]]. Tout comme mon dictaphone, alimentation par pille sme garantissait une utilisation prolongée sur des terrains où l'on ne dispose pas d'accès à un [[w:réseau de distribution d'électricité|réseau de distribution d'électricité]].
 
La retranscription détaillée des enregistrements du dictaphone me demanda plus de trois jours complets durant lesquels j'ai rempli plus de 110 pages de cahier format [[w:Format de papier|A3]] et vidé complètement un stylo à bille dont je m'étais même assuré de la permanence des traits en cas de contact à l'eau. Mais, cette fois-ci, ce fut la taille de tous les fichiers photo réunis qui m’empêcha de les télécharger dans un temps raisonnable, vu le faible débit des connexions offertes dans les cybercafés. Ce système n'aurait donc pu fonctionner que lors d'une sauvegarde journalière, mais il était trop tard. La solution ultime après plus de 15 jours de recherche fut finalement de transférer régulièrement, grâce à l'ordinateur d'un cybercafé, les images de la carte mémoire de mon appareil photo vers une autre carte mémoire de type [[w:micro SD|micro SD]] que je gardais en lieu sûr et que j’imaginais même pouvoir dissimuler sous un [[w:sparadrap|sparadrap]] en cas de situation à risque. Aujourd'hui, je pense que cette solution reste la plus adéquate pour prévenir la perte ou le vol de mes données sur un terrain où l'accès à Internet est problématique voir impossible et où le vol et l'agression sont à craindre.
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[[Fichier:Sans_abri2_Salvador.JPG|thumb|Photo n<sup>o</sup>6: Femme enceinte sans-abri couchée sur le trottoir d'une rue de Salvador de Bahia.|upright=1.2]]
 
J'aiJ’ai un jour partagé un repas avec une personne qui venait de passer la nuit à la rue. Assis sur un appui de fenêtre d'un building, nous avons mangé tout en discutant de sa vie de quinquagénaire sans emploi. Jean sentait l'alcool et le tabac bien qu’il ne semblait pas être dans un état d'ébriété. Il m'avoua en éteignant sa cigarette qu’il avait bu et que cela n'était pas difficile pour les gens de la rue. Selon lui, les gens donnent plus facilement de l'alcool ou du tabac que de la nourriture. Jean était blessé au visage et à l'avant-bras. Il avait enveloppé sa plaie dans un morceau de tissu crasseux sans doute pour éviter que les mouches ne s'y posent. Cette blessure, il me dit qu'elle avait été provoquée par un coup de couteau donné par des personnes qui tentaient de voler une voiture qu’il surveillait pour gagner l'équivalent d'un euro.
 
Au cours de la conversation, j'apprends que Jean a de la famille à [[w:Rio|Rio]], mais qu’il ne possède pas les quatre cents réaux qui lui permettraient de faire le voyage. Il me dit aussi qu’il a bien un endroit où dormir à Salvador, mais qu’il n'a pas les trois réaux pour prendre le bus qui lui permettrait de s'y rendre. Bien qu’il vient de passé cette nuit à la rue, Jean m'informe qu’il a travaillé quinze ans pour la propriétaire du bâtiment qui se situe de l'autre côté de la rue où nous sommes en train de manger. Actuellement, à cinquante-cinq ans, il se considère trop vieux pour trouver du travail dans son métier de [[w:mécanicien automobile|mécanicien automobile]]. Si par chance il en trouvait, ce serait pour être sous-payé et mal traité. Regarde ce chien qui boite, me dit-il, c'est quelqu'un qui l'a blessé sans aucune raison...
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[[Fichier:Maison Itaparica.JPG|thumb|upright=2|Photo n<sup>o</sup>8: A gauche en blanc, maison d'Olivia sur l’île d'Itaparica.|upright=3.5]]
 
Cette dame avec qui je partageais le logement devait avoir plus de quarante ans et était réputée pour fréquenter régulièrement l'une des nombreuses églises protestantes [[w:Évangélisme|évangélistes]] implantées sur l'île. J'étais donc rassuré d’avoir trouvé une habitation et une perspective de recherche de terrain. L'habitation était confortable et n'avait pour seuls défauts qu'un local de douche muni d'une [[w:installation électrique|installation électrique]] quelque peut criminelle et, chose plus embarrassante, des toilettes qui semblaient bouchées depuis un certain temps. Mais tout cela m'était égal, car je me sentais en sécurité dans cet endroit dont il était possible de se barricader pour la nuit avec des portes et fenêtres équipées de grilles en fer forgé. J'aiJ’ai passé deux nuits seul avant que ma cohabitante ne revienne de Salvador. Malheureusement, le contact s'est avéré difficile. Nous n'avons eu qu'une seule conversation pour ainsi dire le matin du lendemain de son retour. Elle lisait la [[w:bible|bible]] dans un fauteuil placé dans le préau de la maison, je lui ai adressé la parole en abordant le sujet de la religion à travers quelques questions, et j'ai appris en peu de mots qu'elle avait été [[w:Catholicisme|catholique]] avant d'être [[w:protestant|protestante]] [[w:évangéliste|évangéliste]] et que la bible qu'elle était en train de lire n'était pas différente de celle qu'elle lisait avant de s'être convertie sauf que pour elle maintenant, Marie, la mère de Jésus « Ela estava morta e estão todos » (Elle était morte et puis c'est tout). Elle conclut notre conversation en me disant qu’il fallait que je quitte la maison d'ici huit jours car elle comptait recevoir de la famille. Nos conversations suivantes se sont résumées à des mesures de sécurité quant à la fermeture des deux cadenas de la grille métallique qui bloque l'entrée de la maison.
 
[[Fichier:Compteur électrique.jpg|thumb|Photo n<sup>o</sup>10: Coffret électrique composé d'un compteur, d'un disjoncteur unique et de deux porte-bonheur... : « Mãos de figa » (mains de figue).|upright=1.2]]
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[[Fichier:Capoeira Itaparica.jpg|thumb|upright=2|Photo n<sup>o</sup>15: Roda de capoeira dans la salle de l'« Oficina de Artes ».|upright=3.5]]
 
Le lendemain, Omara est partie à Salvador pour faire des examens médicaux concernant ses pierres aux reins. Durant son absence, Passarinho a cuisiné pour la petite communauté composée du fils de Omara, trois jeunes capoeiristes envoyées de suisse par le frère d'Omara, une jeune brésilienne venant de la campagne et logeant ici pour pouvoir terminer ses études secondaires, Passarinho et moi-même sans oublier Sapeca et Vida, la chatte et la chienne de la maison. J'aiJ’ai remarqué que durant l'absence d'Omara les tâches et activités étaient beaucoup plus négligées. Ce jour-là par exemple, les restes de repas préparés la veille qui n'ayant pas été mis au frigidaire ont dû être jetés. Quand j'en fis la remarque à Omara à son retour de Salvador, elle dit « quando o gato sai, o rato sobe na mesa » (Quand le chat est parti les souris dansent).
 
Nous avons eu de nombreuses conversations avec Omara. Deux de nos conversations furent enregistrés durant lesquels elle me dévoilait sa vie sans gène et sans tabou. Omara était une personne qui avait assez vécu pour n'avait plus rien à prouver. « Tudo é complicado » (tout est compliqué) me disait-elle d’emblée la première fois que l'on a abordé son histoire de vie. Sans entrer dans des détails trop intimes, je dirai juste qu'a {{unité|52|ans}}, Omara a toujours eu des difficultés relationnelles dans son enfance dans une famille dont le père était originaire de l'île. Après multiples péripéties, Omara est arrivée sur l'île en 1996 et a ouvert l'Oficina de Artes en 1998. Elle vit actuellement depuis plusieurs années séparée de son ex-mari, père de ses trois enfants, avec qui elle s'était mariée par amour à l'âge de {{unité|20|ans}}. Ce mariage lui permit aussi d'accéder enfin à une liberté d'adulte qui lui a toujours été confisquée par sa mère. Il y a eu de grosses crises avec son mari, mais leur amitié est restée très forte. Il continue à l'inviter régulièrement à des activités festives auxquelles j'ai pu assister à deux reprises. D'une vie de couple et d'un emploi stable elle s'est retrouvée petit à petit sans rien. En parlant de ses activités au sein de l'Oficina de artes, elle me dit que « O qu'estava para mim um ocupação secundária que se tornou uma maneira de sobreviver » (Ce qui était pour moi une occupation secondaire est devenu une manière de survivre). Avant de se retrouver dans sa situation actuelle, elle est passée par plusieurs emplois de courts termes et de nombreuses périodes de crises dans son couple. Aujourd'hui, l'Oficina de Artes me semblait être pour elle, à la fois une famille, une occupations et un gagne-pain. Le bâtiment appartient à son frère aîné, actuellement grand maître du groupe de capoeira Union et installé depuis de nombreuses années en Suisse, pays à partir duquel il a fondé plusieurs écoles de Capoeira en Europe. J'aiJ’ai cru comprendre qu'elle ne lui payait pas de loyer mais qu'en échange, elle accueillait kes étudiants de l'école de son frère. Je n'ai pas cherché à rentrer dans les détails indiscrèts au niveau de sa vie, mais je peux dire que le prix des cours de Capoeira et de théâtre sont dérisoires et que le prix de l'hébergement varie entre la gratuité pour certains et cinquante réaux par jours nourriture incluse pour les personnes européennes ayant de bonnes ressources. Lorsque Omara décida de partager le cachet de la représentation théâtrale avec tous ses élèves alors que quelques jours plus tôt l'Oficina de Artes était resté une nuit sans électricité pour une facture d'électricité impayée, j'ai compris que le moteur du projet n'était pas l'argent.
 
[[Fichier:Rues Itaparica.jpg|thumb|upright=2|Photo n<sup>o</sup>16: Rues d'Itaparica.|upright=3.5]]
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=== Se réfugier dans la drogue ou l'activité ===
 
Une drogue très répandue au Brésil telle que le [[w:Crack (stupéfiant)|crack]] ou même l'alcool aident ainsi à se distraire de la réalité. J'aiJ’ai eu de nombreux témoignage durant mon séjour concernant des gens ayant été agressés par des consommateurs de ce crack. Apparemment, le crack aurait un effet désinhibant comme en témoigne Yan qui a reçu un jet de pierre à la tête suite à une discussion dans laquelle il proposait à une femme de partager sa nourriture plutôt que l'argent dont il avait besoin. Selon un article de Wikipédia<ref>http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Crack_(stupéfiant)&oldid=65397659</ref>, les effets du crack sont connu pour être similaires à la [[w:cocaïne|cocaïne]], mais plus violents, rapides, et brefs. Ces effets sont caractérisés par une forte stimulation mentale et une impression de rêve qui s'achève à la descente et ne peut continuer qu'avec une nouvelle prise. Cette sensation semble se comparer à celle que l'on ressent juste après une épreuve stressant que l'on vient de réussit avec grand succès, comme une pièce de théâtre un examen devant un jury ou un exposer publique par exemple. On se sent très stimulé à la foi physiquement et mentalement, incapable de se reposer même en situation de manque de sommeil, on a le moral et on est à mille lieux de se poser des questions existentielles vu la puissance personnelle ressentie. C'est dans ce sens qu'une drogue tel que le crack, la cocaïne et probablement l'[[w:héroïne|héroïne]] peut être un refuge spirituel face aux questions insolubles. La drogue n'apporte pas l'espoir par des réponses de types transcendantales comme la religion mais elle est un moyens efficace de contourner les questions en les escamotant.
 
Certaines hormones sont aussi à l'origine d'un certain état de bien être tel que la [[w:dopamine|dopamine]] ou l'[[w:adrénaline|adrénaline]] qui peuvent être créées par une activité physique intense ou des situations sensationnelles. Un sport comme la capoeira par exemple − qui n'a rien à voir avec la religion selon Omara bien que certains capoeiristes de renom étaient aussi de grands pratiquants dans le culte du candomblé − peut ainsi être un excellent refuge pour l'esprit. On se sent bien après un entraînement durant le quel on a été absorbé par le contrôle des mouvements de son corps tout en produisant la dopamine qui apportera suite au sport, un effet relaxant.
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[[Fichier:Eg.St.Ant.Itaparica.jpg|thumb|upright=2|Photo n<sup>o</sup>19: Église de Santo Antonio dos Navegantes sur l'île d'Itaparica.|upright=3.5]]
 
Pour premier exemple je vais prendre une expérience de vie que je connais bien, la mienne.. Je suis né dans un milieu catholique. J'aiJ’ai été baptisé avant même de savoir parler. Durant mon enfance, j'ai été scolarisé dans un collège catholique. Sans en avoir eu réellement le choix, j'ai fait ma « petite [[w:communion|communion]] » qui m'a permis d'être mis en valeur et recevoir des cadeaux après avoir été conditionné par un enseignement fourni lors du [[w:catéchisme|catéchisme]]). Mes propres choix religieux ne sont finalement apparu qu'à l'âge de l'adolescence en refusant de faire ma [[w:confirmation|confirmation]]. Avant cette adolescence je n'ai fait que suivre des croyances religieuses préfigurées par les personnes de mon entourage parfois à contre cœur puisque je me souvient que je préférais jouer avec des camarades en cachette plutôt que d'assister à la messe du dimanche.
 
Autre exemple, celui d'Omara. Omara est née au Brésil dans au début des années soixante dans une famille où le grand père pratiquait le [[w:spiritisme|spiritisme]] et la mère assistait à des cultes aussi différents que le [[w:candomblé|candomblé]], le [[w:catholicisme|catholicisme]] ou le [[w:messianisme|messianisme]]. Omara, fut baptisée peu de temps après sa naissance, mais elle a pu faire un choix dès son enfance dans ce que j’appellerais une grande panoplie d'abris spirituels. Elle en témoigne elle-même en disant lors d'un de nos entretiens où elle me parlait de sa foi et de son engagement dans l'« [[w:pt:Igreja Messiânica Mundial|Igreja Messiânica Mundial]] » (église messianique mondiale): « acredisei na religion católica mas tambem na religao espirito [...] mas nuca esteve afinidade pelo candomblé » (J'aiJ’ai grandi dans la religion catholique mais aussi dans la religion du spiritisme ... mais je n'ai jamais eu d'affinité pour le candomblé). Omara a donc eu la possibilité de choisir parmi autant de concepts et symboles que peuvent contenir quatre types de croyances religieuses ceux qui lui correspondaient le mieux grâce un ce qu'elle appellera elle-même « um sincretismo religioso muito forte na Bahia » (un [[w:syncrétisme|syncrétisme]] religieux très fort à Bahia
<ref>Au sujet du syncrétisme afro-brésilien [[w:Pierre Verger|Pierre Verger]] apparaît certainement comme étant la personne ayant le plus d'expérience et de recherche dans le domaine. Ce photographe et ethnologue français est devenu au Brésil une des figures majeurs du culte [[w:candomblé|candomblé]] en devenant [[w:Babalawo|Babalawo]], à savoir prêtre d'un système de [[w:divination|divination]] appelé [[w:Ifa|Ifa]], pratiqué par les [[w:yoruba|yoruba]] mais aussi par leurs descendants esclaves qui ont créé des ramifications du culte dans les anciennes colonies tel que le Candomblé mais aussi la [[w:Santeria|Santeria]] par exemple. Le parcours de cette homme est devenu tant populaire à Salvador qu’il finit par créer lui-même [http://www.pierreverger.org une fondation] à son nom dans le centre ville pour y déposer toutes ses œuvres. La biographie de Pierre Vergé est un exemple très parlant sur le fait que la construction d'un abri spirituel n'est pas une chose entièrement définie pas son milieu familial ni même par ses origines. Il est d'ailleurs très probable qu'en abandonnant ses études à l'âge de dix sept ans Pierre Vergé n'avait aucune connaissance des cultes extra-européens tels que le candomblé dont il allait devenir une figure de proue à Salvador de Bahia.</ref>).
 
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Ainsi, c'est grâce à son fils aîné et après une année de fréquentation qu'en [[w:2000|2000]] Omara fit sont baptême au sein de l'[[w:pt:Igreja Messiânica Mundial|pt:Igreja Messiânica Mundial]] d'Itaparica et reçu sa médaille appelée ohikary dans laquelle se trouve gravé « la parole johrei » disant que la personne fut baptisée de la Lumière. Cette église messianique n'est pas vraiment ce que l'on pourrait appeler une [[w:religion du livre|religion du livre]] mais les écrits « do mestre » (du maître) Meishu-Sama de son vrai nom [[w:en:Mokiti Okada|en:Mokiti Okada]]) tiennent une part importante autant au niveau du culte, qu'au niveau de la foi d'Omara. Omara possède plusieurs livre de Mokiti Okada traduits en Portugais et a souvent fait référence à l'histoire et aux écrits du Maître dans ses propos. Voici tirés de nos entretiens quelques exemple de ce qu'elle me dit du maître: « ele esta a escrever as coisa que sao a accontecer no mondo so que quando ele escreveo, ele escreveo no Japon antes da primeira guera mundial onde nao tinha navigação, nao tinha informaçãos » (Il écrivait les choses qui sont en train de s'accomplir dans le monde sauf que quand il a écrit, il a écrit au Japon avant la première guerre mondiale où il n'y avait pas de navigation, pas d'information) « ele escreve sobre todos os temas actuales » (Il a écrit sur tous les thèmes actuels), « Onde a religao era prohibida ele foi empreso por causa da religao » (Où la religion était interdite, il fut emprisonné à cause de la religion) « Tudo qu'ele escreveu esta a acontecer hoje e e por isso que realemente é algo que posso acreditar ». (Tout ce qu’il a écrit est en train de s'accomplir aujourd'hui et c'est pour cela que réellement, c'est quelqu'un en qui je peux croire).
 
Un autre aspect important de la religion messianique mondiale est le « johrei ». il s'agit d'une sorte de méditation faite face à face avec une personne qui le demande. J'aiJ’ai demandé à Omara qu'elle m'administre un johrei ce qu'elle a accepté avec plaisir en me disant que les jorhei son profitable à ceux qui les reçoivent mais aussi à ceux qui les administrent. Pour m’administrer le johrei, Omara a mis son Ohikari (Photo n<sup>o</sup> 29) puis s'est assise en face de moi en me prévenant que cela pouvait me provoquer des effets secondaire physique en fonction de l'acceptation (étourdissements par exemple). Elle a placé la main gauche sur le genou gauche paume vers le haut et la main droite face à elle à hauteur de poitrine paume orientée vers moi et nous sommes ainsi resté immobile durant un temps qui m'a semblé être de dix à quinze minutes. Ensuite elle m'a demandé de lui tourner le dos pour recommencer la même opération. Suite au johrei, je l'ai remercié en lui avouant n'avoir ressenti aucune sensation physique particulière bien que je m'étais grandement concentré dans un esprit d'ouverture et je lui ai demandé s'il fallait avoir des compétences particulières pour administrer un johrei. Elle me répondit qu’il fallait seulement être baptisé de l'église Messianique (et donc posséder un Ohikari) et connaître un minimum de connaissance concernant l'église messianique. Je lui ai demandé enfin si elle récitait une quelconque prière ou intention dans sa tête durant le johrei mais elle me dit qu'elle ne pensait à rien de spécial si ce n'est que de se concentrer sur ce qu'elle fait. Selon les explications d'Omara, le johrei est donc une transmission de la lumière ou énergie de Dieu qui passerait par l'intermédiaire d'un membre de l'église vers une personne demandeuse. Elle précise que « O johrei noa e para curar mas tambem faz isso » (La johrei n'est pas pour guérir mais fait aussi cela). Pour m'en persuader, Omara me raconte une histoire personnelle qu’il lui est arrivée. En voulant séparer deux de ses chiens qui étaient en train de « brincar » (jouer, se battre), Omara s'est fait mordre et s'est retrouvée avec une main très douloureuse, gonflée et pleine de sang. Le lendemain elle se rendit à l'église messianique pour se faire administrer un johrei. Pour elle ce fut un miracle qu'elle n'eu aucune trace de ses blessures et elle me montrait sa main pour en témoigner.
 
[[Fichier:Objets de culte.jpg|thumb|Photo n<sup>o</sup>30: Image d'un dieu hindou placée à côté des objets de culte l'église messianique mondiale|upright=1.2]]