Les réactions chimiques du vivant/Effecteurs de la catalyse enzymatique
Ce chapitre présente les différents types de catalyse que peut réaliser une enzyme.
Catalyse acido-basique
modifierLes acides aminés d'une protéine peuvent avoir un pKa associé à leur chaine latérale : ainsi de nombreux mécanismes enzymatiques impliquent des transferts de protons entre le substrat et les acides aminés du site actif. La figure 1 ci-dessous présente la structure et les pKa des groupements pour les 20 acides aminés. On retrouve dans les enzymes 3 grands types d'acides aminés impliqués dans une catalyse acide ou basique : les résidus "acides" Aspartate ou Glutamate qui à pH 7 pourront capter un proton, les résidus "basiques" comme la Lysine ou l'Arginine qui à pH 7 vont donner un proton, et l’Histidine qui peut jouer le rôle d'amphotère. La connaissance de la structure de ces acides aminés ainsi que des pKa des chaines latérale est nécessaire pour la bonne compréhension de nombreux mécanismes.
Il est à noter cependant que ces valeurs de pKa sont indicatives : en effet ce pKa peut être amené à de grandes variations en fonction de son environnement local au sein de l’enzyme. Par exemple si deux Lysines sont voisines au sein d'une enzyme, la protonation des deux Lysines sera extrêmement défavorisée par effet de répulsion de charge par rapport à la situation où une seule Lysine est présente dans un micro-environnement donné.
Il est à noter également qu'une enzyme peut réaliser une catalyse acide et basique sur le même substrat, ce qui est une situation bien plus complexe à mettre en place en chimie organique classique. Par exemple la Ribonucléase A utilise deux histidines, une réalisant une catalyse basique et l’autre faisant une catalyse acide, ce qui permet à l'enzyme de cliver la liaison 3'-5' entre deux nucléosides d'un ARN.
Catalyse nucléophile
modifierDes acides aminés comme la Cystéine ou la Sérine possèdent une chaîne latérale capable de se comporter comme un nucléophile : on a dans ce cas la réaction de ces résidus nucléophiles avec un groupement électrophile du substrat, ce qui permet l'activation de ce groupe électrophile et peut permettre sa réaction avec un autre substrat plus faiblement nucléophile (réaction de substitution nucléophile dans cet exemple). la Figure 2 ci-dessous présente un exemple de catalyse nucléophile réalisée par une glycoside hydrolase grâce à un groupement carboxylique d'un acide aminé du site actif.
Catalyse par des ions métalliques
modifierLes ions métalliques comme Zn2+ ou Mg2+ sont capables d'aider la catalyse enzymatique en agissant comme des acides de Lewis. Ils peuvent par exemple stabiliser des groupements carbonyles subissant une attaque nucléophile, et peuvent avoir des rôles structuraux comme dans la stabilisation des groupements phosphates présents sur les nucléotides triphosphates par exemple. Enfin certains métaux peuvent également réaliser des catalyses enzymatiques d'oxydo-réduction, en ayant ainsi un rôle de cofacteur de l'enzyme.
Catalyse par effet de proximité
modifierLes enzymes ayant une structure tridimensionnelle particulière au niveau de la poche catalytique, elles sont capables de rapprocher les substrats dans l'espace selon des configurations particulières. La règle des trois points de Ogston veut que le substrat est fixé au moins en trois points de l’espace (donc par au moins trois résidus) du site actif, ce qui permet à l'enzyme d'être stéréosélectif (réaction privilégiée avec un énantiomère R ou S du substrat) et régiosélectif (réaction sur un seul des groupes identiques trouvés dans le substrat). C'est notamment ces propriétés qui motivent l'utilisation des enzymes au sein de la chimie organique. Il est ainsi possible pour les enzymes de rapprocher dans l'espace les substrats, ce qui augmente leur concentration apparente. On a ainsi une catalyse par effet entropique ou effet de proximité.
Catalyse par stabilisation des espèces intermédiaires de réaction
modifierDe nombreux enzymes présentent des acides aminés dont le rôle est de stabiliser les états de transition ou les intermédiaires de haute énergie qui se forment au cours de la réaction. Par exemple les glycosidases utilisent des résidus Aspartate pour stabiliser le carbocation se formant au cours de la réaction (voir Figure 3 ci-dessous).