« Châteaux forts en France » : différence entre les versions

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[[Image:Donjonvuegénérale.jpg|thumb|400px|Le donjon de Château-Gaillard (fin XIIe siècle), en Normandie]]
= Sources =
== Textes ==
*narratifs : le plus célèbre est sans doute celui de Lambert d’Ardres qui décrit l’organisation interne d’un donjon. Sa ''Chronique des comtes de Guines et d’Ardres'' décrit la résidence fortifiée d’un seigneur du Boulonnais, construite vers 1120.
*chartes
== Iconographie ==
*la tapisserie de Bayeux (mais attention aux conventions et aux codes artistiques qui trahissent la réalité)
== Archéologie ==
L’apport de l'archéologie, aidée par la reconnaissance aérienne (en particulier pour les mottes castrales), est d'un apport précieux pour comprendre les châteaux forts
 
= Définitions et vocabulaire =
Le mot "château" désigne une ''résidence fortifiée d’un homme et de sa mesnie''<ref> Jean-Pierre Babelon (dir.), Le château en France, page 15</ref>. Le château se définit plus par un critère social (la résidence, permanente ou temporaire, de la famille châtelaine) que par une description architecturale. Cependant, le château se distingue de la maison forte (''firmitas'' des hobereaux) par ses dimensions et ses fortifications plus importantes. Le château est l’instrument et le symbole du pouvoir local : il permet d’asseoir l’autorité d’un sire sur une population. Dans cette acception, les premiers châteaux apparaissent à la fin de l'époque carolingienne.
 
Les ressources documentaires médiévales utilisent un vocable divers et relativement flou pour désigner les châteaux : le ''castrum'' (''castra'' au pluriel) se confond avec le ''castellum'' (''castella'') pour décrire un lieu fortifié.
 
= Comment sont apparus les premiers châteaux ? =
Au IXe siècle, l'édit de Pîtres encourage la construction de forteresse pour faire face aux invasions scandinaves qui menacent la Francie occidentale. La multiplication des châteaux répond à un contexte d’insécurité : raids vikings et sarrasins puis violences de petits seigneurs brigands menacent les paysans et leurs récoltes. Ces châteaux sont d'abord sous l'autorité des comtes et des ducs, qui sont les délégués du roi dans les régions. Ces représentants se constituent des principautés autonomes et confient leurs forteresses à des délégués (vicomtes, viguiers, centeniers, officiers châtelains). Aux XI{{e}} et XII{{e}} siècles, ces derniers usurpent les prérogatives publiques (rendre la justice, lever une armée, collecter les impôts). Les partages successoraux accentuent l'émiettement du pouvoir. Ils font construire, de manière illégale, des châteaux : à la fin du XIIe siècle, on en comptait environ 150 en Provence, 130 en Catalogne, 110 en Picardie<ref> Robert FOSSIER, ''Enfance de l’Europe''…, page 403</ref>.
 
Cependant, il faut bien noter que l’effacement de l’autorité publique, incarnée par le roi ou le comte, s’est faite selon des rythmes et des intensités différents :
*Dans certaines régions (Centre de la Francie, Bourgogne, Lorraine, Provence, Languedoc, …), l’effacement de l’autorité publique a été précoce et profond. Dès la deuxième moitié du X{{e}} siècle<ref> Robert FOSSIER, ''Enfance de l’Europe''…, page 380</ref>, les viguiers et les alleutiers s’emparent ou reçoivent le ban. L’apogée de la seigneurie châtelaine se situe entre 1030 et 1080. Georges Duby a particulièrement étudié le Mâconnais.
*D’autres régions sont mieux tenues par les princes ou les rois (Normandie, Flandre, …). Les châteaux restent contrôlés par eux ou leurs familiers, sauf pendant les crises. Ainsi, le comte de Flandre interdit dès la fin du X{{e}} siècle la construction de forteresses sans son autorisation<ref> Robert FOSSIER, ''Enfance de l’Europe''…, page 384</ref>. Le cas normand est plus complexe : le duc confie les vicomtés à des agents fidèles. Les vicomtes normands s’occupaient de la justice, des impôts et de l’armée ; ils séjournaient souvent à la cour ducale et rendaient des comptes au prince. Mais à la faveur des crises de succession (mort de Guillaume Le Conquérant en 1087), les seigneurs et les vicomtes en profitent pour devenir autonomes. Les guerres privées sont alors courantes. En 1107, Henri I{{er}} doit réaffirmer l’interdiction d’édifier des tours fortes sans son accord<ref>Michel de Boüard (dir.), ''Histoire de la Normandie'', Toulouse, Privat, 2001, page144</ref>.
 
= Evolution des modèles de châteaux forts =
== Les mottes castrales ==
On les appelle aussi «château à motte et basse-cour»<ref>Gauvard (dir.), ''Dictionnaire du Moyen Âge'', page 275</ref>). Il s'agit d'un habitat fortifié très courant au Moyen Âge, construit sur un tertre de 10 à 60 mètres de hauteur<ref>Gauvard (dir.), ''Dictionnaire du Moyen Âge'', page 275</ref>. Leur pente est plutôt raide. Bâties en terre et en bois selon des plans variés, elles sont soumises aux intempéries (les palissades pourrissent) et aux incendies. Vers l’An 1000, le bois domine dans les constructions du nord de l’Europe. L’Europe méditerranéenne utilise davantage la pierre.
Les premières mottes sont aménagées à la fin de l’époque carolingienne entre Rhin, Escaut et Loire. Les mottes apparaissent plus tardivement dans le nord de l’Europe (XII{{e}} siècle au Danemark) et à l’est de l’Elbe (XIIIe siècle) <ref> Jean-Pierre Babelon (dir.), ''Le château en France'', page 21</ref>
La motte castrale est incluse dans un ensemble fortifié plus vaste qui comprend une basse-cour, séparée par un fossé. Le seigneur exigeait de ses paysans qu’ils participent aux travaux car ces derniers savaient construire leur maison : on commençait par tracer le plan au sol, puis on creusait un fossé dont les débris permettaient l’érection d’un rempart de terre. Le monticule en lui-même était élevé par couches successives, par accumulation de matériaux apportés par chariots ou à dos d’homme dans des hottes. Nul besoin d’une main d’œuvre spécialisée pour élever ce genre de défense. L’habitation du seigneur pouvait être au sommet de la motte (dans une tour) ou bien dans la basse-cour. La tour était encerclée par une palissade ou un muret.
 
== La petite enceinte circulaire ==
Elle mesurait moins de 100 mètres de diamètre et servait d’habitat individuel fortifié dans toute l’Europe ; elle est contemporaine des mottes castrales. La porte était gardée par une tour en bois ou en pierre.
== Les châteaux forts entre 1000 et 1150 ==
 
Pendant cette période, on assiste à une progression de la pierre comme matériau de construction vers le nord. Cependant, le bois est toujours utilisé au XIIe siècle. La pierre reste un matériau coûteux. Les premiers donjons de pierre datent de la fin du Xe siècle (Doué, Langeais en 994<ref>Dominique Barthélémy, ''L’ordre seigneurial'', Paris, Seuil, 1990, page34</ref>) ; mais ils se généralisent à partir de 1050<ref> Jean-Pierre Babelon (dir.), ''Le château en France'', page 33</ref>. Ils ont souvent un plan quadrangulaire.
 
== Les fortifications dans la deuxième moitié du XII{{e}} siècle ==
À partir de 1150, les techniques castrales s’adaptent aux progrès de la poliorcétique :
*utilisation du trébuchet à partir des croisades = attaque plus redoutable
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*Lignes successives de défense : pont-levis, courtine
*châteaux plus "ramassés", plus "tassés" (réduction de la surface)
== Au XIIIe siècle : le château de cour ==
*Progrès de l’autorité monarchique => pacification, fortification des marches et frontières
*Le seigneur de Coucy habite désormais dans un logis, plutôt que dans le donjon
Meilleur confort, plus de raffinement : tapisseries. Encore du froid : papier huilé sur les fenêtres ; jonc et herbes au sols, pavés. Fourrures dans le lit. Torches en résine
= Les fonctions du château fort au XIIe siècle =
== La défense ==
Le château sert de refuge et d'abri : il offre une protection militaire aux habitants de la région.
*La basse-cour accueille les paysans réfugiés en cas d’attaque. Parfois, ce large espace accueille un marché (comme au pied du château du Puiset<ref> Robert FOSSIER, ''Enfance de l’Europe''…, page 440</ref>). On y trouvait des écuries …
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*Cette sécurité n’est pas gratuite : le seigneur réquisitionne des vivres parmi ses dépendants (réserves de nourriture en cas de siège= lard, avoine et foin pour les chevaux, céréales). Il exige la taille, un impôt arbitraire et exhorbitant. Il réclame aussi des travaux gratuits et obligatoires de la part de ses dépendants : les corvées permettait d'entretenir l'édifice (curage les fossés, levées de terres, remplacement du bois des palissades, transport de pierres, …) ; ces corvées sont de quelques jours par an : elles sont de plus en plus rachetées et des ouvriers sont payés pour faire les travaux.
*Le château devait pouvoir tenir un siège : réserve d’armes, de munitions, de nourriture, puits
== Le contrôle d’un territoire et des échanges ==
Le site castral est choisi pour ses qualités de défense mais aussi pour tirer parti de la circulation des Hommes et des marchandises : à un carrefour routier, près d’un pont, au débouché d’un défilé naturel … Les sites en hauteur permettent d’observer et de contrôler une région.
== Le symbole d’un pouvoir banal ==
Il semble que c’est la principale fonction de l’édifice<ref> Robert FOSSIER, ''Enfance de l’Europe''…, page 403</ref> :
*C'est le lieu de la justice seigneuriale ou féodale : la salle de réception pouvait servir de salle de tribunal ; l’aula était également destinée aux banquets ; le donjon pouvait contenir un cachot.
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*dans le donjon se trouvent les archives seigneuriales, le trésor. La grosse tour est le symbole visible de la puissance du maître. Celui de Montbazon mesure 19,65 mètres sur 13,75 mètres au sol. Le donjon de Loches a une hauteur de 37 mètres.
 
== Le château est un lieu de vie ==
*Chapelle desservie par des chanoines ou un chapelain ; se situe dans la basse-cour
*La basse-cour est l’endroit où les futurs chevaliers s’entraînent.
= Notes =
<references/>
= Bibliographie =
*CHATELAIN A., ''Châteaux forts et féodalité en Ile-de-France du XIe au XIIIe siècle'', Paris, 1983.
*CONTAMINE P., GUYOTJEANNIN O. (ed), ''La guerre, la violence et les gens au Moyen Age'', Paris, 1996.