Espace vectoriel/Définitions
Un espace vectoriel est une structure stable par addition de vecteurs et par multiplication par un scalaire. Autrement dit, on peut ajouter deux éléments d’un tel espace, ou les multiplier par un nombre, le résultat appartiendra encore à l'espace de départ.
Espace vectoriel
modifierDéfinition
modifierSoient un ensemble E non vide et un corps (généralement ou ). Son neutre pour + sera et son neutre pour sera noté .
On note l’ensemble E muni d’une loi interne « + » (c'est-à-dire une opération entre les éléments de ) et d’une loi externe « » (c'est-à-dire une opération entre un élément de E et un élément de ).
On dit que est un K-espace vectoriel à gauche lorsque :
- forme un groupe abélien, dont l'élément neutre, noté , est appelé le vecteur nul ;
- (la loi est distributive par rapport à la loi +) ;
- ;
- ;
- .
On dit que est un K-espace vectoriel à droite si les quatre premières des cinq conditions ci-dessus sont satisfaites et que
- .
Les éléments de s'appellent des vecteurs et les éléments de des scalaires[1].
Remarques.
- Pour un corps K, les K-espace vectoriel à gauche (resp. à droite) sont exactement les K-modules à gauche (resp. à droite).
- Si le corps K est commutatif (cas le plus important), il n'y a pas lieu de distinguer entre K-espaces vectoriels à gauche et K-espaces vectoriels à droite. On dit alors simplement « K-espace vectoriel ».
- Le premier état du présent chapitre ne faisait pas la distinction entre K-espaces vectoriels à gauche et K-espaces vectoriels à droite. Avant une révision complète, il sera donc bon de toujours supposer que le corps K est commutatif.
Exemples
modifierPour tout corps , les structures suivantes sont des -espaces vectoriels.
- .
- .
- , l’ensemble des suites à valeurs dans , muni de l'addition « + » des suites et de « ∙ » la multiplication par un scalaire (et non la multiplication terme à terme de deux suites !), est un espace vectoriel..
- Plus généralement, , l’ensemble des fonctions d'un ensemble dans , où « + » et « ∙ » représentent respectivement l'addition des fonctions et la multiplication par un scalaire (et non la fonction produit !).
- L'ensemble des solutions d’une équation différentielle linéaire homogène (pour ).
En particulier, . Nous reviendrons sur ce genre de manipulation plus loin.
Dorénavant, est un -espace vectoriel et est une famille d'éléments de .
Quelques propriétés
modifierSoit .
- : et en ajoutant l'opposé de dans chaque membre on trouve .
- : et en ajoutant l'opposé de dans chaque membre on trouve .
- Réciproquement, : on suppose et .
- .
- Par ailleurs, .
- Donc .
-
- Donc .
Conventions implicites de l'algèbre linéaire
modifierEn algèbre linéaire, on a l'habitude de noter :
- avec des lettres romaines les vecteurs : x, y…
- avec ces lettres grecques les scalaires : λ, μ…
Ceci permet de s'affranchir facilement de la notation fléchée , volontiers utilisée en « géométrie classique » pour désigner les vecteurs. Cette notation deviendrait en effet extrêmement lourde en algèbre linéaire.
Très souvent, pour alléger les notations, on omet le symbole pour alléger les notations multiplicatives. Le signe de multiplication devient alors implicite.
Enfin, lorsqu'on étudie un ensemble en tant qu'espace vectoriel, le nom des lois est connu et est souvent omis. Par convention, les lois interne et externe seront notées respectivement + et .
Combinaison linéaire
modifierOn note l'ensemble des familles de scalaires telles que tous les sont nuls sauf un nombre fini d'entre eux.
On appelle combinaison linéaire d'éléments de la famille de vecteurs tout vecteur v de tel qu’il existe vérifiant .
On dit qu’il existe une relation linéaire dans si 0 est une combinaison linéaire d'éléments de à coefficients non tous nuls.
Sous-espace vectoriel
modifierDéfinitions
modifierSoit une partie de . On dit que est un sous-espace vectoriel (sev) de lorsque :
- ;
- ;
- .
Si est un sous-espace vectoriel de , alors .
- En effet, , donc .
- D'après le deuxième point, .
- D'après le troisième point, , soit .
Pour montrer qu'un ensemble est un sous-espace vectoriel de , on montre :
- .
- L'élément nul est souvent facile à manipuler : il est donc en règle générale très facile de montrer qu’il appartient à F même pour des ensembles compliqués. Si , on a alors l’assurance que .
- .
- Cette assertion est équivalente aux deux derniers points de la définition réunis. Montrer directement cette appartenance permet de concentrer les deux points en une seule preuve.
- On peut donc résumer la définition du sous-espace vectoriel à un ensemble non vide (contenant le vecteur nul) et stable par combinaison linéaire.
, ensemble des fonctions continues de l'intervalle dans . On pose l’ensemble des fonctions de qui s'annulent en .
est un sous-espace vectoriel de car :
- (car la fonction nulle sur l'intervalle est nulle en ) ;
- soit .
- donc .
En général, pour montrer qu'un espace est un espace vectoriel, on montre que c’est un sous-espace vectoriel d’un espace vectoriel connu. Cela permet de vérifier un nombre de points beaucoup plus restreints pour démontrer qu'un ensemble admet une structure d'espace vectoriel.
On sait que l’ensemble des fonctions de dans est un -espace vectoriel lorsqu’il est muni :
- de la loi + d'addition des fonctions ;
- de la loi ∙ de multiplication d’une fonction par un nombre réel.
On pose l’ensemble des fonctions impaires de dans . .
Montrer que est un -espace vectoriel.
- Soit
.
- Donc .
Donc est un sous-espace vectoriel de , donc est un -espace vectoriel.
Sous-espace vectoriel engendré par une partie
modifierLa structure d'espace vectoriel est la structure de base de l'algèbre dite « linéaire », c'est-à-dire de l'algèbre mettant en jeu des combinaisons linéaires d'objets mathématiques, ainsi que des ensembles stables par ces combinaisons linéaires.
On s'intéresse maintenant à la conservation de la structure d'espace vectoriel lorsqu'on choisit une famille de vecteurs d’un espace vectoriel . En particulier, comment construire le « plus petit sous-espace vectoriel de » contenant tous les ?
Le sous-espace vectoriel de engendré par la famille , noté , est l’ensemble des combinaisons linéaires d'éléments de : .
L' ensemble est, au sens de l'inclusion, le plus petit sous-espace vectoriel de contenant tous les .
Il faut montrer qu’il s'agit bien du plus petit sous-espace vectoriel de contenant tous les au sens de l'inclusion, c'est-à-dire que si est un sev de contenant la famille , alors . est un sev, donc il est stable par combinaison linéaire : comme il contient les , il contient donc l’ensemble de toutes leurs combinaisons linéaires, qui est précisément .
Soient un espace vectoriel sur et .
On appelle sous-espace vectoriel engendré par , et l'on note [2] l’ensemble de toutes les combinaisons linéaires d'éléments de :
.
Il s'agit, au sens de l'inclusion, du plus petit espace vectoriel contenant .
Somme de sous-espaces vectoriels
modifierSoient et deux sous-espaces vectoriels de . On définit la somme de et comme l’ensemble :
- .
Remarque : .
Intersection de sous-espaces vectoriels
modifierSoient I un ensemble et une famille de sous-espaces vectoriels de .
- donc (et au passage )
Soit .
- est un sous-espace vectoriel de et donc .
- Donc .
Donc est un sous-espace vectoriel de .
Sous-espaces vectoriels supplémentaires
modifierDeux sous-espaces vectoriels et de sont dits supplémentaires si et , autrement dit : si
On note alors .
, espace vectoriel des fonctions de dans .
On note :
- , sous-espace vectoriel des fonctions paires de
- , sous-espace vectoriel des fonctions impaires de
Démontrer que .
- Soit :
- Donc .
- Soit :
- car ;
- car ;
- donc , c'est-à-dire .
- Donc .
Donc .
Produit d'espaces vectoriels
modifierSoient et deux -espaces vectoriels. On définit l'espace produit de et comme l'ensemble produit , muni des deux lois suivantes, qui en font un -espace vectoriel :
- .
Remarques
modifier