Théorie des groupes/Sous-groupe de Frattini
Rappels sur les bases d'un espace vectoriel
modifierOn ne s'intéressera ici qu'aux espaces vectoriels sur un corps commutatif. (En évitant les corps non commutatifs, on se dispense de distinguer entre espaces vectoriels à gauche et à droite.) Par « base » d'un espace vectoriel, on entend, selon le cas, deux choses légèrement différentes.
Dans le premier sens du mot, une base d'un espace vectoriel V est une famille d'éléments de V telle que
- 1° pour chaque partie finie J de I et chaque famille de scalaires, la relation entraîne pour tout ;
- 2° pour chaque élément de V, il existe une partie finie J de I et une famille telles que
(La condition 1° exprime que la famille est libre; la condition 2° exprime que cette famille engendre V.)
Dans le second sens du mot « base », une base d'un espace vectoriel V est une partie B de V telle que
- 1° si est une famille d'index fini d'éléments de B telle que, pour tous distincts dans I, et soient distincts, alors la famille est libre, c'est-à-dire que si est une famille de scalaires telle que , alors pour tout ;
- 2° pour chaque élément de V, il existe une famille d'index fini d'éléments de B telle que
Une partie B de V est une base de V au second sens si et seulement la famille (assimilable à l'application identique de B dans lui-même) est une base de V au premier sens. Une famille d'éléments de V est une base de V au premier sens si et seulement si les deux conditions suivantes sont satisfaites :
- a) pour tous distincts dans ,
- b) l'ensemble des valeurs de la famille , autrement dit l'ensemble , est une base de V au second sens.
Nous dirons parfois qu'une base de V dans le premier sens est une famille basique de V et qu'une base de V dans le second sens est une partie basique de V.
Si est une famille basique de V et B une partie basique de V, et B ont le même cardinal (qui est aussi le cardinal de l'ensemble des valeurs de la famille ). Deux parties basiques d'un même espace vectoriel ont toujours le même cardinal. Deux familles basiques d'un même espace vectoriel ont toujours des index (ensembles d'indices) de même cardinal.
Si V est un espace vectoriel, le cardinal de toute partie basique de V (qui est aussi le cardinal de l'index de toute famille basique de V et qui est aussi le cardinal de l'ensemble des valeurs de toute famille basique de V) est appelé la dimension de V. Tout espace vectoriel a au moins une base (dans les deux sens du mot).
Sous-groupe de Frattini
modifierSoit G un groupe. Les éléments de G qui appartiennent à tout sous-groupe maximal de G forment évidemment un sous-groupe de G, qu'on appelle le sous-groupe de Frattini de G et qu'on note Frat G ou Dans le présent cours, on le notera Frat G ou Frat(G).
Si G a au moins un sous-groupe maximal, on peut parler de l'intersection des sous-groupes maximaux de G et Frat(G) est alors cette intersection. Si G n'a pas de sous-groupe maximal, Frat(G) est G tout entier.
Si G n'a pas de sous-groupe maximal, alors Frat(G) = G, comme on l'a vu. Si maintenant G a au moins un sous-groupe maximal M, alors Frat(G) est contenu dans M ; comme M, par définition d'un sous-groupe maximal, est un sous-groupe propre de G, Frat(G) est donc un sous-groupe propre de G.
Remarques.
- Un groupe fini non trivial a toujours au moins un sous-groupe maximal, par exemple un sous-groupe du plus grand ordre possible parmi les sous-groupes propres de G. (On peut dire aussi que tout ensemble ordonné fini non vide a au moins un élément maximal.) Donc le sous-groupe de Frattini d'un groupe fini G non trivial est toujours un sous-groupe propre de G.
- D'après les exercices sur le chapitre Sous-groupes monogènes, ordre d'un élément il existe des groupes infinis (par exemple le groupe additif ) qui n'ont pas de sous-groupe maximal et qui sont donc leur propre sous-groupe de Frattini.
(i) Soient G et H deux groupes isomorphes, soit un isomorphisme de G sur H. Alors
(ii) Pour tout groupe G, Frat(G) est un sous-groupe caractéristique de G.
Du fait que est un isomorphisme de G sur H, on tire facilement que les sous-groupes maximaux de H sont exactement les images par des sous-groupes maximaux de G. Il en résulte qu'un élément de H appartient à chaque sous-groupe maximal de H si et seulement si à chaque sous-groupe maximal de G, donc , ce qui démontre le point (i) de l'énoncé.
Soit un automorphisme d'un groupe G. En faisant H = G et dans le point i), nous trouvons , où peut être écrit G. Donc . Ceci étant démontré pour tout automorphisme de G, Frat(G) est donc caractéristique dans G, ce qui prouve le point ii) de l'énoncé.
Soit G un groupe cyclique d'ordre , où est un nombre premier et un nombre naturel non nul. Alors Frat(G) est égal à l'unique sous-groupe d'ordre de G. En particulier, le sous-groupe de Frattini d'un groupe (fini) d'ordre premier est trivial (ce qu'on peut évidemment démontrer plus directement).
Puisque G est cyclique, il a un et un seul sous-groupe d'ordre pour tout diviseur naturel de . D'autre part, d'après un exercice de la série Groupes monogènes, ordre d'un élément, l'ensemble des sous-groupes de G est totalement ordonné par inclusion. Il est donc clair que G a pour unique sous-groupe maximal son (unique) sous-groupe d'ordre , ce qui démontre l'énoncé.
Soit G un groupe. Un élément de G est appelé un élément superflu de G, ou encore un non-générateur de G, si pour toute partie génératrice X de G comprenant , est elle aussi une partie génératrice de G.
Soit G un groupe, soit Y un ensemble fini d'éléments superflus de G ; alors, pour toute partie génératrice X de G contenant Y, est elle aussi une partie génératrice de G.
Démonstration facile par récurrence sur le nombre d'éléments de Y.
Soient G un groupe, H un sous-groupe de G et un élément de
i) Si l'on ordonne par inclusion l'ensemble E des sous-groupes de G contenant H et ne comprenant pas , l'ensemble ordonné E a au moins un élément maximal.
ii) Si H et engendrent G, tout élément maximal de E est un sous-groupe maximal de G.
L'ensemble E n'est pas vide, puisqu'il comprend H. La réunion de toute partie totalement ordonnée non vide de E est un élément de E (c'est un sous-groupe de G qui contient H et ne comprend pas , donc l'ensemble ordonné E est inductif donc, d'après le théorème de Zorn, E a au moins un élément maximal, ce qui prouve le point i) de l'énoncé.
Prouvons maintenant le point ii). Supposons que H et engendrent G ; soit M un ensemble maximal de l'ensemble E; il s'agit de prouver que M est un sous-groupe maximal de G.
Puisque M appartient à E, il ne comprend pas , donc
- (1) M < G.
Soit K un sous-groupe de G tel que
- (hyp. 2)
Compte tenu de (1), tout revient à prouver que
- (thèse 3)
Puisque M est un élément maximal de E, il résulte de l'hypothèse (2) que K n'appartient pas à E, donc
- (4) K ne possède pas à la fois la propriété de contenir H et de ne pas comprendre
Mais, d'après l'hypothèse (2), K contient M et M, appartenant à E, contient H. Donc K contient H, donc, d'après (4), K comprend Puisque H et sont supposés engendrer G, K est donc égal à G, ce qui prouve notre thèse (3).
Remarque. La démonstration peut évidemment se simplfier si on suppose que G est fini, ce qui est le cas le plus important dans les limites du présent chapitre.
Soit un élément superflu de G, soit M un sous-groupe maximal de G ; prouvons que appartient à M.
Par maximalité de M,
- (1) <M, x> est égal à M ou à G.
Si <M, x> était égal à G, serait une partie génératrice de G, donc, puisque est un élément superflu de G, M serait une partie génératrice de G ; puisque M est un sous-groupe de G, cela revient à dire que M serait égal à G, ce qui est faux puisque, par définition d'un sous-groupe maximal, M est un sous-groupe propre de G. Donc <M, x> n'est pas égal à G, donc, d'après (1), <M, x> = M, donc appartient à M. Nous avons ainsi prouvé, comme annoncé, que tout élément superflu de G appartient à tout sous-groupe maximal de G, ce qui revient à dire que tout élément superflu de G appartient à Frat(G).
Pour démontrer l'énoncé, il reste à prouver que tout élément de Frat(G) est un élément superflu de G. Soit donc un élément de Frat(G). Il s'agit de prouver que
- (thèse 2) est un élément superflu de G.
Supposons que, par absurde,
- (hyp. 3) ne soit pas un élément superflu de G.
Alors il existe une partie X de G telle que
- et
Il est clair que
- (4) n'appartient pas au sous-groupe <X> de G
et que
- (5) et le sous-groupe <X> de G engendrent G.
De (4), (5) et de l'énoncé 5, il résulte qu'il existe un sous-groupe maximal de G qui (contient <X> et) ne comprend pas Cela contredit l'hypothèse selon laquelle appartient à Frat(G). Donc notre hypothèse (3) est absurde, donc est un élément superflu de G, ce qui prouve notre thèse (2). Comme nous l'avons vu, cela achève la démonstration.
i) Soient G un groupe, H un sous-groupe de type fini de Frat(G) et K un sous-groupe de G tel que G = <H, K> ; alors K = G.
ii) Soient G un groupe fini, H un sous-groupe de Frat(G) et K un sous-groupe de G tel que G = <H, K> ; alors K = G.
Par hypothèse du point i), H est engendré par des éléments de Frat(G). Donc, puisque H et K engendrent G,
- (1) est une partie génératrice de G.
Puisque sont des éléments de Frat(G), ce sont des éléments superflus de G (énoncé 6), don, d'après (1) et l'énoncé 4,
- K est une partie génératrice de G.
Puisque K est un sous-groupe de G, cela revient à dire que K est égal à G, ce qui prouve le point i) de l'énoncé.
Si G est fini, Frat(G) est fini, donc tout sous-groupe de Frat(G) est engendré par des éléments en nombre fini, donc le point ii) de l'énoncé est un cas particuler du point i).
Soient G un groupe fini, H un sous-groupe normal de G et P un sous-groupe de Sylow de H. Alors
Soit un nombre premier. Du fait que H est normal dans G, on tire facilement que G opère par conjugaison sur l'ensemble X des p-sous-groupes de Sylow de H. Puisque deux p-sous-groupes de Sylow de H sont toujours conjugués dans H, l'opération de H sur X induite par celle de G est transitive.
Soit P un p-sous-groupe de Sylow de H ; donc P est un « point » de X et le stabilisateur de ce point pour l'opération de G sur X est D'après ce qui précède et la forme générale de l'argument de Frattini,
- ,
ce qui démontre l'énoncé.
Soit P un sous-groupe de Sylow de Frat(G). D'après l'énoncé 2, Frat(G) est caractéristique et donc normal dans G, donc, d'après l'énoncé 8,
D'après l'énoncé 7, point ii), on a donc , donc P est normal dans G. Puisqu'il est contenu dans Frat(G), il est donc normal dans Frat(G). Cela étant démontré pour tout sous-groupe de Sylow P de Frat(G), Frat(G) est donc nilpotent.
Soit G un groupe fini.
i) Si N est un sous-groupe normal de G, si H est un sous-groupe de G tel que , alors
ii) Si K est un sous-groupe normal de G, alors
Dans les hypothèses du point i), supposons que, par absurde,
- (hyp. 1) N ne soit pas contenu dans Frat(G).
Alors,
- (2) il existe un sous-groupe maximal M de G qui ne contient pas M.
Par maximalité de M, on a donc
- (3) <M, N> = G.
Puisque N est normal dans G, le sous-groupe <M, N> de G est égal à MN, donc (3) peut s'écrire
- (4) M N> = G.
D'après l'identité de Dedekind et compte tenu que notre hypothèse entraîne , nous avons
- ,
ce qui, d'après (4), peut s'écrire
- (5)
Puisque N est contenu dans Frat(H), il résulte de (5) et de l'énoncé 7, ii) que
- ,
c'est-à-dire que H est contenu dans M. Puisque , N est donc contenu dans M, ce qui contredit (2). Donc notre hypothèse (1) est absurde, c'est-à-dire que N est contenu dans Frat(G), ce qui prouve le point i) de l'énoncé.
Prouvons maintenant le point ii). Soit K un sous-groupe normal de G ; d'après l'énoncé 2, ii), Frat(K) est caractéristique dans K, donc (puisque K est normal dans G) Frat(K) est normal dans G ; dès lors, en faisant N = Frat(K) et H = K dans le point i), nous trouvons que Frat(K) est contenu dans Frat(G), ce qui prouve le point ii) de l'énoncé.
Soit G un groupe fini, soit N un sous-groupe normal de G.
i) Frat(G/N) contient (FratG) N/ N ;
ii) si N est contenu dans Frat(G), alors
- Frat(G/N) = Frat(G) N/ N = Frat(G) / N.
D'après le théorème de correspondance,
- (1) les sous-groupes maximaux de G/N sont les sous-groupes de G/N de la forme M/N, où M est un sous-groupe maximal de G contenant N.
D'autre part, puisque Frat(G) est contenu dans chaque sous-groupe maximal de G, Frat(G) N/N est contenu dans MN/N pour chaque sous-groupe maximal M de G. En particulier,
- Frat(G) N/N est contenu dans M/N pour chaque sous-groupe maximal M de G contenant N
Compte tenu de (1), il en résulte que
- Frat(G)N/N est contenu danschaque sous-groupe maximal de G/N,
ce qui revient à dire que Frat(G)N/N est contenu dans Frat(G/N), d'où le point i) de l'énoncé.
D'après (1),
- (2) Frat(G/N) est l'ensemble des éléments de G/N qui appartiennent à M/N pour tout sous-groupe maximal M de G contenant N.
Dans les hypothèses du point ii) de l'énoncé, N est contenu dans Frat(G), donc tout sous-groupe maximal de G contient N, donc (2) revient à dire que
- Frat(G/N) est l'ensemble des éléments de G/N qui appartiennent à M/N pour tout sous-groupe maximal M de G.
On en tire facilement que Frat(G/N) est l'ensemble des éléments de G/N de la forme , où appartient à chaque sous-groupe maximal de G, autrement dit où appartient à Frat(G). Donc Frat(G/N) = Frat(G) N / N = Frat(G) / N, ce qui prouve le point ii) de l'énoncé.
Soit G un groupe fini. Le groupe G/Frat(G) a pour sous-groupe de Frattini son sous-groupe trivial.
En faisant N = Frat(G) dans l'énoncé 11, ii), on trouve
- Frat(G/Frat(G) ) = Frat(G) / Frat(G),
où le membre droit est égal au sous-groupe trivial de G/Frat(G).
Soient G un groupe nilpotent et M un sous-groupe maximal de G. D'après le chapitre Groupes nilpotents, énoncé 21, M est normal dans G et G/M est un groupe d'ordre (fini) premier, donc un groupe abélien, donc G' est contenu dans M. Ceci étant vrai pour tout sous-groupe maximal M de G, G' est donc contenu dans Frat(G), ce qui prouve le point (i) de l'énoncé.
Soit maintenant G un groupe fini (qu'on ne suppose plus nilpotent).
Si G est nilpotent, alors d'après le point i) ; donc pour prouver le point ii), il reste à prouver que
- (hyp. 1) si
alors
- (thèse 2) G est nilpotent.
D'après notre hypothèse (1), G' est contenu dans tout sous-groupe maximal de G, donc
- (3) tout sous-groupe maximal de G est normal dans G.
Soit P un sous-groupe de Sylow de G. Supposons que, par absurde,
- (hyp. 4) P ne soit pas normal dans G.
Alors ; puisque G est fini, il en résulte que est contenu dans un sous-groupe maximal M de G. Pour un tel M, nous avons, d'après le chapitre Groupes nilpotents, , d'où , donc M n'est pas normal dans G, ce qui contredit (3). Donc notre hypothèse (4) est absurde, donc tout sous-groupe de Sylow de G est normal dans G, donc G est nilpotent. Cela montre que dans notre hypothèse (1), la thèse (2) est vraie, ce qui prouve le point (ii) de l'énoncé.
Remarque. Soit G un groupe nilpotent fini, soit X une partie de G telle que engendre G. D'après le point (i), , donc engendre G. Puisque Frat(G) est fini, il en résulte, d'après l'énoncé 4, que X engendre G. Nous avons ainsi prouvé que si G est un groupe nilpotent fini, si X est une partie de G telle que engendre G, alors X engendre G. Nous avons déjà démontré ce fait dans le chapitre Groupes nilpotents, énoncé 20, mais sans supposer G fini.
Soit G un groupe fini, produit direct interne
de sous-groupes de G.
Alors (produit direct interne).
On peut supposer , le cas général se déduisant facilement du cas particulier par récurrence sur Nous supposons donc que
- (hyp. 1) Soit M un sous-groupe maximal de
Prouvons que
- (thèse 2) est un sous-groupe maximal de
Soit K un sous-groupe de G tel que
- (hyp. 3)
Puisque est clairement un sous-groupe propre de G, la thèse (2) revient à dire que
- (thèse 4)
Puisque K et contiennent M,
- (5)
D'autre part, d'après l'identité de Dedekind, il résulte de et de que
- ,
donc si était contenu dans M, on aurait
- ,
ce qui contredit notre hypothès (3). Donc n'est pas contenu dans M, donc, d'après (5),
Puisque M est supposé être un sous-groupe maximal de , on a donc , autrement dit K contient D'après l'hypothèse (3), K contient également , donc K contient , donc K = G, ce qui prouve notre thèse (4). Comme nous l'avons vu, la thèse (2) en résulte, à savoir que pour tout sous-groupe maximal M de , est un sous-groupe maximal de Donc pour tout sous-groupe maximal M de ,
Dès lors, si on désigne par la projection correspondant à la décomposition en produit direct,
- est contenu dans chaque sous-groupe maximal de , autrement dit
- est contenu dans
De même,
- est contenu dans
Puisque Frat(G) est contenu dans , nos deux derniers résultats donnent
- ,
ce qu'on peut écrire
- (6)
(Jusqu'ici, nous n'avons pas utilisé l'hypothèse selon laquelle G est fini.)
Prouvons l'inclusion réciproque de (6), à savoir
- (thèse 7)
Puisque est normal dans G et G fini, il résulte de l'énoncé 10, (ii), que
et, de même,
- , donc
- ,
ce qui peut encore s'écrire
- ,
donc notre thèse (7) est vraie. Joint à (6), cela prouve que
Comme nous l'avons noté, l'énoncé général en résulte.
Soit G un groupe nilpotent fini. Les deux conditions suivantes sont équivalentes :
a) Frat(G) = 1 ;
b) G est produit direct de groupes d'ordres premiers (et, en particulier, G est abélien).
Prouvons que b) entraîne a). Dans l'hypothèse b),
- (produit direct),
où chaque est un sous-groupe d'ordre premier de G.
D'après l'énoncé 14,
- (1)
D'autre part, puisque chaque est d'ordre premier, nous avons, d'après l'énoncé 3,
- pour chaque
En portant cela dans (1), nous obtenons Frat(G) = 1, ce qui prouve que la condition b) de l'énoncé entraîne la condition a).
Réciproquement, prouvons que la condition a) entraîne la condition b). Dans l'hypothèse a), nous avons
- (1)
D'autre part, puisque G est supposé nilpotent, nous avons, d'après l'énoncé 13,
- ,
donc, d'après (2), G' = 1, donc G est abélien. Dès lors, d'après le chapitre Groupes commutatifs finis, 1, G est produit direct
- (3) , où chaque est un groupe cyclique d'ordre , étant un nombre premier et un nombre naturel
D'après l'énoncé (14), on a alors
- ,
donc, puisqu'on suppose Frat(G) = 1,
- (4)
D'autre part, puisque, d'après (3), est un groupe cyclique d'ordre , il résulte de l'énoncé 3 que est d'ordre , donc d'après (4), pour chaque , donc chaque est d'ordre premier, donc, d'après (3), G est produit direct de groupes d'ordres premiers, ce qui prouve bien que la condition a) de l'énoncé entraîne la condition b).
Soit un nombre premier, soit G un p-groupe fini. Les deux conditions suivantes sont équivalentes :
- a) Frat(G) = 1 ;
- b) G est un p-groupe abélien élémentaire.
Puisque G est un p-groupe fini, il est nilpotent. Donc, d'après l'énoncé 15, la condition a) équivaut à ce que G soit un produit direct de groupes d'ordres premiers. Puisque G est un p-groupe, cela revient à ce que G soit un p-groupe abélien élémentaire.
Soit un nombre premier, soit G un p-groupe fini. Alors G/Frat(G) est un p-groupe abélien élémentaire.
G/Frat(G) est un p-groupe fini et, d'après l'énoncé 12, son sous-groupe de Frattini est trivial. D'après l'énoncé 16 (appliqué au groupe G/Frat(G)), il en résulte que G/Frat(G) est un p-groupe abélien élémentaire.
Soit G un groupe. Une partie génératrice minimale de G est par définition une partie génératrice de G dont aucune partie propre n'engendre G.
Soit G un groupe fini, soit X une partie génératrice de G. Alors X contient au moins une partie génératrice minimale de G. (En particulier, puisque tout groupe est une partie génératrice de lui-même, tout groupe fini a au moins une partie génératrice minimale.)
L'ensemble des parties génératrices de G n'est pas vide (puisqu'il comprend X). Donc, puisque G est fini, on peut choisir, parmi les parties génératrices de G contenues dans X, une partie Y du plus petit cardinal possible. Il est clair que Y est alors une partie génératrice minimale de G contenue dans X, ce qui prouve l'énoncé. (On peut dire aussi que si on ordonne par inclusion l'ensemble des parties génératrices de G contenues dans X, cet ensemble ordonné est un ensemble ordonné fini non vide et que tout ensemble ordonné fini non vide a au moins un élément minimal.)
Remarque. Un groupe fini peut avoir deux parties génératrices minimales non équipotentes. Par exemple, si G est un groupe cyclique d'ordre 6, nous pouvons choisir dans G des éléments d'ordres respectifs 2, 3 et 6. Alors et sont clairement des parties génératrices minimales de G et ne sont pas équipotentes. Nous allons cependant voir que si G est un groupe fini dont l'ordre est une puissance de nombre premier, toutes les parties génératrices minimales de G sont équipotentes.
Soit un nombre premier, soit G un p-groupe fini, soit la dimension de G/Frat(G) comme -espace vectoriel (voir énoncé 17) ; on a donc Pour tout élément de G, désignons par l'image canonique de dans G/Frat(G) ; pour toute partie X de G, désignons par l'ensemble des , où parcourt X.
a) Si X est une partie génératrice minimale de G, alors est une base (partie basique) du -espace vectoriel G/Frat(G) et .
b) Réciproquement, si X est une partie de G telle que et que soit une base (partie basique) du -espace vectoriel G/Frat(G) (autrement dit, si X s'obtient en choisissant une partie basique du -espace vectoriel G/Frat(G) et en choisissant un et un seul élément dans chaque classe modulo Frat(G) appartenant à cette partie basique) , alors X est une partie génératrice minimale de G. c) Les parties génératrices minimales de G ont toutes le même cardinal ; ce cardinal est égal à la dimension du -espace vectoriel G/Frat(G). d) Chaque élément de appartient à au moins une partie génératrice minimale de G.
Prouvons le point a). Soit X une partie génératrice minimale de G ; il s'agit de prouver que est une base (partie basique) du -espace vectoriel G/Frat(G) et que .
Puisque X est une partie génératrice de G,
- est une partie génératrice de G/Frat(G),
ce qui revient à dire que
- (1) est une partie génératrice du -espace vectoriel G/Frat(G).
Posons et notons les différents éléments de X ; prouvons que
D'après (1),
- (2) la famille est une famille génératrice du -espace vectoriel G/Frat(G).
Supposons que, par absurde,
- (hyp. 3) la famille ne soit pas libre dans cet espace vectoriel.
Il existe alors un dans tel que
- appartienne au sous-espace de G/Frat(G) engendré par les parcourant
Quitte à changer la numérotation , nous pouvons supposer que
- appartient au sous-espace de G/Frat(G) engendré par
Si nous notons G multiplicativement, cela revient à dire qu'il existe un élément de Frat(G) tel que appartienne au sous-groupe de G. Alors appartient au sous-groupe de G engendré par , donc (puisque X, égale à , est une partie génératrice de G)
- (4) est une partie génératrice de G.
Mais , appartenant à Frat(G), est un élément superflu de G, donc, d'après (4), est une partie génératrice de G, ce qui contredit le fait que (égale à X) est une partie génératrice minimale de G. Donc notre hypothèse (3) est absurde, donc
- la famille est libre dans le -espace vectoriel G/Frat(G).
Joint à (2), cela montre que
- (5) la famille est une famille basique du -espace vectoriel G/Frat(G),
donc est égal à la dimension de cet espace vectoriel, autrement dit (6) Nous avons vu en (5) que la famille est une famille basique du -espace vectoriel G/Frat(G), donc est une partie basique de cet espace, c'est-à-dire que
- est une partie basique de cet espace.
Joint à (6), cela prouve le point a) de l'énoncé.
Prouvons maintenant le point b) de l'énoncé.
Soit X une partie de G telle que et que soit une partie basique du -espace vectoriel G/Frat(G). Il s'agit de prouver que
- (thèse 7) X est une partie génératrice minimale de G.
Notons les différents éléments de X,
Soit un élément de G. Puisque engendre le -espace vectoriel G/Frat(G), il existe un élément de Frat(G) tel que
- appartienne à
Ceci étant vrai pour tout élément de G,
- est une partie génératrice de G.
Puisque G est fini, il résulte donc de l'énoncé 4 (ou de l'énoncé 7, ii) que , c'est-à-dire X, est une partie génératrice de G.
Si X n'était pas une partie génératrice minimale de G, on pourrait extraire de X une partie génératrice de G de cardinal < ; alors le -espace vectoriel G/Frat(G) aurait une partie génératrice de cardinal < , ce qui est impossible, puisque est la dimension de cet espace. Nous avons donc prouvé notre thèse (7), à savoir que X est une partie génératrice minimale de G. Comme nous l'avons vu, cela prouve le point b) de l'énoncé.
Le point c) est une conséquence immédiate du point a). Prouvons le point d).
Soit un élément de Il s'agit de prouver que
- (thèse 8) appartient à au moins une partie génératrice minimale de G.
Le vecteur n'est pas le vecteur nul du -espace vectoriel G/Frat(G), donc il appartient à une partie basique de cet espace, où et où sont différents éléments de G/Frat(G). Alors sont différents éléments de G. Donc si nous posons , alors et est une partie basique de l'espace G/Frat(G). Donc, d'après le point b) de l'énoncé, X est une partie génératrice minimale de G. Puisque X comprend , cela prouve notre thèse (8) et donc le point d) de l'énoncé.
Soient un nombre premier et G un p-groupe fini. Notons le nombre naturel tel que ( est donc la dimension du -espace vectoriel G/Frat(G) ), notons le nombre naturel tel que Pour tout élément de G, notons l'image de par l'homomorphisme canonique de G sur Frat(G).
(i) Pour tout automorphisme de G, il existe un et un seul automorphisme de G/Frat(G) tel que, pour tout élément de G, ; l'application de Aut(G) dans Aut(G/Frat(G)) est un homomorphisme de groupes.
(ii) divise et le groupe peut être plongé dans le groupe (groupe des automorphismes d'un espace vectoriel de dimension sur le corps ).
(iii) divise
(iv) Tout facteur premier de autre que (s'il y en a) divise
Compte tenu que Frat(G) est un sous-groupe caractéristique de G, le point (i) résulte d'un exercice sur le chapitre Sous-groupes caractéristiques.
Ker est l'ensemble des automorphismes de G tels que, pour tout élément de G, ; la relation revient à , autrement dit , donc
- (1) est l'ensemble des automorphismes de G tels que, pour tout élément de G,
Prouvons que divise
Pour toute partie T de G, on notera l'ensemble des , où parcourt T.
Choisissons une partie génératrice minimale X de G. D'après l'énoncé 19, a),
- (2)
et
- (3) est une partie basique du -espace vectoriel G/Frat(G).
d'où
- (4)
D'après (2), nous pouvons numéroter
- les différents éléments de X
Pour tout d-uplet d'éléments de Frat(G),
- (5)
Puisqu'on a vu en (4) que , le résultat (5) entraîne en particulier que sont différents éléments de G, donc
- (6) la partie de G est de cardinal
D'après (5), nous avons
- ,
donc, d'après (3),
- (7) est une partie basique du -espace vectoriel G/Frat(G).
De (6), (7) et de l'énoncé 19, b), il résulte que
- (8) pour tout d-uplet d'éléments de Frat(G), est une partie génératrice minimale de G.
(En fait, il nous suffira de savoir que c'est une partie génératrice de G.)
La numérotation des éléments de X étant fixée, considérons l'ensemble E des d-uplets d'éléments de G de la forme
- ,
où parcourent Frat(G).
D'après (8),
- (9) les éléments de E sont des familles génératrices de G.
E est équipotent à l'ensemble des d-uplets d'éléments de Frat(G), donc
- (10)
D'autre part, si sont des éléments de G,
- (11) le d-uplet appartient à E si et seulement si pour chaque
Soient un élément de Ker et un élément de E. Puisque appartient à Ker , nous avons, d'après (1),
- pour chaque ,
d'où, d'après (11),
- pour chaque ,
donc, toujours d'après (11),
- le d-uplet appartient à E.
Ceci montre que pour tout élément de et tout élément de E,
- appartient à E.
Cela définit clairement une action
du groupe sur l'ensemble E.
Soit un élément de E, soit un élément du stabilisateur du point pour l'action considérée de sur E. Alors pour chaque . Puisque, d'après (9), est une famille génératrice de G, on a donc . Cela montre que
- (12) pour tout élément de E, le stabilisateur de pour l'action considérée de sur E est réduit à l'élément neutre de
Cela revient à dire que l'action de sur E est libre, donc, d'après le chapitre Action de groupe, chaque orbite est de cardinal , donc
- est divisible par ,
ce qui, d'après (10, revient à dire que
- (13) divise
D'autre part, puisque est un automorphisme de Aut(G) dans Aut(G/Frat(G)), il résulte du premier théorème d'isomorphisme que
- (14) est isomorphe à un sous-groupe de Aut(G/Frat(G)).
Mais, puisque G/Frat(G) est un p-groupe abélien élémentaire (voir énoncé 17),
- Aut(G/Frat(G) est le groupe des automorphismes du -espace vectoriel G/Frat(G).
Puisque cet espace vectoriel est de dimension , Aut(G/Frat(G)) est donc isomorphe à (voir chapitre Groupes linéaires), donc, d'après (14)
- (15) est isomorphe à un sous-groupe de .
Donc
- divise ,
- (16) divise
On a vu en (13) que divise , donc, d'après (16),
- (17) divise
Mais, d'après le chapitre Groupes linéaires),
- ,
ce qui peut s'écrire
- ,
donc (17) revient à dire que
- divise ,
ce qui prouve le point (iii) de l'énoncé.
Le point (iv) se déduit immédiatement du point (iii).
Remarque. Si le p-groupe fini G est abélien, l'ordre de Aut(G) peut être entièrement explicité en fonction de la suite de diviseurs élémentaires de G. Voir par exemple Adolf Mader, « The Automorphism Group of Finite Abelian p-Groups », Ann. Sci. Math. Québec 36, No 2, (2012), 559–575, théorème 3.2, (3), p. 562, en ligne.
Notes et références
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