Introduction à l'élasticité/Déformations
Introduction
modifierLa cinématique est globalement l'étude d'un mouvement indépendamment de ses causes, et fournit ainsi essentiellement des outils descriptifs. Il s'agit donc de pouvoir définir et décrire un solide et les déformations qu’il peut subir.
Ce chapitre s'adresse avant tout aux lecteurs qui ne sont pas familiers avec la mécanique des milieux continus (mécanique des fluides…).
Concepts et définitions
modifierIl faut tout d’abord introduire un certain nombre de notions[1] adaptées à la description des milieux continus. On peut noter que la à plupart d'entre elles ne sont pas spécifiques à l'élasticité, ni même d'ailleurs aux solides, et sont tout à fait générales.
Solides
modifierOn appelle solide, et on note « B », un ensemble de points (distincts) de l'espace.
Lorsque les distances d'un point du solide à tous les autres restent constantes, il s'agit d'un solide indéformable, sinon, il s'agit d'un solide déformable.
Avec cette définition, un liquide ou un gaz sont des « solides » (déformables) ! |
Éléments mésoscopiques
modifierContrairement aux solides rigides, les corps continus ne sont pas décrits par un seul jeu de coordonnées. Au lieu de cela, on considère un élément dit mésoscopique, c'est-à-dire :
- suffisamment petit devant les dimensions de l’objet pour être considéré comme infinitésimal de ce point de vue, assimilable à un point ;
- suffisamment large devant les constituants élémentaires pour ne pas trahir l'aspect « continu » du modèle.
Dans l'étude d'un barreau de fer, une telle échelle serait d'environ 0,1 mm (petit devant la taille de la barre, grand devant les atomes). Dans l'étude d'une dune de sable, elle pourrait être de 10 cm.
Chacun de ces éléments mésoscopiques peut être repéré : on lui associe une position (x), une vitesse… C'est le déplacement de ces éléments et leurs interactions qui vont nous intéresser dans l'étude physique du problème.
Par abus de langage, on parlera d'un « point du solide » au lieu de l'élément mésoscopique qui contient ce point.
Déformations
modifierOn appelle configuration d'un solide, et on note ?, l’ensemble des positions des points constituant ce solide, on parle aussi de placement.[2]
On appelle champ de déformation le champ qui donne la relation entre deux configurations, parfois notée .
Pour un solide continu, une déformation peut être vue comme une application continue d'une configuration à l'autre, bijective, de sorte qu'on puisse « revenir » à la configuration initiale[3] :
- (x est la nouvelle position, X est l'ancienne[4])
Il est à noter que est une application à valeurs vectorielles.
Le gradient de déformation, généralement noté , est la quantité définie par :
Cette quantité est un tenseur, contrairement au gradient « usuel » d'une application à valeurs réelles, qui lui est un vecteur. |
On peut expliciter ce gradient indice par indice (avec des produits tensoriels):
Cette expression est toujours valable.
Dans le cas particulier des coordonnées cartésiennes, cette expression s'écrit encore :
Dans le cas, également courant, d'un problème en coordonnées cylindriques, cette dernière expression n'est plus valable ! |
Déplacements
modifierMême lorsqu'on laisse un objet intouché, le gradient des déformations n’est pas nul (il vaut, dans ce cas, l'identité). On souhaiterait définir une quantité équivalente, mais qui soit nulle lorsqu'un solide n’est pas déformé : cela permettra notamment d'effectuer des développements limités pour des configurations peu différentes de la configuration de départ.
On appelle champ de déplacement, et on note , le champ vectoriel défini par, en tout point X de la configuration de départ :
On appelle gradient de déplacement le gradient du déplacement, c'est-à-dire :
.
Développons cette expression :
Ce qu'on écrit le plus souvent :
Tenseur de Green-Lagrange
modifierNous avons vu comment mettre en équations les déformations subies par un solide. Nous allons construire un objet, le tenseur de Green-Lagrange, dont les propriétés permettent d'accéder à des informations élémentaires sur la déformation, tout en la décrivant.
Définition
modifierLe tenseur de Green-Lagrange[5], noté , est le tenseur défini par :
Ce tenseur n'apporte rien mathématiquement parlant par rapport à F, mais sa structure est beaucoup plus élégante et donne accès à un certain nombre d'informations.
Propriétés de la déformation
modifierSi e est un vecteur unitaire, l'allongement relatif selon sa direction est donné par :
où l0 est la distance entre deux points avant déformation et l la distance entre ces mêmes deux points après déformation. Ce résultat est rigoureux.
TODO : développer le lien entre E (e1) · e2 et l'angle θ1,2
Variations de volume
modifier- Ce paragraphe illustre une utilisation du tenseur de Green-Lagrange et peut être sauté en première lecture.
La variation de volume due à une déformation finie est donnée par :
Lors d'une déformation infinitésimale, la variation de volume est donnée par :
Tenseur infinitésimal
modifierDéfinition
modifierDans le cas de petites déformations — ce qui est le cadre de l'élasticité — nous allons pouvoir simplifier l’expression du tenseur de Green-Lagrange. Dans toutes les applications pratiques, c’est à cette expression simplifiée que l’on fera référence.
Pour de petites déformations, E prend la forme suivante, notée ε :
Pour démontrer ce résultat, on fait l'hypothèse que les termes d'ordre deux et plus en gradient de u sont négligeables :
Tenseur de rotation
modifier- Ce paragraphe peut être sauté en première lecture
avec W le tenseur rotation infinitésimal :
Propriétés
modifier- Par construction, ε est symétrique.
- Par construction, W est anti-symétrique.
- Si e est un vecteur unitaire, l'allongement relatif selon sa direction est donné par :
- Ce résultat est approximatif, et valable uniquement pour de petites déformations.
TODO : développer le lien entre ε (e1) · e2 et l'angle θ1,2
Remarques et références
modifier- ↑ Les concepts et définitions qui suivent sont basées sur les travaux de Gurtin (1972) et ceux de Truesdell et Noll (1992).
- ↑ On peut voir les configurations comme des applications (bijectives) qui à chaque point associent une région de l'espace : des homéomorphismes. On distingue parfois une configuration de référence, notée et une configuration courante .
- ↑ Pour qu’il existe une application inverse, il suffit que le jacobien de la déformation soit non nul.
- ↑ On a préféré la notation X à x0 pour des raisons d'encombrement, notamment pour les indices.
- ↑ Ce tenseur porte de nombreux autres noms : tenseur de déformation fini, tenseur de Green-St Venant, tenseur de contrainte lagrangien…