Utilisateur:Claude PIARD/Brouillon/De la gymnastique au sport gymnique

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De la gymnastique au sport gymnique
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Chapitre no 3
Leçon : Brouillon
Chap. préc. :La gymnastique suédoise
Chap. suiv. :Le sport
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Le Moyen Âge français est une période d’activités physiques intenses dominées par la vie militaire et les fêtes : même en temps de paix, les jeux ressemblaient à la guerre comme la guerre ressemblait aux jeux. On y trouve les prémices de la gymnastique sportive avec l'entraînement à l'équitation qui nous lègue le cheval de voltige, le cheval d'arçons et les barres parallèles ; certaines danses populaires, tel le folklore basque, incluent de véritables prouesses acrobatiques - peut-être héritées des sarrasins - et de véritables professionnels des activités acrobatiques se produisent sur les places et dans les salles des châteaux.

Si la Renaissance insiste sur les activités physiques dans ses traités éducatifs, on peut se demander si ceux-ci ne dénoncent une certaine nostalgie du passé. La sclérose des cours provinciales avec concentration de la noblesse à la cour de France alors que le militaire cède progressivement le pas au diplomate relègue bien loin l’éducation du chevalier. Cependant l’escrime et le jeu de paume restent parmi les occupations des nobles alors que dans les campagnes jeux de balles et autres activités populaires persistent quand la famine, l'épidémie ou les révoltes paysannes ne les relèguent pas au second plan. Et les Jésuites fondés au début du XVI° siècle par Ignace de Loyola pour faire obstacle aux progrès de la [w:Réforme|Réforme]] dans les établissements d'enseignement font une large part dans leurs internats à l’émulation compétitive et aux jeux

Le Grand siècle marque le fond de la régression pour les activités physiques de l'aristocratie. Le jansénisme, surenchère catholique au calvinisme, remplace certes l'usage du latin par celui du français dans les études mais relègue bien loin les soucis corporels parmi les priorités éducatives. Une réaction à ce laisser-aller apparaît vers le milieu du XVIII° avec un regain d'intérêt des physiologistes pour l'hygiène. Des médecins publient volontiers leurs thèses sur leur rôle dans le maintien de la santé ou le traitement de certains maux ; les activités physiques y puisent des bases rationnelles. Des philosophes, tel Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) avec Emile ou de l'éducation, les remettent au premier plan des priorités éducatives.

La Révolution française tente de faire place aux exercices dans ses projets éducatifs. C'est l'époque où dans d'autres pays européens Nachtegall, Guthsmuths, Pestalozzi posent les fondations de la gymnastique. Chez nous, dans le climat de salut public, on en reste surtout à des vœux assortis d'applications ponctuelles, confiées à d'anciens militaires qui utilisent les éléments les plus motivants de la préparation du fantassin et du marin : escalade de mâts, cordes, échelles, trapèzes utilisés tant dans la marine à voiles que pour l'assaut des bastions. La gymnastique de portique qui voit alors modestement le jour poursuit son développement sous l'Empire. C'est un produit bien français.

Cette tradition gymnique républicaine s'enrichit de l'influence de Pestalozzi à travers Amoros (1770-1848), dont l’oeuvre majeure, Le traité d'éducation physique et morale publié en 1830, a été longtemps le fondement de la gymnastique française. Amoros y définit la gymnastique comme la science raisonnée de nos mouvements et de leurs rapports avec nos sens, notre intelligence, nos mœurs et le développement de nos facultés. La mise en œuvre pratique de ces objectifs repose sur la démonstration, l’accompagnement rythmique et chanté des exercices, leur répétition quantitative et les explications rationnelles qui mobilisent respectivement la vue, l’ouie, la sensibilité profonde et l’intelligence. L’altruisme est pour lui la finalité de toute éducation qui reste conditionné aux valeurs morales.

La technique reste celle décrite par Pestalozzi. Elle associe la gymnastique élémentaire héritée de Ling aux exercices d’application aux agrès qu’Amoros développe considérablement – poutre, portique, octogone, échelles, divers engins de suspension - ainsi que les pyramides humaines. La conception et la fabrication d'agrès nouveaux, confiées souvent aux cordiers de la marine (Carue, Bardou) caractérisent cette période. Largement divulguée par l’école de Joinville, la méthode se développe autant dans les domaines scolaires et militaires que dans celui de la gymnastique bourgeoise des gymnases privés.

Sous la Restauration et le second Empire les élites urbaines se retrouvent en effet volontiers dans les gymnases et dès 1859 apparaît à Paris Les amis de la gymnastique, première société de gymnastique de France. Ce regroupement associatif est dû à Eugène Paz (1836-1901), véritable apôtre de la gymnastique française dont le militantisme s'étend autant au domaine scolaire qu'au domaine civil qui reste d’ailleurs longtemps préoccupé de gymnastique scolaire : c'est grâce au financement de l'Union des sociétés de gymnastique de France (USGF) que le cours supérieur d'éducation physique voit le jour à la Sorbonne en 1903.

La création de cette Union est aussi l'oeuvre de Paz qui regroupe en 1873 quelques sociétés de gymnastique. Il ne s’agit pas alors de faire du sport mais bien de préparer une jeunesse saine physiquement et moralement afin d’effacer le désastre de Sedan. Les pouvoirs publics et le ministère de la guerre lui assurent le large appui de l'école militaire de Joinville et sa technique se situe dans le prolongement des travaux de cet établissement : faites-en des hommes, nous en ferons des soldats. Patriote éminent, éducateur passionné, Paz partage l'estime d'écrivains, de savants et d'hommes politiques de son temps : Emile Zola, Paul Féval, Victor Duruy, Jules Simon, Paul Déroulède, Félix Faure qui présidera l'USGF, Etienne Marey. Ils seront ses fervents soutiens et Edmond About dira de lui si Paz avait eu le bonheur de vivre sous une république grecque, on n'aurait pas trouvé que les plus grands honneurs fussent trop grands pour lui. Lié à la Ligue de l'enseignement et à la Ligue des patriotes, il marque l’union d'une empreinte radicale, à la fois rationnelle, nationale, sociale et anticléricale.

Lorsque l'USGF apparaît en 1873, six fédérations existent déjà en Europe. Le président belge Cupérus les regroupe dès 1881 en un Bureau européen qui devient plus tard Fédération internationale de gymnastique (FIG). Il en assure la présidence jusqu'en 1924 puis le bordelais Charles Cazalet lui succède jusqu'en 1933. Cet organisme ne se sent d'ailleurs pas vocation pour entraîner sa gymnastique sur les voies de la compétition sportive naissante : les premières rencontres internationales se déroulent dans le cadre des jeux olympiques d'Athènes (1896) et de Paris (1900), c’est-à-dire hors de son autorité. Le succès rencontré et la persuasion de Charles Cazalet, convaincu de la nécessité de rencontres sportives, entraînent l'organisation d'un premier tournoi international à Anvers en 1903.

Ce n'est pas de gaieté de cœur que le président Cupérus s'y résoud mais, comme aucune fédération n'a cru jusqu'ici faire oeuvre utile en remplaçant les concours par des fêtes exemptes de toute compétition, je dois m'incliner et prendre les hommes et les choses comme elles sont. Il n'en renonce pas pour autant à ses visées éducatives : la compétition couronnera l'aptitude complète et l'éducation physique intégrale et non la virtuosité de quelques-uns. Le programme comporte vingt et une épreuves. Outre les cinq agrès actuels où les candidats doivent produire un exercice libre et un exercice imposé, on trouve six exercices à mains libres, course de vitesse, saut en hauteur et lever de la pierre : pour obtenir la note maximum, il faut monter vingt fois au-dessus de sa tête un poids de quarante kilos !

De championnats du monde en jeux olympiques, ce programme connaît bien des avatars : des agrès disparaissent parfois, les anneaux balançants, le saut à la perche, la natation font des apparitions. Malgré une première compétition sur les seules épreuves gymniques actuelles aux jeux de Berlin en 1936, la course de vitesse, le saut en hauteur et à la perche réapparaissent aux championnats du monde de Bâle en 1950. Ce n'est qu'à Moscou en 1954 que le programme est définitivement fixé pour les masculins et que la FIG entre sans appel dans la définition d'un sport spécifique. Le comité technique féminin retarde sa décision jusqu'en 1962 à Prague où la gymnastique sportive féminine se dégage alors des pratiques issues des méthodes d'éducation physique féminines, constituées en discipline autonome, la gymnastique moderne, devenue depuis gymnastique rythmique.