« Fondements des mathématiques/Les expressions formelles, les ensembles et les fonctions » : différence entre les versions

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Ce chapitre expose les problèmes de l’existence des êtres mathématiques. Qu’est-ce qui existe au sens mathématique ?
 
== L’ontologie mathématique ==
 
La question de l’existence est aussi nommée la question ontologique. L’ontologie d’une théorie, c’est l’ensemble de tous les énoncés d’existence des objets qu’elle étudie.
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Les théories des ensembles apportent donc un point de vue très général. En fait, tous les théorèmes mathématiques peuvent être démontrés à l’intérieur d’une théorie des ensembles. Mais la puissance de ces théories posent des difficultés. Nous allons voir qu’il n’est pas facile de les formuler d’une façon cohérente.
 
== L’existence des extensions conceptuelles, Frege et le paradoxe de Russell ==
Frege est l’un des premiers à avoir proposé une liste explicite des principes d’existence des ensembles. Il l’avait incorporée à une œuvre destinée à fonder l’ensemble des mathématiques sur des méthodes complètement formalisées. Son principal axiome dit que pour tout concept C il existe un ensemble, l’ensemble E des êtres pour lesquels ce concept est vrai. E est l’extension conceptuelle de C.
 
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Un concept existe dès qu’il fait partie d’une théorie sensée. L’ensemble des nombres entiers n’est pas un nombre entier et n’est donc pas élément de lui-même. C’est sensé. Le concept de ne pas être élément de soi-même existe donc. Seule son extension conceptuelle ne peut pas exister. Le concept du barbier ci-dessus existe et a une extension conceptuelle. Elle est tout simplement vide. Le concept de ne pas être élément de soi-même existe mais n’a pas d’extension conceptuelle. S’il en avait une, elle ne pourrait pas être vide, puisqu’il y a des ensembles qui ne sont pas éléments d’eux-mêmes. Appelons concepts extensionnels les concepts qui ont une extension. Russell a prouvé qu’une théorie générale des concepts ne peut pas se limiter aux concepts extensionnels.
 
== Qu’est-ce qu’un ensemble ? ==
Pour faire un ensemble il suffit d’avoir des objets et de donner un critère d’appartenance à l’ensemble que l’on définit. Le critère d’appartenance est en général un prédicat unaire, c’est-à-dire une formule qui contient une seule variable libre. Un prédicat unaire est un concept qualitatif. C’est pourquoi toute ontologie des ensembles incorpore sous une forme plus ou moins restreinte l’axiome de Frege. Il y a des concepts qui ont une extension. Plus il y en a, plus l’ontologie est tolérante. Mais si elle est trop tolérante, elle tombe dans l’absurdité.
 
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L’extension d’un prédicat, c’est l’ensemble de tous les êtres pour lesquels ce prédicat est vrai. L’axiome d’extensionnalité ne fait qu’énoncer la propriété essentielle des extensions, c’est-à-dire des ensembles.
 
== Les ensembles indicibles ==
La fin de cette section prouvera qu’une théorie ne peut pas donner l’existence à tous les ensembles. Elle ne contient pas assez de noms. Quel que soit l’ensemble infini des ensembles nommés dans une théorie, il est toujours incomplet. Qu’on puisse prouver que l’incomplétude ontologique est une propriété nécessaire de toutes les théories montre que la raison est capable de connaître ses propres limites.
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La stratégie ontologique de cette encyclopédie est progressive. On commencera par les ensembles dicibles. Les ensembles dicibles fondamentaux sont les systèmes formels, ou ensembles d’expressions formelles. Les autres ensembles sont définis à partir des systèmes formels avec des règles de construction.
 
== Les systèmes formels ==
Un système formel est un ensemble de formules, ou expressions formelles, que l’on peut interpréter comme des noms, des phrases, ou de toute autre façon.
 
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Les systèmes formels de base sont des ensembles énumérables. Intuitivement, ce sont tous les ensembles pour lesquels on peut donner un procédé mécanique d’énumération de tous leurs éléments. Le chapitre suivant (l’incomplétude) donnera deux définitions équivalentes de cette notion fondamentale d’énumérabilité.
 
== L’existence des non-ensembles ==
Une méthode couramment acceptée en mathématiques fondamentales consiste à limiter l’ontologie aux ensembles. Les seuls êtres mathématiques sont des ensembles. La raison de cette méthode, c’est qu’il semble qu’on ne gagne rien à accueillir les non-ensembles. Tous les non- ensembles peuvent être représentés fidèlement dans une théorie des ensembles. Cela peut surprendre le débutant, parce que les non-ensembles, les nombres et la plupart des objets sont premiers par rapport aux ensembles. Les ensembles ne font que réunir des êtres qui existent déjà. Cependant, si l’on part de l’ensemble vide, et que l’on forme d’autres ensembles, tels que l’ensemble qui contient l’ensemble vide comme unique élément, l’ensemble qui contient les deux précédents, l’ensemble qui contient les trois précédents et ainsi de suite, on obtient une ontologie réduite aux ensembles et cependant assez riche pour définir des représentations de tous les êtres mathématiques. L’économie des moyens justifie donc cette réduction ontologique. Mais cette méthode de réduction ne sera pas suivie dans les pages qui suivent pour plusieurs raisons.
 
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Quand on adopte une démarche ontologique progressive, les fonctions sont parfois plus fondamentales que les ensembles. Il n’y a aucune difficulté à considérer « Singleton de… » comme une fonction. En revanche, il y a beaucoup de difficultés à considérer son domaine comme un ensemble. Dans certaines théories, on veut que tous les êtres soient définis à partir d’objets déjà définis. Comme les fonctions jouent un rôle de premier plan dans la construction, ou définition, des ensembles, leur existence est établie de façon prioritaire.
 
== La théorie cantorienne des nombres infinis ==
Les nombres entiers positifs suffisent pour se faire une idée de l’infini. On peut écrire des nombres aussi grands que l’on veut. Il n’y a pas de nombre qui soit plus grand que tous les autres. On peut le démontrer par l’absurde. Supposons qu’il y ait un nombre plus grand que tous les autres. Appelons-le N. N+1 est plus grand que N contrairement à l’hypothèse, qui doit donc être rejetée, ce qu’il fallait démontrer. Montrons que l’on peut formaliser cette démonstration avec les règles de la déduction naturelle.
 
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On appelle le nombre des nombres réels la puissance du continu. Le théorème précédent affirme que la puissance du continu est plus grande (strictement) que l’infini dénombrable, qu’elle est indénombrable.
 
== Le théorème de l’incomplétude ontologique : il existe des ensembles indicibles ==
Si un ensemble n’est ni fini, ni dénombrable, on dit qu’il est indénombrable. Le théorème de l’incomplétude ontologique est une conséquence des théorèmes de Cantor, parce qu’un ensemble indénombrable est indicible. Pour le prouver, il suffit de montrer que l’ensemble de tous les noms dans une théorie est toujours au plus dénombrable. La définition d’une théorie respecte deux conditions.