Dans tout ce devoir, désigne un plan affine, et son espace vectoriel directeur. On suppose cet espace vectoriel muni d'une structure euclidienne et d'une orientation. On note le sous-groupe de constitué des isométries, et le sous-groupe des isométries directes, c'est-à-dire des rotations vectorielles.
En raison de limitations techniques, la typographie souhaitable du titre, «
Devoir : Groupes de paveurs du plan
Géométrie affine/Devoir/Groupes de paveurs du plan », n'a pu être restituée correctement ci-dessus.
I. Préliminaires.
I.1 Isométries affines.
1. Montrer que l'application suivante est surjective :
On rappelle que c'est un morphisme de groupes dont le noyau est par définition , le sous-groupe des translations de . On notera la translation de vecteur .
2. Montrer que est un sous-groupe de .
On notera le groupe (groupe des isométries affines directes). On appelle rotation (affine) tout élément de ayant un point fixe. On appelle angle d'une rotation affine l'angle, dans , de sa partie vectorielle.
3. Montrer qu'une rotation distincte de l'identité admet un unique point fixe. On appelle centre de la rotation ce point fixe.
4. Soit un élément de . Montrer que pour tout point , il existe un unique couple , où est une translation et une rotation de centre , tels que . Montrer qu'un point est fixe par si et seulement si . En déduire que tout élément de est soit une rotation, soit une translation.
I.2 Composition de rotations.
Soient et deux rotations non triviales, de centres respectifs et , d'angles respectifs et .
5. Décrire si . On suppose désormais .
6. Montrer que si , alors et sont des translations. Exprimer les vecteurs de ces translations sous la forme (avec à préciser). En déduire que et ne commutent pas.
7. Montrer qu'il existe un couple de vecteurs unitaires, formant un angle orienté , et tels que la droite dirigée par passant par soit bissectrice de cet angle. Montrer que le couple , où est la droite dirigée par passant par , est unique.
On se donne ce couple de droites, et le couple analogue centré en , d'angle orienté .
8. Montrer que les assertions suivantes sont équivalentes :
(i) ;
(i') ;
(ii) et sont parallèles ;
(ii') et sont parallèles ;
(iii) .
9. On suppose maintenant , et l'on se donne des points d'intersection et . Montrer que et sont des rotations, dont on précisera les centres et angles. En déduire qu'ici aussi, et ne commutent pas.
10. Montrer que le commutateur de deux rotations non triviales n'ayant pas même centre est une translation non triviale.
I.3 Conjugaison.
11. Soient une translation et . Montrer que est une translation de vecteur .
12. Soient et une rotation non triviale de centre , montrer que est une rotation de centre et de même angle que .
Corrigé
1. Soit . Soit . Un antécédent de par est .
2. L'image réciproque d'un sous-groupe par un morphisme de groupes est un sous-groupe.
3. Si est un point fixe, l'équation aux points fixes est , qui n'a pas de solution non nulle puisque est une rotation vectorielle non triviale (et n'admet pas comme valeur propre).
4. On choisit pour la rotation de centre : . On pose . Un calcul direct montre ; c'est donc une translation. Ceci montre l'existence. L'unicité provient de l'égalite : est l'unique application affine fixant et de partie vectorielle . Et est uniquement déterminé à partir de et . Un point est fixe par si et seulement si . Supposons que n'est pas une translation, alors est une rotation vectorielle non triviale, n'admet pas comme valeur propre, donc est un isomorphisme. L'équation précédente admet une (unique) solution, et donc admet un (unique) point fixe. est alors une rotation de centre ce point fixe.
5. Si et sont deux rotations de même centre et d'angles et , alors est la rotation de centre d'angle .
6. On calcule la partie vectorielle : est une rotation vectorielle d'angle , donc l'identité ici. Ainsi est une translation. De même pour . donc est la translation de vecteur , alors que est la translation de vecteur . Si et commutaient, on aurait , donc serait égal à , l'unique point fixe de , puis donnerait , l'unique point fixe de . C'est exclu par hypothèse.
7. On se place dans un (le) repère orthonormé direct dont la première composante est portée (et dirigée) par ; soient , les coordonnées de et dans ce repère. Le couple est solution si et seulement si :
La première relation donne et . La deuxième devient alors un système linéaire de deux équations à deux inconnues, non trivial, de déterminant nul. Il existe donc une droite vectorielle de solutions. Puisque est unitaire, cela donne deux solutions (qui sont en fait échangées par symétrie centrale), chacune engendrant la même droite vectorielle.
8.
- : est la droite de direction passant par . Puisque passe par , on a bien l'équivalence souhaitée.
- De même, .
- se montre en appliquant aux parties vectorielles la symétrie orthogonale d'axe .
- : on a le calcul , qui montre que la rotation d'angle est l'identité, d'où .
- : puisque , , on a l'égalité , la propriété de bissection est vérifiée, et le couple de vecteurs est solution au problème de la question 8 adapté à . Par unicité, le parallélisme s'en déduit.
9. En considérant la partie vectorielle, qui est non triviale, on voit que et sont des rotations. On trouve . En effet, puisque , , et par les définitions de et , on voit que . Or, par définition des droites et , et coïncident sur ces droites, donc . De même, , ce qui montre que est le centre de , et celui de . Les angles sont pour les deux rotations. est distinct de (sinon, le quadrilatère serait aplati, et l'on aurait et confondues). Deux rotations n'ayant pas même centre sont distinctes ; cela montre que et ne commutent pas.
10. est une rotation d'angle et une rotation d'angle . Leurs centres sont distincts, d'après la question 6, leur composée est une translation non triviale.
11. Le calcul suivant montre la propriété attendue : .
12. On voit que a pour partie vectorielle , donc est une rotation. Un simple calcul montre que est fixe.
II. Les groupes de paveurs.
L'espace affine peut être identifié à muni de sa topologie usuelle, et a donc une structure topologique. On rappelle qu'une partie est compacte si et seulement si elle est fermée et bornée. On rappelle qu'une partie est discrète si elle n'intersecte chaque compact qu'en un nombre fini de points.
On suppose dorénavant donné , un compact connexe de , d'intérieur non vide, et un sous-groupe agissant sur et vérifiant :
Dans une telle situation, on dit que le couple est un pavage du plan. L'objet du problème est d'obtenir des informations sur les sous-groupes de qui peuvent être un groupe de paveurs.
On admettra que le point est en fait une conséquence des points et .
13. Soient un parallélogramme dans , et le groupe de translations engendré par les translations de vecteur et . Montrer que est bien un pavage du plan (indication : on pensera à la partie entière).
II.1 Le sous-groupe des translations.
On note le sous-groupe des translations de . On l'identifiera librement au sous-groupe de des vecteurs de ces translations.
II.1.1 Montrons que est non trivial.
Supposons au contraire que est trivial.
14. En utilisant , montrer que contient deux rotations n'ayant pas même centre.
12. Conclure (indication : question 10).
II.1.2 Montrons que contient deux vecteurs linéairement indépendants.
Supposons au contraire que les vecteurs de appartiennent à une droite vectorielle de .
16. Si , montrer que est inclus dans une bande de direction . En déduire que (par ).
17. Soient et non trivial. Montrer que est une symétrie centrale (rotation d'angle ) (indication : question 11). Montrer que les centres des éléments de sont alignés (indication : question 6).
18. En déduire que est inclus dans une bande de direction , et conclure par .
II.1.3 Montrons que le groupe est discret.
19. Par l'hypothèse , montrer qu'il existe un vecteur de plus petite norme parmi les vecteurs non nuls de , et un vecteur de plus petite norme parmi les vecteurs de non colinéaires à .
20. Supposons qu'il existe une translation qui n'est pas dans . Par un argument de division euclidienne, obtenir une contradiction avec la définition du couple . En déduire :
- .
II.2 Les rotations de .
21. Soit . En utilisant la question 11, montrer que la matrice de dans la base de est à coefficients entiers. En déduire que la trace de est un entier. Quelle est la trace d'une rotation en fonction de son angle ? En déduire que est d'ordre fini égal à , , ou , puis qu'il en est de même de .
22. On se place dans le cas particulier où et n'ont pas même norme. Montrer que , et en déduire que .
II.2.1 Groupe .
On suppose ici que toutes les rotations de sont des symétries centrales.
23. Soit un centre d'une symétrie de . Montrer que l'ensemble des centres des symétries de est (indication : on procédera par double inclusion, et l'on utilisera la question 4 pour l'inclusion réciproque).
II.2.2 Les autres cas.
Soit une rotation, de centre , d'ordre et d'angle . On admet qu'il existe une rotation , de centre , d'ordre et d'angle , telle que le centre soit le plus proche de parmi les centres des rotations non triviales de .
Attention, dans cette partie, désignera une rotation, qu'on introduit à la question suivante.
24. Montrer que est une rotation, dont on note le centre. Montrer que les angles (non orientés) du triangle sont moitié de ceux des rotations , et (indication : questions 7 et 9).
25. Soit l'ordre de . On veut montrer que l'angle de est . Supposons qu'il soit de la forme avec , et . Montrer que la rotation de centre et d'angle appartient à . Construire le centre de la rotation et en déduire une contradiction avec le choix de .
26. Déduire des deux questions précédentes :
- .
Donner tous les triplets d'entiers naturels avec , et vérifiant cette relation.
On se limite dorénavant au cas . On suppose que les vecteurs et sont de norme . Quelle est la nature du triangle ?
27. Montrer que et sont des translations, dont on écrira les vecteurs et dans la base .
28. On souhaite montrer que . Pour cela, montrer que l'application est une similitude vectorielle, c'est-à-dire conserve l'orthogonalité. En calculant son déterminant dans la base , trouver son rapport. Conclure en utilisant la question 4, la section 2.1 et la définition de .
29. Montrer que vérifie l'axiome (indication : on note et les sommets non encore introduits de l'hexagone régulier centré en dont , , et sont des sommets. On commencera par recouvrir cet hexagone).
30. On souhaite montrer que toutes les rotations d'ordre sont obtenues comme conjuguées d'une des rotations , , , , ou par un élément de . Soit donc une telle rotation . Montrer qu'il existe une rotation conjuguée à par des éléments de , et dont le centre est dans . Montrer qu'une telle rotation est , , , une puissance de celles-ci, ou une conjuguée de celles-ci par ou et conclure.
31. En déduire que toute rotation dans est d'ordre . Montrer qu'il existe un morphisme surjectif dont le noyau est isomorphe à .
Corrigé
13. Notons et les translations de vecteurs respectifs et . Montrons que le point est vérifié. Soient un point de et ses coordonnées dans le repère affine . Alors est l'image d'un point de par , où désigne la partie entière. Soirnt maintenant et (avec donc ) tels qu'il y ait un point dans . Les coordonnées de sont donc d'une part de la forme , avec , et , d'autre part de la forme , avec , et . On a donc l'égalité , puis est entier. D'après les inégalités sur les , il est nul, donc . De même, , et donc .
14. Si toutes les rotations de avaient même centre , les images de par ces rotations seraient incluses dans une certaine boule centrée en (en fait, dans n'importe quelle boule centrée en contenant ), et ne pourraient pas recouvrir .
15. Le commutateur de deux rotations n'ayant pas même centre est une translation non triviale, ce qui est une contradiction.
16. Sous les hypothèses faites, , qui est une bande de direction strictement incluse dans . La déduction est claire.
17. est une translation de vecteur , contenue dans , donc est colinéaire à . La rotation admet donc une valeur propre réelle ; elle est non triviale, c'est donc . La composée de deux symétries centrales dans (de centres et ) est une translation de de vecteur , ces centres sont sur la droite passant par de direction .
18. On considère une bande centrée sur et suffisamment large pour contenir . Alors conserve cette bande, donc les images de restent incluses dans cette bande et ne peuvent recouvrir .
19. Pour tout , est discret et fermé comme partie d'un espace discret et fermé. Soit une boule fermée centrée en et contenant au moins un autre point de cet ensemble. Par compacité et discrétude, la boule contient un nombre fini de points de cet ensemble ; il en est donc un tel que la norme soit minimale. Ceci donne . De même pour l'obtention de .
20. Puisque est libre, c'est une base de . Un vecteur d'une translation s'écrit . Alors . Prenons un point , et , , . Alors, soit est dans le triangle (c'est-à-dire barycentre de à coefficients positifs), et c'est une contradiction avec la définition de ou de , soit il est dans le triangle , et dans ce cas est dans le symétrique par rapport à du triangle et c'est une contradiction.
21. La question 11 montre que et sont encore des vecteurs de translation de , et s'écrivent donc et respectivement, avec entiers. La matrice de dans cette base est . La trace de est donc entière. Or, la trace d'une rotation est , où est l'angle de la rotation. Puisque la trace est invariante par conjugaison, on en déduit que est entier, donc , et donc (on exclut comme est non triviale), puis que l'ordre de est ou .
22. Si et n'ont pas même norme, alors et sont les seuls vecteurs de norme minimale parmi les vecteurs de . Comme est un vecteur de de même norme que , il s'agit de . Puisque la rotation admet comme valeur propre, on a , et donc puisque .
23. En composant deux symétries centrales de centres et , on obtient une translation de vecteur . Ainsi, . Réciproquement, soit le vecteur d'une translation dans . On souhaite montrer que est le centre d'une symétrie centrale de : d'après la question 4, convient (c'est une symétrie centrale et son centre est ).
24. La somme des angles de et vérifie donc, d'après la question 9, , et donc sont des rotations. D'après la question 9, les angles et du triangle sont moitié de ceux des rotations et . En échangeant les rôles, on déduit la même propriété sur l'angle et la rotation .
25. Si est d'ordre , alors toutes les rotations de même centre et d'angle , pour entier, sont une puissance de (car les puissances de sont de cette forme, et il y en a distinctes). En particulier, la rotation d'angle et de centre est dans . Mais alors, en appliquant la construction des questions 7 et 9 à la composée , on obtient deux droites et passant par et deux droites et passant par . La droite est tracée dans le secteur angulaire centré en et délimité par et , donc coupe la droite en un point situé sur le segment . Ce point est le centre de la rotation . On a donc exhibé un centre d'une rotation de qui est plus proche de que : c'est une contradiction.
26. La somme des angles d'un triangle est . La relation montre qu'au plus un des entiers vaut . Si , et , sont solutions, et l'on remarque qu'il n'y a pas de solution pour les autres valeurs de . Si , on voit que est solution, et qu'il n'y a pas de solution pour les autres valeurs de . Les triplets sont donc , et .
27. Le triangle est équilatéral. Leurs parties linéaires sont triviales donc et sont des translations. est l'image de par la rotation centrée en et d'angle . C'est donc l'unique point tel que soit un losange. Ainsi a pour vecteur . De même, a pour vecteur .
28. Si , alors :
- ,
en se servant de ce que est une isométrie donc admet pour adjoint , et des relations et , qui proviennent de l'angle de . La matrice de dans est qui a pour déterminant . Le rapport de la similitude est donc . Soit une translation dans . Puisque est engendré par n'importe quel couple de vecteurs non liés de normes minimales (partie 2.1), il suffit de voir que la norme de est plus grande que celles de et . Mais, d'après la question 4, le vecteur est l'image par d'un vecteur tel que est centre de . D'après la définition de , on a donc, puisque est une similitude de rapport , on a . Un calcul direct (hauteur d'un triangle équilatéral) montre , et l'on conclut.
29. En posant , les images par du parallélogramme recouvrent par la question 13. Or, les images de l'hexagone par , et recouvrent ce parallélogramme. Enfin, cet hexagone est exactement l'union des images de par , et .
30. D'après la question 29, il existe un élément de qui translate le centre de dans . Cette translation conjugue à une rotation dont le centre est dans d'après la question 12. Les rotations , , , , , , et les conjugués de ces quatre dernières par et répondent effectivement à la question. S'il y a une rotation centrée en un autre point de l'hexagone que , ce point est strictement plus proche de que et , et par conjugaison par une translation, on en déduit un centre de rotation strictement plus proche de que , ce qui est en contradiction avec la définition de . S'il y a dans une rotation non triviale centrée en un des sommets ou en le centre de l'hexagone et d'ordre , on en déduit une rotation d'ordre , et toujours quitte à translater, on construit comme à la question 25 un centre de rotation strictement plus proche de que et c'est encore une contradiction.
31. L'ordre d'un élément est stable par conjugaison, et toutes les rotations listées précédemment sont d'ordre . L'image de par est donc constituée uniquement de l'identité et des rotations vectorielles d'angles respectifs et : c'est un groupe isomorphe à . Le noyau de restreint à est le groupe dont on a vu qu'il est isomorphe à .