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L’histoire du ‘’Dernier‘’ théorème commence aux alentours de l’année 1638. Fermat est alors âgé d’une trentaine d’années. On peut mieux comprendre son inextinguible soif de connaissances en considérant qu'il vit à une époque où, sans rien renier des connaissances des Anciens mais au contraire en les admirant, on s'attache à leur étude pour mieux aller de l'avant. Tout est digne d'intérêt et on est polymathe. Fermat est de ces hommes, humaniste, lettré, philologue, il connaît le latin, le grec et l'italien, fait des vers français, latins, espagnols. Natif de Beaumont-de-Lomagne dans le Tarn-et-Garonne, il s'installe d'abord à Bordeaux, puis à Toulouse, faisant carrière dans la magistrature où il s'acquitte de sa tâche d'une manière exemplaire. Lorsqu'il découvre l'arithmétique des Anciens, il y voit une telle intelligence, une telle stimulation pour l'esprit, que se contenter d'une activité rémunérée ayant surtout l'avantage d'assurer sa subsistance n'est même pas une question à se poser. Il voit dans l'étude des nombres la voie royale pour contempler les mystères de la Nature. Son enthousiasme débordant a trouvé le moyen de s'exprimer, sa voie est toute tracée. Grâce à lui, la connaissance pourra s'accroître et se propager. La science des nombres n'est pas sa seule passion, le latin, langue des savants et des lettrés, n'a aucun secret pour lui. ''« Il fut façonné par la rigueur et l’intelligence latines : c’est sur ce terreau que put s’épanouir son prodigieux génie des mathématiques. »'' Il est très croyant, comme en témoigne [[s:Page:Œuvres_de_Fermat,_Tannery,_tome_1,_1891.djvu/439|son poème latin]] ‘’''Soumets-toi à Dieu ou l'agonie du Christ‘’'' dédié à Jean-Louis GUEZ de BALZAC. Au début du poème, la raison est engagée à renoncer aux vaines divinités des fables et à se soumettre à Dieu. Fermat est discret dans la vie, et bien que ce fût un génie, ''« le plus grand homme du monde'' ''»'' selon Blaise Pascal, on sait peu de choses sur sa vie. On ne connaît que quelques très rares démonstrations qu'il voulut bien livrer, une des plus remarquables étant celle où il démontre que le nombre 26 est le seul de tous à être compris entre un carré et un cube : 25 (5x5), et 27 (3x3x3).
 
Un jour donc, alors qu'il est en contemplation devant la beauté du théorème de Pythagore (a²=b²+c²), il s'interroge. Pourrait-on ajouter encore quelque chose au sujet, quelque chose auquel personne n'aurait jamais osé évoquer ? Dans la formule de Pythagore, l'exposant est le nombre 2, le seul nombre qui élevé au carré soit égal à son double (2² = 2+2). Fermat put penser que cette propriété lui conférait des propriétés très particulières, et il a l'idée qui allait bouleverser les mathématiques pour les siècles à venir. L'impensable se produit, il remplace l'exposant ''2'' par un ''3''. Est-ce que l'égalité pourrait encore exister pour certains cas en choisissant avec soin les valeurs de ''a, b et c'' ? On perçoit déjà l'étendue de ses ambitions. ''A priori'' il ne semblait pas que ce fût possible, on pouvait toujours s’en approcher de très près, parfois même à une unité, mais trouver une solution semblait impossible. Le nombre ''2'', monstre mathématique, semble le suggérer, à l'Unité, on a ajouté l'unité pour en faire une double unité, une manipulation philosophiquement blasphématoire – ou merveilleusement créatrice. Non seulement ''2'' est le premier des nombres premiers, mais il est aussi le seul nombre premier à être pair. Pour Fermat, tenter de prouver l'impossibilité de son égalité serait un défi formidable, et c'est tout ce qu'il lui faut. Certainement se rend-il compte assez vite qu’il serait plus facile de tester d'abord sa méthode avec un ''4'' en exposant, le carré de ''2'', ce nombre qui semble narguer tous ses suivants. Il utilise une méthode qu'il nomme ‘’descente infinie’’, ou descente indéfinie, un raisonnement par récurrence et un autre par l'absurde, le tout extrêmement efficace. Sa méthode fonctionne parfaitement avec l'exposant ''4'', plus difficilement avec ''3''. En septembre 1636 il commence à exciter la curiosité de ses correspondants, dans une lettre à Mersenne pour Sainte-Croix il propose ce défi : ''<span style="color:blue">« Trouver deux puissances quatrièmes dont la somme est une puissance quatrième et deux cubes dont la somme est un cube ».''</span><br>
À partir de l'exposant ''5'' et jusqu’à l’infini, il comprend vite que la méthode n'est plus adaptée. Il lui faut trouver une autre voie, qui très certainement n’aura aucun rapport avec la première. En 1670, cinq ans après sa mort, dans une courte ''“OBSERVATIO”'' provocatrice écrite en latin et tenue jalousement secrète de son vivant, mais que son fils Clément-Samuel fait connaître, il affirme avoir « assurément dévoilé une explication tout à fait étonnante que la marge trop étroite ne saurait contenir ». À cette observation Samuel en a ajouté 47 autres, le tout est inséré aux endroits adéquats dans le Livre VI de l’''Arithmetica'' du mathématicien grec Diophante qui fut publiée en 1621, et où Bachet de Méziriac avait ajouté une traduction du grec au latin. On dispose donc en 1670 d'une nouvelle ''Arithmetica'' légèrement augmentée mais ô combien précieuse pour la suite. L'observation en question se rapporte à la question VII, c'est la deuxième des 48 et elle se distingue notablement des autres. Nous y reviendrons.
 
Chez les Anciens on n’était pas sollicité dès le plus jeune âge par toutes les vanités qui encombrent maintenant l’esprit de nos enfants. De grandes intelligences ont pu ainsi atteindre à un grand savoir en pénétrant l’essence des choses. Socrate, Euclide, furent de ces hommes. Bien plus tard et dans un même siècle, Pascal, Leibnitz et Fermat qui fut un fameux exemple en théorie des nombres, construisant de puissants raisonnements avec parfois le seul recours aux mots.
 
Comme Pythagore, Fermat sait que quand l’homme a posé ''1'', puis ''2'', tout est déjà posé, l’unicité, la pluralité du monde. Quelque chose pourtant a dû spécialement lui plaire avec ce premier nombre pluriel, pour rendre le théorème de Pythagore décidément inégalable par sa puissance, sa singularité, en imaginant une conjecture beaucoup plus plurielle. Il fallait mettre sur un des deux plateaux de la balance les plus importantes propriétés du premier nombre entier suivant l’unité, l'unité doublée. Puis trouver et placer sur l’autre plateau une nouvelle conjecture qui soit en rapport avec la première, mais appelant cette fois l’infinité des nombres entiers (remarquons que ''1'', le nombre unitaire, n’est pas directement présent dans la «comparaison», il est “à part”). Peser le pour et le contre semblait ''a priori'' un défi gigantesque. Certainement très vite Fermat voit que les deux plateaux de la balance ne pourront jamais se trouver à la même hauteur, une mise en abyme est impossible. Il va donc s’attacher à le prouver.
 
La question du Dernier théorème est bien plus qu’une question arithmétique. Son histoire est comme un symbole profond de l'historiographie de la Mathématique. En reprenant l'idée de Eric Temple Bell nous sommes certain que la civilisation s'éteindra avant que nos mathématiciens puissent comprendre l'explication de Fermat.
 
== Genèse de l'étude ==
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* D'autre part, certains des écrits les plus importants de Fermat sont rédigés en latin, la langue de l'ellipse par excellence. Fermat étant expert en latin, il nous a fallu débusquer le plus possible de ses non-dits – écrits, mais subtilement cachés – auxquels l'obligeaient : a) le souci de discrétion dans une époque troublée (alors qu'il est magistrat) ; b) le manque de temps ; c) le principe même du défi, qui s'accordait avec les deux points précédents ; enfin, d) son goût pour la pédagogie, qui s'accorde à son tour avec les points précédents. Quatre raisons donc d'en dire le moins possible.
Être mathématicien professionnel a des avantages et des inconvénients. Parmi ces derniers l’un émerge : vous ne pensez plus pratiquement qu’à votre travail, votre esprit y est occupé jour et nuit, consciemment ou inconsciemment. Quant à l'étude du ''cas Fermat'', de nombreux mathématiciens et historiens s’y sont penchés, mais un consensus ne s’est jamais fait. Allez-vous perdre votre temps à l’étudier ? Si vous êtes un simple amateur, et que vous pensez être objectif, le problème se pose différemment, vous constatez d’abord qu’aucun argument avancé par les commentateurs sceptiques de Fermat n'est sérieux. Leur assemblage l'est d'autant moins, mais a pris le pas sur la réflexion objective. Le souci est que tout l’édifice vacille si vous ôtez les plus mauvais :
: 1) Fermat ne disposait pas de nos outils modernes – c’est un argument parfois avancé par les Modernes.
: 2) Il n’a pas jugé utile de rectifier, puisque ces observations ‘’étaient réservées à son seul usage‘’.
: 3) Fermat a dû se tromper, il s’en est aperçu plus tard, mais il n’a pas jugé utile de rectifier.
: 4) D'ailleurs il s’était déjà trompé une fois, avec les nombres de la forme 2<sup>2<sup>''n''</sup></sup> + 1.
 
Si donc vous êtes juste un amateur très attentionné, vous voyez immédiatement qu’il y a [https://www.youtube.com/watch?v=qi-eOfduisk anguille sous roche]. Alors vous vous documentez. Longtemps si vous êtes un passionné. Une remarque très vite vous est venue à l’esprit : ces commentateurs semblent être partis de l’''a priori'' que Fermat n’avait pu trouver une preuve, puis ont cherché tout ce qui pourrait les conforter dans cette idée, agrégeant leurs arguments en un seul bloc pour en faire une certitude. Vous vous posez alors pas mal de questions sur l’honnêteté intellectuelle de certains savants. L’amateur que vous êtes se dit alors : « Tout ceci n’est qu’un écran de fumée », ''smoke and mirrors,'' disent les Britanniques. Fermat, dont la véritable profession est magistrat, a toujours considéré l’émulation comme le meilleur moteur dans ses recherches arithmétiques. Il aura tout essayé, pendant 19 ans il a mis au défi 7 de ses correspondants : prouver, ou infirmer, sa fausse conjecture.
Un jour donc, alors qu'il est en contemplation devant la beauté du théorème de Pythagore (a²=b²+c²), il s'interroge. Pourrait-on ajouter encore quelque chose au sujet, quelque chose auquel personne n'aurait jamais osé évoquer ? Dans la formule de Pythagore, l'exposant est le nombre 2, le seul nombre qui élevé au carré soit égal à son double (2² = 2+2). Fermat put penser que cette propriété lui conférait des propriétés très particulières, et il a l'idée qui allait bouleverser les mathématiques pour les siècles à venir. L'impensable se produit, il remplace l'exposant ''2'' par un ''3''. Est-ce que l'égalité pourrait encore exister pour certains cas en choisissant avec soin les valeurs de ''a, b et c'' ? On perçoit déjà l'étendue de ses ambitions. ''A priori'' il ne semblait pas que ce fût possible, on pouvait toujours s’en approcher de très près, parfois même à une unité, mais trouver une solution semblait impossible. Le nombre ''2'', monstre mathématique, semble le suggérer, à l'Unité, on a ajouté l'unité pour en faire une double unité, une manipulation philosophiquement blasphématoire – ou merveilleusement créatrice. Non seulement ''2'' est le premier des nombres premiers, mais il est aussi le seul nombre premier à être pair. Pour Fermat, tenter de prouver l'impossibilité de son égalité serait un défi formidable, et c'est tout ce qu'il lui faut. Certainement se rend-il compte assez vite qu’il serait plus facile de tester d'abord sa méthode avec un ''4'' en exposant, le carré de ''2'', ce nombre qui semble narguer tous ses suivants. Il utilise une méthode qu'il nomme ‘’descente infinie’’, ou descente indéfinie, un raisonnement par récurrence et un autre par l'absurde, le tout extrêmement efficace. Sa méthode fonctionne parfaitement avec l'exposant ''4'', plus difficilement avec ''3''. En septembre 1636 il commence à exciter la curiosité de ses correspondants, dans une lettre à Mersenne pour Sainte-Croix il propose ce défi : ''<span style="color:blue">« Trouver deux puissances quatrièmes dont la somme est une puissance quatrième et deux cubes dont la somme est un cube ».''</span><br>
À partir de l'exposant ''5'' et jusqu’à l’infini, il comprend vite que la méthode n'est plus adaptée. Il lui faut trouver une autre voie, qui très certainement n’aura aucun rapport avec la première. En 1670, cinq ans après sa mort, dans une courte ''“OBSERVATIO”'' provocatrice écrite en latin et tenue jalousement secrète de son vivant, mais que son fils Clément-Samuel fait connaître, il affirme avoir « assurément dévoilé une explication tout à fait étonnante que la marge trop étroite ne saurait contenir ». À cette observation Samuel en a ajouté 47 autres, le tout est inséré aux endroits adéquats dans le Livre VI de l’''Arithmetica'' du mathématicien grec Diophante qui fut publiée en 1621, et où Bachet de Méziriac avait ajouté une traduction du grec au latin. On dispose donc en 1670 d'une nouvelle ''Arithmetica'' légèrement augmentée mais ô combien précieuse pour la suite. L'observation en question se rapporte à la question VII, c'est la deuxième des 48 et elle se distingue notablement des autres. Nous y reviendrons.
 
L’attitude que l’on a, face au ‘’Dernier théorème’’ (on dirait le titre d’un roman, ce qu’il est en effet) dépend de l’''a priori'' choisi au départ. Si l’on choisit celui qui est favorable, on se dit que Fermat, pédagogue et facétieux à la fois, est avant tout un honnête homme et qu'il n’a pas dû en rester là. On est prêt alors à chercher assidûment tous les indices qu’il aurait pu nous laisser, en ne négligeant absolument aucune piste et en cherchant les meilleurs arguments. Eric Temple Bell croyait en une preuve de Fermat et pensait que la civilisation probablement s'éteindrait avant que le Dernier théorème soit résolu. Il n'était pourtant pas totalement exclu que le théorème soit un jour prouvé par une méthode très complexe, ce fut le cas, et on découvrira encore d'autres preuves complexes. Vouloir à tout prix croire que Pierre de Fermat n’aurait pu trouver une preuve empirique, donc beaucoup plus simple que celle de Wiles en 1994, est une mal-mesure criante de la science des nombres, et plus généralement de l'intelligence humaine.
Chez les Anciens on n’était pas sollicité dès le plus jeune âge par toutes les vanités qui encombrent maintenant l’esprit de nos enfants. De grandes intelligences ont pu ainsi atteindre à un grand savoir en pénétrant l’essence des choses. Socrate, Euclide, furent de ces hommes. Bien plus tard et dans un même siècle, Pascal, Leibnitz et Fermat qui fut un fameux exemple en théorie des nombres, construisant de puissants raisonnements avec parfois le seul recours aux mots.
 
Comme Pythagore, Fermat sait que quand l’homme a posé ''1'', puis ''2'', tout est déjà posé, l’unicité, la pluralité du monde. Quelque chose pourtant a dû spécialement lui plaire avec ce premier nombre pluriel, pour rendre le théorème de Pythagore décidément inégalable par sa puissance, sa singularité, en imaginant une conjecture beaucoup plus plurielle. Il fallait mettre sur un des deux plateaux de la balance les plus importantes propriétés du premier nombre entier suivant l’unité, l'unité doublée. Puis trouver et placer sur l’autre plateau une nouvelle conjecture qui soit en rapport avec la première, mais appelant cette fois l’infinité des nombres entiers (remarquons que ''1'', le nombre unitaire, n’est pas directement présent dans la «comparaison», il est “à part”). Peser le pour et le contre semblait ''a priori'' un défi gigantesque. Certainement très vite Fermat voit que les deux plateaux de la balance ne pourront jamais se trouver à la même hauteur, une mise en abyme est impossible. Il va donc s’attacher à le prouver.
 
La question du Dernier théorème est bien plus qu’une question arithmétique. Son histoire est comme un symbole profond de l'historiographie de la Mathématique. En reprenant l'idée de Eric Temple Bell nous sommes certain que la civilisation s'éteindra avant que nos mathématiciens puissent comprendre l'explication de Fermat.
 
== Mathématique et poésie ==
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''– Toutes les puissances quarrées de 2, augmentées de l'unité, sont nombres premiers.''
 
<span style="color:blue">''Cette dernière <u>question</u> est d’une très subtile et très ingénieuse recherche''</span> ''et, bien qu'elle soit conçue affirmativement, elle est négative, puisque dire qu'un nombre est premier, c'est dire qu'il ne peut être divisé par aucun nombre. »'' [[https://fr.wikiversity.org/wiki<nowiki/>[[Recherche:L%E2%80%99%C3%A9nigme_de_Fermat_pass%C3%A9e_au_cribleL’énigme de Fermat passée au crible#Lettre_bilan_de_Fermat_Lettre bilan de Fermat %C3%A0_Pierre_de_Carcavi_en_aoA0 Pierre de Carcavi en ao%C3%BBt_1659BBt 1659|(Voir la lettre complète)]]]</blockquote>
Cette formulation à l'attention de Huygens, qui a prêté à confusion, deviendra après sa mort la plus célèbre de ses remarques sur les nombres de Fermat. Huygens était un jeune mathématicien de 30 ans, le seul qui aurait pu encore le suivre, mais il ne donna pas suite. La formulation de ce dernier ballon d'essai était pourtant fort excitante.
* Dans ces lettres il demande du secours (!) à ses six principaux correspondants. L'un après l'autre il les teste, les stimule, les encourage à le suivre dans ses travaux (quelle motivation pour eux, venir à l'aide du grand Fermat). Mais aucun ne répondra à part Frénicle.
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=== Le style des Observations ===
 
* (CM, Jean Rousseau, '''Laurent Hua''' [https://www.letudiant.fr/educpros/personnalites/hua-laurent-884.html], Albert Violant I Holz). Le style utilisé par Fermat dans ses 48 observations (leur élégance aussi), montre clairement qu'elles ont été rédigées à l'attention du lecteur. En outre, '''quel besoin aurait-il eu de s'expliquer à lui-même''' qu'il a vraiment mis à nu, entièrement, une explication tout à fait étonnante ? Quel besoin aussi aurait-il eu de répéter sans cesse, uniquement à son intention, qu'il manquait de place – le plus souvent – ou de temps ?
 
* Pourtant l’historien Jean Itard écrivait : « réservées à son seul usage. » De même après la découverte de Wiles en 1994, Winfried Scharlau veut nous le faire croire. Un autre argument est avancé : « puisqu’il [Fermat] ne connaissait pas nos outils modernes ». Il est saisissant de voir comment les mathématiciens qui n'ont pu suivre ses traces ont pu s'ingénier à utiliser des arguments spécieux pour rabaisser un génie qui les a autant défiés. Certaines légendes urbaines ont la vie dure, surtout quand ''« des considérations d’ordre affectif ou égocentrique (et plus généralement les considérations “humaines”) viennent immanquablement troubler le cours limpide d’un raisonnement logique. »'' ([[w:Christophe_Breuil|Christophe Breuil]]).
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''C<sup>V<span style="color:red">bum</span></sup> a<span style="color:blue">'''u'''</span><span style="color:red">'''t'''</span>em in duos cubos, a<span style="color:blue">'''u'''</span><span style="color:red">'''t'''</span>em quadratoquadra<span style="color:red">'''t'''</span><span style="color:blue">'''u'''</span>m in duos quadratoquadratos<br>''
''& generaliter nullam in infini<span style="color:red">'''t'''</span><span style="color:blue">'''u'''</span>m vltra quadra<span style="color:red">'''t'''</span><span style="color:blue">'''u'''</span>m potestatem in duos eiusdem''<br>
''nominis fas est diuidere cuius rei demonstrationem mirabilem sane de<big>'''t'''</big>ex<big>'''ṡ'''</big> <sub>•</sub><br>''
''Hanc marginis exiguitas non caperet.''
 
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Le mathématicien [[w:Harold_Edwards|Harold Edwards]] voulut vulgariser des mathématiques. Évoquant la conjecture des '''"nombres de Fermat"''' il écrivit : « [Fermat] alla même jusqu’à dire, plus tard dans sa vie, qu’il pouvait prouver que ces nombres étaient tous premiers ». Quand Fermat écrit : « J’ai ensuite considéré certaines questions », Edwards tombe dans le piège et interprète ainsi : ''« J'ai ensuite prouvé certaines propositions. »'' . [[w:Eric_Temple_Bell|Eric Temple Bell]], lui aussi mathématicien, comme Edwards avait à cœur d'attirer des gens vers les mathématiques, voici ce qu'il écrit dans son livre ''The Last Problem'', édité en 1961, après sa mort survenue en 1960 :
 
<blockquote>''« Fermat a déclaré qu'il ''pensait'' que la proposition était vraie, mais n'a jamais prétendu nulle part l'avoir prouvée. Il est temps que les déclarations erronées dans certaines histoires mathématiques soient corrigées – même au prix d'imprimer tout ce que Fermat a dit dans son propre langage. [...]. »''</blockquote>EnDans 1976sa lettre bilan à Carcavi pour Huygens, dans sonil ouvragene ''Fermat'sfait Lasttoujours Theoremaucune -allusion Aau Genericgrand Introductionthéorème, toil Algebraictermine Numberpar ces mots : Theory''« (pageEt 38)peut-être la postérité me saura gré de lui avoir fait connaître que les Anciens n’ont pas tout su, Edwardset discourtcette d’unerelation étrangepourra façonpasser àdans proposl’esprit de Fermatceux qui viendront après moi pour'' amenertraditio salampadis propositionad finale :filios, ''comme parle le grand Chancelier d’Angleterre, suivant le sentiment et la devise duquel j’ajouterai,'' multi pertransibunt et augebitur sciencia<brsup>(*)</sup>''».''
 
''« Au contraire, à notre époque, l'attitude générale est que les Anciens ne savaient rien du tout. »'' C'est évident et Fermat n'a jamais prétendu le contraire. Edwards oublie quand même beaucoup de choses, par exemple que les Babyloniens, il a 4000 ans, savaient qu'on pouvait déterminer la valeur de <math>\sqrt{2}</math> avec une grande précision, proche du millionième. (Voir Wikipedia, [[w:YBC_7289|YBC 7289]]).
(*) « Ils seront nombreux à aller au-delà, et la connaissance en sera accrue. »
 
En 1976, dans son ouvrage ''Fermat's Last Theorem - A Generic Introduction to Algebraic Number Theory'' (page 38), Edwards discourt d’une étrange façon à propos de cette lettre pour conclure : ''« Au contraire, à notre époque, l'attitude générale est que les Anciens ne savaient rien du tout. »'' C'est évident et(!...). Fermat n'a jamais prétendu leque contraireles Anciens savaient tout. Edwards oublie quand même beaucoup de choses, par exemple que les Babyloniens, il a 4000 ans, savaient qu'on pouvait déterminer la valeur de <math>\sqrt{2}</math> avec une grande précision, proche du millionième. (Voir Wikipedia, [[w:YBC_7289|YBC 7289]]).
 
On peut énoncer une formule générale pour disqualifier Pierre de Fermat, “Juge” et mathématicien amateur.<br>
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Tout mathématicien sérieux et familier des travaux de Fermat sait qu'aucun des «arguments» avancés par ses contempteurs ne tient sérieusement la route. Au fond, seul le fait que Fermat aurait pu trouver une preuve avec ses seuls outils leur est difficilement concevable. Si, obsédé par son désir de généralité, il n'a jamais évoqué ailleurs que dans cette note son théorème général, on sait qu'il l'a toujours eu présent à l’esprit. Il affirme en détenir une preuve, pourtant il n'en parle jamais de son vivant. Dans cette affaire digne d'un roman à suspense il fait preuve d’une maîtrise et d’une virtuosité confondantes, brouillant les pistes d'un côté, de l'autre laissant de nombreux indices. Qu'il ait révélé à l’intention de ses seuls suiveurs un début d'explication à l’aide de trois lignes et demie d’écriture latine – même s’''il'' (Pierre + Samuel) les a écrites différemment (à peine) dans trois versions de l’édition de 1670 – participe du sublime. La seule édition consultable à Zurich, sans anomalie trop flagrante, n'aurait sans doute pas permis un décryptage, d'autant que l'usage du latin s'est raréfié au cours du XIX<sup>e</sup> siècle. L'édition de Lyon aurait suffi (elle a suffi à Roland Franquart), celle de Rome, la plus révélatrice (''detex'''is''''' camouflé → « tu tisses complètement  »), la plus excentrique aussi, est d'une force moindre mais confirme encore plus le décryptage effectué par Roland Franquart. Les deux particularités sur le même mot, dans deux éditions différentes, se renforcent mutuellement, et encore davantage quand elles sont ajoutées aux cinq autres dans l'«''OBSERVATIO»'', et toujours plus quand elles sont ajoutées à celles présentes dans sa correspondance.
 
Dans sa lettre bilan à Carcavi pour Huygens, où il ne fait toujours aucune allusion au grand théorème, il termine par ces mots : ''« Et peut estre la postérité me scaura gré de luy avoir fait connoistre que les Anciens n’ont pas tout sceu, et cette relation pourra passer dans l’esprit de ceux qui viendront après moy pour traditio lampadis ad filios, comme parle le grand Chancelier d’Angleterre, suiuant le sentiment et la deuise duquel j’adjousteray, multi pertransibunt et augebitur sciencia<sup>(*)</sup>».''
 
(*) « Ils seront nombreux à aller au-delà, et la connaissance en sera accrue. »
 
Lorsqu'on étudie Fermat, il y a deux façons de procéder :<br>
1) Avec un ''a priori'' favorable : toujours se souvenir que c’est un grand pédagogue, lui faire confiance, détecter tous les arguments spécieux émis par ses innombrables détracteurs, au contraire rechercher les nombreux indices qu’il nous laisse, et tous les bons arguments (j’en ai compté quatorze importants). Les auteurs ayant publié un livre consacré au grand théorème ont eu la sagesse de rester objectifs, neutres.<br>
2) Avec un ''a priori'' très suspicieux : le sous-estimer, ne pas faire confiance à son désir le plus cher et le plus louable de ne jamais nous mâcher le travail On imagine alors de multiples arguments pour le discréditer. Citons [[w:Alexandre_Grothendieck|Alexandre GROTHENDIECK]] :<br />
''« L’aspect de cette dégradation auquel je pense surtout ici (qui en est juste un aspect parmi de nombreux autres) est le mépris tacite, quand ce n’est la dérision sans équivoque, à l’encontre de ce qui (en mathématique, en l’occurrence) ne s’apparente pas au pur travail du marteau sur l’enclume ou sur le burin – le mépris des processus créateurs les plus délicats (et souvent de moindre apparence) ; de tout ce qui est inspiration, rêve, vision (si puissantes et si fertiles soient-elles), et même (à la limite) de toute idée, si clairement conçue et formulée soit-elle : de tout ce qui n’est écrit et publié noir sur blanc, sous forme d’énoncés purs et durs, répertoriables et répertoriés, mûrs pour les ‘’banques de données’’ engouffrées dans les inépuisables mémoires de nos méga-ordinateurs. Il y a eu (pour reprendre une expression de C.L. Siegel) un extraordinaire ‘’aplatissement’’, un ‘’rétrécissement’’ de la pensée mathématique, dépouillée d’une dimension essentielle, de tout son ’’versant d’ombre’’, du versant ‘’féminin’’. Il est vrai que par une tradition ancestrale, ce versant-là du travail de découverte restait dans une large mesure occulté, personne (autant dire) n’en parlait jamais – mais le contact vivant avec les sources profondes du rêve, qui alimentent les grandes visions et les grands desseins, n’avait jamais encore (à ma connaissance) été perdu. Il semblerait que dès à présent nous soyons déjà entrés dans une époque de dessèchement, où cette source est non point tarie certes, mais où l’accès à elle est condamné, par le verdict sans appel du mépris général et par les représailles de la dérision. »''<ref>{{Lien web|langue=français|auteur=Alexandre Grothendieck|titre=RECOLTES ET SEMAILLES - Réflexions et témoignage sur un passé de mathématicien|url=http://matematicas.unex.es/~navarro/res/|consulté le=21 février 2021|page=85}}, un texte sur lequel le chercheur pourra avantageusement méditer.</ref>
 
Si l’on cherche le livre entier que Fermat aurait consacré à la science des nombres, on trouvera beaucoup de choses dans l’''Arithmetica'' de 1670 qui inclut 48 ''observations'' très stimulantes. La pépite qui y figure est une galéjade qui laisse pantois. Jamais on n’avait vu, jamais plus on ne verra, un génie fût-il universel livrer la démonstration d’un puissant théorème sous forme d’une affirmation qui laisse tant à penser : ''« J'en ai réellement mis à nu l'explication tout à fait étonnante que la marge trop étroite ne contiendrait pas ».''
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Si donc vous êtes juste un amateur très attentionné, vous voyez immédiatement qu’il y a [https://www.youtube.com/watch?v=qi-eOfduisk anguille sous roche]. Alors vous vous documentez. Longtemps si vous êtes un passionné. Une remarque très vite vous est venue à l’esprit : ces commentateurs semblent être partis de l’''a priori'' que Fermat n’avait pu trouver une preuve, puis ont cherché tout ce qui pourrait les conforter dans cette idée, agrégeant leurs arguments en un seul bloc pour en faire une certitude. Vous vous posez alors pas mal de questions sur l’honnêteté intellectuelle de certains savants. L’amateur que vous êtes se dit alors : « Tout ceci n’est qu’un écran de fumée », ''smoke and mirrors,'' disent les Britanniques. Fermat, dont la véritable profession est magistrat, a toujours considéré l’émulation comme le meilleur moteur dans ses recherches arithmétiques. Il aura tout essayé, pendant 19 ans il a mis au défi 7 de ses correspondants : prouver, ou infirmer, sa fausse conjecture.
 
L’attitude que l’on a, face au ‘’Dernier théorème’’ (on dirait le titre d’un roman, ce qu’il est en effet) dépend donc de l’''a priori'' choisi au départ. Si l’on choisit celui qui est favorable, on se dit que Fermat, pédagogue et facétieux à la fois, est avant tout un honnête homme et qu'il n’a pas dû en rester là. On est prêt alors à chercher assidûment tous les indices qu’il aurait pu nous laisser, en ne négligeant absolument aucune piste et en cherchant les meilleurs arguments. Eric Temple Bell croyait en une preuve de Fermat et pensait que la civilisation probablement s'éteindrait avant que le Dernier théorème soit résolu. Il n'était pourtant pas totalement exclu que le théorème soit un jour prouvé par une méthode très complexe, ce fut le cas, et on découvrira encore d'autres preuves complexes. Vouloir à tout prix croire que Pierre de Fermat n’aurait pu trouver une preuve empirique, donc beaucoup plus simple que celle de Wiles en 1994, est une mal-mesure criante de la science des nombres, et plus généralement de l'intelligence humaine.
 
Des commentateurs de Fermat ont parfois été animés d'une compulsion d'avoir raison. D'où vient cette incapacité à se défaire de ses préjugés les plus ancrés ? Cette crainte terrible d'avoir tort, quelle pourrait en être la cause première ? Cette peur de perdre un ''moi'' alimenté par des décennies de méconnaissance de soi, qui a façonné une personnalité rigide, les rend inaptes à une analyse rigoureuse et les place dans une position de défense agressive rassurante pour l'égo. Ils continuent ainsi d'alimenter les rumeurs les plus triviales, incapables de comprendre qu'ils ont été bernés de la plus subtile des manières par un génie universel. Dans le passé déjà « ''des mathématiciens qui avaient fait de vains efforts pour démontrer les théorèmes trouvés par Fermat ont voulu jeter quelque doute sur la réalité des démonstrations qu’il déclarait posséder, et ils ont supposé que ce grand géomètre était parvenu à certains résultats plutôt par induction et un peu au hasard que par une analyse rigoureuse de la question »'' (Libri).