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=== Une induction qualitative basée sur des faits et pas uniquement des dires ===
 
L'[[w: fr: Méthode hypothético-déductive|hypoitético-déduction]] et l'hypotético-induction sont deux méthodes couramment utilisées en sciences sociales. La première débute souvent par une question de départ, comme guide à la sélection de modèles, d'hypothèses et concepts. Ceux-ci sont ensuite articulés en dimensions et composants dans le but de les vérifier ou infirmer à l'aide d'un ensemble d'indicateurs. La seconde méthode au contraire fait le trajet inverse et commence d'abord par une observation pour ensuite seulement produire des indicateurs empiriques qui permettront de construire ou de récupérer des concepts, hypothèses, dans le but éventuel de produire ou de confirmer un ou plusieurs modèles théoriques<ref group="B">{{Ouvrage|langue=|auteur1=|prénom1=Luc van|nom1=Campenhoudt|prénom2=Jacques|nom2=Marquet|prénom3=Raymond|nom3=Quivy|titre=Manuel de recherche en sciences sociales|passage=133 – 134|lieu=|éditeur=|date=2017|pages totales=|isbn=978-2-10-076541-6|oclc=999909946|lire en ligne=https://www.worldcat.org/title/manuel-de-recherche-en-sciences-sociales/oclc/999909946&referer=brief_results|consulté le=2021-01-11}}</ref>. Par tradition peut-être, ou en raison de son histoire et de certaines convictions partagées, la méthode inductive fut celle choisie par les anthropologues. Elle fut aussi mon propre choix influencé très certainement par mon environnement de travail, mais aussi comme il sera vu bientôt en raison de nombreux [[w: fr: Biais cognitifs|biais cognitifs]] possible qui peuvent se développer lorsque l'on commence son travail de recherche en se basant des concepts et hypothèses modèles théoriques aussi savants ou inébranlables qu'ilils puissent être.
 
L'anthropologie est aussi une discipline où l'on s'intéresse davantage aux aspects qualitatifs que quantitatif dans la manière d'aborder son terrain d'étude. Afin de garantir toute fois une certaine « rigueur du qualitatif », Olivier de Sardan préconise dans dans le cadre d'enquêtes ethnographiques de produire des « indicateurs qualitatifs » qu'il intitule « descripteurs » et définit de la sorte:
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[[Fichier:Shadow Person.jpg|alt=Auto portrait d'une personne faite au départ de son ombre dont les proportions anatomiques sont déformées|vignette|392x392px|Auto portrait d'une personne faite au départ de son ombre dont les proportions anatomiques sont déformées (source :https://w.wiki/3GZS)]]
Vu l'ampleur du mouvement et la quantité insondable d'indicateurs qu'il est possible de produire, je n'aurai pas pris l'option, bien qu'elleque cela futsoit possible, de faire le chemin inverse de l'étude déductive qui consisterait à produire dans un ordre chronologique de nouveaux concepts, hypothèses et théories anthropologiques. Cette idée m'était venue à l'esprit en cours d'écriture, mais elle est finalement apparue impossible à la vue de la quantité de travail et de pages que nécessite déjà la description synthétique du mouvement Wikimédia. CertainCertains pourront regretter aussi l'absence d'interview ou de compte rendu d'entretiens compréhensifs ou de récits de vie, mais en me faisant ce reproche à moi-même, je me suis alors demandé si l'on pouvait vraiment se fier au discours des acteurs pour se faire une représentation fiable de la réalité. L'histoire de la socio-anthropologie nous a en effet démontré que les dires des acteurs de terrain pouvait dans certains cas contenir de grave omissions voir des erreurs flagrantes par rapport une réalité qu'il est parfois difficile à verbaliser ou qui ne semble par répondre aux attentes du chercheurschercheur.
 
Parmi les exemples les plus connus figurent les travaux de [[w: Marcel Griaule|Marcel Griaule]] en pays Dogon, et notamment son ouvrage intitulé ''Dieu d'eau : entretiens avec Ogotemmeli'' (Griaule 1948)<ref group="B">{{Ouvrage|langue=English|prénom1=Marcel|nom1=Griaule|titre=Dieu d'eau : entretiens avec Ogotemmeli|éditeur=Fayard|date=1966|oclc=233656659|lire en ligne=https://www.worldcat.org/title/dieu-deau-entretiens-avec-ogotemmeli/oclc/233656659&referer=brief_results|consulté le=2019-05-09}}</ref> contesté par la suite par Wouter Eildert Albert van Beek qui s'étonna entre autreautres que « la trajectoire initiatique de Griaule n'a jamais été mise en parallèle ou même approchée par aucun de ses élèves »<ref group="B">{{Article|langue=|auteur1=|prénom1=Wouter Eildert Albert van|nom1=Beek|titre=Dogon restudied : a field evaluation of the work of Marcel Griaule|périodique=Current anthropology.|volume=32|date=1991|issn=|lire en ligne=https://booksc.org/dl/48718858/29ba2d|pages=142}}</ref><ref group="N">Texte originale avant traduction par deepl.com version gratuite : « ''Griaule's initiatory trajectory has never been parallele or even approximated by any of his student'' »</ref> alors que « la variation culturelle interne entre les DogonDogons peut être un facteur des inévitables styles et interprétations personnels »<ref group="B">''Ibid,'' p.164</ref>. Comme autre exemple dans le milieu anglophone cette fois, on trouve aussi les travaux de [[w: Margaret Mead|Margaret Mead]] dont elle rend compte dans son ouvrage ''[[w: en: Coming of age in Samoa|Coming of age in Samoa]]''<ref group="B">{{Ouvrage|langue=English|prénom1=Margaret|nom1=Mead|prénom2=Franz|nom2=Boas|prénom3=Sam|nom3=Sloan|titre=Coming of age in Samoa : a psychological study of primitive youth for western civilisation|date=2014|isbn=9784871872348|oclc=977239261|lire en ligne=https://www.worldcat.org/title/coming-of-age-in-samoa-a-psychological-study-of-primitive-youth-for-western-civilisation/oclc/977239261&referer=brief_results|consulté le=2019-05-13}}</ref>. Critiqués à maintes reprises, les résultats de cette recherche auront eu aussi été remis en cause par Serve Tcherkésoff cette fois lors d'une enquête subséquente qui permis d'apprendre que la chercheuse « habitait au poste américain de l'île et conduisait des entretiens, par interprètes, avec une cinquantaine de jeunes filles »<ref name="b3" group="B">{{Article|langue=fr|prénom1=Serge|nom1=Tcherkézoff|titre=Margaret Mead et la sexualité à Samoa. Du consensus anthropologique au débat ethnographique|périodique=Enquête. Archives de la revue Enquête|numéro=5|date=1997-09-01|issn=1953-809X|doi=10.4000/enquete.1203|lire en ligne=http://journals.openedition.org/enquete/1203|consulté le=2019-05-13|pages=141–160}}</ref>.
 
Voici donc deux controverses anthropologiques porte donc réflexion sur la validité des informations recueillies lors d'entretiens individuels ainsi que de leur interprétation par le chercheur lorsque l'on désire accéder à la pure réalité des choses et pas aux mythes qui la décrivent au sein d'une communauté et qui par nature seront toujours sujet à reconstruction<ref name="b13" group="B">{{Ouvrage|langue=English|prénom1=Derek|nom1=Freeman|titre=Margaret Mead and Samoa : the making and unmaking of an anthropological myth|éditeur=Harvard University Press|date=1983|isbn=9780674548305|oclc=8785070|lire en ligne=https://www.worldcat.org/title/margaret-mead-and-samoa-the-making-and-unmaking-of-an-anthropological-myth/oclc/8785070|consulté le=2019-11-01}}</ref>. Suite à ces deux importantes polémiques, le questionnement sur la fiabilité du discours des acteurs semble en outre toujours d'actualité si l'on se réfère par exemple aux travaux de Thierry Boissière, qui en raison des risques liés à un terrain exposé à des conflits armés, pratique ce qu'il appelappelle lui-même une « socio-anthropologie à distance » avec des « informateurs skype » dont les propos sont parfois difficiles à vérifier ou recouper<ref group="B">{{Article|langue=fr|prénom1=Thierry|nom1=Boissière|titre=L'anthropologie face au conflit syrien : replacer la société au cœur de l'analyse|périodique=Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée|numéro=138|date=2015-12-15|issn=0997-1327|doi=10.4000/remmm.9237|lire en ligne=http://journals.openedition.org/remmm/9237|consulté le=2019-05-09|pages=117–130}}</ref>. Une situation tout à fait à l'antipode de ma propre expérience, puisque de mon côté, il m'est loisible d'observer librement, en temps réel ou de manière asynchrone, clique par clique, l'archivage presque complet tous ce qui se passe dans la partie numérique de mon terrain d'observation. D'un côté figure donc l'expérience de Thierry Boissière qui n'a d'autre choix que de s'exposer aux risques du « syndrome narratif »<ref group="B">{{Article|prénom1=Francis|nom1=Farrugia|titre=Le syndrome narratif : théorie et terrain|périodique=Cahiers internationaux de sociologie|volume=127|numéro=2|date=2009|issn=0008-0276|issn2=1969-6787|doi=10.3917/cis.127.0269|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.3917/cis.127.0269|consulté le=2019-05-12|pages=269}}</ref> et du « reflet déformé du réel »<ref group="B">{{Ouvrage|langue=French|prénom1=Jean-Claude|nom1=Kaufmann|prénom2=François de|nom2=Singly|titre=L'entretien compréhensif|éditeur=Colin|date=2011|isbn=9782200259907|oclc=852936614|lire en ligne=https://www.worldcat.org/title/entretien-comprehensif/oclc/852936614&referer=brief_results|consulté le=2019-05-09}}</ref> pour ensuite recouper autant qu'il peut les informationinformations récoltées avec d'autres sources tels que les communiqués de presse et les réseaux sociaux. De l'autre, apparaitse trouve ensuite ma propre expérience d'un terrain que l'on pourrait presque qualifier d'holoptique tant il m'est loisible d'accéder directement au réel de référence sans nécessité de collecter des informationinformations au travers d'entretiens individuels ou collectifs.
 
Ceci étant dit, il va de soi que récolté le point de vue des acteurs autant que les mythes qu'ils véhiculent, reste une tâche tout à fait indispensable pour accéder à l'imaginaire de la communauté que l'on étudie. CetteCet aspect très important ne sera donc pas mis de côté dans le cadre de cette étude et ferasera d'ailleurs traité en profondeur au niveau des deux derniers chapitre. Solliciter ces acteurs au travers de sondages est aussi une autresautre démarche très utile pour produire des indicateurs statistiquestatistiques au sujet de ce que les gens pensent. Par chance à ce niveau et alors que je ne suis pas des plus apteaptes à réaliser ce genre de tâche en solitaire, il me fut possible de récupérer les informations produites par des travaux d'enquêtes précédemment réalisés par la fondation Wikimédia ou certains centres de recherche commandité.
 
=== Un questionnement progressif et une ignorance de départ ===