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Robert Gibrat, ingénieur chargé de la conception de l'usine marémotrice de la Rance, a été le premier à théoriser et à inventer une formule pour calculer le '''potentiel énergétique''' d'une marée dans un bassin donné. Pour choisir un site marémoteur des calculs sont effectués pour évaluer le '''potentiel marémoteur''' du site en fonction de la surface du bassin de retenue d'eau au cours de la mi-marée (S) et du marnage moyen (A) (différence de hauteur d'eau entre la marée haute et la marée basse) selon la relation : <math>E(GWh/an)=2.S(km^2)A^2(m)</math>.
 
Le potentiel marémoteur d'un site correspond à l'énergie que l'on peut tirer d'un volume d'eau présent dans le bassin de surface (S) et se vidant de la hauteur (A). Le déplacement du volume d'eau de hauteur (A) et de surface (S) va permettre la production d'énergie. Lorsqu'il va se déplacer verticalement d'une hauteur A, il y a conversion d'énergie potentielle en énergie mécanique, l'énergie potentielle étant définie par la relation : <math>E(J)= \rho.g.S.A^2</math> avec ρ la masse volumique de l'eau et g la constante universelle de gravitation.
 
Par exemple, l'usine marémotrice de la Rance a une surface de retenue d'eau (S) de 22 km² et produit en moyenne 540 GWh/an. D'après la formule précisée ci-dessus, on peut dont en déduire un marnage moyen utile de 3,5 mètres. Le marnage moyen mesuré à l'emplacement de l'usine est théoriquement de 8,6 mètres ; on peut donc remarquer qu'une seule partie de l'énergie potentielle créée par la différence de niveau d'eau de part et d'autre du bassin peut être exploitée lors de la conversion en énergie mécanique et par conséquent pour la production d'électricité.
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== Évolution de l'intérêt porté à l'énergie marémotrice : étudeanalyse de la trajectoire ==
[[Fichier:Trajectoire des usines marémotrices.png|centré|vignette|737x737px|Trajectoire des usines marémotrices]]
=== Premières utilisations des marées (avant le XX<sup>ème</sup> siècle) ===
Avant l'invention de la machine à vapeur, l'homme avait comme seules sources d'énergie, ses propres forces physiques, celles d'animaux de trait, mais aussi la force du vent et de l'eau. Ces sources étaient principalement exploitées par le biais de moulins hydrauliques et éoliens. Traditionnellement, les '''moulins''' sont utilisés pour convertir l'énergie cinétique contenue dans l'eau ou dans l'air en énergie mécanique. On les utilisait pour moudre des aliments tels que les céréales, mais également pour scier du bois ou travailler les métaux dans les forges.
 
La date précise de l'invention du '''moulin à marée''' reste encore indéterminée, les chiffres peuvent variésvariant avec les nouvelles recherches. Les documents les plus anciens référençant l'utilisation de l'énergie marémotrice datent du X<sup>ème</sup> siècle et présentent des moulins situés en Irak. Cependant, d'après de nouvelles recherches archéologiques, le premier moulin à marée pourrait être apparu au VII<sup>ème</sup> siècle sur la Fleet à Londres. Pendant le Moyen AgeÂge, les moulins à marée se sont développés en Europe. Ils vont subir un déclin à partir de la première '''révolution industrielle''' au XVIII<sup>ème</sup> siècle. Le charbon est utilisé comme source de substitution à l'eau, en alimentant la machine à vapeur et permettant d'être indépendant des énergies naturelles telles que les marées. La deuxième révolution industrielle au XIX<sup>ème</sup> siècle est marquée par l'arrivée de l'électricité. L'exploitation de l''''électricité''' présente l'avantage d'avoir une indépendance entre le lieu de production et celui de l'utilisation. Les anciens moulins dont les moulins à marée sont abandonnés pour être remplacés par des moteurs électriques. Cependant, au XX<sup>ème</sup> siècle, les marées vont être utilisées de nouveau pour produire de l'électricité avec les usines marémotrices<ref>Juan Aurelio MONTERO SOUSA et José Luis CALVO ROLLE, « Energía mareomotriz: perspectiva histórica y estado actual », Técnica Industrial, mars 2013, consulté le 19 avril 2019.http://www.tecnicaindustrial.es/TIFrontal/a-4507-Energia-mareomotriz--perspectiva-historica-actual.aspx </ref>.
=== Premiers projets d'usines marémotrices (première moitié du XX<sup>ème</sup> siècle) ===
Les premiers projets d''''usines marémotrices''' sont apparus dans les années 1920. Plusieurs pays ont effectué des études d'installations d'usines marémotrices dont le Canada et l’Angleterre. La France prépare à partir de 1921 un projet d'usine marémotrice à l'Aber-Wrac'h, en Bretagne, proche de la ville de Brest. Cette installation a un '''caractère expérimental''', elle a pour objectif de préparer l'usine de la Rance. Le projet est soutenu par l’État qui le subventionne<ref>Emmanuel DESGREES DU LOU, « La houille bleue dans l'ouest », L’Ouest-Éclair, 13 septembre 1921, consulté le 13 avril 2019.https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6466661/f1.item.r=plouvien.langFR</ref>. La production d'énergie électrique par les marées est novatrice, car au début du XX<sup>ème</sup> siècle l'électricité était produite à partir du charbon ou des barrages hydroélectriques principalement. Cet aspect avant-gardiste a participé à l'élaboration du projet, la France aurait été le premier pays à développer cette technique.
 
Le projet de l'Aber-Wrac'h s'inscrit dans une dynamique de développement de l''''électricité'''. Dans les années 1920, un ensemble de progrès techniques permet d'avoir des applications de plus en plus nombreuses de l'électricité, avec le tramway ou le téléphone. Dans cette période, on commence à pouvoir transporter l'électricité sur des longues distances, et des programmes d'électrification du territoire sont mis en place. Le domaine d'utilisation de l'électricité s'élargit avec le début de l'électroménager. L'électricité s'implante dans le milieu domestique. La volonté de développement du réseau électrique en France se perçoit par le lancement de programmes d'électrifications du territoire par l’État. En 1919, seulement 20 % des communes sont raccordées à l'électricité, en 1941, c'est près de 97 % de la population qui est desservie<ref>Arnard BERTHONNET « L’électrification rurale » dans Histoire & Sociétés Rurales, Association d’histoire des sociétés rurales, 2003 ,consulté le 13 avril 2019. p. 384. https://www.cairn.info/revue-histoire-et-societes-rurales-2003-1-page-193.htm</ref>.
 
Même si le projet semblait appartenir à un mouvement favorable, l''''usine de l'Aber-Wrac'h''' ne fut jamais construite. L'installation de la centrale avait commencé en 1928, mais a été arrêté par manque de fonds dû au krach boursier de 1929. Investir dans un projet expérimental présentait un risque. De plus, les moyens techniques étaient encore insuffisants pour être une construction intéressante. Pour subvenir au besoin d'électricité, en période de crise financière, l'investissement va se tourner vers des techniques maîtrisées telles que les barrages hydroélectriques. Après 1929, suit une période avec un intérêt réduit pour les usines marémotrices. L'intérêt depour ces structures réapparaît en Russie en 1938. Des études sont entreprises pour la construction d'une centrale expérimentale de petite taille.
 
=== Construction des premières usines marémotrices (deuxième moitié du XX<sup>ème</sup> siècle) ===
Dans les années 1960, les projets d'usines marémotrices se concrétisent. En effet, à partir des années 1930, des idées de projets commencent à apparaître, notamment pour une centrale à '''Kislaya Guba''' en Russie en 1938 (dont les études dureront jusqu'en 1965), et de la '''Rance''' en Bretagne, dont les études de conception commencèrent en 1943. Ainsi, Kislaya Guba commence à être construite en 1968 et l'usine marémotrice de la Rance est mise en service en 1966. De plus, de nouveaux projets voient le jour comme l'usine d'<nowiki/>'''Annapolis Royal''' au Canada, datant de 1960. A cette période, au cœur des Trente Glorieuses, la classe moyenne se modernise, et a de plus en plus accès à la consommation et l'énergie. Il faut donc trouver de nouvelles sources d'énergie afin de répondre à cette '''demande''' en pleine explosion. C'est dans le même temps que commence à progresser l''''énergie nucléaire'''. La première centrale nucléaire sur le territoire français est construite en 1962. AÀ mesure que le nucléaire monte en puissance, l'énergie marémotrice est délaissée. La production d'énergie par les usines marémotrices est dépendante de la géographie du site, tandis que pour une centrale nucléaire, si [http://geoconfluences.ens-lyon.fr/actualites/eclairage/nucleaire-territoires-france les contraintes géographiques] sont respectées, la production sera constante quel que soit le site. C'est un avantage conséquent qui explique, selon nous, la croissance exponentielle de production d'énergie provenant des centrales nucléaires.
 
AÀ partir des années 1980, un '''changement de mentalitémentalités''' s'amorce. Le monde entame une prise de conscience de son impact sur l''''environnement''' et commence à réagir. Le concept de "'''transition écologique'''", qui aspire à une sortie du pétrole et du nucléaire, naît en Allemagne. Les usines marémotrices d'Annapolis Royal et de '''Jiangxia''' sont mises en service en 1980 et 1984.
 
=== Les usines marémotrices au XXI<sup>ème</sup> siècle ===
Courant années 2000, le besoin de protéger l'environnement s'ancre de plus en plus dans les consciences. La population mais aussi les gouvernements comprennent qu'ils ont un impact direct sur l'écologieenvironnement. Les premières réflexions ont lieu avec notamment le '''Sommet de la Terre''' en 1992 (dans le cadre de la ''Convention des Nations Unies''), ou encore avec la rédaction du '''protocole de Kyoto''' en 1997. Ces réflexions vont aboutir à des mesures mises en place au début des années 2000 visant à réduire la production de gaz à effet de serre. Dans ce contexte, l'intérêt pour les '''énergies renouvelables''' connaît un véritable essor, des moyens financiers et techniques sont débloqués pour trouver des solutions plus vertes. Les usines marémotrices sont concernées, les pays possédant des côtes avec un marnage suffisamment important relancent des projets. La Corée du Sud et le Royaume-Uni mettent en service de nouvelles centrales. Des projets plus ambitieux voient le jour comme le projet de '''Severn''' au Royaume-Uni, de la baie de '''Mezen''' en Russie ou d''''Incheon''' en Corée du Sud.
 
CComme le montre le tableau ci-dessous, c'est dans un contexte de demande toujours plus importante d'électricité (comme le montre le tableau ci-dessous)et etavec la volonté de développer de nouvelles alternatives de production d'énergie que les usines marémotrices prennent un nouvel élan.
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Le changement de mentalitémentalités continue et les États prennent une part de plus en plus importante dans la "transition écologique". La COP21 de Paris en 2015 en est un des symboles. Cependant, les usines marémotrices rencontrent quelques '''oppositions''' avec des organismes de protection de l'environnement qui dénoncent l'impact environnemental de telles installations. Le Green Party Korean arriveparvient même à faire abandonner le projet d'Incheon., Enen France aussi, l'utilisation de l'énergie marémotrice par l’usine de la Rance fait débat. En effet, lors de la construction de l’usine en 1966, la question environnementale ne se posait pas et aucune analyse de risquerisques étaitn'a été mise en œuvre. Ainsi, le bassin de la Rance a été isolé et mis au sec pendant 2 à 3 ans pour permettre sala construction de l'usine, ce qui a entraîné une destruction totale de la '''biodiversité''' existante. Il a fallu une dizaine d’années pour qu’une nouvelle faune et flore, totalement différente de celle initiale, s’installe à nouveau. Même si un équilibre a été retrouvé, comme l'affirme EDF, ce phénomène est désastreux car il peut entraîner la disparition d'[[w:Endémisme|espèces endémiques]]. Beaucoup de poissons ont disparus : parmi eux les anguilles et les poissons plats. Seulement 30% des espèces de poissons présentes initialement ont survécu. Des [https://www.futura-sciences.com/planete/definitions/botanique-espece-opportuniste-7267/ espèces opportunistes] (notamment les moules) ont colonisé les fonds de l'estuaire, tout comme les algues vertes. En effet, la présence de l’usine est à l'origine d'un fort '''envasement''' de l’estuaire qui est très dangereux pour les poissons qui sont alors étouffés. Cet envasement est lié au dépôt de sédiments dans l’estuaire car il n'est plus jamais au sec comme avant, il reste toujours une petite quantité d’eau ce qui faitfaisant proliférer la vase. Il serait nécessaire de retirer au moins 50.000 m<sup>3</sup> de sédiments par an pour que le désenvasement de la Rance soit optimal. Tandis qu’il est déjà difficile pour EDF d’en retirer 20.000 m<sup>3</sup> en raison du coût de l’opération, l’association '''Rance Environnement''' demande d’en supprimer 100.000 m<sup>3</sup>. Mais cette opération, d’un coût de l’ordre de 2 millions d’euros par an ne semble pas envisageable. En effet, cette association a lancé en 2018 un plan quinquennal pour le désenvasement (2018-2023), toutefois il aurait dû débuter en juillet 2018 mais il n’était toujours pas effectif en septembre de la même année. Par ailleurs, depuis 1986 en France, une [[w:Loi_littoral|loi]] protège le littoral. Elle vise à la protection de l’environnement et des paysages du littoral français, ce qui peut expliquer pourquoi il n’est pas plus exploité malgré son potentiel marémoteur important.
 
L''''impact environnemental''' de l'usine de Kislaya Guba commence également à être étudié. En effet, une évaluation des risques environnementaux liés à cette usine russe est sponsorisée par l’Unesco. Depuis que l'usine a été construite, une eau stagne toute l'année dans la baie de Kislaya. Cette eau gèle en hiver ce qui détruit la biodiversité : beaucoup de mollusques sont retrouvés morts.[[Fichier:Trajectoire des usines marémotrices.png|centré|vignette|737x737px|Trajectoire des usines marémotrices]]
=== L'avenir de l'énergie marémotrice ===
Selon Nicolas Chiron, guide et manager de l'espace découverte de la Rance interviewé par nos soins, l'énergie marémotrice est considérée comme une '''source fiable''' d'énergie. Exploiter les marées revient à utiliser une énergie prévisible et régulière (nous sommes assurés d'avoir deux marées par jour contrairement à l'éolien ou leau solaire qui sont des sources d'énergie renouvelables plus variables). Les horaires de fonctionnement de l'usine et de production sont donc parfaitement connus, l'inconvénient étant que l'usine ne produit pas en permanence.
 
En théorie les autres sources d'énergies ne font pas de '''concurrence''' à l'énergie marémotrice. Aujourd'hui on multiplie les sources d'énergie pour répondre à la demande toujours plus importante en énergie tout en tenant compte du fait que chaque énergie présente des avantages et des inconvénients. La concurrence s'effectue plutôt au niveau de la revente de l'électricité. Dans le contexte de '''transition énergétique''', la revalorisation des énergies renouvelables pourrait donner un nouvel élan à l'énergie marémotrice mais le secteur de la mer est difficile à exploiter d'un point de vue économique. Cela se remarque dans le plan pluriannuel<ref>{{Lien web|langue=fr|titre=Programmations pluriannuelles de l’énergie (PPE)|url=http://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/programmations-pluriannuelles-lenergie-ppe|site=Ministère de la Transition écologique et solidaire|date=|consulté le=2019-04-11}}</ref> de l'énergie diffusé par le gouvernement français : on favorise les énergies renouvelables terrestres plutôt que marines car celles-ci coûtent moins chers à exploiter, à transporter...
 
Un grand projet d'usine marémotrice est actuellement mené par la société [http://www.tidallagoonpower.com/ Tidal Lagoon Power] en Angleterre dans la Swansea Bay. Il témoigne de la politique actuelle dans le domaine des énergies : construire des barrages avec de très grosses puissances pour avoir une bonne rentabilité énergétique rapidement et donc permettre d'attirer des investisseurs rapidement. De plus, par retour d'expérience de l'usine marémotrice de la Rance, on ne travaille plus avec les estuaires, considérés comme des zones environnementales trop sensibles (en raison de l'envasement notamment). Cette structure se démarque des anciennes constructions, elle ne reprend pas le modèle de la Rance. En effet, la centrale utiliseutilisera un lagon artificiel comme bassin et non un estuaire. Le programme prévoit la construction d'une digue afin de délimiter un volume sur l'espace maritime. Ce type d'usine marémotrice permet d'utiliser l'énergie des marées plus facilement. Le projet gallois valorise également les activités économiques complémentaires au barrage avec l'intégration d'un service de visites sur le site, la mise en place d'éoliennes sur le barrage, la création d'un port de plaisance dans le lagon... Le barrage ne se limite donc pas uniquement à la production d'électricité mais fournit également d'autres services pour générer des '''retombées économiques locales'''. Cependant le Brexit a financièrement mis en danger le projet qui est pour le moment suspendu.
 
Les projets concernant l'exploitation de l'énergie marémotrice restent encore lourdlourds à porter en raison de toutes les contraintes devant être respectées. Un des plus gros facteurs qui pèse sur le développement de l'énergie marémotrice est l'usage de la marée. Dans le monde, seulement une dizaine de pays ont des marnages supérieurs à 10 mètres et les pays ayant la possibilité de développer des centrales le font. L'Australie serait intéressée pour développer un nouveau projet et l'usine marémotrice de la Rance doita recevoirreçu un membre du gouvernement australien en avril 2019 pour lui expliquer précisément comment fonctionne l'usine marémotrice de la Rance.
 
== Acteurs impliqués : l'exemple de l'usine marémotrice de la Rance ==