Matrice/Inverse
Nous avons défini le produit matriciel et constaté qu'il n'était ni commutatif, ni simplifiable à gauche ou à droite. Comme annoncé alors, nous allons voir dans ce chapitre que cependant, certaines matrices carrées sont simplifiables (des deux côtés) et même inversibles, sous réserve que l'anneau K soit un corps commutatif (comme , ou ), ce que nous supposerons désormais.
Exemple motivant
modifierSoit une équation simple impliquant des nombres réels :
- .
On suppose non nul. Alors la solution existe, est unique, et il s'agit de :
- .
On cherche à trouver quelque chose d'analogue pour les matrices, qui permettrait de résoudre les équations matricielles de même type :
- .
Définition
modifierSoit une matrice carrée de taille n × n. Lorsqu'elle existe, on appelle inverse de , et l'on note , une matrice telle que : . Cette matrice inverse (nécessairement de taille n × n) est alors unique, et est dite inversible.
- Si , la matrice scalaire est inversible : .
- Plus généralement, une matrice diagonale est inversible si et seulement si tous ses termes diagonaux sont non nuls, et son inverse est alors .
Groupe des matrices inversibles
modifierPuisque est un anneau, on a immédiatement :
Les matrices inversibles de taille n × n à coefficients dans K forment un groupe pour la multiplication, appelé groupe général linéaire ou groupe linéaire et noté
- .
Par conséquent :
- si est inversible alors l'est aussi, et
- ;
- si alors le produit est inversible, et l'inverse du produit est le produit des inverses, dans l'ordre contraire :
- .
Condition nécessaire et suffisante d'inversibilité
modifierNon-nullité du déterminant
modifierSi est inversible alors son déterminant est évidemment non nul, puisque
- .
Réciproquement, si alors la formule de Laplace (cf. chapitre précédent) prouve que est inversible, et fournit une expression de son inverse :
Cette condition nécessaire d'inversibilité n'est suffisante que lorsque K est un corps commutatif. Si K est seulement un anneau commutatif, la condition est à remplacer par : est inversible dans K. Par exemple dans , les matrices inversibles ne sont pas toutes les matrices de déterminant non nul, mais seulement celles dont le déterminant est égal à .
Cette caractérisation des matrices inversibles permet de démontrer que dans et dans :
- le sous-ensemble des matrices inversibles est dense (cf. Espaces vectoriels normés/Exercices/Dimension finie#Exercice 2-2 : densité de GLn) ;
- son complémentaire est négligeable, c'est-à-dire de mesure de Lebesgue nulle[1],[2].
Conditions équivalentes
modifierSoit . Les propositions suivantes (dans lesquelles on identifie Mn,1(K) à Kn) sont équivalentes :
- A est inversible ;
- l'application linéaire est bijective (ou, ce qui est équivalent : injective, ou encore : surjective) ;
- A est inversible à gauche, c'est-à-dire qu'il existe une matrice B telle que BA = In ;
- A est inversible à droite, c'est-à-dire qu'il existe une matrice B telle que AB = In ;
- les colonnes de A forment une base de Kn ;
- la transposée de A est inversible (et dans ce cas, on a ).
: la proposition 3 équivaut à l'injectivité de l'application et la proposition 4 à sa surjectivité. Les deux sont par conséquent équivalentes entre elles, donc équivalentes à la proposition 1.
: la proposition 4 équivaut à la surjectivité de , dont l'image est engendrée par les n colonnes de A.
: résulte de la formule sur la transposée d'un produit.
La deuxième caractérisation se reformule en termes de système d'équations linéaires. Pour l'application :
- l'injectivité équivaut à :
- pour tout b dans Kn, le système AX = b a au plus une solution, ou encore à
- le système homogène AX = 0 a pour seule solution X = 0 (c'est-à-dire le noyau de cette application est nul) ;
- la surjectivité équivaut à :
- pour tout b dans Kn, le système AX = b a au moins une solution .
Calcul de l'inverse
modifierCalculer l'inverse d'une matrice est une tâche ardue à la main dès lors qu'on aborde les matrices 3 × 3, et la difficulté croît avec la taille.
Cas des matrices 2 × 2
modifierUn cas très simple (et à mémoriser) est celui des matrices de taille 2 × 2, dont l'inverse est facile à calculer :
Cas général
modifierLe moyen le plus simple est d’utiliser la méthode dite du pivot de Gauss.
Soit la matrice A définie par :
- .
On place, à droite de cette matrice que l’on cherche à inverser, la matrice identité. On a donc :
- .
On applique alors le pivot de Gauss en ligne sur la matrice A et l'on effectue simultanément les mêmes opérations élémentaires sur la matrice I2, jusqu'à obtenir la matrice identité à la place de A. La matrice que l'on obtient alors à la place de la matrice identité est égale à A–1 :
Référence
modifier- ↑ Alexandre Bailleul, « Mesure de Mn(R)\GLn(R) », sur abailleul.perso.math.cnrs.fr.
- ↑ Boris Mityagin, « The zero set of a real analytic function », arXiv, 2015 [texte intégral].