Encore reticent a la differenciation

Les réticences à la pratique de différenciation relevées dans les points suivants sont-elles justifiées ?

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Le temps de préparation

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"La différenciation ça prend trop de temps, entre les corrections, les affichages et la préparation, c'est pas possible pour moi !"

Le temps de préparation sera nécessairement plus long dans un premier temps. Tout comme les élèves en situation d'apprentissage, apprendre à enseigner autrement nécessitera du temps et de la pratique. Ce temps diminuera à fortiori avec l'expertise: manipuler les consignes, les objectifs, organiser et gérer la classe, les écrits de classe deviendront plus faciles et plus automatisés. Les temps de réflexion et de préparation des séances deviendront plus efficaces.

Il est nécessaire de s’exercer petit à petit, d'évaluer ces pratiques avant de les généraliser de manière inappropriée. La différenciation à tout prix peut devenir inefficace si elle n'est pas réfléchie. Différenciez quelques activités au départ, puis, poursuivez petit à petit dans différentes situations.

Développer l’autonomie des élèves permettra aussi d’avoir plus de temps et d'exercer cette différenciation avec certains élèves.

Les difficultés supplémentaires pour un cours multiple

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"J'ai déjà un cours double, c'est-à-dire que mon temps de préparation est doublé aussi, si je dois encore dédoubler et différencier mes niveaux, je dors quand ?"

Il est vrai que différencier au sein de 2 ou 3 niveaux semble plus délicat que de différencier au sein d'un seul niveau. Seulement, dans une classe unique comme dans une classe multiple, la variété des profils apprenants existera de la même manière. Un seul niveau ne signifie pas un groupe d’élèves homogène. Enseigner dans un cours multiple, gérer le temps, l'espace, les groupes d'élèves, c'est déjà, en quelque sorte, développer les compétences d'un enseignement différencié. Vous possédez donc tous les atouts pour poursuivre ces pratiques différenciées.

Préparer des activités autonomes, développer le tutorat entre les niveaux faciliteront l'étayage de l'adulte auprès de certains élèves, la gestion des élèves rapides et/ou en difficultés. La gestion de groupes au sein de chaque niveau n'est pas plus compliquée que pour une classe unique qui compte souvent autant d'élèves (voir la partie "méthodologie" de la mallette).

Dispersion des élèves

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"A chaque fois que j'ai essayé de travailler en groupe de besoins, ou en différenciant les exercices, ça a été la foire dans la classe. Au final, ils n'ont rien appris !"

On a souvent peur, en donnant des consignes différentes aux différents groupes, que les élèves se perdent, s'éparpillent en attendant leur tour, mettent le bazar. Pour éviter ces possibles débordements et une perte de temps inutile, la mise en place des rituels est importante: par exemple, afficher/ écrire les consignes pour chaque groupe (couleurs différentes par groupe), pour le premier groupe, donner des activités autonomes (exercices de révisions ludiques…) en vous attendant, pour le second groupe, demander une lecture des consignes autonome et de réfléchir à la reformulation lorsque vous les interrogerez, puis, pour le troisième groupe, lire et reformuler la/les consignes

( envisager l'utilisation d'un enregistrement audio si plusieurs consignes ou nécessité de ré-écouter). N'hésitez pas à fixer des limites de temps décalées pour mieux gérer la fin d'activité.

Différencier ne signifie pas forcément donner des consignes différentes: la consigne peut être la même pour tous, puis vous apporterez des outils supplémentaires pour un groupe, une exigence supplémentaire pour un autre, une seconde consigne pour un troisième...

Ces méthodes de travail demandent un apprentissage chez les élèves mais aussi chez l'enseignant. L'analyse de la séance avec les élèves permettra de progresser. Il faut s'exercer et s'accorder du temps pour que les pratiques différenciées soient fonctionnelles.

Manque de motivation ou refus de certains élèves

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"De toute façon, Tartempion, il ne fait rien de ses journées, je ne vais pas passer du temps à lui préparer un parcours adapté s'il refuse toute aide ! "

ou " Tartempion, refuse de faire un exercice différent de celui de ses camarades, il ne veut pas reconnaître et accepter ses difficultés"

Certains élèves refusent de faire des choses différentes (quelles soient plus faciles ou plus difficiles) par soucis de marginalisation, vous trouverez dans cette mallette de nombreuses méthodes qui permettront soit d'accepter de faire différemment soit de ne pas se rendre compte qu’ils font un travail différent. Le fait de donner des consignes similaires peut leur donner l’impression de faire comme les autres alors qu’en réalité le contenu de l'exercice est adapté (phrases simples phrases complexes). Au fur et à mesure, ils apprécieront cette différenciation et ses bénéfices. En attendant qu'ils l'acceptent, ils se sentiront moins stigmatisés.

D'autres élèves sont démotivés et n'agissent plus car le travail n’est pas adapté à leur niveau, ils sont soit en difficulté soit, au contraire, face à un travail peu nourrissant intellectuellement (très bon élève voire haut potentiel intellectuel) : Différencier favorisera la mise au travail et le maintien des élèves dans l'activité.

Peur de stigmatiser, de niveler par le bas ou inversement d'aller trop loin

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"Oui mais si je simplifie systématiquement, il n'atteindra pas les compétences attendues ..."

" Je ne vais tout de même pas lui faire faire des maths de CE2, c'est repousser le problème, il s’ennuiera en CE2 !"L'enseignant a un très grand rôle à jouer, dans l'acceptation des différences au même titre que le statut de l'erreur dans la classe. Il peut envisager de commencer l'année par une séquence "Tous pareils, tous différents" en EMC qui s'intitulera " Tous pareils, tous différents dans la classe de ..." . Pourquoi ne pas organiser "Un incroyable talent" dans la classe et découvrir celui de chacun pour mieux se connaitre?

La différenciation concerne tous les élèves, plus ou moins à des moments différents, à des niveaux différents. L'enseignant doit instaurer une ambiance de classe sereine pour tous et la pratique de la différenciation y concourt. La stigmatisation est bien plus importante lorsque l'on ne considère pas ces différences, qu'on les ignore.

Ni trop ambitieux, ni pas assez, un juste milieu est à trouver ne serait ce qu'à travers les outils indispensables, supports de tous nos enseignements: les programmes. Ils signifient les objectifs et les compétences visées pour tous les élèves !

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