« Recherche:Quel abri pour l'être humain ? » : différence entre les versions

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Dans mon trajet d'avion pour Salvador, je me suis retrouvé, par le plus grand des hasards, assis à côté d'un membre de la communauté CouchSurfing. C'était un jeune Suisse venu au Salvador pour un échange universitaire et qui, mieux organisé que moi, avait trouvé via le réseau une personne pour l'héberger durant les deux premiers jours de son arrivée. Nous nous étions donné rendez-vous le lendemain de notre arrivée pour assister au «[[w:pt:Lavagem do Bonfim| Lavagem do Bonfim]] », un cortège religieux qui commémore le transfert de l'église de la Penha à l’[[w:église Nosso Senhor de Bonfim|église « Nosso Senhor de Bonfim »]] d'une image du Christ apportée de [[w:Lisbonne|Lisbonne]] en [[w:1745|1745]] par Teodósio Rodrigues de Farias, officier de la marine portugaise. Ce fut un bon moment passé ensemble, hormis les coups de soleil et, chose plus embarrassante, le vol de mon carnet de terrain... Cela s'était passé dans la cohue qui a lieu habituellement en fin de cortège, là où tout le monde essaye de toucher la façade de l'église. Deux jeunes [[w:Vol à la tire|voleurs à la tire]] avaient tenté de me prendre mon [[w:caméscope|caméscope]], sans succès, mais ils ont réussi à prendre mon petit carnet de terrain que j'avais avec imprudente garder sur moi dans une poche de mon pantalon située au niveau de la cuisse. Trois jours de collecte d'informations perdues. J'avais aussi dans ce carnet l'adresse et le numéro de téléphone de mon logement, ce qui me causa toutes les difficultés du monde pour retrouver mon chemin.
 
J’ai finalement retrouvé mon logement et je me suis ensuite estimé heureux que cela m'arrive en début de séjour et que seul mon carnet ait été volé. Et tirant leçon de cette mésaventure, j'étais bien déterminé, à trouver le soir même, des solutions pour ne plus jamais perdre de données de terrain. J'avais pour objectif de parer à toutes situations possibles dans une ville où l'insécurité règne au point d'en faire l'unique sujet d'un [[w:tract|tract]] de [[w:propagande|propagande]] (voir photo ci-dessous). J'utilisais déjà une ceinture munie d'une pochette en coton collée sur mon ventre dans laquelle je transportais mon passeport, mon argent et mes cartes de banque, mais elle était bien trop petite pour y mettre un carnet. Et puis de toute façon, il est courant, en cas d'agression à Salvador, que l'onl’on doive se déshabiller. Il me fallait donc trouver un autre moyen de stockage plus facile et plus sûr. Après réflexion, j’ai fini par opter pour le [[w:dictaphone|dictaphone]]. Par rapport au carnet de terrain, je lui trouvais de nombreux avantages. Il était moins encombrant et plus facile à dissimuler qu'un ou plusieurs carnets de terrain. De plus, par rapport au carnet, je pouvais l'utiliser en un minimum de temps et de manipulations. Les informations y étaient directement stockées sous forme de fichiers [[w:numérique|numériques]] triés et nommés par date et heure, et tout pouvait ensuite facilement être transmis en lieu sûr via une connexion Internet.
 
[[Fichier:Tract PMDB.JPG|thumb|Photo n<sup>o</sup>2: Tract du parti du mouvement démocratique brésilien concernant la criminalité dans l'état de Bahia.|upright=1.2]]
 
Malheureusement, j’ai passé énormément de temps pour essayer d'extraire les fichiers de mon dictaphone sans jamais y parvenir. Pendant près de dix jours, je me suis obstiné en testant le dictaphone sur différents ordinateurs, avec différents câbles et selon différentes configurations, mais sans aucun résultat. Finalement, quand je suis arrivé à saturation de la mémoire de cet appareil que l'onl’on risquait de me voler, j’ai pris la décision de réécouter l'entièreté des messages pour les retranscrire par écrit et les mettre en lieu sûr. Ma première idée fut de le faire sur ordinateur, de nouveau pour pouvoir sauvegarder les informations via une connexion Internet. Mais comme j'avais fait le choix de partir sans ordinateur pour des raisons déjà connues, la solution fut donc de retranscrire mes enregistrements dans des cahiers et de les photographier ensuite page par page avec un appareil photo digital afin de stocker les images sur Internet. J’ai donc acheté à bon prix un appareil de fabrication brésilienne qui me semblait idéal par sa petite taille, sa couleur discrète, ses fonctions photo et vidéo, ses choix de [[w:compression d'image|compression d'image]] et puis sutout son alimentation par piles de type [[w:Pile électrique|AA]]. Tout comme mon dictaphone, alimentation par pille sme garantissait une utilisation prolongée sur des terrains où l'onl’on ne dispose pas d'accès à un [[w:réseau de distribution d'électricité|réseau de distribution d'électricité]].
 
La retranscription détaillée des enregistrements du dictaphone me demanda plus de trois jours complets durant lesquels j’ai rempli plus de 110 pages de cahier format [[w:Format de papier|A3]] et vidé complètement un stylo à bille dont je m'étais même assuré de la permanence des traits en cas de contact à l'eau. Mais, cette fois-ci, ce fut la taille de tous les fichiers photo réunis qui m’empêcha de les télécharger dans un temps raisonnable, vu le faible débit des connexions offertes dans les cybercafés. Ce système n'aurait donc pu fonctionner que lors d'une sauvegarde journalière, mais il était trop tard. La solution ultime après plus de 15 jours de recherche fut finalement de transférer régulièrement, grâce à l'ordinateur d'un cybercafé, les images de la carte mémoire de mon appareil photo vers une autre carte mémoire de type [[w:micro SD|micro SD]] que je gardais en lieu sûr et que j’imaginais même pouvoir dissimuler sous un [[w:sparadrap|sparadrap]] en cas de situation à risque. Aujourd'hui, je pense que cette solution reste la plus adéquate pour prévenir la perte ou le vol de mes données sur un terrain où l'accès à Internet est problématique voir impossible et où le vol et l'agression sont à craindre.
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Au final, toutes ces mésaventures ont fini par me sensibilisé sur les conditions de vie de tous ces gens qui dorment sur les trottoirs des quartiers riches, ramassant des détritus ou tirant des charrettes à bras comme des bêtes de somme au beau milieu de la circulation. Sans en avoir souffert moi-même, je ne me serais sans doute jamais rendu compte que trouver un abri dans une ville telle que Salvador était une chose bien plus importante et compliquée que de trouver de la nourriture. Je n'aurais certainement pas eu le même point de vue sur tous ces sans-abri qui s'associent parfois pour réunir la somme d'un repas ou, le cas échéant, visitent les poubelles des quartiers riches lorsque la faim et le manque de sécurité les obligent de toute façon à veiller toute la nuit.
 
J'en fini par conclure qu'un terrain d'étude anthropologique n'a rien à voir avec un séjour de vacances, et que l'une des satisfaction que l'onl’on en retire est peut-être de pouvoir témoigner avec autant de détailles et de références possible tous d'une réalité qui jamais ne sera figurera dans les revues touristiques. J'étais parti pour faire un travail de terrain en anthropologie et cela m'a permis de découvrir de nouvelles souffrances liée à la discipline. C'était bel et bien la le but de l'exercice, un réel apprentissage gratifier par une meilleur compréhension de l’être humain et des communautés humaines.
 
== Un abri physique ==
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Le lendemain, Omara est partie à Salvador pour faire des examens médicaux concernant ses pierres aux reins. Durant son absence, Passarinho a cuisiné pour la petite communauté composée du fils de Omara, trois jeunes capoeiristes envoyées de suisse par le frère d'Omara, une jeune brésilienne venant de la campagne et logeant ici pour pouvoir terminer ses études secondaires, Passarinho et moi-même sans oublier Sapeca et Vida, la chatte et la chienne de la maison. J’ai remarqué que durant l'absence d'Omara les tâches et activités étaient beaucoup plus négligées. Ce jour-là par exemple, les restes de repas préparés la veille qui n'ayant pas été mis au frigidaire ont dû être jetés. Quand j'en fis la remarque à Omara à son retour de Salvador, elle dit « quando o gato sai, o rato sobe na mesa » (Quand le chat est parti les souris dansent).
 
Nous avons eu de nombreuses conversations avec Omara. Deux de nos conversations furent enregistrés durant lesquels elle me dévoilait sa vie sans gène et sans tabou. Omara était une personne qui avait assez vécu pour n'avait plus rien à prouver. « Tudo é complicado » (tout est compliqué) me disait-elle d’emblée la première fois que l'onl’on a abordé son histoire de vie. Sans entrer dans des détails trop intimes, je dirai juste qu'a {{unité|52|ans}}, Omara a toujours eu des difficultés relationnelles dans son enfance dans une famille dont le père était originaire de l'île. Après multiples péripéties, Omara est arrivée sur l'île en 1996 et a ouvert l'Oficina de Artes en 1998. Elle vit actuellement depuis plusieurs années séparée de son ex-mari, père de ses trois enfants, avec qui elle s'était mariée par amour à l'âge de {{unité|20|ans}}. Ce mariage lui permit aussi d'accéder enfin à une liberté d'adulte qui lui a toujours été confisquée par sa mère. Il y a eu de grosses crises avec son mari, mais leur amitié est restée très forte. Il continue à l'inviter régulièrement à des activités festives auxquelles j’ai pu assister à deux reprises. D'une vie de couple et d'un emploi stable elle s'est retrouvée petit à petit sans rien. En parlant de ses activités au sein de l'Oficina de artes, elle me dit que « O qu'estava para mim um ocupação secundária que se tornou uma maneira de sobreviver » (Ce qui était pour moi une occupation secondaire est devenu une manière de survivre). Avant de se retrouver dans sa situation actuelle, elle est passée par plusieurs emplois de courts termes et de nombreuses périodes de crises dans son couple. Aujourd'hui, l'Oficina de Artes me semblait être pour elle, à la fois une famille, une occupations et un gagne-pain. Le bâtiment appartient à son frère aîné, actuellement grand maître du groupe de capoeira Union et installé depuis de nombreuses années en Suisse, pays à partir duquel il a fondé plusieurs écoles de Capoeira en Europe. J’ai cru comprendre qu'elle ne lui payait pas de loyer mais qu'en échange, elle accueillait kes étudiants de l'école de son frère. Je n'ai pas cherché à rentrer dans les détails indiscrèts au niveau de sa vie, mais je peux dire que le prix des cours de Capoeira et de théâtre sont dérisoires et que le prix de l'hébergement varie entre la gratuité pour certains et cinquante réaux par jours nourriture incluse pour les personnes européennes ayant de bonnes ressources. Lorsque Omara décida de partager le cachet de la représentation théâtrale avec tous ses élèves alors que quelques jours plus tôt l'Oficina de Artes était resté une nuit sans électricité pour une facture d'électricité impayée, j’ai compris que le moteur du projet n'était pas l'argent.
 
[[Fichier:Rues Itaparica.jpg|thumb|upright=2|Photo n<sup>o</sup>16: Rues d'Itaparica.|upright=3.5]]
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=== Le concept d'abri spirituel ===
 
Quand on parle de [[w:spiritualité|spiritualité]], on pense souvent à la religion. Pourtant si l'onl’on se réfère à la définition du mot [[wikt:spiritualité|spiritualité]] à savoir : « Qualité de ce qui est esprit ou [[wikt:âme|âme]], concerne sa vie, ses manifestations ou qui est du domaine des valeurs morales »<ref> http://www.cnrtl.fr/definition/spiritualité</ref>, on voit que le mot concept lié n'est pas celui de « religion » mais bien d' « esprit ». Quant à l’[[wikt:esprit|esprit]], il peut se définir à son tour comme « principe de vie immatériel » mais aussi comme « disposition psychique dominante d'une personne ou d'un groupe, déterminant le choix d'une attitude et l'orientation de l'action », « ensemble des dispositions psychiques dominantes qui déterminent et caractérisent les sentiments et les actions d'une personne ou d'un groupe social » ou encore « pensée dominante, idée centrale, principe qui anime une œuvre et lui donne son sens profond ; inspiration dominante et caractéristique d'un auteur, essence de sa pensée »<ref>http://www.cnrtl.fr/definition/esprit</ref>.
 
Au départ de l’idée de spiritualité, je conçois donc l'abri spirituel non pas en tant qu'abri pour l'âme − l'âme à mon sens est un concept trop peu immanent pour être porteur dans le cadre d'observation anthropologique − mais bien en tant qu'abri pour certaines [[wikt:pensée|pensée]], [[wikt:idée|idées]], [[wikt:sentiment|sentiments]], ou [[w:émotions|émotions]] néfastes aux personnes. L'abri spirituel, se conçoit donc comme une manipulation de l'esprit qui permettrait à une personne de s'abriter de ses pensées, idées, sentiments ou émotions insupportables[[wikt:cognition|.]]
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=== Se réfugier dans la drogue ou l'activité ===
 
Une drogue très répandue au Brésil telle que le [[w:Crack (stupéfiant)|crack]] ou même l'alcool aident ainsi à se distraire de la réalité. J’ai eu de nombreux témoignage durant mon séjour concernant des gens ayant été agressés par des consommateurs de ce crack. Apparemment, le crack aurait un effet désinhibant comme en témoigne Yan qui a reçu un jet de pierre à la tête suite à une discussion dans laquelle il proposait à une femme de partager sa nourriture plutôt que l'argent dont il avait besoin. Selon un article de Wikipédia<ref>http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Crack_(stupéfiant)&oldid=65397659</ref>, les effets du crack sont connu pour être similaires à la [[w:cocaïne|cocaïne]], mais plus violents, rapides, et brefs. Ces effets sont caractérisés par une forte stimulation mentale et une impression de rêve qui s'achève à la descente et ne peut continuer qu'avec une nouvelle prise. Cette sensation semble se comparer à celle que l'onl’on ressent juste après une épreuve stressant que l'onl’on vient de réussit avec grand succès, comme une pièce de théâtre un examen devant un jury ou un exposer publique par exemple. On se sent très stimulé à la foi physiquement et mentalement, incapable de se reposer même en situation de manque de sommeil, on a le moral et on est à mille lieux de se poser des questions existentielles vu la puissance personnelle ressentie. C'est dans ce sens qu'une drogue tel que le crack, la cocaïne et probablement l’[[w:héroïne|héroïne]] peut être un refuge spirituel face aux questions insolubles. La drogue n'apporte pas l'espoir par des réponses de types transcendantales comme la religion mais elle est un moyens efficace de contourner les questions en les escamotant.
 
Certaines hormones sont aussi à l'origine d'un certain état de bien être tel que la [[w:dopamine|dopamine]] ou l’[[w:adrénaline|adrénaline]] qui peuvent être créées par une activité physique intense ou des situations sensationnelles. Un sport comme la capoeira par exemple − qui n'a rien à voir avec la religion selon Omara bien que certains capoeiristes de renom étaient aussi de grands pratiquants dans le culte du candomblé − peut ainsi être un excellent refuge pour l'esprit. On se sent bien après un entraînement durant le quel on a été absorbé par le contrôle des mouvements de son corps tout en produisant la dopamine qui apportera suite au sport, un effet relaxant.
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=== La construction de l'abri religieux ===
 
Avant d'utiliser le terme [[w:religion|religion]], je tiens à souligner le fait que l'être humain ne naît pas religieux mais il le devient. La religion est un fait [[w:culture|culturel]] à part entière dans le sens où la religion est quelque chose qui se transmet de génération en génération. Même si au sein de certaines croyances religieuses des personnes peuvent croire en des systèmes de [[w:réincarnation|réincarnation]] de type [[w:Dalaï-lama|Dalaï-lama]], les histoires d'[[w:enfants sauvages|enfants sauvages]] nous démontrent que l'être humain vient au monde sans réel préformation [[w:cognition|cognitive]] {{harv|Strivay|2006}}. La foi ne semble donc pas être quelque chose d’inné mais quelque chose que l'onl’on acquière et qui reste un choix même quand celui-ci est fait par l'entourage plutôt que la personne. Quand le choix est personnels, il faut aussi garder à l'esprit que si la liberté de penser existe, l'être humain n'a pas la liberté de penser tout ce qui existe. La pensée des êtres humains se forme en fonction de leurs contacts sociaux et par acquisition de [[w:concept|concepts]], [[w:symbole|symboles]] et autres [[w:figurations mentales|figurations mentales]] qui leur permettent d’appréhender le monde. L'homme ne pense donc pas en toute liberté. Ses pensées sont limitées par ce que l'onl’on pourrait appeler une « ouverture d'esprit » acquise suite à une série d'apprentissages et d'expériences source d'informations stockées en mémoires dans un système inter-relationnel évolutif. Les [[w:croyance|croyances]], la [[w:foi|foi]], la [[wikt:religion|religion]] ne sont donc pas des choses mais bien transmises ou choisie.
 
[[Fichier:Eg.St.Ant.Itaparica.jpg|thumb|upright=2|Photo n<sup>o</sup>19: Église de Santo Antonio dos Navegantes sur l'île d'Itaparica.|upright=3.5]]
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L'abri spirituel est donc quelque chose qui peut être en perpétuelle construction ou reconstruction, et la rencontre de cultures différentes comme l'a vécue une personnage comme [[w:Pierre Vergé|Pierre Vergé]] peut aboutir à toute une série de transformations de l'abri spirituel. Selon les cas de figures l'échange interculturel en termes d'abri spirituel peut mener à de nombreux phénomènes tels que la [[w:reconversion|reconversion]] mais aussi l’[[w:acculturation|acculturation]], l’[[w:inculturation|inculturation]], l’[[w:enculturation|enculturation]], ou changements de type [[w:métisse|métissage]] ou syncrétiques qui ont inspiré de nombreux auteurs dans des productions intellectuelles basées sur des représentations métaphoriques. Pour en reprendre certaines abordées au cours de Religion et Interculturalité dispensé par le professeur [[w:Olivier Servais|Olivier Servais]] à l'Université catholique de Louvain, je cite dans un ordre non chronologique, [[w:Victor Segalen|Victor Segalen]]: « Le divers », [[w:Jean-Loup Amselle|Jean-Loup Amselle]]: « Branchement » et « mé-tissage », [[w:André Mary (Anthropologue)|André Mary]]: Le « Bris-collage », [[w:Danièle Hervieu-Léger|Danièle Hervieu-Léger]]: Sur-modernité, [[w:Serge Gruzinski| Serge Gruzinski]]: « mélange » « la Pensée métisse », [[w:Gilles Deleuze|Gilles Deleuze]] et [[w:Félix Guattari| Félix Guattari]]: « Rizhome », [[w:Georges Balandier|Georges Balandier]]: « Désordre », [[w:René Depestre|René Depestre]] : « Ajout » et puis pour ceux qui on traité du Brésil, [[w:François Laplantine|François Laplantine]]: Oscillation-Tension,
[[w:Claude Lévi-Strauss|Claude Lévi-Strauss]]: « Bricolage » et « Kaléidoscope » et en fin [[w:Roger Bastide|Roger Bastide]]: « Syncrétisme en mosaïque » et « bricolage intellectuel » Toutes ces métaphore peuvent illustrer autant de manière de se « construire » un abri spirituel. Et l'onl’on pourrait ainsi approfondir le sujet à partir de chacune d'entre elle comme je l'ai fait dans un travail précédent intitulé [[Recherche:Introduction à la bricologie|Introduction à la bricologie]] où je récupérais la métaphore du bricolage pour réfléchir sur les fondements de l'humanité<ref> http://fr.wikiversity.org/w/index.php?title=Introduction_à_la_bricologie&oldid=248833</ref>. Mais mon choix dans ce présent travail bien que l'onl’on aborde un sujet d'[[w:anthropologie fondamentale|anthropologie fondamentale]] sera de rester à un niveau [[w:ethnographie| ethnographique]] en me limitant à mes propres expériences de terrain faites durant un peu moins d'un mois où je n'ai pu découvrir qu'une partie de ce que peut être les [[w:Religions au Brésil|Religions au Brésil]].
 
=== Candomblé et catholicisme ===
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[[Fichier:Bonfim m.png|thumb|Photo n<sup>o</sup>21: Purification du corps et de l'âme à la fin du cortège « Lavagem do Bonfim|upright=1.2]] [[Fichier:Candomblé Itaparica.jpg|thumb| Photo n<sup>o</sup>22: Cérémonie privée de candomblé|upright=1.2]]
 
De ces phénomènes religieux abordés dans la partie précédente, j'en ai rencontré de multiples variations durant mon voyage au Brésil et cela dès le taxi qui m'a emmené de l'aéroport au centre ville. Sur le tableau de bord de la voiture, je pouvais observer l’icône de je ne sais quelle saint et j’ai pensé que cette figurine avait pour but de protéger le chauffeur et ses passagers comme cela se faisait encore dans ma famille il n'y a pas si longtemps. J'imaginais donc que le conducteur était de confession catholique, et j’ai d'ailleurs regretté de ne pas lui avoir demandé car il me semblait très au courant d'une manifestation religieuse afro-brésilienne [[w:Lavagem de Bonfim|Lavagem de Bonfim]] dont on a déjà parlé au début de ce travail dans le chapitre consacré à la méthodologie. C'est donc en partie grâce à ce chauffeur que je m'y suis rendu. Durant cette manifestation populaire j’ai pu observer différents signes de syncrétisme comme sur la photo ci-contre ou apparaît sur une table, une statuette en plastique que l'onl’on pourrait croire être la Vierge Marie mais qui fut identifiée par Omara comme étant « Yemanjá a rainha do mar » ([[w:Yemanja|Yemanja]] la reine de la mer) quand à l'homme qui venait de retirer la casquette du jeune en chemisette verte pour l’éclabousser d'eau parfumée, il serait « pai de santo e está fazendo uma purificação, com galhos, limpando as más energias do corpo e do espírito do homem qu'está segurando a lata de cerveja... » ( Un prêtre intermédiaire entre les hommes et les [[w:Orisha|Orisha]] qui est en train de faire une purification, avec un rameau, lavant les mauvaises énergies du corps et de l'esprit d'un homme qui est en train de tenir une canette de bière... ).
 
[[Fichier:Fête Santa Cruz cadeau.jpg|thumb|Photo n<sup>o</sup>23: Offrande à Yemanja.|upright=1.2|upright=1.2]]
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=== Église messianique mondiale ===
 
Dans cette partie du travail j'aborderai la foi d'Omara en tant que cas de figure dans la construction d'un abri spirituel. Il a déjà été question précédemment du parcours de vie spirituel d'Omara qui s'est retrouvée jeune enfant confrontée à de nombreux choix en termes de systèmes symboliques pour structurer sa pensée et se construire son propre abri spirituel. Je vais maintenant, dans cette partie de ce travail, consacrer du temps pour décrire plus en détail ce que l'onl’on pourrait appeler la foi d'Omara et les étapes de construction de son abri spirituel.
 
Omara, m'a confié dans nos discussion qu’il n'y aurait pour elle qu'un seul Dieu pour tout le monde et les religions ne sont que différentes manières de croire en lui. Cette foi monothéiste doit sans doute tirer ses origines d'une influence reçu par sa mère, qui rappelons le, a toujours gardé sa foi catholique malgré ses participations multiples à d'autres cultes dont un polythéiste (candomblé). Omara fut baptisée à l'église catholique et a pratiqué ce culte durant une grande partie de sa vie mais elle me confia ceci durant un entretien enregistré un jour où nous faisions ensemble la vaisselle de toute la petite communauté de l'Oficina de Artes: « sempre mi emocionei muito quando entrava na egresia » (toujours j'étais très émue quand je rentrais dans une église ), « Cada vez sou na uma misa eu choulava muito e ficava muito feliz e tranquila depois e quando entrava na egresia e nao consegei a chular durante o culto eu ficava no sentido muito frustrada » (chaque fois que je suis à une messe je pleurais beaucoup et étais très heureuse et tranquille après et quand à l'église je n'arrivais pas a pleurer durant le culte je restais avec un sentiment de frustration), « so que sentei que falta uma coisa de mi . Eu nao consigo entender Deus com um fé de puniçao . A egresia catolica e as otras religao a majoria falam que Deus puni que Deus castiga. » ( Sauf que j’ai senti qu’il me manquait quelque chose. Je n'arrive pas a concevoir Dieu comme une foi de punition. L'église catholique et la majorité des autres églises disent que Dieu punit, que Dieu châtie). Voici donc des raisons apparentes expliquant pourquoi, Omara a finalement pris ses distances par rapport au culte catholique auquel sa mère l'avait initiée mais aussi par rapport à d'autres culte qui reconnaissent en Dieu des capacités de châtiment comme c’est souvent le cas dans les [[w:religions du livre|religions du livre]]. N'ayant pas non plus d'affinité personnelle pour le candomblé, ni pour le spiritisme qu'elle respecte toute fois et dans lesquels elle reconnaît une dimension sacrée, c’est finalement au sein des membre de l’[[w:pt:Igreja Messiânica Mundial|Igreja Messiânica Mundial]] (Église Messianique Mondiale) qu'elle finira par trouver sa place en devenant « batisada da luz » (baptisée de la lumière) ou « outirguei » (terme exact) au courant de l'année [[w:2000|2000]]. Tout ceci ne s'est pas fait en un jour et c’est encore une fois par l'influence d'une tierce personne qu'elle trouva une nouvelle direction dans sa foi, car c’est cette fois grâce son fils aîné, seule autre personne reconnue croyante parmi ses trois enfant et son mari, qu'elle découvrit ou redécouvrit, d’abord par curiosité, puis par ferveur, cette église.
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[[Fichier:Ohikari1.jpg|thumb|Photo n<sup>o</sup>29: Médaille ou Ohikari qu'Omara reçu après son baptême de lumière|upright=1.2]]
 
Ainsi, c’est grâce à son fils aîné et après une année de fréquentation qu'en [[w:2000|2000]] Omara fit sont baptême au sein de l’[[w:pt:Igreja Messiânica Mundial|pt:Igreja Messiânica Mundial]] d'Itaparica et reçu sa médaille appelée ohikary dans laquelle se trouve gravé « la parole johrei » disant que la personne fut baptisée de la Lumière. Cette église messianique n'est pas vraiment ce que l'onl’on pourrait appeler une [[w:religion du livre|religion du livre]] mais les écrits « do mestre » (du maître) Meishu-Sama de son vrai nom [[w:en:Mokiti Okada|en:Mokiti Okada]]) tiennent une part importante autant au niveau du culte, qu'au niveau de la foi d'Omara. Omara possède plusieurs livre de Mokiti Okada traduits en Portugais et a souvent fait référence à l'histoire et aux écrits du Maître dans ses propos. Voici tirés de nos entretiens quelques exemple de ce qu'elle me dit du maître: « ele esta a escrever as coisa que sao a accontecer no mondo so que quando ele escreveo, ele escreveo no Japon antes da primeira guera mundial onde nao tinha navigação, nao tinha informaçãos » (Il écrivait les choses qui sont en train de s'accomplir dans le monde sauf que quand il a écrit, il a écrit au Japon avant la première guerre mondiale où il n'y avait pas de navigation, pas d'information) « ele escreve sobre todos os temas actuales » (Il a écrit sur tous les thèmes actuels), « Onde a religao era prohibida ele foi empreso por causa da religao » (Où la religion était interdite, il fut emprisonné à cause de la religion) « Tudo qu'ele escreveu esta a acontecer hoje e e por isso que realemente é algo que posso acreditar ». (Tout ce qu’il a écrit est en train de s'accomplir aujourd'hui et c’est pour cela que réellement, c’est quelqu’un en qui je peux croire).
 
Un autre aspect important de la religion messianique mondiale est le « johrei ». il s'agit d'une sorte de méditation faite face à face avec une personne qui le demande. J’ai demandé à Omara qu'elle m'administre un johrei ce qu'elle a accepté avec plaisir en me disant que les jorhei son profitable à ceux qui les reçoivent mais aussi à ceux qui les administrent. Pour m’administrer le johrei, Omara a mis son Ohikari (Photo n<sup>o</sup> 29) puis s'est assise en face de moi en me prévenant que cela pouvait me provoquer des effets secondaire physique en fonction de l'acceptation (étourdissements par exemple). Elle a placé la main gauche sur le genou gauche paume vers le haut et la main droite face à elle à hauteur de poitrine paume orientée vers moi et nous sommes ainsi resté immobile durant un temps qui m'a semblé être de dix à quinze minutes. Ensuite elle m'a demandé de lui tourner le dos pour recommencer la même opération. Suite au johrei, je l'ai remercié en lui avouant n'avoir ressenti aucune sensation physique particulière bien que je m'étais grandement concentré dans un esprit d'ouverture et je lui ai demandé s'il fallait avoir des compétences particulières pour administrer un johrei. Elle me répondit qu’il fallait seulement être baptisé de l'église Messianique (et donc posséder un Ohikari) et connaître un minimum de connaissance concernant l'église messianique. Je lui ai demandé enfin si elle récitait une quelconque prière ou intention dans sa tête durant le johrei mais elle me dit qu'elle ne pensait à rien de spécial si ce n'est que de se concentrer sur ce qu'elle fait. Selon les explications d'Omara, le johrei est donc une transmission de la lumière ou énergie de Dieu qui passerait par l'intermédiaire d'un membre de l'église vers une personne demandeuse. Elle précise que « O johrei noa e para curar mas tambem faz isso » (La johrei n'est pas pour guérir mais fait aussi cela). Pour m'en persuader, Omara me raconte une histoire personnelle qu’il lui est arrivée. En voulant séparer deux de ses chiens qui étaient en train de « brincar » (jouer, se battre), Omara s'est fait mordre et s'est retrouvée avec une main très douloureuse, gonflée et pleine de sang. Le lendemain elle se rendit à l'église messianique pour se faire administrer un johrei. Pour elle ce fut un miracle qu'elle n'eu aucune trace de ses blessures et elle me montrait sa main pour en témoigner.
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L'histoire d'Omara et de l'Oficina de Artes, illustre bien je trouve le fait que les êtres humains ont besoin de beaucoup de temps dans leurs [[w:construction identitaire|constructions identitaires]]. L'Oficina de Atres, tant le bâtiment que les activités qui s'y déroulent, n'a pas été construit en un jour et c’est aussi par exemple seulement après {{unité|40|ans}} de vie, qu'Omara fini par trouver dans l'église messianique mondial l'abri spirituel qui lui convient. Toutes ces constructions prennent du temps et peuvent aussi aussi malheureusement disparaîtront du jour au lendemain lors d'un quelconque évènement imprévisible. Le monde des hommes est ainsi fait, il reste dans une instabilité permanente nécessaire à son changements.
 
Tous ce qui a été aborder dans ce travail permet aussi d'établir une multitude de liens entre la dimension matériel, socio-affective et spirituel du monde construit par les êtres humains. Un bâtiment tel que l'Oficina de Artes est un ensemble de matériaux (ciment, bois...) mais aussi un ensemble de groupes sociaux (théâtre, capoeira) et fut même à une époque, j’ai oublié de le mentionner, un lieu de rassemblement spirituel momentané pour la communauté de l'église messianique mondiale de la ville d'Itaparica à une époque où elle n'avait pas, ou plus, de lieu de réunion pour les activités du culte. Il y a donc ainsi dans le monde des hommes, un jeu permanent de va et viens entre les dimensions et composantes [[w:matière|matérielles]], [[w:société|sociales]] et [[w:spiritualité|spirituelles]]. Dans cette univers, tout ce qui est [[w:signifiant| signifiant]] est forcément étroitement lié à tout ce qui est [[w:signifié|signifié]]. Tout ce qui est matériel véhicule une valeur symbolique mais aussi, tout [[w:symbole|symbole]] crée par l’[[w:imagination|imagination]] humaine ne survivra à la mort de son auteur qu'après avoir trouver une représentation [[w:physique|physique]] permettant sa transmission que se soit dans la constructions d'objets ou de mots (son ou lettres) par exemple. Voici donc ce qui pourrait être les [[w:fondement|fondements]] de ce que l'onl’on a pour habitude d’appeler [[w:Culture|Culture]]. La culture n'est elle pas un [[w:Héritage (droit)|héritage]] matériel (les biens), social (la parenté) et spirituel (les croyances) transmise de génération en génération ?
 
Aussi si dans ce travail, il fut utile de grouper et séparer les choses pour mieux les observer, il ne faut pas oublier que toutes choses restent liées entre elles dans un jeu d’interrelation et/ou de transmission. Autrement dit, rassembler une partie des besoins des êtres humains en trois types d'abri n'est qu'une construction [[w:heuristique|heuristique]] puisque l'Oficina de Artes en tant que signifiant ou [[w:concept|concept]] est en même temps un lieu physique, un lieu socio-affectif et fut un lieu spirituel. En tant qu'être humain limité par nos capacités intellectuelles nous nous voyons obligé d’abordé la réalité par petites partie tout comme un ordinateur limité par sa mémoire et la vitesse de son processeur ne peut traité qu'une certaine quantité de donnée à la foi. Tout comme l'ordinateur, l'être humain doit donc traiter les informations en fonction de ses capacités et comme il le peut et s'il veut rester sincère par rapport à ces propres résultat d'analyse, il ne dois jamais oublier que la [[w:réalité|réalité]] est un tout inséparable et probablement incompréhensible pour l'esprit humain.