Colorimétrie/CIE RGB 1931
Le système colorimétrique CIE RGB 1931 a été défini par la Commission internationale de l'éclairage en 1931, tout comme le système CIE XYZ 1931. Bien que CIE XYZ 1931 soit aujourd’hui la référence, historiquement, ce sont les résultats expérimentaux permettant de parvenir à CIE RGB 1931 qui ont ensuite permis de déterminer CIE XYZ 1931.
Conditions d'expérience
modifierLes couleurs primaires utilisées sont générées par trois rayonnements monochromatiques. Pour une couleur étudiée donnée, l'égalisation de la sensation colorée est obtenue par synthèse additive pour une observation faite sous un angle de 2° (ce qui correspond à l'angle de la fovéa, partie la plus sensible de l'œil). La flux lumineux émis par chacune des primaires est alors mesuré, permettant la quantification de la couleur étudiée.
Les travaux de John Guild (1889-1979), réalisés entre 1926 et 1928 au National Physical Laboratory (NPL) et publiés en 1931, concernèrent sept observateurs, avec trois primaires quasi-monochromatiques obtenues avec des filtres correspondant à peu près aux longueurs d'onde 628 nm, 542 nm et 462 nm[N 1]. Guild espérait pouvoir refaire ces essais sur un échantillon plus important, ce qui retarda la publication des résultats. Les travaux de William David Wright (1908-1998), réalisés en 1928-29 à l'Imperial College of Science et publiés peu après, concernèrent dix observateurs, avec trois primaires monochromatiques de 650 nm, 530 nm et 460 nm. Ils confirmèrent les résultats de Guild et permirent de penser qu'un petit échantillon de personnes était satisfaisant.
Les deux chercheurs ayant utilisé des couleurs primaires différentes, il a fallu transformer les résultats pour pouvoir les comparer. Aussi, a-t-il fallu procéder à un changement de primaires. La méthode mathématique utilisée est expliquée dans l’annexe n°3 et les transformations effectuées y sont décrites. Guild proposa de choisir de façon définitive des primaires facilement reproductibles et conseillées par le (NPL) aux longueurs d'onde 700 nm pour le rouge[N 2], 546,1 nm pour le vert et 435,8 nm pour le bleu[2],[3]). Ces primaires sont devenues les primaires du système CIE RGB 1931.
Les deux séries de mesures étant concordantes, une valeur moyenne fut établie[4]. Il fallut ensuite déterminer les fonctions colorimétriques. Pour cela, il est nécessaire de connaître les luminances de chaque primaire pour égaliser le blanc de référence. Expérimentalement, le blanc de référence utilisé était le blanc NPL, proche du rayonnement du corps noir pour 4800 K. C'est finalement le blanc équi-énergétique, totalement théorique, qui fut choisi comme blanc de référence, il a alors fallu corriger les fonctions colorimétriques pour obtenir les coordonnées 1/3, 1/3, 1/3 pour ce blanc. La méthode est expliquée en annexe n°4. Ainsi fut défini le système CIE RGB.
Description du système
modifierCouleurs primaires et blanc de référence
modifierLes couleurs primaires , et choisies sont les couleurs pures correspondant aux rayonnements monochromatiques dont les longueurs d'ondes sont indiquées ci-après. Le blanc de référence est un blanc neutre, équi-énergétique noté , c'est-à-dire que toutes les longueurs d'ondes du visible sont représentées dans les mêmes proportions du point de vue énergétique.
Couleur Rouge Vert Bleu Blanc Longueur d'onde 700,0 nm[N 3] 546,1 nm[2],[3] 435,8 nm[2],[3] Equi-énergétique Coefficient de luminance
L'égalisation de la sensation colorée pour un blanc quelconque se note (de façon identique à celle d'une couleur quelconque) :
Pour le blanc les composantes sont fixées à soit
- ,
si la luminance de ce blanc vaut :
avec
L'égalisation visuelle du neutre est observée pour les primaires rouge, verte et bleue, ayant des flux énergétiques (en watts) proportionnels aux nombres 357 / 6,83 / 4.95[5]. Les valeurs sont plus homogènes si on utilise des flux photométriques (en lumens), les mesures fixent alors les quantités de primaires rouge, verte et bleue, proportionnelles aux nombres 1,0000 / 4,5907 / 0,0601[5]. Étant donné que le choix des proportions 1 / 1 / 1 s'impose comme le plus simple, on retrouve le poids de chaque primaire dans le calcul de la luminance de l’ensemble des trois rayonnements[5]
En pratique, L représente n’importe quelle grandeur photométrique, à un facteur près, car elles sont toutes proportionnelles entre elles. Cependant, c’est le terme luminance qui est utilisé car c’est la grandeur photométrique caractéristique de l'éclat lumineux d'une surface : elle est naturellement la plus adaptée pour décrire une couleur. Son apparence est sombre si la luminance est faible tandis qu'une surface claire, lumineuse, éclatante aura une luminance élevée.
On peut se fixer une valeur de 100 % pour le blanc de référence quelle que soit sa luminance. On parle alors de luminance relative et il n'y a alors pas d'unité[6], on peut écrire[N 4] :
- ,
et la luminance relative du blanc (par rapport à lui-même) s'exprime :
- .
On retrouve ainsi la luminance relative nécessaire pour chaque primaire (les proportions sont les mêmes que précédemment) :
- .
Composantes et coordonnées d'une couleur
modifierR, G et B sont les composantes trichromatiques de ce stimulus qui permettent d'égaliser la sensation colorée créée par la couleur . En d'autres termes, ce sont les proportions dans lesquelles il a fallu modifier les flux pour obtenir l'égalisation (flux lumineux ou énergétique sont proportionnels entre eux pour une primaire donnée).
- .
La luminance de la couleur peut être obtenue à partir de ses composantes trichromatiques, connaissant la luminance de chaque couleur primaire. On obtient la formule suivante :
- .
Dans le cas où on se fixe une valeur de 100 % pour le blanc de référence, la luminance d'une couleur quelconque, connaissant ses composantes, comprises entre 0 et 100 %, s'exprime alors :
- .
Les coordonnées trichromatiques r, g, b, sont obtenues à partir des composantes trichromatiques et indiquent les proportions de chacune des primaires, de façon à ce que la somme des coordonnées soit égale à 1.
Le diagramme de chromaticité (figure 1, ci-contre) fait apparaître les axes r et g ; la dernière coordonnée b est telle que b = 1 - r - g. Le rouge primaire est obtenu pour r = 1 et g = 0, le vert primaire pour r = 0 et g = 1, et le bleu primaire pour r = g = 0 (et donc b = 1). Le gamut du système de trois primaires choisies est représenté par l’ensemble des points situés à l'intérieur du triangle représenté.
Pour les couleurs réelles qui sont situées hors du gamut des trois primaires, elle ne peuvent être reproduites, elles sont trop saturées. Il faut donc les délaver en y ajoutant la couleur complémentaire.
Par exemple, il faut ajouter du rouge aux couleurs cyans très saturées. Ceci a pour effet de délaver le cyan et permet l'égalisation de la sensation colorée par addition de vert et de bleu.
Fonctions colorimétriques
modifierVoir l'annexe sur : Valeurs tabulées normalisées des fonctions colorimétriques. |
Les fonctions colorimétriques doivent permettre de retrouver les composantes de n’importe quelle couleur connaissant la répartition de sa densité spectrale d'énergie S(λ). Ici encore on peut étudier n’importe quel type de grandeur radiométrique puisqu'elles sont toutes proportionnelles. La constante K cas sera choisie selon les cas.
Voir l'annexe sur : Détermination des fonctions colorimétriques. |
Historiquement les fonctions colorimétriques , et furent calculées à partir des résultats de Guild et de Wright. Seules les proportions des composantes égalisant les lumières monochromatiques, qui permettent de calculer les coordonnées, sont nécessaires pour déterminer les fonctions colorimétriques (explications en annexe n°4).
Actuellement, les fonctions colorimétriques , et sont calculées à partir des valeurs tabulées et normalisées des fonctions colorimétriques , et du système CIE XYZ 1931. Les valeurs tabulées sont données en annexe n°2 et sont représentées sur la figure 2 ci-contre.
avec
et
Les coordonnées du lieu du spectre peuvent être facilement calculées à partir des fonctions colorimétriques. Elles permettent le tracé de ce dernier dans le diagramme rg sur la figure 1 ; elles sont représentées sur la figure 3 ci-contre.
Les fonctions colorimétriques, pondérées par le poids des primaires égalisent la fonction d'efficacité lumineuse relative spectrale :
Vers CIE XYZ 1931
modifierLe système colorimétrique ainsi défini présente pour la première fois l'avantage de pouvoir quantifier de façon précise n’importe quelle couleur et de la représenter par un vecteur ou un point dans un espace colorimétrique. Cependant les couleurs ne sont pas réparties de façon satisfaisante : beaucoup de nuances de bleus sont trop concentrées alors que les vert-cyan occupent une portion de l'espace beaucoup plus importante, en comparaison avec la perception que l’on peut en avoir. Par ailleurs, les composantes négatives sont jugées gênantes. Le système CIE XYZ permet une amélioration de ces défauts sans pour autant corriger totalement le problème de la répartition des couleurs.
Notes et références
modifierNotes
modifier- ↑ Les valeurs exactes peuvent être trouvées par interpolation ou graphiquement.
- ↑ La précision n'a pas avoir beaucoup d'importance au vu de l'étendue de cette couleur dans le spectre visible.
- ↑ La précision de la longueur d'onde du rouge utilisé a peu d'importance compte tenu du fait que la sensation rouge est identique sur une bande de fréquences importante du spectre visible.
- ↑ Les composantes sont fixées à .
Bibliographie
modifier- Robert Sève, Science de la couleur : Aspects physiques et perceptifs, Marseille, Chalagam, 2009 (ISBN 2-9519607-5-1)
- (en) Jànos Schanda, Colorimetry: Understanding the Cie System, Wiley-Blackwell, 2007 (ISBN 978-0470049044)
- (en) John Guild, « The Colorimetric Properties of the Spectrum », The Royal Society, 1er janvier 1932 [texte intégral]
Références
modifier- ↑ John Guild 1932, p. 180, table II
- ↑ 2,0 2,1 et 2,2 Ces deux valeurs correspondant à deux raies d'émission les plus intenses du spectre d'émission du mercure et qui ont pour longueur d'onde de 435,833 nm et 546,074 nm : spectre d'émission du mercure, valeurs tabulées.
- ↑ 3,0 3,1 et 3,2 NIST : Atomic Spectra Database
- ↑ John Guild 1932, p. 185, table IV
- ↑ 5,0 5,1 et 5,2 Robert Sève 2009, p. 72-75
- ↑ Jànos Schanda 2007, p. 29