Transistor/Transistor MOSFET

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Le MOSFET (Metal Oxide Semiconductor Field Effect Transistor)[1] est un composant éléctronique important, notamment dans l’industrie des micro-processeurs car il constitue l'élément de base permettant la construction de portes logiques.

Transistor MOSFET
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Chapitre no 2
Leçon : Transistor
Chap. préc. :Transistor bipolaire
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Présentation

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MOSFET canal N.

Le MOSFET se présente comme un composant à trois ports :

  • le « drain » (noté D) ;
  • la « grille » (notée G) ;
  • la « source » (notée S).

Les tensions sont mesurées par rapport à la source. On mesure ainsi :

  •   la tension entre le drain et la source ;
  •   la tension entre la grille et la source ;

Enfin, pour un MOSFET idéal, aucun courant ne peut entrer par la grille. Ainsi, le courant qui entre par le drain ressort par la source et vice versa. On note donc ce courant   car il est le même en D et en S.

Il existe deux types de MOSFET :

  • Le MOSFET « canal n » ou NFET ;
  • Le MOSFET « canal p » ou PFET ;

Ces deux types ont la même importance, pour des raisons expliquées plus bas. Dans un premier temps, nous nous intéresserons uniquement au NFET.

Régimes de fonctionnement

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Le NFET possède trois « régimes » différents. En exploitant l'un ou l'autre, il nous sera possible de construire des circuits variés.

Régime de coupure

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Le MOSFET se comporte comme un interrupteur ouvert lorsque   ( ).

La tension de seuil, notée  , est caractéristique du composant mais dépend aussi de facteurs extérieurs, en particulier la température. En effet :  , où k est la constante de Boltzmann, T la température en Kelvin et q la charge élémentaire.

Régime linéaire (triode)

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Dans certaines conditions, le MOSFET se comporte comme une résistance, dont la valeur dépend de  . Ce régime porte ce nom de « régime linéaire » en référence à son comportement qui est similaire à une résistance.

Il ne constitue pas un intérêt pratique dans le cadre de cette leçon. Ce régime a lieu lorsque :

  •   ;
  •  

On peut exprimer le courant   circulant dans le drain pour ce régime de fonctionnement :

 

  est une caractéristique du transistor

Régime de saturation

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Dans certaines conditions, le courant traversant le MOSFET ne dépend plus de la tension  [2], mais uniquement de la tension entre la grille et la source   :

 

Il se comporte ainsi comme un générateur de courant commandé en tension. Cela permet par exemple d'amplifier un signal faible, comme nous le verrons dans un exemple. Cependant, la relation entre le courant et la tension n’est pas linéaire, ce qui a tendance à déformer le signal. Nous verrons comment corriger.

D'un autre côté, l'absence de courant entre la grille et la source permet un interfaçage direct entre un système de puissance (alimentation électrique, éclairage…) et un système de contrôle numérique (ordinateur…).

la constante K est caractéristique du composant. Ce régime a lieu lorsque :

  ;  .

En petits signaux, on peut alors remplacer le transistor par un modèle équivalent composé d’un générateur de courant commandé en tension, en parallèle avec une résistance  . Les valeurs du courant et de la résistance sont donnés par :   et   où la transductance est  , et   est la tension d'Early.

Caractéristique : résumé et remarques

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On observe ici le courant en fonction de la tension au drain, pour différentes tension à la grille. En rouge, la zone de fonctionnement « linéaire », qui ne nous intéresse pas. En jaune, la zone de fonctionnement en saturation. Il est à noter que cette courbe n’est pas tout à fait réaliste :

  • le courant n’est pas une fonction linéaire de   ;
  • pour   plus petit qu'une tension seuil non nulle, le courant s'annule.

La séparation entre les deux zones est donnée par   et dépend donc de la tension à la grille.

En passant d'une valeur   à une valeur   avec   suffisamment grand, le NFET se comporte comme un interrupteur contrôlable en série d'une résistance (faible). Cela nous intéresse notamment pour les circuits numériques et la conception de portes logiques.

Le MOSFET « canal P » ou PFET

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Un MOSFET canal P.

Le MOSFET « canal P » ou PFET est l'autre type de MOSFET. Son comportement est simple : il est exactement l'opposé de celui du NFET. En effet :

  • lorsque  , le NFET ne conduit pas, le PFET conduit ;
  • lorsque le NFET conduit progressivement, le PFET coupe progressivement.

L'utilisation des PFET est très rare dans le cas de circuits analogiques, car leurs performances sont moins bonnes que celles des NFET. En revanche, pour ce qui est des circuits numériques, ils sont fondamentaux à l'architecture CMOS développée dans les années 1980.

À noter que leurs "performances" sont moins bonnes que celles des NFET en termes de mobilité des porteurs de charges. En effet, pour les PFET, ce sont des "trous" qui sont à l'origine de la création du canal "p" (contrairement au NFET, où ce sont des "électrons" qui sont à l'origine du canal "n"), les "trous" possédant une mobilité moindre que celle des électrons (environ 3 fois inférieur) !

Le symbole représentant un PFET est celui d'un NFET avec un rond (signifiant « inversé ») devant la grille.


Exemples

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Un amplificateur inverseur

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On peut exploiter le régime de saturation du NFET pour mettre au point un amplificateur rudimentaire. Cependant, celui-ci ne peut pas être linéaire, à cause du comportement du MOSFET.

 

Caractéristique du montage.
Légende :

  • 1. Régime de coupure ;
  • 2. Régime de saturation ;
  • 3. Régime linéaire (triode).
  • VTH tension seuil ;
  • Vmax tension de saturation ;

De plus, certaines tensions ne sont pas amplifiées, mais atténuées : celles qui entrent dans les zones de fonctionnement linéaire ou de coupure. Nous allons pouvoir contourner le problème en nous restreignant à la gamme de tensions d'entrées pour lesquelles le NFET est en saturation. Le signal obtenu est alors amplifié, mais déformé. On note V la tension qu’il faut ajouter au signal à amplifier afin de travailler dans la bonne région. V s’appelle tension de référence.

Lorsque, en outre, on envoie de petits signaux en termes d'amplitude, autour d'une tension de référence V (qui correspond à une tension de sortie VO), alors la déformation s'atténue. En effet, si on note v l'amplitude des signaux en question et vO les signaux obtenus en sortie :

 

 

On a donc :

 

Ce qui s'écrit succinctement  , avec A un réel appelé « gain ». Que fait notre circuit ? C’est un inverseur car A < 0, c’est un amplificateur car |A| > 1. De plus, il est linéaire dans cette approximation. Enfin, le gain est contrôlable (dans une certaine gamme, car il faut rester en saturation) en choisissant V et RL.

 
L'amplificateur inverseur quasi-linéaire.

En conclusion, nous avons construit un amplificateur inverseur, linéaire pour de petits signaux d'entrée.

Un inverseur logique

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Reprenons le même montage que précédemment. Dans le monde numérique, il ne peut recevoir que deux types d'entrées (« haut » et « bas ») et ne peut envoyer en sortie que deux types de réponses (« haut » et « bas »).


Supposons les valeurs suivantes :

  • VS = 5 V (ce qui correspond à un signal « haut ») ;
  • VTH = 1 V ;
  • GND = 0 V (ce qui correspond à un signal « bas ») ;
  • V = 0 V ou 5 V (« bas » ou « haut », respectivement) ;

Étudions le comportement de ce système dans chacun des cas de figure possibles.

Si V = 0 V (l'entrée est un signal « bas »), alors le MOSFET est en régime de coupure. Il n'y a pas de connexion avec la terre (interrupteur ouvert), on a donc VO = VS = 5 V. Lorsque l'entrée est basse, la sortie est haute.

Si V = 5 V (l'entrée est un signal « haut »), alors le MOSFET est en saturation (VGS > VTH et VDS > (VGS − VTH)). Il se comporte donc comme un interrupteur fermé en série d'une faible résistance qui relie la sortie à la terre. Lorsque l'entrée est haute, la sortie est basse.

Il s'agit donc d'une porte logique « NON » rudimentaire.

Remarquons que, lorsque l'entrée est basse, aucun courant ne parcourt le circuit, alors que, lorsqu'elle est haute, ce n’est pas le cas. Cela signifie que, même lorsque l'inverseur n’est pas utilisé activement, tant que l'entrée est haute, il consomme de l'énergie. Cela devient un problème lorsqu’il y a plusieurs millions de tels inverseurs dans un circuit, a fortiori dans un micro-processeur. C’est pour pallier ce défaut qu'a été inventé l'architecture CMOS décrite plus bas.

L'architecture CMOS

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Un inverseur CMOS.

Comme l'exemple de l'inverseur le suggère, utiliser le MOSFET en « interrupteur » risque de laisser passer un courant. Celui-ci est non seulement inutile (car c’est la tension qui sert au système) mais en plus il a pour conséquence une dissipation d'énergie qui échauffe les circuits. Pour des micro-processeurs, qui regroupent sur un espace réduit des millions (voire des milliards) de transistors, cette dissipation pourrait atteindre des centaines de kilowatts, ce qui n’est pas acceptable.

Une solution est de dessiner les circuits en respectant une architecture appelée CMOS (Complementary MOS, MOS complémentaires). L’idée sous-jacente est, à l'instar de l'inverseur dans un cas, qu’il est possible de ne jamais relier alimentation et masse. Ce qui assure qu'aucun courant ne circule. Pour cela, on utilise à la fois des NFETs et des PFETs, de manière complémentaire.

Lorsque, dans l'inverseur réalisé plus haut, l'entrée est basse, aucun courant ne passe. Lorsque l'entrée est haute, le NFET s'active et « tire » la sortie vers l'état bas, on parle de « pull-down ». De manière symétrique, on peut concevoir un circuit avec un PFET qui « tire » la sortie vers l'état haut, à savoir un « pull-up », lorsque l'entrée est basse.

En associant les deux circuits, pull-up et pull-down, on fabrique un inverseur CMOS. Voici comment il se comporte :

  • lorsque l'entrée est basse, le PFET conduit, le NFET bloque. La sortie est directement reliée à l'alimentation, donc à l'état haut.
  • lorsque l'entrée est haute, le NFET conduit, le PFET bloque. La sortie est directement reliée à la masse, donc à l'état bas.

En fin de compte, ce circuit ne consomme dans le cas idéal aucun courant et ne dissipe donc pas d'énergie. L'architecture CMOS se résume ainsi à :

  • construire un circuit pull-up avec des PFETS qui réalise l'opération désirée ;
  • construire un circuit pull-down avec des NFETS qui réalise la même opération ;
  • associer les deux circuits.

On utilise certes deux fois plus de transistors, mais le prix en vaut la chandelle : l'économie d'énergie est considérable.

Le MOSFET sur le silicium

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Nous avons déjà vu que le MOSFET est intéressant d'un point de vue fonctionnel, car il permet de réaliser des composants essentiels à savoir les portes logiques. Mais comment peut-on construire de tels composants ? C’est là l'autre intérêt des MOSFET : ils sont extrêmement simples à mettre au point.

Le schéma de principe

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Sans entrer dans le détail du fonctionnement (subtil) du MOSFET, voici les éléments qui le constituent :

 

  • La source et le drain sont connectés à une bande de silicium dopé N (on y trouve des donneurs comme le phosphore) ;
  • Ces bandes sont incrustées dans une bande (le « corps », appelé body, well ou bulk), plus large, de silicium dopé P (on y trouve des accepteurs comme le bore) ;
  • Une bande très fine (de l’ordre de 20 Å) d'oxyde de silicium[3] très pur sépare le corps de la grille (gate) ;
  • La grille, quant à elle, est une bande de silicium polycristallin.

Lorsque la tension entre la grille et la source est suffisamment importante, le champ électrique dans le corps permet le passage d'électrons : le NFET conduit[4]. Le PFET est conçu exactement de la même manière, en intervertissant silicium dopé P et dopé N, ce sont alors les trous qui conduisent.

En pratique, la source est reliée au corps, ce qui explique qu'elle serve de référence dans toute l'étude électrique du système.

La mise en pratique

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Pour réaliser des MOSFET en pratique, on utilise des galettes de silicium (appelées wafers) très pur. Celui-ci est dopé de manière adéquate par une association de procédés chimiques d'abrasion et de procédés physiques de photosensibilisation. Les pistes d'oxyde de silicium sont obtenues en oxydant le métal directement sur la galette à l'aide d'un laser, en présence d'oxygène et d'eau. On dépose enfin les pistes de silicium polycristallin (ou polysilicium).

Tout le procédé est automatisé et très rapide. L'ingénieur se contente de tracer les pistes, dont le dessin très régulier permet d'accélérer encore la mise au point.

 
Une porte logique NON-ET en architecture CMOS, prête à être gravée.

Cette porte logique est facile à lire : en haut le pull-up, en bas le pull-down. Puisqu’ils font la même chose, il suffit par exemple de regarder le comportement du pull-down : la sortie (OUT) est haute si et seulement s'il n'y a pas de connexion entre elle et la terre, c'est-à-dire si l'une ou l'autre des entrées (en vert) n’est pas activée. C’est une porte NON-ET.

L'échelle de gravure de ces pistes, de l’ordre de la dizaine de µm, permet de condenser près de 2 milliards de MOSFET sur une surface comparable à celle d'un ongle humain.

Limitations du modèle

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Notre modèle idéal de MOSFET souffre de quelques limitations. Les plus importantes concernent d’une part la « constante » K et d’autre part la consommation de courant.

La valeur du paramètre K, utilisé dans l'étude de l'amplificateur inverseur, est sujette à des variations. En particulier, elle varie avec la température, alors même que le transistor s'échauffe lors de son utilisation. Elle n'est acceptablement constante que pour des courants relativement faibles.

En dépit de l'architecture CMOS, qui réduit de façon drastique la consommation d'un circuit numérique, nos ordinateurs consomment toujours de l'énergie ! En effet, cette méthode de construction permet d'éliminer la dissipation d'énergie en régime permanent, appelée dissipation statique. Dans les faits, les MOSFET présentent une faible capacité CM qui se charge et se décharge, donnant lieu à une dissipation dynamique dont on montre qu'elle est de l’ordre de :

 

pour une puce, avec f la fréquence d’utilisation (en Hz) et n le nombre de transistors concernés. Enfin, comme aucun condensateur n'est parfait, un léger courant de fuite s'échappe de la grille… Ces remarques, d'ordre pratique, sont essentielles pour la mise au point de micro-processeurs mais restent secondaires dans le cadre de la réalisation de circuits modestes.

Remarques

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  1. « Transistor à effet de champ (à grille) métal-oxyde ».
  2. En pratique, ce courant dépend encore — quoique faiblement — de VDS, mais cela n'a pas une grande incidence ici.
  3. D'où le nom de « MOS ».
  4. D'où le terme de transistor à « effet de champ ».