Recherche:Trilogie pour un monde juste et sain/Une crise de la gouvernance

La Gouvernance

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Manifestation No Culture Bruxelles

Dans une humanité en crise, la notion de gouvernance apparaît tel un thème central de nos sociétés.

« La notion de "gouvernance" désigne les règles, les processus et les comportements qui influent sur l'exercice des pouvoirs [...], particulièrement du point de vue de l'ouverture, de la participation, de la responsabilité, de l'efficacité et de la cohérence. » (Commission des Communautés Européennes 2001, p. 9)

Aborder le thème de la gouvernance de façon générale, risquerait d’être un exercice fastidieux. En termes de gestion des pouvoirs, chaque peuple, chaque culture, chaque nation, mais aussi chaque époque, a en effet ses propres spécificités. Mieux vaut dès lors limiter l'observation et l'analyse à ce qui se passe dans un seul pays. Voici pourquoi on ne parlera ici que de la situation belge jusqu'à la période préélectorale de 2014. Le but de l'exercice sera dans un premier temps d'analyser la situation actuelle pour définir ensuite les conditions propices à une bonne gouvernance citoyenne.

La distribution du pouvoir

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Dans toutes les Nations, l'organisation du pouvoir se fait au départ d'un texte premier intitulé Constitution. En plus d’être l'acte fondateur d'une nation, ce texte a pour fonction principale de garantir, d'une part, les droits de tout citoyen, et d’autre part le mode de distribution des pouvoirs au sein de la nation.

 
Puzzle de la déclaration des droits de l'homme
« Les droits naturels et imprescriptibles de l'homme sont la liberté, la propriété, la sûreté. » (Rogron 1836, p. j)
« La Constitution protège les droits et les libertés des citoyens contre les abus de pouvoir potentiels des titulaires des pouvoirs »[1]
« Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n’est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution. »[2]

Comme premier principe de bonne gouvernance apparaît le principe de séparation des pouvoirs pensé à l'époque de la Rome antique et théorisé ensuite par Montesquieu et John Locke. Cette séparation a pour but d’éviter la concentration des pouvoirs aux mains des mêmes acteurs, tout en assurant un contrôle et une modération réciproques entre ceux-ci. De tous les pouvoirs pouvant être exercés au sein d'une nation, Montesquieu fait la distinction entre les pouvoirs temporel et spirituel. C'est ensuite au sein du pouvoir temporel qu’il prôna la séparation entre le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire. Plus tard apparaîtra l’idée d'un quatrième pouvoir en référence au développement de la presse et autres médias de masse. À ces quatre pouvoirs, on peut encore ajouter le pouvoir économique parfois appelé cinquième pouvoir.

Le pouvoir spirituel

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En Belgique, la constitution garantit la liberté des cultes, son exercice public tout en interdisant la contrainte religieuse[3]. Dans ce pays, aucune religion d'État n'est reconnue et les questions religieuses sont traitées avec une certaine neutralité. Chaque année, l'État belge accorde un budget pour le financement[4] des six cultes reconnus et du secteur de la laïcité organisée. En 2007, c’est près de 300 millions d’euros[5] qui furent distribués pour l’entretien du patrimoine et le paiement des salaires et pensions des ministres des cultes ainsi que celui des délégués des communautés philosophiques non confessionnelles reconnues par la loi. Pour cette même année, 86,4% de ce montant fut attribué au culte catholique (Sägesser 2009, p. 96). L'observation des pratiques religieuses et de l'importance attribuée par les belges à la religion chrétienne laisse apparaître un certain nombre de paradoxes.

 
Représentation du Christ en vitrail
« D'une part, la société belge se caractérise « par une individuation du croire, un effondrement de la pratique religieuse, une perte d’influence normative des institutions religieuses » et d’autre part un retour institutionnel de celles-ci ; entre l’effacement progressif de la référence chrétienne dans nombre de secteurs de la société, et une adhésion manifeste où elle demeure franchement maintenue, comme à l’école libre. »[6]
« [D'autre part,] Après 177 ans d'histoire, on continue toujours dans le domaine public à critiquer, classifier, stigmatiser, juger, préférer ou, à l'inverse, exclure sur base des convictions philosophiques et religieuses [...] La séparation de l’Église et de l’État s'impose d'ailleurs doublement : Du point de l’État, précisément en tant que règle essentielle de bonne gouvernance, mais aussi du point de vue de l’Église, parce que le célèbre ; « Rends à César ce qui appartient à César et rends à Dieu ce qui appartient à Dieu » y rappelle que la foi tout comme l'appartenance religieuse s'inscrivent dans un registre non-concurrent à la chose publique. » (Monette et Laporte 2007, p. 23)
« En Belgique, ni le Constituant ni le législateur − et encore moins le pouvoir exécutif − n'ont tiré toutes les conséquences du principe de la séparation des Églises et de l'État ; ainsi la présence des symboles religieux dans des édifices publics. Le rang protocolaire des chefs de culte ; les cérémonies religieuses organisées ou inspirées par les pouvoirs publics, etc. sont autant de signes extérieurs de cet état de fait. »[7]

La séparation entre l'Église et l'État tant d'un point de vue budgétaire qu'idéologique ne fait donc pas l’objet d'une position claire au sein du peuple belge. Sans pour autant parler de pouvoir religieux au sein de la nation, il existe cependant certaines formes de soutien et d'alliance autour d'une sorte d'héritage du passé. De façon comparable à la monarchie, le culte catholique, auquel adhère officiellement d’ailleurs la famille royale, garde donc au sein de la nation belge un certain pouvoir d'influence sans pour autant entrer en réelle compétition avec les autres pouvoirs.


Le pouvoir législatif

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Le pouvoir législatif est confié au Parlement qui en Belgique est composé de deux chambres : la chambre des représentants et le Sénat. Les membres de la Chambres des représentants sont directement élus par la nation tandis qu'environ un tiers du sénat est composé de personnes cooptées. À cela, il faut ajouter les sénateurs de droit que représentent les enfants du Roi âgés de 18 ans, ou, à leur défaut, les descendants belges de la branche de la famille royale appelée à régner[8].

Le rôle du parlement, et donc du pouvoir législatif, est de voter les lois, de gérer le budget de l'État, et de contrôler l'action du pouvoir exécutif. Mais ce qui est vrai en théorie n’est pas forcément mis en pratique dans le cadre de la Belgique.

 
Palais de la nation
« La prise d'ascendant de l'Exécutif sur le Législatif est même généralisée car elle répond à une complexification des enjeux de notre monde moderne et à une nécessaire accélération de la prise de décision. Mais ce qui est inquiétant en Belgique, c’est qu'au-delà de cet affaiblissement du Législatif (Parlement) on assiste à plusieurs glissements successifs au sein même de l'Exécutif. D'abord, le chef d'État est de plus en plus souvent mis sur la touche − on va même au Nord du pays jusqu'à lui dénier tout droit de conseil et même d'avis sur les 'affaires' de l’État alors que cela relève de sa mission constitutionnelle. Ensuite, au sein même du gouvernement, le pouvoir réel a glissé du conseil des ministre vers le kern − entendez le conseil des ministres restreint aux principaux membres du gouvernement. Enfin le kern lui-même ne prend souvent ses décisions qu'après feu vert des 'belles mères' (nom très évocateur donné aux présidents de partis). » (Monette et Laporte 2007, p. 60)
« Les partis de la coalition réussissent à imposer une discipline de fer à leurs parlementaires. Une discipline d'autant plus efficace que ceux-ci savent que leur réélection future dépend pour 99,5 % de la place que leur conférera l'oligarchie des partis respectifs sur les listes électorales. » (Groupe Coudenberg 1991, p. 21)

Le communiqué de presse de la députée européenne Véronique De Keyser « Jetée comme un chien »[9] par son parti, prouve que la tyrannie des partis reste d'actualité. Pour avoir des chances d’être élus et donc de conserver leur activité rémunératrice, les membres du parlement doivent donc rester dociles aux injonctions des partis et dissimuler leurs impuissances.

« On ne peut accepter que dans une démocratie parlementaire, le Parlement, comme c’est le cas aujourd'hui, soit cantonné à n'intervenir qu'en toute fin de course dans l'élaboration de plus de 90 % des lois, c'est-à-dire à un stade où le texte est ficelé et négocié et qu’il est devenu politiquement impossible de toucher à une seule de ses virgules. Car ce faisant, on transforme les membres du Parlement en simples presse-boutons. » (Monette et Laporte 2007, p. 111)
« À l'évidence, le pouvoir d'initiative a quitté pour l'essentiel l'enceinte parlementaire et les journalistes ne s'y trompent pas qui désertent les séances publiques. » (Eraly 2002, p. 170)

Les journalistes ne sont pas les seuls à déserter les parlements. En 2009 des sanctions contre l'absentéisme parlementaire ont été adoptées[10] pour réduire l'absentéisme des élus directs de la nation.

 
Chambre des représentants
« Si ces mesures incitent les parlementaires à participer à ce moment crucial dans la vie des assemblées qu'est celui du vote des lois, décrets ou ordonnances selon les cas, des motions de méfiance et de vote de confiance, des propositions de résolution, etc., elles ne règlent toutefois pas la question de leur participation active à l´ensemble des travaux de leur assemblée. »[11].

Ainsi sanctionner l'absentéisme parlementaire apporte une réponse aux conséquences d'un problème, sans résoudre le problème en soi.

« A l'origine de la démocratie représentative, l'électeur élit son représentant mais celui-ci détermine librement la politique de la nation en fonction de l’intérêt général. Il n'exprime pas la volonté de ses électeurs mais il se décide par lui-même et sous sa propre appréciation. La prohibition du mandat impératif est la conséquence nécessaire du mandat représentatif : l'élu n'exprimant pas la volonté de ses électeurs, ceux-ci ne peuvent pas le lier par des instructions. [...] Or c’est bien un mandat impératif, mais du parti cette fois, que les parlementaires suivent en général dans leurs votes, quels que soient leurs états d'âme. [...] Afin de rétablir l’idée originelle du mandat représentatif, il faudrait réfléchir au rétablissement des votes secrets, notamment pour tous les votes qui ne sont pas des lois-programmes. » (Destexhe, Eraly et Gillet 2003, p. 121)

Vient ensuite la question de la rémunération. Le montant mensuel des allocations parlementaires s'élève à 179.901,84 euros bruts (montant à l'indice 1,6084), en 2013[12] avec une indemnité de départ allant de 5 000 euros pour un mois de mandat jusqu'à 250 000 euros nets étalés en 48 mensualités pour 20 ans[13]. En 2010, le budget destiné à la Chambre s’élevait à 115,9 millions d’euros, et celui consacré au Sénat à 80,2 millions d’euros[14].

En ces temps de crise économique, il fut décidé de réduire l'importance du budget alloué au parlement fédéral, en réduisant, dès la prochaine législature, le nombre de députés fédéraux de 212 à 150 et le nombre de sénateurs de 184 à 71 membres. Paradoxalement, la rémunération des ministres ne fut réduite que de 5 %[15] et leur nombre ainsi que la composition de leurs cabinets ministériels n'a fait l’objet d'aucun changement.

Ces mesures ne feront donc qu'affaiblir d'avantage le pouvoir législatif au profit du pouvoir exécutif. Une transformation d'autant plus dommageable que la réduction des places disponibles au parlement et au sénat limitera encore plus l'accès des petits partis. En effet, la clef d'Hondt qui assure la répartition des sièges parlementaires aux partis commence par les partis qui ont récolté le plus de voix et ce jusqu'à ce que tous les sièges soit distribués. De ce fait, moins il y a de sièges disponibles, moins les petits partis ont de chance d’avoir un élu. Par contre, et ce fait est paradoxal, là où la clef d'Hondt s'avérerait utile pour faciliter les processus de répartition comme la formation du gouvernement ou l’attribution des portefeuilles ministériels, elle n’est pas appliquée (Faniel et Tréfois 2011, p. 10 & 11). Il y a donc réellement en Belgique, et selon que l’on gère la question du pouvoir législatif ou du pouvoir exécutif, deux poids deux mesures.

Le pouvoir exécutif

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Le pouvoir exécutif s'exerce au sein d'un gouvernement composé de ministres encadrés de leurs collaborateurs. Le gouvernement a pour mission de gérer la politique courante de l'État et de contrôler l’application de la loi élaborée par le pouvoir législatif. Composé de ministres et de secrétaires d'État, le gouvernement entreprend donc les actions nécessaires à la conduite de l'État et de son administration.

 
Gouvernement provisoire Belge 1830
« Dans ce système, le ministre ne prend dans son cabinet que des proches fonctionnaires de sa couleur politique − ou invités à l'adopter − tandis que le travail administratif d'exécution est laissé à l'administration. » (Monette et Laporte 2007, p. 112)
« Les ministres ont rarement pleins pouvoirs dans le choix de leurs collaborateurs. Au PS en particulier, la tradition concède au président du parti un pouvoir dans la nomination des principaux collaborateurs du ministre, en particulier son directeur de cabinet [...] Au PSC, le président dispose plutôt d'un droit de veto, au PRL d'un pouvoir de suggestion plus ou moins appuyé. Mais une situation n’est pas l'autre et beaucoup dépend des rapports de force entre le président et le ministre. » (Eraly 2002, p. 45)
« Les membres des cabinets ne sont toutefois soumis à aucune déontologie, tandis que le fonctionnaire est tenu à une loyauté absolue et qu’il est investi d'une responsabilité tant personnelle qu'en tant qu'organe de l'État. Enfin, il est notoire qu'en cas de démission du ministre les dossiers du cabinet essentiels pour la continuité du service public disparaissent avec les occupants. » (Groupe Coudenberg 1991, p. 32)

Au sein même du pouvoir exécutif apparaissent donc des mécanismes dans lesquels « [...] l'essentiel du pouvoir politique est aux mains des directions de partis et des ministres en tant que membres des partis, et où la gestion des affaires publiques est assurée par les cabinets sous le contrôle de la presse plus que du Parlement. » (Eraly 2002, p. 82). Les témoignages de certains membres de partis sont à ce sujet très édifiants.

« [...] Il faut un réel courage pour défendre un point de vue contraire à celui du président ! Une phrase malencontreuse et on se fait fusilier. C'est presque du terrorisme [...] Il n'y a guère de démocratie au sein des partis. J'en veux pour preuve les fortes restrictions à la liberté de parole. Quand quelqu’un ose contester la ligne des dirigeants, sa carrière est finie. [...] Pour faire carrière, il faut se conformer au moule. [...] » »(Eraly 2002, p. 59)

Enfin, le pouvoir exécutif ne se limite pas à la production des textes législatifs, il exerce aussi un pouvoir économique de taille tout en bénéficiant de la plus haute position hiérarchique par rapport à l’ensemble des fonctionnaires, soit environ un travailleur sur cinq.

 
Résidence du premier ministre de Belgique
« En Belgique, les dépenses publiques absorbent 49,8 % du produit intérieur brut, soit la moitié de l’ensemble des richesses produites. Outre les milliers de mandataires politiques et les presque 900 000 personnes qui composent la sphère publique et tirent de celle-ci leur rémunération, l'État assume une fonction fondamentale de redistribution des richesses en délivrant un éventail toujours plus large de biens publics » (Destexhe, Eraly et Gillet 2003, p. 35)

La Belgique est donc un pays dans lequel le pouvoir législatif est phagocyté par un pouvoir exécutif lui-même orchestré par les membres les plus influents des partis politiques. Une réelle concentration du pouvoir donc qui sera d'autant plus vive que le cumul de mandats est autorisé.

« La Belgique est avec la France un des derniers pays au monde à tolérer et à encourager le cumul d'un mandat parlementaire avec des fonctions exécutives au niveau local (bourgmestre, échevin, président d'une inter-communale, etc.). Partout ailleurs, dans les démocraties occidentales, le cumul est soit interdit, soit marginal. » (Destexhe, Eraly et Gillet 2003, p. 125)

Parmi les trois pouvoirs temporels, et selon la célèbre maxime de Montesquieu : « Pour qu'on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir. » (Montesquieu 1767, p. 206). Le pouvoir judiciaire reste donc le seul pouvoir susceptible de contrecarrer les abus du pouvoir exécutif.

Le pouvoir judiciaire

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Le pouvoir judiciaire est confié aux juridictions composées de juristes qui ont pour rôle de contrôler l’application de la loi et de sanctionner son non-respect. La constitution belge spécifie qu’il n'y a dans l'État aucune distinction d'ordres. « Les Belges sont égaux devant la loi »[16] Mais cette égalité reste relative puisque, dans les faits, les membres du pouvoir exécutif sont à la fois juge et partie dans l'édiction des lois qui les concernent et de plus ne les respectent pas forcément sans pour autant en être réprimandés.

«Le citoyen a de plus en plus l'impression que l’État plane au dessus des règles. Il n'observe pas toujours ses obligations internationales et européennes, il utilise des artifices (chèques-repas que par ailleurs il réprouve), il contourne les décisions judiciaires (nomination de fonctionnaires après un arrêté d'annulation). Les exemples sont nombreux. L’État de droit est le vrai rempart de la démocratie. L’État doit donner l'exemple de civisme. » (Groupe Coudenberg 1991, p. 14)
« Ce sentiment très présent chez certains responsables politiques selon lesquels la loi ne peut arrêter le politique, cette tendance très actuelle à considérer que la loi ne doit pas impérativement être respectée si d'autres facteurs, plus important à leurs yeux, entrent en jeu. Et il y en a beaucoup d'exemples. » (Monette et Laporte 2007, p. 30)
 
Palais de justice de Bruxelles
« Enfin, Il faut signaler qu’il existe un nombre significatif de lois qui restent purement et simplement non appliquées, parce que ces lois ont été votées sans aucune préoccupation de créer les moyens de leur application. [...] Elles restent ensuite comme des dards empoisonnés qui pèsent sur le climat politique et provoquent des éruptions d'urticaire périodiques. Une loi inappliquée est pire que l'absence de loi : elle crée de toutes pièces un déficit d'État de droit. » (Destexhe, Eraly et Gillet 2003, p. 74)

La désinvolture témoignée par le pouvoir exécutif par rapport au respect des lois n’est pas la seule faiblesse du système politique belge puisque la magistrature elle-même fut, à une époque du moins, étroitement liée au pouvoir politique par le simple fait du recrutement.

« Il y a ensuite le problème de la politisation du recrutement, de la nomination et de l'avancement. Là aussi la politisation est devenue un véritable cancer qui mine l'institution. Jamais on n'a atteint une telle désinvolture dans la nomination des magistrats. De nombreuses propositions ont été faites pour arrêter l'incroyable légèreté des dernières années en matière de nominations et de promotions. De l'avis de tous les magistrats, la mesure est pleine. Pourtant, personne ne voit de solution se profiler à l'horizon. » (Groupe Coudenberg 1989, p. 68)

Il fallut ainsi attendre la marche blanche du 20 octobre 1996 qui rassembla plus de 300 000 belges des quatre coins du pays, pour que les solutions apparaissent. La mise en place d'un Conseil Supérieur de la Justice (CJS), sorte de « forum démocratique où s’expriment toutes les opinions sur la fonction judiciaire »[17] eut lieu au courant de l'année 2000. Fonctionnant sur la base des plaintes de citoyens et des enquêtes qu’il mène, le CJS fournit des avis aux responsables politiques pour améliorer le fonctionnement de la Justice. Plus important encore, il choisit objectivement les candidats à la magistrature, de façon à dépolitiser les nominations. Malheureusement, deux ans plus tard, la dépolitisation de la justice restera perçue comme une « illusion suprême » au yeux de Jan Nolf ancien avocat et juge de paix à la retraite[18].

Par la suite, et après 30 ans de discussion, apparaîtra au moniteur belge du 18 février 2014, le texte de loi organisant une nouvelle réforme garantissant un regain de flexibilité, d'autonomie, d'efficience et de spécialisation au sein du pouvoir judiciaire[19]. De cette nouvelle réforme, il faut donc espérer une plus grande indépendance du pouvoir judiciaire envers le pouvoir législatif.


Le pouvoir médiatique

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Le pouvoir de la presse et des médias parfois appelé contre-pouvoir est assuré par les journalistes, mais aussi et de plus en plus depuis l’arrivée du web 2.0, par des acteurs non professionnels et indépendants. Cette état de fait apparaît aujourd’hui dans la définition faite du journaliste en page 11 du code de déontologie journalistique[20]. Avec la venue d'Internet, le quatrième pouvoir poursuit donc son processus historique d'indépendance.

« Les raisons de cette montée en puissance du quatrième pourvoir sont connues. Un peu partout, les médias de masse ont repris l'essentiel des fonctions d'information qu'assumaient par le passé les grands partis à partir de leurs propres organes de presse. Les médias se sont « dépilarisés » : un journal trop étroitement inféodé à un parti n'est désormais plus viable en Belgique. » (Eraly 2002, p. 269)
« L'indépendance de la presse est une valeur essentielle pour tous les journalistes politiques, le fondement de leur identité professionnelle, et ils ne manquent de parler avec mépris de ceux de leurs collègues qui leur semblent inféodés à un parti ou un homme. » (Eraly 2002, p. 286)

Si l'indépendance du journaliste est aujourd’hui soutenue par un ensemble de règles éthiques et déontologiques, les risques de dérives au sein de cette activité sont toutefois bien réels. En tant qu'acteurs économiques, les journalistes et les comités de rédactions sont aussi tributaires des rentrées financières accordées par un public dont le désir est parfois incompatible avec une information de première qualité.

«Lucidement, les journalistes évoquent quatre conséquences de la logique économique : le mimétisme, c'est-à-dire la tendance à épier et copier les concurrents ; la pression de l'urgence ; la quête effrénée des primeurs (qu'on reçoit avec les concurrents) et des scoops (qu'on publie en exclusivité) ; la tendance à privilégier le sensationnel. » (Eraly 2002, p. 282)

À côté de ces contraintes imposées par le public, il existe aussi, dans le cadre du journalisme politique, un autre type de contraintes lié à la récolte d'information.

« Le public se figure parfois que les journalistes doivent arracher de haute lutte leurs primeurs et leurs scoops au monde hermétique des décideurs. En réalité, le plus souvent, ils les échangent dans un vaste marché de fuites organisées auquel participent tous les partis et à peu près tous les responsables politiques.(Eraly 2002, p. 293)
 
Tour de la RTB
« Les journalistes sont fréquemment invités au restaurant ou conviés à accompagner le ministre, tous frais payés, dans ses déplacements à l’étranger, et dès lors tacitement soumis à un devoir de réciprocité sous la forme d’articles et de reportages. La pratique est institutionnalisée et pourtant fort coûteuse. » (Eraly 2002, p. 290)

Face à de telles pressions, les journalistes doivent donc, au même titre que les magistrats[21], faire preuve d'un « devoir d'ingratitude » tout en devant accepter le fait que, de plus en plus, les ministres s'entourent de professionnels issus de leurs propres rangs. (Eraly 2002, p. 287). Dans un autre cas de figure et comme ce fut le cas récemment, il n’est pas rare non plus qu'un journaliste rejoigne les rangs d'un parti pour se présenter candidat dans le cadre d'une campagne électorale en cours[22].

La frontière entre pouvoir et contre-pouvoir pose à nouveau problème à partir du moment où les membres du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel[23], chargés de la réglementation publique en matière de diffusion médiatique, sont choisis, en Belgique comme en France[24], par les membres du gouvernement. Le problème de neutralité politique deviendra d'autant plus délicat pour les médias publics composés d'un conseil d'administration politisé et fonctionnant sur la base d'un budget en grande partie accordé par le pouvoir politique.

« L'Union européenne de radio-télévision (UER) a dénoncé les coupes budgétaires dans les services publics de radio-télévision en Europe et l'ingérence des gouvernements dans les nominations qui menacent selon elle la qualité de la programmation. "Les budgets des télévisions publiques ont été coupés dans de nombreux pays", notamment en Hongrie, Moldavie, Lituanie et en Belgique »[25]

Face aux réductions budgétaires la solution des médias sera souvent l'intégration ou l’augmentation de recettes publicitaires. Mais avec la publicité apparaissent aussi de nouvelles sources de pressions.

« Tant les groupes privés que les opérateurs publics (à concurrence d'un pourcentage de 30 % des recettes pour la RTBF), par ailleurs, doivent compter sur la publicité pour assurer une part non négligeable de leur financement. Ce poids influe sur les contenus des supports médiatiques, privés et même publics, et est source de tensions entre la logique de profit du secteur privé et les exigences de la qualité du secteur public. Ainsi, les entreprises qui de la publicité dans les médias exigent de facto de ceux-ci qu’ils ne dévoilent pas d'information susceptible de nuire à l'image de marque de ces entreprises. Ces entreprises peuvent retirer ou menacer de retirer leur investissement publicitaire si les médias n'observent pas cette règle d’auto-censure. Certains journalistes spécialisés dans l’investigation économique font état de leurs difficultés à obtenir des informations mais aussi à les voir diffusées, les pressions étant fortes sur les responsables éditoriaux pour les faire renoncer à la diffusion de tel ou tel reportage. » (Goethals, Vincent et Wunderle 2013, p. 105)
 
Studio de télévision
«Une évolution importante est observable ces dernières décennies : les activités financières et économiques sont fortement valorisées et l'information à leur propos est largement diffusée par-delà les frontières. Cette tendance est le produit à la fois de la stratégie de communication de l'actionnariat, du développement de l'espace occupé par les informations économiques et financières dans la presse généraliste, et du développement de la presse spécialisée dans ces domaines.
Dans un même temps, la discrétion reste la règle pour les aspects essentiels de la stratégie des groupes : processus de fabrication ou de parts de marché, stratégies de dumping social, mise en concurrence d'État pour obtenir les meilleures conditions d'investissement, tractations autour des quotas de
Début d’une formule chimique
CO2
Fin d’une formule chimique
, exigence de disposer de services clés sur porte ou d’infrastructures sur mesure ... » (Goethals, Vincent et Wunderle 2013, p. 24)

De nombreux facteurs limitent donc les capacités du contre-pouvoir médiatique. Cette constatation est d'autant plus inquiétante que tant au niveau politique qu'au niveau économique, l'un des rôles premier des médias est justement d'apporter une information vraie et non censurée sur la base de laquelle pourra se former l’opinion publique.

« Par-dessus les deux grandes traditions de la démocratie représentative symbolisée par le Parlement et de l'État social qui consacre le rôle des syndicats dans l'économie, une sorte de troisième modèle politique est en voie d'émergence : la démocratie d'opinion, avec les médias et les sondages pour symboles, les ONG pour acteurs emblématiques, et la mise en débat généralisée pour fantasme. » (Eraly 2002, p. 267)

Afin de voir clair au sein des différentes tendances émises au sein de l'opinion publique, divers mécanismes peuvent être mis en œuvre, tels que les sondages, les pétitions, les manifestations publiques ou encore d'autres techniques d'observations statistiques comme cela peut se faire actuellement sur Internet par exemple. Si ces instruments ont pour but d'apporter des éclaircissements sur l'opinion publique, il faut garder à l'esprit qu’ils peuvent aussi apporter dans certains cas une image trompeuse de la réalité et dans ce sens tronquer les débats publics.

 
Des ordinateurs filmés par une caméra
« On ne se sert plus aujourd’hui des sondages politiques comme d'un cliché instantané permettant de connaître approximativement l'état du corps électoral sur un sujet donné à un moment donné − ce qu’il est, ni plus ni moins − mais comme d'un outil de persuasion, d'influence voire même parfois de manipulation. Et la coupable absence concernant l'organisation, l'utilisation, l'interprétation et la publicité des sondages renforce évidemment cette déviance, avec nombre de sondages aux méthodologies fort peu scientifiques, aux échantillons restreints et mal définis, aux marges d'erreur enlevant toute pertinence, au calendrier orienté, au marketing troublant et aux commanditaires juges et parties. Qui plus est, cette « sondagite » aiguë se poursuit même durant les périodes électorales et jusqu'aux veilles de scrutins, ajoutant à la perversion du système. » (Monette et Laporte 2007, p. 118)

Il ne faut pas non plus oublier qu’il existe aussi de nombreux moyens pour manipuler l'opinion publique, soit au travers des médias : en 1914, Arthur Ponsonby mettait déjà en évidence un ensemble de principes élémentaires de propagande de guerre, de vielles méthodes toujours appliquées de nos jours (Morreli 2010), soit au travers d'autres méthodes faussement participatives.

« Un exemple particulièrement saillant de manipulation s'observe lors des pseudo-consultations populaires qui, du niveau communal au niveau fédéral, parsèment la communication politique. La technique est toujours la même, elle est sans doute aussi vieille que la politique : sous le couvert d'un appel à l’expression du citoyen, d'une forme de démocratie directe, on réalise en fait une opération de promotion. » (Eraly 2002, p. 329)

Enfin, il faut aussi garder à l'esprit que toutes ces méthodes de manipulation sont aussi bien utilisées par le pouvoir politique que par le pouvoir économique.

Le pouvoir économique

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Le pouvoir économique s’articule d’une part en tant que fondement et d’autre part en tant qu'objet (Aron 1958, p. 56). En tant que fondement, ce pouvoir repose sur la richesse matérielle ou financière pouvant être utilisée en tant qu'outil d'influence sur la société. En tant qu'objet, le pouvoir économique devient la capacité d'influencer le déroulement des activités économiques. Contrairement aux pouvoirs temporels précédemment cités, le pouvoir économique en général peut se voir cumuler aux autres types de pouvoir. On peut d'ailleurs observer ce cumul au sein des dirigeants des partis politiques qui, déjà, cumulent le pouvoir législatif et exécutif.

 
Billet de Vingt francs Belge
« Comme les partis n'ont pas de personnalité juridique, aucun contrôle des comptes ne peut être exercé. Bizarrement, pour contourner ce problème, la loi de 1989 sur le financement des partis politiques prévoit que les fonds sont versés à un ASBL de financement, qui les reverse aux partis. Mais les membres des conseils d'administration de ces ASBL, ne sont pas choisis de façon démocratique alors qu’ils jouissent d'une puissance considérable puisqu’ils détiennent les clés budgétaires. [...] Dans plupart des partis, ni les militants, ni les membres du bureau ou du comité directeur, ni les parlementaires ne discutent, ne voient ou n'approuvent de budget ou de comptes, alors que l'essentiel des ressources est d’origine publique. » (Destexhe, Eraly et Gillet 2003, p. 111 & 112)
« La "solution belge" au problème du financement de la vie politique est unique au monde : aucun pays n'accorde un financement public aussi généreux aux seuls partis représentés au niveau fédéral tout en limitant aussi radicalement les dons privés. [...] Une partie substantielle est versée est reversée aux partis politique afin de financer les campagnes électorales. » (Destexhe, Eraly et Gillet 2003, p. 142)
«Les temps sont durs mais les partis politiques qui jouent dans la cour des grands passent entre les gouttes. PS , MR, CDH, Ecolo, FDF, CD&V, SP.A, Open VLD, N-VA, Vlaams Belang, Groen et la Lijst Dedecker (LDD) partis sont assis sur un trésor de guerre de plus de 88 334 747 euros, sur foi des compteurs arrêtés au 31 décembre 2011. Ce joli matelas financier, logé en placements de trésorerie et en liquidités, s’est alourdi de 18 millions en un an. De quoi aborder 2014 et son triple cap électoral (fédéral, régional, européen) avec une relative sérénité sur le plan financier. »[26]

Les partis politiques bénéficient donc d'un coté, du pouvoir économique en tant qu'objet de part leur situation privilégiée dans l'édition des règles auxquelles doivent se soumettre les acteurs économiques, et de l'autre côté, du pouvoir politique en tant que fondement, grâce au financement de l'état qui leur permet de se maintenir au pouvoir grâce à des campagnes électorales onéreuses et l'emploi de personnel pour assurer leur marketing politique en général. Ceci dit, le pouvoir économique se trouve aussi entre les mains de nombreux autres acteurs et non des moindres. En ce qui concerne le pouvoir économique en tant qu'objet, ce sont aujourd’hui les instances européennes et internationales qui tiennent le devant de la scène.

 
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« Ces dernières années, une très grande part du pouvoir des Parlements nationaux a été transférée à des institutions transnationales telles que la Banque centrale européenne, la Commission européenne, la Banque mondiale et le FMI. Ces instances n'étant pas élues démocratiquement, elles entraînent une technocratisation considérable de la prise de décision. Les banques, les économistes et les analystes des conditions monétaires sont eux aussi aux manettes du pouvoir » (Van Reybrouck 2014, p. 35)
« La représentation démocratique de ces institutions internationales, dont le rôle s’accroît, fait débat, notamment parce qu’elles n'ont aucune dépendance par rapport à l'électeur. Les décisions, dans ces institutions, se prennent en effet lors de négociations entre États qui ne rendent des positions prises devant leurs parlements que dans un deuxième temps, et qui exigent de leur majorité parlementaire de donner leur assentiment aux résultats des négociations. » (Goethals, Vincent et Wunderle 2013, p. 16 & 17)

Une des tendances plébiscitées par ces organismes transnationaux sera la privatisation. Sa mise en œuvre au niveau des États européens commença par le secteur des finances pour se poursuivre ensuite au sein de différents services publics tels que la télécommunication, les transports en commun, la poste, etc. C'est ainsi que la CGER, banque d'état Belge créée en 1865 par Walthère Frère-Orban, et ayant fonctionné de manière autonome et sans aide de l'État, fut privatisée en 1990. Dix huit ans plus tard, suite à la crise économique de 2008, la nouvelle banque répondant au nom de Fortis devra être sauvée par l'État pour être ensuite revendue au groupe BNP Paribas. Cette opération de sauvetage mis en évidence l'interdépendance de tous les acteurs économiques que sont les banques, les ménages, les entreprises et l'État. Le coût total du sauvetage s'est élèvé en principe à 15,2 milliards d’euros[27], 20,64 milliards d’euros si l’on compte aussi le renflouement de Dexia, KBC et Ethias (Millet et Toussaint 2011). Cette opération aura fait remonter la dette du pays au dessus des 100 % de son PIB mais aussi placer l'État Belge garant pour un montant de 329 milliards en cas de nouvelle crise[28].

Le pouvoir économique en tant que fondement place donc aujourd’hui les banques et groupes financiers en situation d'acteurs privilégiés. Dans un même contexte, les groupes d'entreprises constitués pour défendre les intérêts communs de leurs membres, apparaissent aussi tels de puissants acteurs économiques au niveau de la répartition des richesses au sein des populations.

« La généralisation de la constitution systématique des entreprises et des patrimoines mobiliers et immobiliers en groupes de sociétés a contribué à accroître ces dernières décennies l'inégalité de la répartition des richesses des ménages, dans un grand nombre de pays et notamment en Belgique. C'est le constat effectué par l'économiste français Thomas Piketty dans son analyse historique sur l'évolution des patrimoines dans différents pays européens et sur leur transmission. Une récente étude de la Banque nationale de Belgique montre également que la détention d'actifs financiers (en particulier autres que les dépôts) est en Belgique essentiellement le fait d'un pourcentage relativement faible de ménages les plus riches, qui concentrent la majorité de la richesse du pays. » (Goethals, Vincent et Wunderle 2013, p. 29 & 30)
 
Banque centrale européenne

Dans le cadre du marché de l'emploi, les inégalités de distribution de richesses se traduisent en réelles relations de pouvoir entre les citoyens.

« Le contrat de travail associant un salarié, obligé de travailler, à un employeur, ayant la possibilité de choisir entre plusieurs postulants, illustre bien cette relation de pouvoir asymétrique. On trouve par ailleurs la même asymétrie dans les relations que les entreprises entretiennent avec les fournisseurs, les sous-traitants ou les consommateurs. » (Goethals, Vincent et Wunderle 2013, p. 15)

Contrairement au pouvoir politique, le pouvoir économique en tant que fondement, ne connaît aucune contrainte liée à une quelconque légitimité démocratique. De plus, dans le cas d'entreprises ou de groupes transnationaux, la mise en concurrence des États par un chantage à l'emploi et à l'investissement permet à ces acteurs de négocier des avantages fiscaux, des réglementations favorables, des primes diverses, etc. tout en bénéficiant parfois de conditions très favorables à la fraude fiscale.

« Parallèlement, la dérégulation des marchés financiers a facilité la banalisation des instruments juridico-financiers destinés à rendre anonyme l'origine des flux financiers (trusts, fiduciaire, etc., localisés de préférence dans des paradis fiscaux). Ce phénomène s'est amplifié ces dernières années en Europe, contribuant à former un cyberspace dématérialisé et sans régulation crédible, débouchant sur le développement de bourgeoisies liées plus ou moins directement à la criminalité organisée, peu à peu intégrées dans des réseaux « normaux » » (Goethals, Vincent et Wunderle 2013, p. 54)

En Belgique, les profits réalisés par les organisations criminelles sont estimés entre 7 et 12 milliards d’euros par an, dont 99 % échapperaient au contrôle de la Justice[29]. Le gouvernement fédéral a donc mis en place au cours de l'année 2013 un nouveau Collège contre le blanchiment sous la direction d'un haut magistrat et du président de la Cellule de traitement des informations financières[30]. Mais Jean-Claude Delepière, président de la CTIF (Cellule de traitement des informations financières) dénoncera une absence de volonté politique dans le désir d'enrayer le blanchiment et la fraude fiscale grave et organisée. Dans un article de presse, il fait référence aux moyens dérisoires dont dispose la cellule : « Que peuvent encore faire des sections financières moribondes et des enquêteurs démunis et limités à leur arrondissement judiciaire face à des criminels financiers aux moyens considérables, dont le terrain de jeu s'étend à la planète ? C'est comme si la police de la route devait rattraper des Ferrari avec des 2 CV »[31]. Ce cri d'alarme fut lancé en commission à la chambre des représentants laquelle ne comptait que 3 sur 17 membres effectifs, sans compter les suppléants théoriquement deux fois plus nombreux[32].

La fraude fiscale reste donc une plaie ouverte dans un monde où la crise économique porte de graves préjudices aux États et aux ménages les plus pauvres. Une situation d'autant plus embarrassante que même quand le pouvoir politique tente de jouer son rôle régulateur, les actions intentées ne semblent pas à la hauteur des profits escomptés. « Une étude réalisée en 2013 par le think tank européen Bruegel tend à montrer que les amendes infligées par la Commission européenne suite à des ententes illicites seraient largement inférieures aux bénéfices engrangés. » (Goethals, Vincent et Wunderle 2013, p. 28)

L'accès aux pouvoirs

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En Belgique, le scrutin électoral fonctionne selon le principe du suffrage universel pur et simple. C'est-à-dire que tout citoyen majeur a le droit de vote selon la formule un homme égale une voix. Mais ce qui est valable dans le cadre du vote proprement dit ne l'est pas dans le processus de déposition des listes de candidats. En effet, pour déposer une liste aux élections européennes par exemple, il faut l'accompagner de 5000 formulaires chacun signé par un électeur différent et validé dans sa commune. La seul alternative à ceci sera la remise de 5 formulaires signés chacun par un parlementaire fédéral sortant[33].

 
Bulletin de vote de Walcourt

Dans ce contexte précis, la voix du parlementaire compte donc pour mille voix de citoyens non élus. La logique de guerre électorale fera en sorte que les voix des parlementaires sortants seront uniquement destinées aux dépôts des listes de leur parti. Apparaît donc ainsi, au niveau de la réglementation du dépôt des listes un premier biais démocratique du système électoral belge.

Un autre biais démocratique repose sur la question du financement des campagnes électorales. Pour se faire élire, il faut dans un premier temps se faire connaître par les électeurs, car il va de soi que personne ne votera pour un nom inconnu. Ensuite, il faut convaincre les électeurs de voter pour soi. Tout ceci demande un investissement considérable en temps mais surtout en argent.

« Aujourd'hui, pour créer un parti et le développer il faut disposer d'une fortune personnelle. Lors des élections de 1990, le fondateur de Vivant a englouti plus de 20 millions de FB pour faire connaître ses idées, sans obtenir un seul siège au Parlement Fédéral. » (Destexhe, Eraly et Gillet 2003, p. 154)

Si les partis politiques contrairement aux personnes isolées arrivent à relever ce défit, c’est en grande partie grâce à l’argent reçu du contribuable au travers de financements publics. Ainsi pour pouvoir profiter de cet argent dans le but d’avoir une chance d’être élu et donc de participer activement à la vie politique du pays, il faut donc rejoindre un parti politique.

« Or les partis belges n'ont ni limites légales ni code de conduite contraignant. Ils sont régis par des statuts et des organes internes, mais leur mode de fonctionnement échappe à tout contrôle. » (Destexhe, Eraly et Gillet 2003, p. 110)

Ensuite, pour être élu, il ne suffit pas d’avoir de bonnes idées et de rejoindre un parti il faudra aussi poursuivre la logique partisane jusqu'au bout.

« L'entrée la plus efficace en politique consiste à nouer une relation personnalisée avec un homme politique influent, de se placer dans son sillage et de profiter de l'aspiration. [...] Cette voie royale comporte assurément des désavantages. Elle suppose d’investir massivement dans un petit nombre de relations, et cela dans un contexte de rivalité permanente, chacun s'échinant à capter l'estime, la confiance et la sympathie des barons. » (Eraly 2002, p. 37)

Enfin, fait très important, il faut savoir que seuls les partis déjà installés au pouvoir peuvent bénéficier du financements public.

« La loi de 1989 impose deux conditions pour qu'un parti puisse accéder au financement public : il doit être (on l'a dit) représenté dans les deux chambres fédérales, mais aussi être reconnu comme parti politique. La première condition est déjà extrêmement difficile à remplir, particulièrement au Sénat où il faut plus de 120.000 voix pour obtenir un siège et au moins 7 % des voix sur une circonscription qui couvre toute la Wallonie et Bruxelles. La seconde condition impose de présenter des candidats aux élections fédérales dans chaque circonscription électorale d'une communauté. Avec le système actuel, Écolo, Agalev, la VU, Spirit, le FDF ou le Rassemblement wallon n'auraient pu exister. [...] Les nouveaux partis, même s'ils n'arrivent pas à passer le cap de l'élection, sont cependant nécessaires à la vitalité du débat démocratique » (Destexhe, Eraly et Gillet 2003, p. 145)
 
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Voici donc comment en Belgique le mandat politique est devenu chasse gardée d'un cercle de citoyens qui en ont fait une véritable profession[34] − Une profession qui dans nombre de cas non négligeable sera transmise à travers les liens familiaux[35]. Car de façon générale, il est relativement facile pour une personne influente dans un parti de placer des personnes au pouvoir selon ses volontés. La façon la moins démocratique reste sans doute le recourt au système de suppléant. Pour propulser discrètement une personne au pouvoir, il est en effet efficace de la placer en tant que suppléante à un candidat susceptible de récolter beaucoup de voix, mais qui n'envisage aucunement de siéger au parlement. Ce phénomène ne fait pas exception puisque « Vingt-deux députés francophones sur les 62 que compte la Chambre siègent parce qu’ils sont suppléants. Ce phénomène touche tous les partis et toutes les circonscriptions. »[36]

Apparaîtront ensuite de nouveaux biais liés au système de distribution des sièges et aux méthodes de formation du gouvernement. Accusé d’être peu démocratiques, les biais du système ont été dénoncés, dès le début des années nonante, par un ensemble d'experts rassemblés au sein du groupe nommé Groupe Coudenberg.

« Le système électoral belge est non seulement confus, il est surtout peu démocratique. Il ne confère en effet pratiquement aucun pouvoir à l'électorat, ni dans la désignation des élus, ni dans le choix du Gouvernement qui sera mis en place après le scrutin, ni dans la politique à mettre en œuvre par ce gouvernement.
Les voix de préférence émises par les électeurs n'ont aucun impact sur la désignation des députés et des sénateurs. La loi électorale privilégie en effet de façon démesurée la place du candidat désigné sur la liste du parti : de 1919 à 1987, seuls 28 des 4.507 députés (soit 0,62 %) et 1 seul des 2.252 sénateurs (soit 0.04 %) ont été élus à une autre place que celle prévue sur la liste électorale du parti, grâce aux voix de préférence recueillies. C'est grâce à la prépondérance de la place utile sur la liste que l'oligarchie des partis peut désigner d'avance ses parlementaires. La seule incertitude de l'électeur est le nombre de sièges à pourvoir aux partis respectifs.
 
Élus de la nation belge
La constitution des listes électorales par les partis n'a que peu de légitimité démocratique. Les polls organisés au sein des partis sont souvent réduits à une formalité dans la mesure où ils ne servent qu’à faire approuver les listes électorales établies par l'oligarchie du parti. Cette oligarchie ne peut se prévaloir d'une vraie légitimité, puisqu'elle n'est que rarement le résultat d'une élection par les membres du parti. De 1945 à 1986, pas moins de 86 des 99 présidents de partis ont été élus sans présentation de contre-candidat.
Si l'électeur n'a aucun pouvoir réel dans la désignation de ses représentants, il dispose cependant du pouvoir de déterminer la distribution des sièges à pourvoir entre les différents partis. Ce pouvoir des sièges est toutefois peu significatif dans la mesure où, en règle générale, les « vainqueurs » d'une élection sont évincés de la coalition gouvernementale qui suit le scrutin. Des études ont démontré que de 1919 à 1986 le résultat électoral n'a été déterminant que pour 7 des 55 gouvernements formés au cours de cette période.
Le système électoral belge est donc très peu démocratique dans la mesure où il ne confère aucun pouvoir réel à l'électorat. Il donne cependant aux oligarchies politiques en place une légitimation qui est plus apparente que réelle.» (Groupe Coudenberd 1991, p. 17 & 18)
«Lorsque les partis ont obtenu leur nombre de sièges, les élus de ce parti ne sont toutefois pas désignés en fonction du nombre des voix de préférence qu’ils ont recueillies. Les listes électorales respectent en effet l’ordre pré-établi de ces listes. C'est ce report de voix qui rend les élections peu démocratiques puisque ce système donne priorité à la place sur la liste électorale et non pas au nombre de votes de préférence obtenus par tel ou tel candidat » (Groupe Coudenberd 1991, p. 88)

Des électeurs impuissants, des élus illégitimes et non représentatifs, voici donc le résultat du système électoral belge. Dans tout ceci on ne voit plus rien de démocratique. Et pour cause, ce système a été mis en place au temps des révolutions par une bourgeoisie désireuse de garder ses avantages.

« Le gouvernement représentatif a été institué avec la claire conscience que les représentants élus seraient et devaient êtres des citoyens distingués, socialement distincts de ceux qui les élisaient. » (Manin 1995, p. 125)

Comme le souligne très bien David Van Reybrouck les citoyens belges sont pris en otages d'une situation paradoxale où « Nous méprisons les élus, mais nous vénérons les élections. » (Van Reybrouck 2013, p. 52) ce à quoi Alain Eraly réplique : « Croire que l’on va résoudre le problème de la gouvernance politique en modifiant la loi électorale, c’est tomber dans une forme de pensée magique » (Eraly 2002, p. 83)

La démocratie ?

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La Belgique est une monarchie constitutionnelle soumise au régime parlementaire. Si la Belgique est considérée comme un État démocratique c’est par convention car nulle part dans la constitution n'apparaît le mot démocratie ni même l'adjectif démocratique.

Une démocratie se définit aussi comme étant un « Régime politique, système de gouvernement dans lequel le pouvoir est exercé par le peuple, par l’ensemble des citoyens »[37]. Or, ce que dit la constitution belge au sujet du pouvoir dans son article 33 est : « Tous les pouvoirs émanent de la Nation. Ils sont exercés de la manière établie par la constitution ». Aussi, émaner ne veut pas dire exercer, mais bien « Provenir, tirer son origine de »[38].


De plus, il vient d’être démontré dans les précédentes parties de ce travail qu'en Belgique, le pouvoir politique n’est pas exercé par le peuple comme le voudrait la définition du mot démocratie, ni même « par le Roi, la Chambre des représentants et le Sénat » comme le voudrait la constitution[39], mais bien par les personnes les plus influentes distribuées au sein des plus gros partis selon une logique propre à ceux-ci.

« Un parti est un système de clans rassemblés autour d'un discours légitime avant d’être une communauté de valeurs et d'idéaux ; c’est au chef d'un de ces clans bien plus qu'au parti lui-même qu’il importe de marquer sa soumission et sa fidélité. La politique reste profondément féodale. » (Eraly 2002, p. 64)

Dans la pratique, l’État Belge ne semble donc pas faire exception à la loi d'airain de l'oligarchie. Depuis plusieurs décennies déjà, on parle en Belgique de cette forme particulière d'oligarchie intitulée particratie.

« Qui dit organisation dit tendance à l’oligarchie. Dans chaque organisation, qu’il s’agisse d’un parti, d’une union de métier, etc., le penchant aristocratique se manifeste d’une façon très prononcée. Le mécanisme de l’organisation, en même temps qu’il donne à celle-ci une structure solide, provoque dans la masse organisée de graves changements. Il intervertit complètement les positions respectives des chefs et de la masse. L’organisation a pour effet de diviser tout parti ou tout syndicat professionnel en une minorité dirigeante et une majorité dirigée » (Michels 1914, p. 23 & 24)
« Tout homme comme toute institution qui dispose d'un pouvoir a tendance à en abuser si des limites ne sont pas fixées de l’extérieur ou si un code déontologique n’est pas accepté de l'intérieur. Or les partis belges n'ont ni limites légales ni code de conduite contraignant. Ils sont régis par des statuts et des organes internes, mais leur mode de fonctionnement échappe à tout contrôle. » (Destexhe, Eraly et Gillet 2003, p. 110)
«La démocratie parlementaire a cédé le pas à une forme de particratie électorale. Ce ne sont pas les partis qui ont outrepassé leurs pouvoirs, mais ce sont les institutions au sein desquelles ils fonctionnent qui sont devenues désuètes. Le fonctionnement des institutions repose encore sur des principes et sur des méthodes conçues en 1831, lorsque les partis étaient inexistants. » (Groupe Coudenberg 1991, p. 111)

Ainsi, dans une Belgique en pleine crise identitaire, les dimensions atteintes par la particratie ne réconfortent en rien sur l'avenir démocratique du pays.

 
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« Il semble incertain que l’on puisse s’attendre à une hausse de la qualité du débat démocratique du côté des entités fédérées. La commission interparlementaire francophone dite “4X4” pousse la logique du secret à un point tel qu’un regard extérieur peine à rendre compte de sa composition, de son objet et de l’avancement de ses travaux. Cette logique du secret, qui confine à la paranoïa, est bien attestée par le fait que « l’ensemble des documents ayant servi de brouillon aux travaux de la commission ont été soigneusement détruits»[40]. Dans ce contexte, s’éloigne la question de savoir si les gouvernants consultent les gouvernés dans les débats qu’ils tiennent, et sur les décisions qu’ils adoptent à propos de leur avenir commun. Tout semble en effet mis en œuvre pour que les gouvernés en soient écartés. » (Bourgaux 2013)

Tenus à l'écart la gouvernance politique, les gouvernés, jusqu'à ce jour résignés, continuent donc à assister au spectacle médiatique offert par la scène politique.

« Les faits sont là : la scène politique tient d'une arène plus que d'une agora, les pugilats y sont plus fréquents que les débats d'idées, les mots servent à impressionner plus qu’à faire réfléchir, le cynisme et la dureté valent comme signes d'appartenance. Les jeux sont rationnels en surface : guidés par l'opportunisme et le calcul d'intérêt. Et irrationnels en profondeur : dominés par les passions et les enjeux symboliques. En agissant comme s'ils prenaient à la lettre le modèle sociologique de l’acteur stratège ou la théorie des jeux chère aux économistes, les politiciens ne cessent, paradoxalement, de souligner les limites de ces conceptions. » (Eraly 2002, p. 7)
« En politique on travaille vraiment loin de l'optimum ! Les bilans inlassablement dressés par les hommes politiques ont le défaut de ne comporter qu'une colonne : celle des réalisations. Mais s'avise-t-on de ce qu’il serait possible de faire en plus, de faire en mieux, de faire en plus rapide dans des conditions d'efficience politique et administrative ? Il me semble que, sans forcer le trait, on peut parler en Belgique d'une crise de la gouvernance publique, [...] » (Eraly 2002, p. 341)

Sortir de la crise de la gouvernance

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Une démocratie enrayée (Perin 1958) ... Il y a cinquante ans déjà, François Perin faisait le constat d'une crise de la gouvernance publique au sein de la démocratie Belge. Aujourd’hui encore, les différents chapitre abordés ci-dessus dans ce travail nous démontre que, l'élitisme − pour ne pas dire l'arrivisme − créé par les mécanismes électoraux et l'adversité entretenue par le fonctionnement par partis continue d'enrayer l'action politique belge. Alors qu'une coopération solidaire entre citoyens responsables pourrait profiter à tous, le champs politique belge se résume à une guerre perpétuelle entre partis politiques. Les batailles en sont les élections desquelles sortent vainqueurs les élus et sortiront perdants le reste de la population. Quand aux victimes elle se constituent de l’ensemble des électeurs privés d'initiative et de participation politiques jusqu'aux prochaines élections. Dans un tel contexte, l’émancipation citoyenne apparaît tel un espoir de changement. En Belgique comme dans le reste du monde, les choses bouges, les citoyens s'organisent entre eux en dehors du concourt et du contrôle des élus. Des expériences de gouvernance alternatives ont déjà vu le jour, les consciences se réveilles ...


« Il est fascinant de voir que de nombreux acteurs sont à la recherche d’un tel enrichissement de la démocratie, de l’Europe à l’Amérique latine en passant par la Chine. Bien sûr, la politique ne peut tout résoudre et les défis économiques, sociaux ou écologiques requièrent des réponses globales. Mais elle peut y contribuer. Une telle évolution ne peut venir seulement d’en haut et ne pourra se passer des mobilisations citoyennes. Même s’il s’agit d’une expérience qui avait des limites et qui n’a pas débouché jusque-là sur des transformations institutionnelles, le G 1000 me semble dans ce contexte un vrai signe d’espoir. »[41]
« Deux études récentes de Didier Caluwaerts, Kris Deschouwer et Min Reuchamps, arrivent à des conclusions différentes. La démocratie délibérative semble fonctionner même dans un pays aussi divisé que la Belgique. Plus encore, la délibération citoyenne peut même renforcer la démocratie.
Sur base d'une étude expérimentale, les auteurs ont conclu que les citoyens ordinaires, plus que les élites politiques, sont à même de parler de façon ouverte et constructive ainsi que de prendre des décisions sur des thèmes importants, comme la réforme de l'État et l'immigration. En outre, il semble que la délibération entre des citoyens aux visions de la société diamétralement opposées conduit à plus de respect et d'appréciation des différences d'opinion. »[42]

En Belgique, une proposition concrète a aussi été proposée récemment par David Van Reybrouck dans son livre intitulé Contre les élections (2014).

 
Schéma de la Démocratie Ouverte
« Il serait intéressant d'appliquer pour la première fois le modèle bi-représentatif en Belgique. Aucun autre pays au sein de l'Union européenne n'a présenté des symptômes aussi aigus du syndrome de fatigue démocratique : après les élections de 2010, il a fallu cinq cent quarante et un jours avant qu'une équipe se constitue pour gouverner le pays, un record mondial absolu. De plus, aucun autre pays n'offre actuellement une aussi belle chance de rendre possible le tirage au sort. À partir de 2014, la Belgique n'aura plus de Sénat élu au suffrage direct. Au niveau fédéral, le pouvoir législatif repose désormais exclusivement sur la Chambre des représentants. [...] Cela ouvre la possibilité d'un tirage au sort. » (Van Reybrouck et 2014 182 & 183)

La Belgique serait-elle capable de montrer l'exemple pour servir d'inspiration au reste du monde comme elle le fit déjà lors de la publication de sa première Constitution de 1831 ? (Van Reybrouck 2014, p. 118).

Notes et références

modifier
  1. Constitution, Wikipédia, 2014-03-09. Consulté le 2014-03-12
  2. Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, Assemblée Nationale.fr, 1789. Consulté le 2014-03-10
  3. Article 19 & 20 de, « La Constitution belge », senate.be. Consulté le 2014-03-12
  4. Le financement des cultes fait actuellement débat au sein du Parlement wallon, « Projet de décret modifiant le décret du 29 avril 2004 habilitant le Gouvernement à codifier la législation relative aux pouvoirs locaux et diverses dispositions relatives à la tutelle sur les établissements chargés de la gestion du temporel des cultes reconnus. », Parlement wallon.be, 18 février 2014. Consulté le 2014-03-12
  5. Jean-François Husson, « Politique, revue de débats - Le financement public des cultes et de la laïcité », Politique .eu.org, revue de débats, 2007. Consulté le 2014-03-12
  6. Christian Laporte, « Les paradoxes de la société face aux religions en Belgique », La Libre.be, 25 juin 2013. Consulté le 2014-03-12
  7. Centre d’Action Laïque, « La séparation des églises et de l'état », Laicité.be. Consulté le 2014-03-12
  8. Service officiel d'information, « Le Parlement fédéral - La Belgique - Portail des services publics belges », Portail belgium.be/fr. Consulté le 2014-03-16
  9. Le Vif, « "Les valeurs du PS sont une chose, son fonctionnement en est une autre" », LeVif.be, 22 mars 2014. Consulté le 2014-03-23
  10. L'absentéisme parlementaire sera sanctionné, 7 sur 7.be, 18 décembre 2008. Consulté le 2014-03-18
  11. Le CRISP, « Vocabulaire politique : absentéisme politique », vocabulairepolitique.be. Consulté le 2014-03-18
  12. Luigi Mendola, « Le statut des mandataires communaux: La limitation des rétributions, la déclaration de la liste des activités relevant de la sphère publique et la déclaration annuelle de l’ensemble des activités publiques et privées des mandataires locaux », Union des Villes et des Communes.be. Consulté le 2014-03-10
  13. Indemnités de départ: un parlementaire touche jusqu'à 250 000 euros, RTBF Info.be, 30 janvier 2014. Consulté le 2014-03-10
  14. Dominique Soenens, « Que coûtent nos parlementaires et sénateurs ? », Référence.be, 12 novembre 2010. Consulté le 2014-03-20
  15. V.R., « Le salaire brut des ministres belges parmi les plus élevés », La Libre.be, 18 mai 2012. Consulté le 2014-03-21
  16. Article 10 de, « La Constitution belge », senate.be. Consulté le 2014-03-12
  17. Définition trouvée sur le site du CSJ
  18. Jan Nolf, « Dépolitiser la justice: l’illusion suprême », LeVif.be, 13 septembre 2012. Consulté le 2014-03-30
  19. Une présentation sommaire de la réforme est disponible sur cette page du site justice.belgique.be et les informations plus détaillées sont accessibles sur cette copie du moniteur belge.
  20. Conseil de déontologie journalistique, « Code de déontologie journalistique », CDJ.be. Consulté le 2014-03-20
  21. Philippe Vandenbergh, « «Le magistrat a un devoir d'ingratitude» », La libre.be, 31 janvier 2005. Consulté le 2014-03-23
  22. G.Ga., « Olivier Maroy déjà de retour dans "Mise au Point" », 14 mars 2014. Consulté le 2014-03-23
  23. Composition du bureau, Conseil supérieur de l'audiovisuel. Consulté le 2014-03-20
  24. La politisation du CSA n’est pas un phénomène propre à la Belgique : Le CSA «politisé», libération.fr, 14 mai 2004. Consulté le 2014-03-20
  25. Propos de Ingrid Deltenre recueillis par l'agence Belga, « Télévisions publiques: trop d'économies et de politisation », RTBF Info, 21 avril 2010. Consulté le 2014-03-20
  26. Pierre Havaux, « Argent des partis : une mine d’or », Le Vif.be, 04 avril 2013. Consulté le 2014-03-21
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Bibliographie

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