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Dans ce chapitre, on va démontrer trois théorèmes sur les degrés des
-caractères irréductibles d'un groupe fini.
La numérotation des énoncés fait suite à celle du chapitre précédent.
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En raison de limitations techniques, la typographie souhaitable du titre, «
Théorie des groupes : Caractères complexes des groupes finis, 2 : théorèmes sur les degrés
Théorie des groupes/Caractères complexes des groupes finis, 2 : théorèmes sur les degrés », n'a pu être restituée correctement ci-dessus.
Rappelons (chapitre Représentations complexes des groupes finis, 1, Exemples de représentations) que si G est un groupe fini, la
-représentation régulière gauche de G est la
-représentation vectorielle L de G dans le
- espace vectoriel
définie de la façon suivante :
- pour tout g dans G, L(g) est l'automorphisme
du
- espace vectoriel ![{\displaystyle \mathbb {C} [G].}](https://wikimedia.org/api/rest_v1/media/math/render/svg/ccbd501df0fe67f8c21392b50f9709da854cb472)
Le caractère de la représentation L est appelé le caractère régulier de G.
Début d’un théorème
Lemme 32
Soit G un groupe fini. Désignons par L la

-représentation régulière gauche de G et par

le caractère de cette représentation (caractère régulier de G). Pour tout
g dans G,

Fin du théorème
Démonstration. Notons n l'ordre de G et choisissons une numérotation
des éléments de G. Donc
est une base (numérotée) du
-espace ![{\displaystyle \mathbb {C} [G].}](https://wikimedia.org/api/rest_v1/media/math/render/svg/ccbd501df0fe67f8c21392b50f9709da854cb472)
La i-ième composante d'un élément h de G dans cette base est 1 si
et 0 sinon.
Donc pour tout élément g de G et tout i dans {1, ... , n}, la i-ième composant de
, autrement dit de
, dans la base
est égale à 1 si g = 1 et à 0 dans le cas contraire. Donc la trace de l'endomorphisme L(g) est égale à n si g = 1 et à 0 dans le cas contraire. Puisque
est égal par définition à Tr(L(g)), l'énoncé en résulte.
Début d’un théorème
Lemme 33
Soit G un groupe fini, soient

ses différents

-caractères irréductibles, soit L la

-représentation régulière gauche de G, soit

le caractère de cette représentation (caractère régulier de G). Alors

Autrement dit, chaque

-caractère irréductible

de G est un constituant de

, avec pour multiplicité le degré

de

.
Fin du théorème
Démonstration. D'après le théorème 20 (chapitre Caractères complexes des groupes finis, 1 : relations d'orthogonalité),
- (1)

D'autre part, par définition de
,
- (2)

Il résulte du lemme 32 que dans la somme du second membre, tous les termes correspondant aux indices g distincts de 1 sont nuls et que le terme correspondant à l'indice g = 1 vaut 
Donc la relation (2) peut s'écrire

En portant ceci dans (1), on trouve

ce qui prouve l'énoncé.
Voici une autre démonstration. D'après la seconde relation d'orthogonalité (chapitre Caractères complexes des groupes finis, 1 : relations d'orthogonalité, théorème 31), appliquée à la classe de conjugaison d'un élément g de G et à la classe de conjugaison {1},

Puisque le degré
de
est un nombre réel, cela peut s'écrire

D'après le lemme 32, le second membre égale
, donc, pour tout g dans G,

ce qui prouve l'énoncé.
Début d’un théorème
Théorème 34
Soit G un groupe fini, soient

ses différents

-caractères irréductibles, soient

les degrés respectifs de
Alors

Fin du théorème
Démonstration. Notons
le caractère régulier de G. D'après le lemme 32,

D'après le lemme 33, le premier membre égale

donc

Comme
l'énoncé en résulte.
On pourrait aussi appliquer la seconde relation d'orthogonalité (chapitre Caractères complexes des groupes finis, 1 : relations d'orthogonalité, théorème 31) à « deux » classes de conjugaison égales à {1}.
Début d’un théorème
Théorème 35
Soit G un groupe fini. G est abélien si et seulement si toute

-représentation irréductible de G est de degré 1 (autrement dit si tout

-caractère irréductible de G est de degré 1).
Fin du théorème
Démonstration. Nous savons déjà que si G est abélien, alors toute
-représentation irréductible de G est de degré 1 (voir chapitre Représentations complexes des groupes finis, 2, théorème 3).
Réciproquement, supposons que toute
-représentation irréductible de G est de degré 1 et prouvons que G est abélien. L'hypothèserevient à dire que tout
-caractère irréductible de G est de degré 1. D'après le théorème 34, nous avons donc

où k désigne le nombre des
-caractères irréductibles de G. D'après le théorème 29 (chapitre Caractères complexes des groupes finis, 1 : relations d'orthogonalité), ce nombre est égal au nombre des classes de conjugaison de G. Donc le nombre des classes de conjugaison de G est égal à l'ordre de G, ce qui n'est possible que si chaque classe de conjugaison est réduite à un élément, autrement dit si le groupe G est abélien.
Rappelons que si
est un caractère d'un groupe fini G, si K est une classe de conjugaison d'éléments de G, on a convenu de désigner par
la valeur prise par
en tout élément de K.
Début d’un théorème
Lemme 36
Soient G un groupe fini,

un

-caractère irréductible de G, de degré

.
- Pour toute fonction centrale
sur G à valeurs entières,
est un entier algébrique.
- En particulier, pour toute classe de conjugaison K d'éléments de G,
est un entier algébrique.
Fin du théorème
Démonstration.
Choisissons une
-représentation vectorielle T de G admettant
pour caractère et notons V le
-espace vectoriel de cette représentation (donc T est irréductible et
).
Pour toute fonction
, considérons l'endomorphisme suivant de V :

ainsi que le nombre complexe :
.
D'après le chapitre précédent (lemme 27) :
- (1) si
est centrale alors
est l'homothétie de rapport 
et il s'agit de prouver que si de plus
est à valeurs entières alors ce rapport est un entier algébrique.
Remarquons d'abord que
- (2) le
-module des fonctions centrales à valeurs entières est stable par la multiplication de l'anneau
.
En effet :
- dans cet anneau, le produit
de deux fonctions
s'exprime par
donc si les deux fonctions sont à valeurs entières alors leur produit aussi ;
- si les deux fonctions sont centrales, c'est-à-dire appartiennent au centre de l'anneau, alors leur produit aussi.
En considérant le morphisme d'anneaux
, on déduit de (2) que :
- (3) le sous-
-module
de
est stable par composition.
En appliquant les homothéties à n'importe quel vecteur non nul de V, on déduit de (1) et (3) que
- le sous-
-module
de
est stable par produit.
C'est donc un sous-pseudo-anneau de
Notons, bien que ce ne soit pas essentiel, que c'est même un sous-anneau de
En effet, il comprend 1, comme rapport de l'homothétie associée à la fonction
(la fonction caractéristique du singleton {1}) :
= T(1) = idV.
Comme ce sous-anneau est un
-module de type fini (engendré par les
où K parcourt l'ensemble des classes de conjugaison d'éléments de G), ses éléments sont des entiers algébriques (voir chapitre Caractères complexes des groupes finis, 1, rappels sur les nombres algébriques, point 5°), ce qu'il fallait démontrer.
Début d’un théorème
Théorème 37
Soit G un groupe fini. Les degrés des

-caractères irréductibles de G divisent l'ordre de G.
Fin du théorème
Démonstration. Fixons un
-caractère irréductible
de G et notons d son degré.
Pour toute classe de conjugaison K d'éléments de G, posons
.
Ainsi,

donc en sommant sur les classes de conjugaison d'éléments de G,

D'après le lemme 36, les nombres
sont des entiers algébriques et d'après le corollaire 10 (chapitre Caractères complexes des groupes finis, 1), les nombres
sont eux aussi des entiers algébriques.
Comme un produit et une somme d'entiers algébriques sont des entiers algébriques (chapitre Caractères complexes des groupes finis, 1, rappels sur les nombres algébriques, point 7°), il résulte de (1) que
est un entier algébrique. Puisqu'il est rationnel, c'est donc un entier rationnel (chapitre Caractères complexes des groupes finis, 1, rappels sur les nombres algébriques, point 8°) et, bien sûr, un nombre naturel.
Dans le chapitre suivant, on va montrer comment la théorie des caractères permet de prouver le théorème p-q de Burnside (ou théorème paqb de Burnside), selon lequel tout groupe fini dont l'ordre compte au plus deux facteurs premiers distincts est résoluble. Puis, dans un chapitre indépendant du chapitre sur le théorème p-q de Burnside, on déterminera les
-caractères irréductibles de quelques groupes finis. Le lecteur pressé de connaître « effectivement » les
-caractères irréductibles de quelques groupes finis peut omettre le chapitre sur le théorème p-q de Burnside.