Poucette, en allant chercher son lait,
n'a eu besoin que de causer cinq minutes à deux ou trois voisines
pour que, avant midi, on sût, dans tout le village, que,
à telle heure, telle place, une représentation serait donnée
par la merveilleuse, incomparable et même invraisemblable troupe
de l'excellente Mme Bontemps.
Aussi, dès l'ouverture, la baraque était-elle bondée de spectateurs.
Et, lorsque les cinq acteurs défilèrent devant eux à la queue leu leu,
il ne faut pas demander s'ils se montrèrent étonnés.
On l'eût été à moins.
Médor commença les exercices,
coiffé d'un turban fantaisiste et ceinturé comme un commissaire.
Gravement il a pris place à l'un des côtés de la table,
ayant en face de lui son amie Poucette.
Celle-ci, entre eux deux, a étalé le contenu d'une boîte de dominos,
et la partie a commencé.
« Est-ce. qu'il vont jouer sérieusement, ou ne faire que semblant ? » se demande-t-on.
Mais on sait bientôt à quoi s'en tenir.
« Il est capable de gagner la partie, » se dit-on.
Si bien capable qu'il la gagne en effet,
à l'ébahissement général et de Poucette elle-même.
Ensuite Trottemenu s'est élancé sur une corde tendue à cet effet
et, tout debout, s'est mis à y danser une gigue
d'une sûreté et d'une élégance prestigieuses.
Minette, à son tour, est entrée en scène.
Un bouquet dans une patte
et, de l'autre, jouant avec une écharpe qui l'enveloppe à demi,
c'est une danse de caractère qu'elle offre à l'admiration des spectateurs.
Cela tient de la valse et du boléro, et c'est surtout original.
