La belle au bois dormant/La fileuse et l'enchantement

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La fileuse et l'enchantement
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Chapitre no 8
Leçon : La belle au bois dormant
Chap. préc. :Quinze années de bonheur
Chap. suiv. :Cent ans plus tard
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LA clé était rouillée et Primerose pensa avec ennui qu'elle ne pourrait pas s'en servir ; mais, à sa grande surprise, elle tourna dans la serrure sans difficulté. La lourde porte grinça sur ses gonds et Primerose se trouva dans une petite pièce sombre remplie de poussière. De cette pièce partait un escalier tournant que Primerose se préparait à gravir lorsqu'un bruit soudain la fit reculer d'effroi.
Whirrrr ! C'était un battement d'ailes, le vol d'une ombre aux yeux jaunes qui passa devant elle. Un hibou caché dans la tour s'enfuyait ; la pauvre Primerose en fut très effrayée et elle hésita pendant deux minutes, prête à retourner en arrière, mais l'escalier tournant la tentait fort, et, après avoir regardé si personne ne la suivait, elle saisit ses robes pour ne pas les laisser traîner par terre, et monta l'escalier en spirale, aussi vite qu'elle put, jusqu'à ce qu'elle eût atteint le sommet. Là, il y avait encore une porte. Dans cette porte était aussi une clé rouillée que Primerose tourna aussi aisément qu'elle avait tournée la première ; alors elle poussa la porte et entra.
Elle se trouva dans une petite chambre éclairée par d'étroites fenêtres. Au-dessous d'une de ces fenêtres se trouvait un lit, et, dans le fond de la pièce, était assise une vieille femme qui filait.
– " Bonjour, vieille grand'mère, " dit la Princesse. " Que faites-vous là? "
– " Je file, ma jolie enfant," répondit la vieille femme sans cesser son travail.
– " Vous filez ? " s'écria la Princesse. " Oh, faites-moi voir. Quelle est cette petite chose qui tourne si gaîment ? "
– " C'est le fuseau," reprit la fileuse. " Mais, mon enfant, vous parlez de cela comme si vous n'aviez jamais vu un rouet et un fuseau."
– " Mais non, je n'en ai jamais vu. Comme cela est intéressant ! Je voudrais savoir filer aussi bien que vous ! Voulez-vous me laisser essayer ? "
– " Bien volontiers," dit la vieille femme. " Toutes les jeunes filles devraient savoir filer. Tenez, mon enfant. "
Et elle donna le fuseau et la quenouille à Primerose.
Mais, soit que Primerose dans sa hâte de saisir le fuseau s'en fut emparée trop maladroitement, soit que la fée l'eut ordonné ainsi, il arriva que la pointe de fer effilée pénétra dans la main de la Princesse et, immédiatement, elle tomba profondément endormie sur le lit.
Au même instant, tous ceux qui se trouvaient dans le Château, les hommes, les femmes, et tous les êtres vivants, furent plongés dans le sommeil. Le Roi, qui était assis dans la Salle du Conseil avec tous ses ministres, s'endormit au milieu d'une phrase, et resta la bouche ouverte, et personne ne remarqua l'étrangeté de sa position car tous les ministres s'étaient endormis au même moment sur leur siège. S'endormirent aussi, aux portes, les sentinelles leur pique à la main et les demoiselles d'honneur dans la chambre de la Reine, tandis que l'une se mouchait avec son mouchoir, qu'une autre brodait, et qu'une troisième parlait à son perroquet. La Reine s'endormit sur sa chaise ainsi que son petit page qui chantait et qui laissa inachevé le son qui s'échappait de ses lèvres.
Et partout, dans le Château, le même charme opéra.
Courtisans, officiers, intendants, cuisiniers, valets, gardes, même les chevaux dans l'écurie et les chiens dans leurs chenils furent frappés d'immobilité comme s'ils étaient morts. Les mouches cessèrent de voler contre les fenêtres, et les pigeons de roucouler sur les toits. Dans les cuisines, les marmitons furent saisis par un profond sommeil tandis qu'ils lavaient les assiettes, ainsi que le chef en train de calotter un petit marmiton aide de cuisine. Mais, pendant cent ans, la calotte ne devait pas arriver à destination, et pendant cent ans l'aide de cuisine allait retenir le cri qui était sur le bord de ses lèvres.
Le chien s'endormit sous la table où il rongeait un os ; ainsi que le chat devant un trou de souris, et la souris de l'autre côté dont le petit nez rose reniflait l'air avec crainte.
L'immobilité frappa aussi les broches qui étaient au feu, toutes pleines de perdrix et de faisans, accommodés pour célébrer l'anniversaire de la Princesse Primerose, et le feu cessa de flamber.
Un profond silence envahit le Château. Dans les champs, les moutons cessèrent de bêler, les chevaux de hennir et les vaches de ruminer. Les oiseaux dans les arbres ne chantèrent plus. L'air, rempli de leur musique joyeuse, devint soudain comme mort. Le vent s'arrêta de souffler sur la forêt et les nuages blancs restèrent sans mouvement dans le ciel.

Ainsi tout s'endormit dans le Château enchanté, parce que la Princesse Primerose, couchée sur un lit dans la plus ancienne tour, devait y dormir cent ans jusqu'à ce qu'un fils de roi vînt la réveiller.
Tout autour du Château poussèrent des ronces et des épines entremêlées de lierre, de chèvrefeuille et d'autres plantes grimpantes. Le tout formait une masse si compacte qu'à distance, cela ressemblait à une petite forêt, qui, peu à peu, entoura le Château et s'éleva à une hauteur telle qu'on n'apercevait plus que le sommet de la plus haute des tours du Château et le mât qui la surmontait, et le long duquel pendait, sans mouvement aucun, l'étendard royal.

Et les années s'écoulèrent. Le printemps vint, les bois et les champs refleurirent, les arbres reprirent leur verte parure et les oiseaux firent entendre leurs chants, tandis que les hirondelles et les martinets construisaient leurs nids ; les enfants poussaient des cris de joie en battant leurs petites mains à la vue du brillant soleil, et les vieillards eux-mêmes souriaient quand ils apercevaient les premiers tapis de jacinthes dans les bois et les coucous balancés au souffle de l'air. Mais, au dedans de ce rempart de broussailles, la vie ne revenait pas, et pas une fleur ne répondait à l'appel du printemps. Les jours succédaient aux jours ; les gens qui étaient jeunes lorsque le Château devint enchanté vieillirent et moururent, mais ils n'oublièrent jamais la prophétie de la fée qu'un jour la Princesse endormie serait réveillée ; et ils racontaient cette merveilleuse histoire à leurs enfants, qui, à leur tour, la transmettaient à leurs descendants, modifiant quelque peu le récit, qui, pour eux, était devenu un conte. Et il arriva qu'au bout d'un certain nombre d'années, la légende se répandit dans les pays voisins, et que plus d'un jeune prince rêva qu'il était l'élu qui tirerait la Princesse de ce sommeil magique.
De temps en temps, l'un d'eux essayait de franchir les impénétrables broussailles, mais sans succès. Les ronces agrippaient le malheureux jeune homme si cruellement qu'il ne pouvait ni avancer ni reculer, et qu'il périssait misérablement, et ses os, blanchis par le soleil et le vent, étaient bientôt recouverts par les herbes, les mousses et les plantes de toutes sortes qui poussaient sous la forêt.

Répondre à ces dix questions modifier

 

  1. Pourquoi la clef est-elle rouillée ?
  2. Que veut dire sortir de ses gongs au sens figuré ?
  3. L'illustration représente le hibou et … ?
  4. Pourquoi l'escalier est-il en colimaçon ?
  5. Pourquoi la vieille pense-t-elle que toutes les jeunes filles devraient savoir filer ?
  6. Le charme prévu s'opère instantanément et s'applique au château et à ses alentours : est-ce le cas dans la version de Grimm ? Dans celle de Perrault ?
  7. L'immobilité totale s'accompagne aussi d'un … ?
  8. Comment l'auteur fait-il ressortir le contraste entre le château enchanté et le monde environnant.
  9. Comment l'histoire est-elle devenue un conte, puis une légende ?
  10. Comment l'illustrateur représente-t-il la barrière mortelle de ronces ?

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